🍄🟫Chronique🍄🟫
« C’est quoi qui coince, exactement? »
Exactement, je ne saurai dire. Mais ce qui coince c’est à peu près, tout. Il n’y a qu’à regarder l’actualité, la jeunesse actuelle, l’indifférence des pouvoirs en place. Je pourrai être Aby, ou j’aurai pu, mais en tout cas, sa détresse me parle intimement. L’identification est si facile, mais n’allons pas si vite, attendez que je vous parle un peu de cette nana attachante. En fait, Aby traverse une phase difficile. Un passage à vide. Ça arrive à tout le monde, mais elle a au moins eu le courage, d’essayer de s’en sortir, d’adopter une nouvelle façon de vivre, de quitter une situation pénible pour quelque chose de plus « aligné ». Elle cherche, se cherche, cherche dedans ou dehors, du sens. On va la suivre dans ses pérégrinations spirituelles, sociales, et émotionnelles. Ce n’est pas facile d’être jeune. De comprendre la politique, les autres, soi-même. De trouver sa place au milieu de tout ça, avec les injonctions, les informations alarmistes, la vie en communauté. Gérer le TROP, qui arrive par vagues et écrase tout sur son passage. Alors Aby, part en forêt, seule. Déconnecte l’esprit. Elle se prend de passion pour les champignons. Et c’est drôle, parce que ce nouvel intérêt est à mon avis, un signe évident de reconnection. Avec la nature certes, mais j’ai trouvé dans ce choix, une subtilité silencieuse et puissante, qui lui fait reprendre pied. C’est par les champignons qu’Aby rencontre la sagesse, l’engagement, et la magie. C’est dans leur manière de communication complexe et ingénieuse qu’elle va le moyen de sortir de la toxicité qu’elle ressent à l’intérieur comme à l’extérieur. Tourner les pages de La part des lâches, c’est décoincer le carcan des aprioris. C’est ce que j’ai trouvé génial. Tout n’est pas forcément bon dans ces tentatives de décroissance, dans ces discours new-age, dans ces retranchements abrupts au fin fond des bois. La santé mentale est à prendre en compte, avant tout. Aby est fragile, hypersensible, bienveillante. C’est évident que la folie furieuse du capitalisme est à bannir, mais un peu de nuance et de subtilité quand aux moyens à mettre en place pour cette jeunesse désemparée face à ce futur toujours trop catastrophé, est à repenser intégralement. Et je trouve que ce roman graphique est justement rempli de nuances. Que ce soit dans les illustrations aussi bien que dans les propos, Marguerite Boutrolle a l’intelligence de nous montrer l’angoisse et l’intention de bien faire de ces jeunes. Il y a un potentiel, un espoir que j’ai trouvé touchant. Maladroit peut-être, drôle, hallucinant, délirant mais extrêmement touchant. On est tous perdus, jeunes comme vieux face à l’avenir, ce n’est pas une question d’âge, c’est une réalité effroyable qui nous déconcerte tous, mais la façon dont l’autrice traite ce sujet m’a beaucoup plu. J’ai lu et adoré ce huis-clos au cœur des bois, du mycelium et des énergies telluriques. Une retraite au vert, ça vous tente?
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