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4,3

sur 5444 notes
Bonne nouvelle, voici une veille qui ne vous laissera pas de marbre (de Carrare) et ne vous donnera pas envie de dormir.
Car, non, vous ne dormez et ne rêvez pas, la lumière rouge qui brille, là, vous la voyez ? Viola vous a laissé un message.
Euuuhh, un message ? mais mon téléphone ne fait pas une lumière rouge quand j'ai reçu un message, sur whatsapp non plus d'ailleurs ! C'est nimp cette histoire de lumière rouge…
Non non cher babéliote en ce temps-là, 1918, pas encore de portable. La lanterne recouverte d'un tissu rouge qui brille de mille feux à la fenêtre de la Villa, signale le message écrit par Viola sur du beau papier à l'encre verte, et déposé au creux d'une souche. C'est vraisemblablement moins rapide et un tantinet moins pratique qu'un banal portable mais avouez que ça a quand même beaucoup plus de gueule et de charme !
Mimo guette cette lumière, le code secret établi avec Viola. Lors de leur rencontre, Mimo et Viola sont deux adolescents de 13 ans. Mimo tombe immédiatement raide dingue de la belle et rebelle Viola Orsini, fille de la puissante famille du village. Viola va lui faire découvrir le monde du savoir et des livres en subtilisant des ouvrages dans la très fournie bibliothèque familiale ; art, sciences, les découvertes sont multiples pour Mimo à l'aide la précoce Viola qui se projette en Léonard de Vinci au féminin.
Une amitié indéfectible va naître de cette rencontre, une histoire d'amitié- amour platonique éternel que nous raconte Mimo, mais pas de la manière la plus confortable qui soit. En ce jour d'automne 1986, Mimo Vitaliani est sur son lit de mort, il tente de dire quelque chose. Une oreille se penche pour recueillir ses confessions. Cette oreille c'est la nôtre, c'est à nous que Mimo (de son vrai prénom Michelangelo) va murmurer dans ses derniers souffles ce que fût sa vie.
Dans un formidable travellling arrière nous repartons en 1904, à la naissance de Mimo découvrir ses racines, ses origines pauvres, son enfance meurtrie et son adolescence mises en regard des différents événements politiques de l‘époque (les guerres, la montée au pouvoir de Mussolini), puis l'ascension de Mimo et son rayonnement lorsqu'il va atteindre le sommet de son art. Mimo n'est plus n'importe qui, un moins que rien, il est devenu un grand sculpteur, digne de porter le prénom de son illustre prédécesseur.
Mimo un être hors-norme, dans tous les sens du terme, car Mimo souffre d'achodronplasie (autrement dit de nanisme). Mimo a une revanche à prendre sur la vie, il veut briller, devenir l'égal de la riche famille Orsini. le souvenir du mépris affiché par les parents et le frère ainé de Viola lors de leur première rencontre qui ne s'est pas déroulée sous les meilleurs auspices reste encore cuisant malgré les années.
Après m'être régalée avec Des diables et des saints, j'attendais avec impatience la sortie du nouveau Jean-Baptiste Andréa. J'ai été absolument conquise par Veiller sur elle, par cette incursion en Italie (les auteurs semblent s'être donné le mot en cette rentrée littéraire), de la petite ville ligure fictive de Pietra d'Alba, à Florence et Rome, des bas-fonds citadins à la luxueuse villa des Orsini ou aux bureaux du Vatican.
Il y aurait tant à dire, je ne me suis pourtant jamais perdue dans ce livre foisonnant, tumultueux, riche en personnages, époques et rebondissements.
Aux grincheux qui s'ennuient dans cette rentrée littéraire, conseillez cette lecture, j'espère qu'une scintillante lumière rouge leur rendra leur bonne humeur.
Je vous laisse le plaisir et le soin de découvrir qui se cache derrière ce fameux Elle.
Aurez-vous envie à votre tour de veiller sur elle ? Je retourne à son chevet…
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Tout en souffle et subtilité, cette fresque historique se déroule dans l'Italie du XXème siècle. Siècle Italien très noir avec la montée du fascisme, le régime de Mussolini,
tyrannie politique mais on découvre aussi l'art de l'Italie!

