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EAN : 9782709670050
250 pages
J.-C. Lattès (03/01/2024)
3.82/5   80 notes
Résumé :
A la mort de son père, l'écrivaine se tourne vers l'écriture pour le retrouver. Elle brosse le portrait de cet homme, évoquant les souvenirs qui lui sont attachés : l'enfance, l'Algérie, l'amour, un art de jouer, des secrets.
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
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Nina Bouraoui nous raconte une histoire très personnelle : son père est aux soins palliatifs et la famille tente de l'accompagner au mieux. Dans cette situation infiniment douloureuse, l'autrice se souvient de la personnalité de son père, de l'image qu'il projetait, de sa forte personnalité. Par le biais, elle se confie sur sa vie, parle de sa forte amitié avec celle qu'elle nomme l'Amie, de son amour pour A, une femme qu'elle aime depuis longtemps, de sa jeunesse, de sa difficulté à vivre son homosexualité tant, plus jeune, elle craignait de décevoir ce père à la figure imposante, admiré en tant qu'homme, me semble-t-il, plus qu'en tant que père.
***
J'ai moi-même accompagné quelqu'un de très proche aux soins palliatifs, pendant un mois, et j'ai donc d'autant plus de difficultés à comprendre pourquoi ce récit ne m'a pas vraiment touchée et pourquoi l'identification ne fonctionne pas. Peut-être par ce que les qualités que l'autrice admire chez son père ne me semblent pas primordiales dans une relation père-fille. Peut-être parce que l'homme lui-même ne m'apparaît pas particulièrement sympathique. J'avoue avoir été infiniment plus émue par la relation de compassion et de compréhension que l'autrice noue avec Georges, qui accompagne sa soeur, ainsi que par l'attitude du personnel médical et les particularités du lieu. Malgré l'écriture précise, soignée, tout en nuances, je n'ai pas été emportée par ce chagrin, ni n'ai suivie l'autrice dans son deuil. Je le regrette.

[Lu dans le cadre du Grand Prix des lectrices de Elle 2024]
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En mai 2022, le père de Nina est admis en soins palliatifs au centre Jeanne-Garnier, dans la chambre 119 ; il est entouré de sa femme et de ses deux filles et il va y séjourner pendant une dizaine de jours.

Cela va induire une réflexion de Nina sur la souffrance, la maladie, la mort, le deuil mais en parallèle les souvenirs d'enfance remontent à la surface. Elle évoque ainsi cet homme brillant et cultivé qu'est son père, l'exil, car il a dû quitter son pays natal, l'Algérie, au moment où sévissait la violence.

Elle évoque aussi ses absences, elle guettait ses retours avec impatience, car comme elle le dit si bien il était « l'homme de sa vie », et ce sera le seul en fait, celui qui l'a aidée à se construire. Elle faisait tout ce qu'elle pouvait dès le plus jeune âge pour qu'il soit fier d'elle, même s'il l'a élevée en garçon.

Nina Bouraoui parle de ce « grand seigneur » avec tendresse et respect, évoquant au passage l'exil, le déracinement, le couple qu'il formait avec sa mère, Bretonne, la double culture, et également son homosexualité et comment il la percevait.

Elle livre dans ce récit intimiste la progression vers la fin de vie, la manière dont son père est devenu l'ombre de lui-même, rongé par la maladie, ainsi que ses réactions vis-à-vis de la mort qui approche, ainsi que toutes les démarches qui accompagnent : choisir « la tenue » organiser le grand départ.

J'ai été touchée par sa pudeur aussi, quand elle n'ose pas le toucher ou quand elle lui parle, ainsi que la relation qui se noue avec Georges dont la soeur occupe la chambre d'en face et ne veut plus se battre.

J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a permis de découvrir la plume de Nina Bouraoui et je vais rester dans la même thématique avec « Kaddour » de Rachida Brakni.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions J.C. Lattès qui m'ont permis de découvrir ce livre et la plume de son auteure.

