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3,64

sur 107 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2019 #9 °°°

Presqu'île de Kamtchatka, aux confins de l'Extrême-Orient russe.

Le roman s'ouvre sur l'enlèvement de deux soeurs, onze et huit ans, un jour d'été, au bord d'une baie. Début classique pour un polar ou un thriller où le lecteur suivrait classiquement enquêteur, victime et criminel ... sauf que Julia Phillips est partie dans une toute autre direction. Ce n'est pas l'enquête ni sa résolution ( même s'il y en a une ) qui l'intéressent. Non, ce qui l'anime, c'est de parler des femmes du Kamchatka, de leur condition au sein d'une société en plein bouleversement : de l'isolement total durant la guerre froide, jusqu'à la lente ouverture actuelle qui enflamme et aggrave les tensions et les peurs endormies. L'auteure a vécu plus d'une année au Kamchatka, et on sent à travers ses mots la parfaite connaissance qu'elle en a .

La temporalité du roman court sur une année, chaque chapitre sur un mois, un mois pour mettre en scène un personnage féminin différent, touché directement ou très indirectement par la disparition des fillettes, comme un bruit de fond. Julia Phillips rend compte avec finesse et sensibilité du poids du patriarcat, du sexisme ordinaire, des relations familiales et amoureuses qui pèsent sur l'émancipation féminine, du racisme à l'égard des populations indigènes évènes ( peuple nomade de Sibérie vivant d'élevage des rennes et de chasse, la problématique est très proche du vécu douloureux des Amérindiens en Amérique du Nord ).

Chaque chapitre chante d'une voix claire et subtile les tragédies mineures ou majeures de la femme qui est en son coeur, comme un singulier huis clos au coeur du décor grandiose du Kamchatka. Celle qui m'a le plus touchée est Ksyusha, fille d'un éleveur évène, étudiante réservée et sérieuse, sous la coupe d'un petit ami blanc, elle se révèle à elle-même en tombant amoureuse d'un jeune autochtone comme elle, plus doux. Cette dizaine de portraits féminins - jeunes filles, mères, épouses, blanches, autochtones – finissent par résonner les uns avec les autres comme une ronde sororale , jusqu'à ne plus former qu'un seule femme, inscrite dans la société russe du Kamchatka. Au final la femme dans toute son universalité.

Et c'est là toute la prouesse narrative de Julia Phillips que de nous plonger dans les expériences émotionnelles de ces femmes entre douleurs et espoirs tout en faisant converger les indices parcimonieusement disséminés dans chaque chapitre jusqu'à une résolution. Lorsqu'elle arrive, franche et claire, dans les deux derniers chapitres, j'en ai été presque déconcertée tellement j'ai été hypnotisée par ces voix féminines.

