Si l'on peut regretter la mauvaise traduction du titre (« Disappearing Earth », le titre anglais, soit sauf erreur « Une Terre en voie de disparition », ayant beaucoup plus de correspondances avec ce qui est narré dans le livre… Dommage !), «
Dégels », premier roman de l'américaine
Julia Phillips, à paraître fin août chez Autrement, est certainement l'un des textes les plus séduisants, les plus promis à succès de cette rentrée, d'une grande qualité littéraire, mais en même temps susceptible d'être recommandé au plus grand nombre de lecteurs. Autour d'un fait-divers, la disparition (en fait, leur enlèvement, raconté dans les premières pages du roman) de deux petites filles, des soeurs, sur la plage du centre-ville de la capitale du Kamtchatka (cette péninsule du bout du bout de la Sibérie russe, en face de l'Alaska, de l'autre côté du détroit de Béring, devenue à cause de la beauté des paysages un lieu de tourisme à la mode) et d'une enquête qui traîne en longueur, sans résultats, le roman évoque les répercussions de ces événements dans la vie d'une douzaine de femmes de la région, d'origines (russe ou de différents peuples indigènes), de conditions et de tempéraments très différents, mais parfois cependant liées par la famille ou le travail les unes avec les autres, dans douze chapitre correspondant aux douze mois de l'année qui suit. Mal-être professionnel, conflits dans leur couple, rêves brisés ou difficiles à réaliser, disputes d'adolescents, chacune vit une situation de tensions et l'écho de la disparition des deux gamines ajoute une touche d'angoisse supplémentaire à leur fragilité ou fait évoluer, même discrètement, leur existence. Une douzaine de destins pour une image de la condition féminine, des humiliations et des dangers qui pèsent sur elle, et tout cela au milieu d'une nature de rêve, pourtant elle-même menacée… Car ce roman, magnifique, est aussi celui du Kamtchatka, ses glaces et ses ours, un territoire que l'on sera amené à retrouver dans le texte de
Nastassja Martin, " Croire aux fauves ", si attendu chez Verticales au mois d'octobre !