#GrandSeigneur #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Au moment où son père décède, notre autrice raconte ce qu'elle a partagé avec cet homme-modèle, sa vie politico-diplomatique secrète aussi. Et surtout comment elle envisage cette future perte. Comment on fait, dans quel état on est quand il s'agit de choisir le dernier costume ? Comment on dit au-revoir quand on envisage l'inévitable. de belles phrases, mais globalement un témoignage très personnel. Voilà voilà !
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La démarche relève de l'intime. de ce parcours bouleversant vers l'inéluctable épilogue. " le plus dur n'est pas la mort, c'est l'attente de cette mort." Nina Bouraoui se remémore les anecdotes et les moments forts qui ont fait de ce père un "Grand seigneur". L'hommage poignant d'une fille pour son père, lorsque ce dernier emporte avec lui une part de son identité, de ses origines, ce dernier lien avec l'Algérie, de sa force et de sa masculinité. le style et l'écriture de Nina Bouraoui sont toujours empreints de délicatesse et de puissance. Un roman lumineux.
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Le père de Nina Bouraoui va mourir; nous sommes en mai 2022 dans une unité de soins palliatifs à Paris. Nina, ainsi que toute sa famille, va accompagner son père pendant les 11 jours que dure son agonie. Elle nous livre dans cet ouvrage très personnel, très intime, ce qu'était le lien très fort qu'elle entretenait avec son père, en convoquant des souvenirs de lui, d'elle, d'eux deux, parfois sous forme d'instantanés, parfois sous forme de descriptions, de pensées.
Ce livre est un hommage au père qui a été l'homme de sa vie, son "seul ami", auquel elle voue admiration, amour et qui fut son roc sur lequel elle s'est construite. Elle se pose d'ailleurs la question sur ce que va être son identité quand celui qui en est un acteur principal aura disparu.
Mais c'est aussi un soutien, une aide pour Nina. Les mots l'aident à accepter le départ de son père, elle lui dit adieu en convoquant l'homme qu'il fut et le père qu'il a été. Les mots rendent la mort réelle et lui permettent en même temps de le retrouver à jamais.
Ce livre m'a touchée car j'ai moi-même accompagné mon père pendant ses derniers jours en soins palliatifs mais en même temps, je ne me suis pas vraiment sentie proche de Nina face à la mort du père car mon ressenti a été différent, moins intellectualisé, plus brut, plus violent.
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critiques presse (6)
LeFigaro
08 mars 2024
La romancière raconte les derniers jours de son père. Bouleversant.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeDevoir
07 mars 2024
L'autrice française transforme adroitement le deuil du père en littérature.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LeMonde
14 février 2024
Douloureux et tendre, Grand Seigneur est aussi, et peut-être d’abord, un texte de double gratitude. A l’égard, d’une part, de cet homme qui a permis à sa fille de devenir la femme et l’écrivaine qu’elle voulait. Et à celui du personnel d’un établissement médical qui a accompagné avec le plus de douceur possible le malade vers la mort, et sa famille vers cette perte.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
12 février 2024
L'écrivaine ne doit pas que la vie à son géniteur, Rachid Bouraoui, mais également sa vocation, tant il l'a encouragée et inspirée. Dans « Grand Seigneur », elle rend hommage à cet homme décédé en 2022.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
05 février 2024
Rachid Bouraoui, a gravi les échelons jusqu’à devenir gouverneur de la banque centrale d’Algérie. Il est mort en 2022 et Nina Bouraoui lui consacre un livre sobre et bouleversant : « Grand Seigneur ». Elle y raconte les derniers jours dans ces limbes entre la vie et la mort, entre le passé, les souvenirs d’Alger, du temps de la grandeur, et le présent dans la chambre de soins palliatifs, les errances dans les rues de Paris, les voyages à Aix pour retrouver la femme aimée.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
SudOuestPresse
31 janvier 2024
La romancière signe, avec style et délicatesse, la chronique d'un chagrin annoncé, la perte du père, et avec lui du dernier lien qui la rattache à l'Algérie.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
Citations et extraits (67) Voir plus Ajouter une citation
J’ignore si, l’effet des drogues passé, mon père sait qu’il va mourir. Quand l’idée de sa disparition me quitte, je me transporte au temps d’avant, sans la maladie, un temps qui paraît ne pas avoir été occupé depuis des années. La fin de vie est une aventure à part entière, elle possède ses rites, ses habitudes, sa géographie et ses personnages, elle fige les aventures passées après les avoir remisées dans une chambre secrète dont on a égaré la clé, deux mondes se mélangent, celui des couchés, celui des debout, aucun langage n’est assez juste pour que ces deux mondes s’entendent et se répondent. Je sais la colère du premier, la perdition du second.