Ces rencontres dites "improbables" ouvrent l'espace de tous les possibles, de cette lumière :
La lumière qui permet de vivre !
Deux personnages :
Viola femme indépendante, forte, brillante, riche, arrogante et tendre.
Mimo né pauvre, maladroit, inculte, atteint de nanisme
est un génie de la sculpture.

Ce n'est pas une romance : c'est plus fort !
Ces deux héros s'aiment, parfois au point de se détester.
Amour, amitié et détestation.
Ils ne se laisseront pas détruire par les obstacles, les circonstances : ils vont se relever, ne jamais cesser de s'enthousiasmer !
Entre eux la lumière vacille mais ne s'éteint jamais !

Viola veut déployer ses ailes, se battre pour sa liberté de femme ! Elle se heurte aux tyrannies de sa famille, de la société patriarcale qui la condamnent à l'obscurité !
Mimo aux dix mille vies, sculpteur depuis sa naissance, son combat pour s'élever, son refus de se faire traiter de nain : il veut prendre sa revanche sur le sort !
Il va se battre pour sa seule liberté :
Son Art et sculpter sa Piéta.
Tous les deux liés, jumeaux cosmiques, refusent toutes les normes, ne se résignent jamais.
Viola intelligente et cultivée, invite Mimo à lire, sortir de sa condition et lui façonne une conscience politique dont il est totalement dépourvu !

Je suis entrée dans ce roman et la magie a opéré !
J'ai voyagé entre Rome et Gênes en passant par Florence Cette lecture originale m'a tenue en haleine !
Cinq cent quatre vingt pages d'un récit fougueux, peuplé de personnages truculents, émouvants servi par une écriture poétique, sensuelle et inventive !
Les dialogues magiques apportent une force supérieure.
La narration mise sur la simplicité absolue !
Je salue le talent de l'auteur pour sa très belle histoire
pleine de grâce et de beauté !

Veillez sur la Piéta
Mimo veille sur Viola ....
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J'aime Jean-Baptiste Andréa, enfin ses livres, vous aviez compris !

J'ai bien eu un peu peur à un moment parce qu'on ne peut pas dire que Mimo soit attachant attachant et la chaleur humaine ne caractérise pas "Veiller sur elle" mais tel un magicien, l'auteur arrive à me retourner, c'était pareil avec "Cent millions d'années et un jour", et je finis le livre enchantée.

Bon, le pitch vous connaissez.
Mimo, italien d'origine, atteint de nanisme, naît en France en 1904. Son père, sculpteur meurt, sa mère l'envoie en Italie, à Turin chez un "oncle" qui a une dette envers sa famille : Alberto Susso. Ce dernier, alcoolique, violent, sculpteur sans talent, laisse petit à petit Mimo effectuer son travail. Avec ses sculptures, Mimo révèle déjà tout son génie.

C'est à Pietra d'Alba, où sa mère lui achète un atelier, qu'Alberto commence à sculpter pour les Orsini et pour l'Eglise. Mimo fait la connaissance de Viola Orsini, la fille de cette puissante famille de Liguri. Les 2 adolescents ont le même âge (13 ans au moment de leur rencontre), ils deviennent des âmes soeurs.

Inséparables malgré leur différence de condition, ils ne pourront jamais vivre longtemps éloignés l'un de l'autre.
Mimo s'affranchit de la pauvreté et de sa petite taille en devenant un sculpteur reconnu. Viola rêve de liberté et, féministe et intelligente, refuse de se résigner à la condition d'épouse que sa famille veut lui imposer.
Différents mais unis dans leur désir de s'émanciper de leur naissance, tous les deux vivent une grande amitié, voire un amour (même s'ils n'en parlent pas), une grande complicité en tout cas qui les unit à jamais.

Au-delà de ce destin romanesque, Jean-Baptiste Andréa, avec la belle plume qu'on lui connaît, retrace l'histoire de l'Italie entre les deux guerres, la montée du fascisme, l'arrivée de Mussolini, jusqu'à sa défaite.
L'influence de la religion, ses secrets, son pouvoir sont distillés tout au long du roman, composant une oeuvre historique extrêmement intéressante.
Et bien sûr, l'Art, notamment la sculpture, est la clé de voûte de ce beau roman. On y rencontre Michelangelo Buonaroti ou encore Fra Angelico (j'ai pris plaisir à aller voir ses oeuvres sur internet).

