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Tableau croisé dynamique.
Je ne suis pas un virtuose d'Excel mais comme je suis lassé des formules toutes faites du genre « Roman-Monde » ou « Roman-fleuve », je préfère ouvrir les windows pour évoquer ce titre qui raconte les vies entrelacées d'une bonne douzaine de personnages éparpillés entre la France et les States.
Le second livre d'Edouard Jousselin est un passionnant pot-pourri au parfum des trente dernières années, qui passe de la relégation de l'AJ Auxerre en ligue 2 (c'est du foot !) à l'attentat d'Oklahoma City en 1995, du succès d'un blockbuster Hollywoodien à la succession d'un vignoble bordelais, des bas-fonds du Darkweb aux fantômes de Qarré-les-tombes. Un fil dysharmonique.
Tous ces évènements, catastrophes, attentats qui fracturent l'histoire sont ici greffés par un effet papillon taille triple XL qui traverse l'Atlantique, provoqué par des destins que certains provoquent et que d'autres subissent. Entre les supposés winners et les prétendus loosers, dans une langue Houellebecquienne, le romancier floute très habilement la différence entre le déterminé et le déterminable. La fameuse géométrie des possibles du titre. Une équation peuplée d'inconnus. Est-il illusoire de penser que nous pouvons être maître de notre avenir ?
Allez, je vous fais les présentations, mais on va oublier les bisettes, le tour de table étant plus long que la liste des invités d'un mariage royal.
Du côté des aînés, il y a Lucien, au passé de résistant aussi trouble que les brumes du maquis du Morvan. Sa fille Isabelle est un des maillons fort du récit. D'abord marié à Dominique, un fan de Guy Roux, avec lequel elle a eu deux enfants, Max, un glandeur qui vit de petites escroqueries sur le Darkweb et Marine, dopée à la réussite professionnelle. Max fréquente Clarisse, prête à tout pour concrétiser son rêve de devenir actrice. Marine, de son côté vit une petite histoire avec Stéphane, un écrivain en herbe.
Et côté Yankees me direz-vous ? Il y a Benjamin, un directeur du FBI qui ne fait pas le deuil d'une amourette de jeunesse avec Jessica, partie enseigner la littérature à Paris. Nous avons aussi William Smith, qui tente de reprendre un semblant de vie normale avec sa femme Lucy après l'attentat d'Oklahoma City dans lequel il a laissé une partie de lui-même et ce n'est pas une métaphore. Ils ont une progéniture difficile, descendance descendante, avec un fiston plus dopé qu'un coureur cycliste. Je finis par Candido Rincon, immigré mexicain, déraciné et apatride affectif qui va croiser la route d'un producteur de cinéma à succès, Bruno, le nouveau compagnon d'Isabelle. Vous avez suivi ? Présentez comme cela, on dirait le pitch du 1317 ème épisode d'un feuilleton français post-apéro mais promis, tous les personnages ne portent pas des chemises en lin et ne boivent pas du rosé pour s'occuper les mains et s'épargner des dialogues affligeants.
Malgré le foisonnement de personnages, je n'ai pas été une seule fois égaré dans ce récit et je me suis intéressé à la vie de tout ce petit monde en me demandant comment l'auteur allait les connecter. Comme les aléas de la vie se soucient peu de la chronologie, le récit n'est pas linéaire et cette construction habile, autour d'évènements historiques, rappelle certains romans de Jonathan Coe.
Edouard Jousselin s'intéresse à tout sauf à son nombril, ce qui déjà est une rareté louable pour un romancier français, son style assez clinique se marie bien à l'époque et les 600 pages de son roman se lisent comme des chroniques imprévisibles qui suivent un fil d'Ariane emmêlé.
Un roman de ruptures : temporelles, sentimentales, spatiales et accidentelles. Et de retrouvailles qui vaille.
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Entrelacement de destins en une ronde dans laquelle je n'ai pas réussi à m'insérer…

Ce roman choral du jeune Edouard Jousselin est son second roman. Il trace le destin de plusieurs personnages des années 90 aux années 2000, à travers différents lieux. du petit village de Quarré-les-Tombes dans le Morvan aux vignes bordelaises, de Paris aux États-Unis, de l'État d'Oklahoma, en passant par le Mexique à la Californie, le monde fourmille de vies éparses et la destinée des personnages s'entrelace petit à petit, d'abord subrepticement puis de façon plus équivoque. Cette façon de tresser les destins de personnes aussi éloignées m'a fait penser à la théorie des six degrés de séparation qui évoque la possibilité que toute personne sur le globe peut être reliée à n'importe quelle autre, au travers d'une chaine de relations individuelles comprenant au plus six maillons.