Un premier roman puissant, sous tension douce, nimbé de mystères, peuplé de femmes inoubliables, déployé dans le décor inédit du Kamtchatka. La comparaison avec Laura Kasischke ( une de mes auteures préférées ), proposée aux Etats-Unis, me semble totalement justifiée.
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Un premier roman plutôt original dans sa construction : nous sommes au Kamtchatka alors que deux jeunes filles sont enlevées. Sur une année nous allons suivre une dizaine de femmes autour de cette affaire, qu'elles soient plus ou moins concernées. Pas toujours facile de s'y retrouver dans les nombreux personnages ( dont les prénoms se finissent souvent par un "a") mais heureusement on finit par repérer tous les liens entre eux ( avec quelques retours en arrière parfois). Et c'est là qu'on se dit que ce bouquin est superbement écrit jusqu'au final. Et puis ce décor, peu connu, avec ses peuples différents aux traditions marquées, ajoute à l'exotisme. On a envie de le relire une fois la fin arrivée pour repérer tous les détails et revoir certains personnages à la lumière de la conclusion. J'ai passé un très bon moment !
Challenge Mauvais genres 2021
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Magnifique roman choral, que je referme imprégnée de ces destins de femmes et de ce territoire qu'est le Kamtchatka, situé dans l'Extrême-Orient russe.  Deux petites filles vivant à Pétropavlosk disparaissent;  en déambulation dans la ville comme tous les jours où leur mère travaille, elles aident un homme s'étant foulé la cheville à regagner son véhicule, qui leur offre de les raccompagner chez elles, ce qui aura des conséquences funestes.  Une femme, qui les reconnait lorsque leur disparition est télévisée, se présente comme témoin de la scène, mais ses descriptions sont trop générales et n'aident pas aux recherches.  La police, de son côté, conclut à une noyade, faisant peu d'efforts pour maintenir le dossier actif.  Chaque chapitre, un nouveau mois de l'année suivant la disparition des soeurs Golosovskaya, se concentre sur un personnage féminin, touché de près ou de loin par l'événement, ce qui finit par créer une fresque - la fille de, la femme de, la soeur de, la petite amie de… -, qui nous place en quelque sorte dans le rôle de l'enquêteur, et de cette interconnectivité, des liens se créeront, qui mènerons au développement final.  Posant un regard ethnologique, Julia Phillips développe autour des tensions familiales et raciales que vivent ces femmes, qui sont en quête d'une vie meilleure pour elles et leurs enfants, femmes de toutes origines (russes et indigènes) et classes sociales, dans cette ère post-soviétique où les frontières ont été ouvertes, non sans tensions. Une façon originale de réinventer la forme du roman policier.
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Nous sommes dans le Kamtchatka, une péninsule aux confins de la Russie. En août, deux petites filles (la plus grande s'occupait de la plus jeune) disparaissent. Mois après mois pendant un an, à la manière d'un roman choral (mais sans une once de feel good) nous allons apprendre à connaître cette région. Chaque mois est consacré à une femme différente. Toutes ne se connaissent pas mais sont néanmoins liées d'une manière ou d'une autre, et les deux petites disparues sont dans leur esprit. C'est comment, de vivre au Kamtchatka, de nos jours ? Les petites sont-elles mortes ? Qu'est-ce qui s'est passé et pourquoi toutes ces femmes différentes ?…
Pour son premier roman Julia Phillips frappe très fort. Elle nous offre tout le suspens d'un roman policier tout en flirtant avec la nouvelle pour la forme et en soutenant le tout par un fond très solide : tenant de l'ethnologie et du social pur, elle parvient à nous émouvoir aux larmes (Revmira) avant de faire s'envoler notre rythme cardiaque. C'est une découverte assez éblouie, pour ma part, par le talent de l'autrice bien sûr mais aussi par celle du peuple Évène dont j'ignorais l'existence. Tendu, émouvant, effrayant et invitant avant tout au voyage et à la rencontre de l'autre, ce roman est ultra prenant.
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Si l'on peut regretter la mauvaise traduction du titre (« Disappearing Earth », le titre anglais, soit sauf erreur « Une Terre en voie de disparition », ayant beaucoup plus de correspondances avec ce qui est narré dans le livre… Dommage !), « Dégels », premier roman de l'américaine Julia Phillips, à paraître fin août chez Autrement, est certainement l'un des textes les plus séduisants, les plus promis à succès de cette rentrée, d'une grande qualité littéraire, mais en même temps susceptible d'être recommandé au plus grand nombre de lecteurs. Autour d'un fait-divers, la disparition (en fait, leur enlèvement, raconté dans les premières pages du roman) de deux petites filles, des soeurs, sur la plage du centre-ville de la capitale du Kamtchatka (cette péninsule du bout du bout de la Sibérie russe, en face de l'Alaska, de l'autre côté du détroit de Béring, devenue à cause de la beauté des paysages un lieu de tourisme à la mode) et d'une enquête qui traîne en longueur, sans résultats, le roman évoque les répercussions de ces événements dans la vie d'une douzaine de femmes de la région, d'origines (russe ou de différents peuples indigènes), de conditions et de tempéraments très différents, mais parfois cependant liées par la famille ou le travail les unes avec les autres, dans douze chapitre correspondant aux douze mois de l'année qui suit. Mal-être professionnel, conflits dans leur couple, rêves brisés ou difficiles à réaliser, disputes d'adolescents, chacune vit une situation de tensions et l'écho de la disparition des deux gamines ajoute une touche d'angoisse supplémentaire à leur fragilité ou fait évoluer, même discrètement, leur existence. Une douzaine de destins pour une image de la condition féminine, des humiliations et des dangers qui pèsent sur elle, et tout cela au milieu d'une nature de rêve, pourtant elle-même menacée… Car ce roman, magnifique, est aussi celui du Kamtchatka, ses glaces et ses ours, un territoire que l'on sera amené à retrouver dans le texte de Nastassja Martin, " Croire aux fauves ", si attendu chez Verticales au mois d'octobre !
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Un livre envoûtant au suspense intense : j'ai été captivée.
L'écriture poétique, les décors impressionnants de cette péninsule de l'extrême-orient russe, le Kamchatka et l'histoire parfaitement menée en font une lecture inoubliable.
Les deux jeunes soeurs disparaissent dès le premier chapitre alors qu'elles se promènent le long de la plage proche du centre-ville où elles habitent. Nous sommes en août, elles passent leur été ici, leur mère travaille. Elles n'ont jamais quitté cette péninsule qui se trouve à neuf heures d'avion de Moscou.
Après leur disparition, les chapitres suivants alternent les personnages, en lien avec les petites filles. Douze chapitres ou un an d'enquête, chacun centré sur une personne en lien avec l'enquête. Parfois, leur vie a été bouleversée par la disparition.
Ce récit, à la limite du fantastique parfois, rappelle les romans de Laura Kasischke ou ceux de Joyce Carol Oates. le ton poétique, l'atmosphère particulière et les paysages grandioses m'ont enthousiasmée.
Trois cents quatre vingt pages en apnée à dévorer ce roman bluffant.
Lien : http://www.despagesetdesiles..
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Si je devait cataloguer ce roman, j'en serais incapable.
L'autrice nous plonge remarquable dans la Russie du grand froid. L'écriture est fluide, poétique, sans fioritures.
À travers une disparition d'enfants, on rentre dans de très beaux portraits de femmes.
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À Petropavlovsk, sur la côte sud-est de la péninsule extrême-orientale du Kamtchatka, deux filles sont kidnappées. Cette informations touchera directement ou de loin toute la population de cette île, de ses parents aux habitants des confins évènes et autochtones de régions accessibles uniquement par air.

