Jean-Baptiste Andrea vous présente
Cent millions d'années et un jour disponible en livre audio !
Résumé :
1954. C'est dans un village perdu entre la France et l'Italie que Stan, paléontologue en fin de carrière, convoque Umberto et Peter, deux autres scientifiques. Car Stan a un projet. Ou plutôt un rêve. de ceux, obsédants, qu'on ne peut ignorer. Il prend la forme, improbable, d'un squelette. Apatosaure ? Brontosaure ? Il ne sait pas vraiment. Mais le monstre dort forcément quelque part là-haut, dans la glace. S'il le découvre, ce sera enfin la gloire, il en est convaincu. Alors l'ascension commence. Mais le froid, l'altitude, la solitude, se resserrent comme un étau. Et entraînent l'équipée là où nul n'aurait pensé aller. de sa plume cinématographique et poétique,
Jean-Baptiste Andrea signe un roman à couper le souffle, porté par ces folies qui nous hantent.
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On a fait un jeu, c'est elle qui a eu l'idée, il fallait trouver la coccinelle avec le plus de points. Au début, j'ai eu du mal, je trouvais beaucoup de points mais il n'y avait pas de coccinelle autour, et Viviane m'a appris comment chercher : d'abord la coccinelle, bien rouge et bien brillante, et seulement après les points.
J'ai pensé à leur rencontre. J'ai frotté mes parents comme du cuivre ancien pour en effacer le noir. Redressé leur têtes, aminci leurs corps, rallumé leurs yeux. Ils avaient dû s'aimer l'espace d'un instant, quand ils avaient tournoyé sous les lampions du 14 juillet, à moins qu'ils ne soient restés fixes pendant que le reste se mettait à tourner. Ton père était beau, avait dit ma mère, et il était doux, et il dansait comme un dieu. J'ai pensé à leur rencontre mille fois, le plus souvent la nuit, quand j'avais l'impression d'étouffer. Il fallait qu'ils se soient aimés, sinon quelle raison j'avais d'exister, moi, de respirer, de prendre la place d'un autre ? Mais alors, il était parti où, cet amour ? Je l'ai cherché sous mon lit, dans les murs froids, dans la forêt, dans les yeux de ma mère puis dans ceux d'autres femmes, et j'ai fini par comprendre qu'il s'était changé en pierre. Elle avait dû rouler quelque part, passer par le trou d'une poche, et peut-être même qu'ils l'avaient un peu cherchée, mais va-t'en retrouver une pierre dans la caillasse du monde.
Ma grand-mère disait aussi: il y a deux choses que j'aime dans la vie. Mentir et jardiner. J'aime tellement mentir que je viens de le faire: je déteste jardiner. Mentir, c'est beaucoup plus utile. Rappelle-t'en, Joseph.
(pages 92-93)
Il n'y a rien à faire, rien d'autre que d'attendre. La combe, autour de nous, est un bloc d'obsidienne. Le silence est absolu, il nous emplit la bouche et nous colle aux dents. Nous sommes la seule trace de vie dans un monde de prière. Même notre feu brûle en silence pour ne pas déranger.
Elle me sourit, un sourire qui dura trente ans, au coin duquel je me suspendis pour franchir bien des gouffres.
Le Dr Bardet m'avait demandé d'attendre dans la salle d'attente pendant qu'il parlait à mes parents. J'avais fait semblant d'accepter, j'avais pris un magazine et je m'étais assis avec mes pieds bien posés à plat par terre. Dès qu'il avait refermé la porte, j'étais allé écouter, j'avais appris à la maison que c'était comme ça qu'on entendait les choses les plus intéressantes, les gens parlaient mieux derrière les portes.
On n’avait jamais vu un saint chatouilleux, encore moins souriant. En tout cas pas en statuaire, où tous les saints arboraient en général des mines de fonctionnaires divins harcelés de demandes d’intercession.
(page 398)
La nuit est tombée, l'air s'est allégé. Umberto fredonne une mélodie traditionnelle sans s'en rendre compte. Des points de feu scintillent derrière nous sur les pentes - ce sont les bergers que nous avons vu à distance durant la journée. Silhouettes longues et massives, ils ont répondu à nos saluts d'un geste qui ressemblait à une bénédiction.
Un glacier de près.
C'est un spectacle qu'il faut avoir vu une fois dans sa vie : la Terre bâille une langue énorme, crevassée, se lèche avec curiosité et attrape au passage, si elle y parvient, les alpinistes qui osent s'y risquer. Plus d'une histoire s'est effondrée là, dans un grand craquement bleu, dans le silence dur de cette mer sans poissons.
Je suis parfois maladroit. Blessant, bourru, bête même. Empoté et désespérant. Mais je ne suis pas un mauvais bougre. J’ai la gentillesse ébouriffée des abeilles, je pique parfois sans m’en rendre compte la main qui approche, parce que je crois par habitude qu’elle va m’écraser. J’aimerais que vous le sachiez.
- On le sait Stanè. On le sait.
Foutue prune qui fait parler à voix haute les hommes pudiques.