Même si j'ai passé un assez bon moment de lecture, souriant de bon coeur notamment aux références culturelles et politiques des années 90 dont il est fait mention, et trouvant l'idée de base du roman original et intriguant, je n'ai pas été emportée comme je l'escomptais. Toutes les critiques, excellentes et dithyrambiques sur ce livre, mentionnaient en effet un attachement immédiat aux personnages au point de rendre le livre addictif. Force est de constater que je suis restée quelque peu au bord, sans doute du fait d'une plume qui ne m'a pas particulièrement plu tant elle manque d'âme, de singularité, de caractère. Et ce malgré une structure narrative non linéaire, l'auteur jouant avec les époques en allers-retours incessants, déstabilisants au départ puis donnant enfin la seule originalité au récit, nous permettant de sauter sans arrêt d'époques, de lieux et de personnages, l'auteur tressant ces fils du destin en éléments de plus en plus serrés. Et ce malgré une construction efficace et impeccable.
Alors je suis un peu triste d'avoir été à contrecourant avec cette lecture où moi aussi j'aurais tant aimé prendre plaisir à virevolter entre des psychés et des univers culturels, des époques, et attendre avec intérêt la façon dont l'auteur allait bien pouvoir retomber sur ses pieds…

Le texte pourtant commence fort. Il s'ouvre sur un accident de voiture et les détails qui y sont apportés donnent le ton, et quel ton, en termes de détails précis, de séquence quasi cinématographique, d'émotions. Un zoom, un traveling, puis la ronde commence avec Isabelle et Dominique, couple français habitant ce petit village du Morvan et leurs deux enfants, Max et Marine. Quarré-les Tombes est une petite bourgade du Morvan marquée par l'Histoire, depuis le Moyen Âge jusqu'à la Résistance. le père d'Isabelle, Lucien, qui meurt en 2012, était justement un ancien résistant. Isabelle a beaucoup de mal avec son garçon et ce dès la naissance. Puis il y Clarice, petite amie de Max qui rêve de devenir une star hollywoodienne et Stéphane, étudiant décadent, petit ami de l'ambitieuse Marine. Voilà, en partie, pour les personnages français. Concernant la partie américaine, il y a plusieurs personnages masculins qui vont avoir leur rôle à jouer. Il y a notamment Steve qui est fan de séries. Ben, spécialiste en crimes au FBI, William au triste destin et père de Steve et Tyler, Candido d'origine mexicaine qui rêve d'une vie normale et douce en Californie, Bruno un producteur de films, et d'autres encore.
Quel est le lien entre tous ces personnages qui ont tous des rêves et des espoirs singuliers ? Comment va procéder l'auteur pour faire en sorte que leurs destins se croisent, se frôlent, voire se percutent ?

Si la plume de l'auteur m'a laissé de marbre, j'ai apprécié en revanche les différentes facettes du roman, sa facette sociologique sur la France des lisières, sur l'importance des réseaux sociaux et d'Internet, sur les migrants et leurs conditions de vie précaires, sa facette psychologique sur la solitude et les addictions, son côté historique avec la Résistance via la voix de Lucien, même si ces facettes sont simplement abordées, elles le sont avec subtilité et sont naturellement insérées au récit.
C'est ainsi une fresque colorée au style moderne qui raconte le monde occidental de ces trente dernières années entre terrorisme, solitude, piraterie informatique et ubérisation de la société.

Beaucoup parlent d'une oeuvre-monde à propos de la géométrie des possibles, je peux le comprendre même s'il manque pour moi cet ingrédient essentiel qu'est la plume de l'auteur, la beauté d'un style, l'étonnement de tournures de phrases, le caractère d'une plume qui sait camper une ambiance. Sinon, en termes de structure narrative et de construction et dans la façon d'approcher des problématiques sociales contemporaines, ce livre est très bon et permet de passer un agréable moment de lecture.

