La première fois que j'ai entendu parler de
Cizia Zykë, c'était à une émission d'Apostrophe de
Bernard Pivot. Il y présentait son premier roman où il relatait sa propre expérience d'aventurier en Amérique du sud.
Ce qu'il disait était assez effrayant. Avouant à demi-mots avoir pratiqué l'esclavage, la séquestration, la torture et autres pratiques du même acabit, pratiques qu'il justifiait pour arriver à ses fins, notamment l'extraction de l'or, si je me souviens bien. Il s'exprimait avec une petite voix et un fort accent des Balkans, expliquant l'utilité de ses agissements, tranquillement, comme si c'était une attitude normale dans un environnement aussi inhospitalier que la jungle sud-américaine. Cela rendait le personnage encore plus inquiétant. Je me souviens encore de l'étonnement de Pivot.
Je n'ai pas encore lu cette trilogie, pensant que ça ne m'aurait pas plus. Mais récemment j'ai trouvé «
Fièvres » dans une brocante. J'étais prêt pour me lancer dans « l'aventure ». Et je n'ai pas été déçu. Deux chasseurs endurcis, accoutumés à la chasse au gros gibier en Afrique, accompagnés d'un intellectuel venu faire des recherches scientifiques, vont accepter de combattre pour des villageois un éléphant particulièrement agressif et intelligent qui saccage régulièrement le village. Mais la bête sera plus coriace que prévu. C'est à la fois un roman d'aventure et d'initiation. L'homme confronté à la nature ! Mais pas de manichéisme chez
Zykë. L'éléphant en question est décrit comme étant assez exceptionnel pour être plutôt considéré comme un monstre sanguinaire à abattre. Plusieurs scènes montrent nos amis en train d'essayer de survivre dans cette forêt hostile, avec humilité, en s'appuyant sur les bienfaits offerts par la nature et en apprenant à utiliser toutes les ressource possibles. Et ils y arriveront. Une scène particulièrement forte est celle de l'abattage inutile d'une mère éléphante et son éléphanteau. Les trois hommes se rendant compte de la barbarie de leurs agissements, portant longtemps le poids de leur culpabilité. Ce roman s'avère plus riche qu'il n'y paraît. Pas de sentimentalisme écolo-bobo mais pas non plus d'apologie de la chasse au gros gibier africain. Avis aux amateurs !
Il s'agit plutôt d'une expérience de survie, aller au bout de ce que l'humain peut endurer. Nos héros seront changés à jamais après cette aventure.
Au-delà de ses aventures sulfureuses Zikë se révèle être réellement un écrivain, fin observateur de l'humain.
Je suis prêt pour lire la trilogie.