À travers 12 mois et autant de chapitres, Julia Phillips nous convie à découvrir la vie du quotidien des femmes qui résident dans cette région de volcans et de pécheurs. Leurs envies, leurs regrets et la façon dont elles espèrent l'avenir. Mais le spectre de ces enfants est toujours présent dans les coeurs et la question toujours sans réponse: où sont-elles passées ?

Découvrir de l'intérieur, dans leur intimité les personnages proposés par l'auteure m'a vraiment convaincu, et même si Phillips n'est pas elle-même originaire de Petropavlovsk, on voit très vite qu'elle s'est beaucoup interrogée sur la vie d'un Russe de là-bas. J'ai été subjugué par ces tranches de vie. Mais malheureusement, la fin m'a laissé sur la mienne et l'avant dernier chapitre, étant particulièrement beau à lire, aurait à mon avis dû être le final.
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Un livre fort, qui vous prend aux tripes.
La vie de ces femmes, leurs désirs, leurs déceptions sur cette presqu'île plus ou moins sauvage et qui s'entremêle plus ou moins autour d'un fil directeur avec la disparition d'enfants.
Ce fil directeur sous jacent est pourtant bien présent, sombre toile qui pèse sur l'ambiance des populations, avec en fond d'écran le racisme russe blanc et population autochtone.
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A l'approche d'un nouvel été caniculaire, prenons un peu le froid de Russie... (Je n'aime pas beaucoup l'été !).
Julia Phillips, dans "Dégels", nous emmène dans la péninsule du Kamtchatka. L'autrice a reçu la prestigieuse bourse Fullbright (si si, c'est très dur de l'avoir, je vous confirme !), pour vivre un an dans cet endroit reculé, froid et sauvage.
Un jour, deux petites filles disparaissent... Cet évènement atroce créé l'émoi chez les habitants de la petite ville isolée. Est-ce un habitant qui est responsable ? Pour le découvrir, le lecteur va suivre le quotidien de 10 femmes, toutes plus courageuses les unes que les autres.
C'est parfois, je trouve, un peu décousu puisque nous passons d'une personnage à l'autre, dans ce huis clos glacial et enneigé. Il y a les éléments classiques d'un polar, mais avec beaucoup d'importance donnée aux personnalités de ces 10 femmes.
Original, bien écrit (quoique, un peu long), avec une résolution d'intrigues intéressante. le plus : la force de caractère de ces femmes adaptées à cet environnement rude. Un bémol : il faut se concentrer un minimum pour suivre 10 héroïnes en même temps dans leur quotidien et leurs interactions !
"Dégels" reste une très bonne lecture qui, à coup sûr, nous décrit bien le mode de vie si singulier des habitants de cette région peu connue de Russie.
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