Bon, je ne vous ai pas parlé de l'oeuvre majeure de Mimo, la Pieta, pleine de secrets, que le Vatican soustrait aux regards mais... c'est exprès ;) Faudrait pas non plus tout vous raconter !

J'ai encore une fois été envoûtée par la plume et les thèmes abordés par l'auteur, qui a finalement su me rendre les personnages attachants. Son écriture fluide, sobre et poétique à la fois est un régal.

Un beau roman à savourer!
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En 1986, dans une communauté religieuse, entouré de 32 frères, Michelangelo Vitaliani dit "Mimo", vit ses dernières heures.
Dès la page 12, il prend la parole pour nous conter son parcours de vie. Quelle vie !
Né en 1904 en France, son père italien , sculpteur a le temps de lui transmettre son métier et les bons gestes avant de partir à la guerre et de mourir. Mimo n'a que 10 ans.
Le métier de son père reste gravé dans sa mémoire.
Orphelin de père, il arrive chez un sculpteur minable qui le refuse presque à cause sa petite taille.
Dans le petit village de Pietra d'Alba, il fait la connaissance de Viola d'Orsini, fille de la plus riche famille du village, une fille étrange, fantaisiste, révoltée contre la condition de la femme, désobéissante quant à leurs rendez-vous secrets mais bien consciente de son rang à tenir.
Leurs classes sociales les séparent mais ils se rencontrent souvent dans le cimetière.
Un lien indissociable les unit, une entente indestructible les rassemble.
J'aimerais écrire qu'ils sont là l'un pour l'autre mais c'est Mimo qui se souciera plus de Viola à distance et lors de leurs rencontres.
Le titre "Veiller sur elle " prend tout son sens dès le début de leur rencontre.
Le temps du récit est tout à fait remarquable comme s'il n'avançait pas vite. Ils ont treize ans, quatorze ans, quinze ans...En tant que lectrice, je me réjouissais du temps qui s'écoulait lentement et rapidement à la fois étant donné qu'on retrouve Mimo à la veille de sa mort en 1986.
L'écriture de Jean-Baptiste Andrea est empreinte d'un belle poésie très vivante. En effet, Mimo a une vie très mouvementée, pas monotone du tout.
Je souhaite un très bon parcours au roman que j'ai déjà eu du mal à trouver dans mes deux librairies habituelles.
J'ai dû aller un peu plus loin car je désirais commencer la lecture le jour même où je l'avais décidé.
Un petit caprice de temps en temps, ça met du piment.


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« - C'est ridicule, tout ça.
- Qu'est ce qui est ridicule, Mimo ?
- Toi, moi. Notre amitié. Un jour on s'aime, le lendemain on se déteste… Nous ne sommes pas des aimants. Plus nous nous rapprochons, plus nous nous repoussons.
- Nous ne sommes pas des aimants. Nous sommes une symphonie. Et même la musique a besoin de silences. »

Cette citation renvoie avec exactitude l'atmosphère de ce magnifique roman où je me suis délicieusement nourri d'autant d'amour que de haine, de beauté que de laideur, de pauvreté que de richesse bercé dans une ambiance poétique. J'ai ressenti un réel bonheur de lecture dans l'élégance des phrases de J.B Andréa lorsque chaque point final procure soit la quiétude, soit l'inquiétude mais offre toujours le rêve.
C'est un Goncourt De circonstance.
Un Goncourt dans la veine du « Soleil des Scorta » ou de « Tout les hommes n'habitent le monde de la même façon » qui peut séduire un grand nombre par la force de l'intrigue et la manière accessible et passionnante de la relater.
Il y a du « Martin Eden » de Jack London dans l'ascension sociale de Mimo. Pour conquérir sa place, atteindre son but, la lutte est présente à chaque page.
La chasse à l'autre.
Pour Mimo, Viola, fille de la richissime famille Orsini est son amour sans étreinte, son âme-soeur sans état d'âme, son revient va-t'en, sa muse qui ne s'amuse pas, son oiseau aux ailes brisées, son fantôme du bonheur, sa caractérielle de malheur, sa soif de vivre et sa faim de mourir paisible.
Pour Viola, Mimo est sa normalité, son centre de gravité.