Je me représente le cancer mi-animal mi-végétal avec des pousses, des ramifications, des ventouses, des crocs, des tentacules. Il s’abreuve au sang de mon père, festoie avec la chair qui lui reste, le cancer a pris le pouvoir, il s’amuse, il détruit, il nous méprise, nous, ses spectateurs hagards et sonnés par sa fureur.

J’imagine trois périodes qui forment trois mouvements d’une chute dans le vide : mon père est au sommet d’un building (malade), il est en vol (en soins palliatifs), au sol (lorsqu’il s’éteindra). « Mon père va mourir » est une phrase violente et double, dite elle choque puis conjure le sort un instant et me fait croire aux vertus du langage, à sa dimension vaudoue et aux énigmes qu’il revêt.
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Mon homosexualité vécue sans être encore assumée avait comme hissé ma féminité, l'avait découverte, mise à nu, façon peut-être de m'affranchir de mon père, moi son fils imaginaire, de me démarquer des femmes viriles qui fréquentaient les mêmes endroits que moi où, je le comprends à présent, ma nouvelle féminité me servait d'alibi.
(pp. 94-95)
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Il reste mon référent masculin, celui que j’ai singé enfant, qui m’accompagne adulte, m’apprenant très jeune dès la parution de mon premier livre, à organiser mes idées, à être la plus claire possible quand tout en moi était obscur.
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Mon père est le chef de notre tribu, s’il venait à disparaître, je parie sur
un éclatement de notre cellule et pressens un désastre, une folie,
l’égarement de chacun et le repli déraisonnable dans une peine sans salut.
Mon père porte l’identité de notre famille, nous sommes à lui ou nous
transitons par lui, cherchant encore à le séduire pour qu’il nous admire.
Ma sœur et moi sommes deux petites filles attardées, hantées par nos
fantômes, craignant les sorcières et les démons, nous inventant un monde
qui n’existe pas, nous sommes sans défense, naïves, crédules, fidèles à
l’extrême en dépit des trahisons, des déceptions comme si l’amour que
nous éprouvions pour les autres suivait la trame tissée à partir de l’image
de notre père, l’Unique. Nous restons les cœurs d’un seul cœur, n’ayant
que la douceur pour arme, une légère soumission pour défaut, mon père a
ravi la force, la parole et l’autorité ; lui n’est pas à nous, ne le sera jamais,
même s’il meurt, il n’appartient à personne, n’a jamais appartenu à
personne, ni à son dieu qu’il interpelle autant qu’il le prie, ni à sa maladie
qu’il refuse de nommer, non par honte du cancer mais par mépris, me
confiant un soir, dans son appartement, que le mal dont il souffre
s’attrape en allant dîner chez « des gens ». Ces trente dernières années,
nous n’avons pas quitté sa tour d’ivoire alors qu’il ne travaillait plus,
parce que nous avions du temps à rattraper et que dans cette tour nous
nous sentions protégées, cadrées, encore éduquées, tenues non en laisse
mais par un fil d’or. Je crois marcher dans ses pas quand j’écris, voyage,
aime, quand lui n’aura pas marché dans les miens, toujours devant moi,
ouvrant les portes, les sentiers, l’avenir ou disparaissant dans les nuages à
bord d’un avion en direction d’un pays étranger. Le travail de mon père
était comparable à une clôture électrique, il ne fallait pas la franchir, le
déranger. Les grands destins se forgent dans le silence et la solitude.
Notre admiration atténuait le manque, notre frustration, nous étions fières
de l’apercevoir au journal de vingt heures, à la sortie d’un Boeing, au
Fonds monétaire international, parmi les membres de l’Opep, du groupe
des 24, en Asie, en Afrique, en Amérique. Mon père réparait ses
absences en rentrant les bras chargés de cadeaux qu’il disposait en
montagne sur la table ronde où nous prenions nos déjeuners, nos dîners,
nous habitions un pays où tout manquait, il dévalisait le Monoprix pour
nos vêtements et le Codec de l’aéroport d’Orly pour les produits