L'auteur a su rendre son héroïne tellement attachante que par instant, je l'ai cru échappée d'un roman de Pierre Benoit. Pour tracer un portrait si touchant, si ensorcelant, il faut sans doute faire partie de la confrérie confidentielle des hommes qui aiment les femmes.

J.B. Andréa me régale de ses mots ciselés. Extraites de son texte énergique, vivantes et imagées les figures romanesques apparaissent aussi polies que les sculptures de Mimo. Chaque page façonne le relief des caractères avec les creux et les bosses, les déboires et les réussites rythmés par les trahisons et les intérêts de chacun.

Le contexte historique avec la montée du fascisme italien augmente la tension de cette saga familiale dramatique où Stefano et Francesco, les frères de Viola détiennent la force du sabre et la puissance du goupillon. La violence et la rigueur de leurs influences sont traduites avec l'importance suffisante pour concevoir la chape de plomb qui pèse sur la destinée de Viola et Mimo.

« Écoute-moi bien. Sculpter, c'est très simple. C'est juste enlever des coucher d'histoires, d'anecdotes, celles qui sont inutiles, jusqu'à atteindre l'histoire qui nous concerne tous, toi et moi et cette ville et le pays entier, l'histoire qu'on peut plus réduire sans l'endommager. Et c'est là qu'il faut s'arrêter de frapper. Tu comprends ? Non, monsieur.

Parfois, comme pour les sculptures, il en est de même pour les livres. Tu comprends ?
Oui, Monsieur Andréa.

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Quel plaisir de retrouver Jean-Baptiste Andrea !
Après avoir lu « Cent millions d'années et un jour » dont j'avais apprécié l'équilibre entre la justesse de l'écriture et l'émotion autour des personnages, je m'étais promise de revenir un jour vers cet auteur.
Mon choix s'est porté sur « Veiller sur elle », pas seulement en raison du prix Goncourt 2023 qu'il a obtenu, mais surtout à cause du mystère entourant son titre et de la thématique liée à l'Art.

*
Cette histoire est celle d'une magnifique amitié entre Michelangelo Vitaliani, surnommé Mimo, un sculpteur de pierre de génie et Viola Orsini, l'héritière d'une famille issue de la noblesse italienne.
De cette rencontre improbable va naître la statue de la Piéta, dissimulée dans les sous-sols d'une abbaye. le Vatican tient en effet, à la garder à l'abri des regards et pour en saisir la raison, le lecteur va devoir plonger dans le destin incroyable de son sculpteur.

Ce roman commence par la fin. Mimo devenu vieux agonise dans sa cellule. Entouré et veillé par ses frères, il est le seul à ne pas être moine. On raconte une étrange histoire à propos de cet homme aux doigts de fée : il serait là pour veiller sur elle. « Elle qui attend, dans sa nuit de marbre, à quelques centaines de mètres de la petite cellule. Elle qui patiente depuis quarante ans. »

*
Le roman se déploie sur un demi-siècle d'Histoire pour élucider l'énigme autour de cette statue et de cet artiste au nom prédestiné.
Jean-Baptiste Andrea, en merveilleux conteur d'histoires, nous fait changer d'époque. Par une construction originale qui traverse le temps et convoque les souvenirs, on remonte au début du XXème siècle pour revivre, sur près de six cents pages, l'Histoire de l'Italie au rythme de ses grands bouleversements : la première et la seconde guerre mondiale, la montée du fascisme.

*
Le récit porte en lui le dépaysement et le charme de l'Italie.
Si l'auteur saisit les bas-fonds de Florence et de Rome, il transcende la beauté des collines entourant Pietra d'Alba et le domaine des Orsini par son écriture vivante, rythmée et chaleureuse, pleine de poésie et de délicatesse. L'auteur en capture la beauté surannée, les parfums subtils des orangers, l'odeur iodée portée par le vent venu de la mer, la palette de couleurs chaudes et douces avec ses tonalités de terre cuite et le rose de son marbre.

*
Jean-Baptiste Andrea offre des personnages hauts en couleur, charismatiques, pleins d'humanité, touchants de part leurs émotions, leurs rêves, leurs expériences, leurs failles et leurs erreurs. Leurs portraits provoquent l'empathie ou l'antipathie immédiates du lecteur.

Dès les premières pages, je me suis attachée au jeune Mimo, à son combat pour devenir un sculpteur respecté et estimé. Cela provient sans aucun doute du fait de vivre dans un même temps, l'émotion de ses derniers instants et l'élan de ses jeunes années.

Face à Mimo, Viola est tout en exubérance, fragile et rebelle à la fois.
Le lecteur est le témoin privilégié de leur amitié indéfectible, de leur complicité, de cette force magnétique qui les attire l'un vers l'autre tout en les repoussant inextricablement. Leurs destins s'effleurent, se frôlent, s'éraflent, se croisent et se décroisent sans jamais se rejoindre réellement.

« Elle me sourit, un sourire qui dura trente ans, au coin duquel je me suspendis pour franchir bien des gouffres. »

J'ai adoré et savouré ma rencontre avec Viola : j'ai aimé son extravagance, sa folie et son intelligence, sa force de caractère et son besoin de s'affranchir, d'aller contre son temps. Malgré ses fêlures, Viola a soif de connaissance, elle aspire intensément à la vie, la liberté.

« Viola était une funambule en équilibre sur une frontière trouble tracée entre deux mondes. Certains dirent entre la raison et la folie. Je me battis à plus d'une reprise, parfois physiquement, contre ceux qui l'accusèrent d'être folle. »

L'auteur a été aussi très attentif aux personnages secondaires, dressant de superbes portraits, bons ou mauvais. Celui d'Emmanuele Orsini, un des frères de Viola, est particulièrement réussi.

*
C'est une lecture résolument romanesque et intimiste qui se concentre sur les personnages mais qui nous fait pareillement voyager dans le monde de l'Art, dans un passé à la fois proche et lointain. Elle parle de la puissance des rêves, du lien étroit entre le sculpteur et la pierre, de la force du savoir et de la connaissance par les livres, de la valeur des rencontres et de l'amitié malgré l'appartenance à des milieux sociaux différents.

*
Je ressors enchantée de cette escale de quelques jours au coeur de l'Italie. Je retiendrai de ce superbe roman la qualité du texte, la sensibilité et la douceur de la plume de Jean-Baptiste Andrea, la profondeur des deux personnages principaux, leur amour platonique et pudique et ce dénouement émouvant qui dévoile enfin le secret entourant la Piéta.

Entre humour et tragédie, un excellent moment de lecture !
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Un vrai coup de coeur pour, Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea. Je trouve qu'il a amplement mérité son prix, pour une fois, je suis totalement d'accord. Pas une once d'ennui, une écriture magnifique, à chaque page, un fait nouveau qui nous pousse à continuer et à ne pas poser le livre.

Énormément de belles critiques, donc je vais faire court.
Mimo, vient de perdre son père, sa mère n'ayant pas les moyens de l'élever, elle le pousse dans les bras, d'un obscur sculpteur de pierres, oncle, cousin, ami,…. Il devait faire office d'apprenti, mais c'est plutôt, le garçon à tout faire. Malmené, pas rémunéré, s'il réussit en catimini à sculpter quelque chose, les retombées vont à son maître, jaloux, buveur. Mimo s'accroche et sera un génie, bien au-delà de ses espérances.

Entre Pietra d'Alba, Florence, Rome, sa réussite sera fulgurante, atteint de nanisme, il se battra pour être respecté. Il fera la connaissance de Viola Orsini, super intelligente, qui rêve de voler, des idées, qui la feront passer, pour quelqu'un de bizarre, un peu sorcière, une famille très riche. Ils s'acharneront pour pouvoir vivre leurs rêves.

Une amitié sincère et à toute épreuve les lieront à tout jamais, des jumeaux cosmiques. Cette merveilleuse relation, aura pour fond historique, l'Italie, durant la première guerre mondiale, Mussolini, le fascisme. Les descriptions de la campagne avec ses champs d'oranger, de bigaradier sont sublimes, j'ai aimé aussi la vision des bouges de Florence et Rome, ainsi que la faune qui y sévit.