alimentaires.
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J’ai quitté Paris sans prévenir les membres de ma famille. Je ne les
abandonnais pas. Je craignais que la mort de mon père ne me précipite
dans un état que je ne connaissais pas, je voulais revoir A avant de
gagner le statut d’orpheline. J’étais dans le train quand ils l’ont emmené
en ambulance, quand il a protesté, s’est défendu, a menacé, quand ma
mère m’a demandé de lui acheter un pyjama, quand il a fallu remplir les
papiers d’admission, quand il a découvert sa chambre qui donne sur un
jardin, quand il a retiré ses vêtements avant de se coucher dans son
nouveau lit, quand le médecin a présenté les étapes du protocole, quand
chacun a décliné son identité, sa profession, quand ma mère a dit « j’ai
une autre fille, elle est écrivain ».
En lisant les messages de ma mère sur mon téléphone j’ai pensé que
les écrivains avaient un temps de retard ou un temps d’avance, qu’ils
n’étaient pas constitués pour occuper l’existence en temps réel, que ce
léger différé était une façon de déclencher la mémoire avant le souvenir,
le récit avant l’écriture.
Pendant mon voyage, je n’ai répondu à aucun des messages, je ne me
sentais ni lâche ni libre mais revenue à ma vie d’avant, je rejoignais A
constituée de mon père, non amputée, encore fille, enfant, progéniture.
L’orpheline abîmerait peut-être l’amoureuse, je ne savais rien de moi
après et je ne m’imaginais pas sans celui à qui je ressemblais à force de
l’avoir imité, envieuse de sa virilité, mimant ses gestes, portant son eau
de Cologne, écrivant sur son papier à lettres, volant ses briquets, ses
cigares qu’il ne fumait pas, rallumant ses mégots de cigarette, épluchant
les œufs durs à sa façon en les frottant entre mes mains jusqu’à ce que la
coquille craquelle, me brûlant en cuisinant comme lui l’intérieur du bras,
sautant du rocher le plus haut après l’envol de celui que l’on surnommait
au lycée de Vannes, arrivé en bateau puis en train depuis la petite Kabylie
avec, comme il aimait nous le rappeler, dans sa valise un costume, deux
chemises, une seule paire de chaussures : l’Oiseau rare. Je ne savais rien
des ravages du chagrin prochain, je ne savais rien de la mort d’un
patriarche, de cet abîme qui menaçait.
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Videos de Nina Bouraoui (50) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nina Bouraoui
Dans Grand seigneur, Nina Bouraoui se tourne vers l'écriture pour conjurer la douleur de la mort de son père, entré en soins palliatifs en 2022. Entremêlant les souvenirs de sa vie et le récit de ses derniers jours, elle illumine par la mémoire et l'amour un être à l'existence hautement romanesque. Le désir d'un roman sans fin rassemble quant à lui de nombreux écrits de l'autrice, portraits, nouvelles, chroniques, parus dans la presse ou publiés entre 1992 et 2022. Une oeuvre à part entière, qui pourrait se lire comme un roman racontant la vie, ses arrêts, ses errances. Ces deux parutions récentes prolongent l'oeuvre prolifique et lumineuse d'une romancière majeure de la littérature contemporaine. Elle reviendra sur son parcours d'écriture à l'occasion de ce grand entretien mené par Lauren Malka, dans le cadre de l'enregistrement du podcast Assez parlé.
Nina Bouraoui est l'autrice de nombreux romans et récits dont La Voyeuse interdite (Gallimard, prix du Livre Inter 1991), Mes mauvaises pensées (Stock, prix Renaudot 2005) ou Otages (JC Lattès, prix Anaïs Nin en 2020). Elle est commandeur des Arts et des Lettres et ses romans sont traduits dans une quinzaine de langues.
Rencontre animée par Lauren Malka dans le cadre de l'enregistrement du podcast Assez parlé.
Retrouvez notre dossier "Effractions le podcast" sur notre webmagazine Balises : https://balises.bpi.fr/dossier/effractions-le-podcast/ Retrouvez toute la programmation du festival sur le site d'Effractions : https://effractions.bpi.fr/
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