Une magnifique lecture, tout en émotions, bouleversante. Bonne lecture et bonnes fêtes à tous.
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Je suppose que vous connaissez la Pieta de Michel-Ange. Une sculpture magnifique, la plus belle du monde, dit-on. Mais vous ne connaissez pas la Pieta de l'autre Michel-Ange si vous n'avez pas lu ce roman qui transporte, tourbillonne et ramène aux racines de soi-même !

Oui, Michelangelo Vitaliani, dit Mimo, est un sculpteur de génie, même si, à sa naissance, la sage-femme l'a traité de « piccolo problema »... Il est né en France en 1904 et est renvoyé par sa mère en Italie après la mort de son père en 1914. Il habitera dans un village où la pierre est rose comme l'aube, Pietra d'Alba : « A Pietra d'Alba, la fortune venait de couleurs qui changeaient avec le soleil, d'une délicieuse amertume ou d'une sensation de sucré dans un matin froid ». Il devient l'esclave d'un « oncle » à qui sa mère l'a confié, un sculpteur lui aussi, mais qui, lorsqu'il découvre la première sculpture du petit, en conçoit une jalousie terrible. Heureusement, dans la villa de la famille Orsini, à quelques pas de chez lui, habite une petite fille qui ne sera pas étrangère à son destin. Veiller sur elle sera le projet de sa vie et l'emmènera vers des hauteurs insoupçonnées.

Dieu que ce roman m'a emportée ! Continuellement, Jean-Baptiste Andrea passe du divin au prosaïque à l'aide d'un vocabulaire bien choisi et d'images poétiques. Son protagoniste flirte avec les sommets et côtoie les bas-fonds, tout entier possédé par l'amour difficile pour Viola Orsini, une petite fille, jeune fille puis femme qui n'accepte pas les frontières.

Une plongée dans Florence, puis dans Rome m'a rappelé les trésors de l'art qu'arborent ces deux villes ; un passage obligé par le fascisme m'a rappelé l'arbitraire et la calamité ; tout cela pour finir à genoux devant la Pieta, celle de Vitaliani, retirée dans un monastère éloigné afin que son auteur puisse veiller sur elle, où j'ai été définitivement conquise par l'émotion.
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Scoop !
Futur Prix Goncourt !!!

(Je vous explique pourquoi en fin de chronique)

Quelle déception !
Alors que tout était réuni pour que je passe un bon moment en compagnie de Mimmo (l'Italie, l'histoire du pays, l'art...), me voilà fort déçu en refermant ce (trop) long roman. Et je suis même en colère. En colère contre Jean-Baptiste Andrea d'avoir pondu cette histoire sans aucune aspérité, banale et sans émotion. Alors oui, il aura eu le mérite de me rendre en colère mais ce n'est pas ce que j'attends d'un roman.

Je ne vous raconterai pas l'histoire (banale) que vous pourrez trouver partout.

Je me suis ennuyé à suivre la complainte de ce nain incompris, lisse et en mal de reconnaissance au point de se compromettre avec le Parti et de devenir un artiste adoubé par le régime fasciste. Mimmo est un personnage passif qui ne lève jamais la voix.

J'aurais aimé être conquis par l'articulation de la petite histoire dans la grande Histoire. Mais las... j'ai le sentiment qu'Andrea, très scolaire, a cherché à plaquer les grands événements du siècle (et encore, il a eu la bonne idée de faire passer les 40 dernières années de la vie de Mimmo reclus dans un monastere) sur son histoire. J'ai hurlé en lisant les quelques lignes tombées d'on ne sait où sur la déportation des juifs par les fascistes. Un personnage disparu depuis plusieurs centaines de pages réapparaît pour demander à Mimmo de l'aider à faire fuir sa soeur juive ...

Le dénouement de l'histoire aurait pu être interessant si l'idée avait été creusée sur de plus longues pages. J'ai le sentiment d'une fin bâclée comme si Andrea voulait en finir et nous épargner les souffrances de fin de roman.

Peut être sauverais-je le personnage féminin: Viola.

Bref, une très grosse déception et comme à chaque fois que je n'aime pas un roman, il reçoit le Goncourt. Je félicite donc l'auteur pour cette récompense.

Et je sais déjà qu'il a trouvé son lectorat. Donc une voix dissonante importera peu.
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Je me suis précipité sur Veiller sur elle, le dernier roman de Jean-Baptiste Andrea, car j'avais été enchanté par Des diables et des saints, le précédent. J'ai relu ma critique de celui-ci, ce que je vous invite à faire aussi, parce que pour celui-là, je pourrais presque me laisser aller aux mêmes mots enthousiastes. La lecture de Veiller sur elle a déclenché à nouveau en moi « toutes sortes d'émotions négatives et positives, compassion, consternation, indignation et aussi espoir, soulagement, éblouissement, sans oublier de fréquents sourires et même quelques rires francs ».

Bien entendu, l'histoire de Mimo n'a rien à voir avec celle de Joseph, mais un air de famille saute aux yeux. Des destinées personnelles toutes deux sous-tendues par une référence artistique suprême. Pour succéder au pianiste obsédé par les sonates de Beethoven, l'auteur a cette fois-ci imaginé un sculpteur tourmenté par la Piéta de Michel-Ange. Il en porte d'ailleurs le prénom.

Dès sa naissance, le sort s'avère ingrat pour Mimo, dont le nom complet est Michelangelo Vitaliani. Pauvreté, et surtout achondroplasie ! En compensation, un visage séduisant, de la force musculaire, une personnalité charismatique ; et puis une détermination, une envie de revanche et un talent pour la sculpture qui touche au génie.

Mimo fait ses classes à Pietra d'Alba, un village situé sur un plateau rocheux de Ligurie, où la pierre a pris des teintes de lever de soleil. C'est là, adolescent, qu'il rencontre Viola Orsini, une fille de marquis. Elle a son âge, des yeux intenses, une allure androgyne, un cerveau brillant, caustique et hypermnésique. Ses passions, ses ambitions, ses exigences sont fantasques. Mimo éprouvera pour elle jusqu'à sa mort, une sorte de fascination mystique. Chez Andrea, les amours de jeunesse sont pures et éternelles.

Des errances mènent Mimo à Florence et à Rome, en un temps où l'Etat italien, récemment unifié, cherche avec peine à s'affirmer. Des choix perdants d'alliance pour les deux guerres mondiales. Entre les deux, l'aventure fâcheuse du fascisme ; violence, dictature et mondanités. L'Eglise catholique reste toute puissante ; bienveillance, combinaisons et… mondanités. Chez les Orsini, une famille prestigieuse, on a tout compris et on a beaucoup d'ambition pour les frères de Viola. L'ainé meurt presque au champ d'honneur, le cadet sera presque pape, le benjamin aura presque été ministre de Mussolini.

C'est sur son lit de mort, que Mimo fait défiler la partie active de sa vie, en Italie, depuis la Première Guerre mondiale jusqu'aux lendemains de la Deuxième. Sa narration est entrecoupée du récit de ses derniers instants, quarante ans plus tard, ainsi que de commentaires contextuels sur son oeuvre et sur la sculpture du marbre.

Veiller sur elle est une fiction audacieuse et pleine de surprises. Elle pique la curiosité. L'envie de savoir qui veille sur qui ou quoi, et pourquoi ! Elle m'a enchaîné à ma lecture, chapitre après chapitre, presque à l'aveugle, car aucun de ces chapitres ne porte de titre ni de numéro, une habitude chez l'auteur. Cela pourra t'égarer, lectrice, lecteur, mais laisse-toi balader, tu trouveras ton plaisir. Les aventures vécues par Mimo s'inscrivent dans le cadre d'un mystère énigmatique, qui n'a pas été jugé digne des caves du Vatican, et dont la clé n'est dévoilée que dans les dernières pages.

Les péripéties sont relatées d'une plume fluide, imprégnée d'une pointe d'humour absurde. Une plume devenant lyrique pour dépeindre les couleurs changeantes des paysages de Ligurie, les déambulations dans les villes d'art italiennes, ou la beauté d'une sculpture semblant éclore d'un bloc de marbre. La richesse du vocabulaire et la grâce des métaphores sont éblouissantes.

Les sommets littéraires sont rares. Des diables et des saints en était un. Veiller sur elle en est un autre. Jean-Baptiste Andrea n'est pas le seul à les atteindre. Mais cela fait deux en l'espace de trente mois.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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