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Coup de coeur !
● « – […] C'est l'objet de mon roman : à travers cet homme, je voulais parler d'un esprit, un esprit très français. L'esprit de résistance.
– Et c'est justement là où votre livre devient un grand texte. Vous ne racontez pas seulement l'histoire de ce Lucien, mais vous allez bien au-delà, vous disséquez la psyché française. Et pour ce faire, vous remontez jusqu'à Charlemagne, si je ne me trompe pas…
– Oui, pratiquement, sourit Stéphane.
– Pour finir avec les Gilets jaunes. »
● 2012. Quarré-Les-Tombes, en Bourgogne, dans le Morvan. On enterre Lucien Michot ; son gendre Dominique Richard est présent aux funérailles, mais pas sa fille Isabelle, divorcée de Dominique. Ses petits-enfants Maxime, dit Max, et Marine sont là aussi. Max est en Terminale, mais ne pense qu'à s'envoyer en l'air avec sa copine Clarice qu'il méprise et qui, elle, ne rêve que d'être une grande actrice hollywoodienne. Max lui fait croire qu'il peut lui ouvrir des portes grâce à son beau-père qui est producteur à Los Angeles. Marine est en prépa HEC à Paris ; elle travaille beaucoup et a un copain qui est dans la même classe, Stéphane. Elle n'est pas amoureuse de lui, mais fait avec en attendant mieux. Dominique est fan de foot, notamment de l'AJ Auxerre. Puis nous allons explorer le passé, en 1995, époque de la jeunesse de Dominique et Isabelle, et faire la connaissance d'autres personnages sur le continent américain.
● Je suis complètement admiratif du brio narratif de ce deuxième roman d'Edouard Jousselin (je n'ai pas lu le premier). Les fils narratifs paraissent d'abord épars et on se demande comment l'auteur va pouvoir rassembler tous ces personnages, d'autant que leurs relations n'apparaissent pas avant la moitié du livre. ● de même, il y a un va-et-vient brillant entre les époques, en gros les années 1990 et les années 2010 (avec de petites incursions au Moyen Âge et même dans l'Antiquité !). Beaucoup d'auteurs font cela, mais peu le font avec autant de finesse et de subtilité. ● L'apparence est désordonnée, mais en fait on se rend compte que tout est très savamment orchestré, y compris la résurgence de l'année 1993 ou l'apparition de certaine lettre à la fin. ● L'architecture narrative est remarquable et permet au lecteur de découvrir des secrets peu à peu révélés, sans que cela paraisse le moins du monde artificiel. ● L'ambitus temporel permet à l'auteur d'embrasser les événements des trente dernières années, sur le plan de la politique française comme étatsunienne, des faits de société, du terrorisme, des meurtres de masse, des épidémies… ● le roman est addictif, même au début lorsque l'auteur parle de personnages sans qu'on comprenne ce qui les lie car il a le don de les rendre attachants et on a envie d'en savoir plus sur eux. C'est un captivant tourbillon de destins individuels qui s'entrechoquent avec les événements du monde. ● le foisonnement de personnages ne nuit pas du tout à la compréhension car ils sont tous très bien caractérisés et on les garde en mémoire dès qu'ils apparaissent. ● Edouard Jousselin parle avec un égal bonheur des territoires morvandiaux laissés pour compte, de la grande viticulture bordelaise, de la téléréalité, d'un migrant mexicain et de la poudre aux yeux d'Hollywood… ● C'est un superbe roman au souffle magistral dont on lit les six cents pages en apnée. Quelle ambition et quelle réussite ! Même le titre est magnifique ! Je remercie Chantal @kittiwake de me l'avoir fait découvrir et à mon tour je le conseille sans réserve !
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Le roman est construit sur une convergence des parcours, si différents les uns des autres qu'il est impossible de deviner comment ces destins se croiseront un jour. Qu'est-ce qui relie un émigré mexicain, des étudiants américains en couple, une jeune mère exténuée, un père de famille et une jeune française qui rêve d'une carrière cinématographique à Hollywood ? C'est d'autant plus mystérieux que la chronologie s'amuse à brouiller les pistes…


C'est en tout cas fort réussi, terriblement addictif, et malgré le nombre de pages, aucun ennui ne se fait sentir. Sans doute en raison de la précision des portraits, et de l'intérêt que suscite chaque personnage, alors que chaque situation renvoie à des thèmes de société bien actuels et sujets à débat, entre autres le darkweb, la télé-réalité, le terrorisme, le racisme et les rêves qui s'échouent à peine entrevus.Des destins que chacun croit avoir choisis, et qui se heurtent à une fatalité aussi perverse qu'aveugle …

Un deuxième roman envoutant et un premier coup de coeur pour cette rentrée d'hiver !

608 pages rivages 3 janvier 2024

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Un panorama saisissant de notre époque
C'est avec un roman choral qu'Édouard Jousselin confirme son talent à construire des histoires foisonnantes. de Los Angeles au Morvan, il va peindre une riche galerie de personnages qui vont lui permettre d'analyser avec acuité nos sociétés contemporaines.

Le roman s'ouvre sur une scène d'accident mortel sur l'autoroute 101 aux abords de Los Angeles. Il a coûté la vie à un producteur de cinéma.
Puis on bascule en février 2012, dans l'église de Quarré-les-Tombes dans le Morvan où l'on enterre l'un des derniers résistants de la Seconde Guerre mondiale. Au sein de la maigre assemblée, on compte Dominique son gendre et ses petits-enfants Maxime et Marine. Attardons-nous un peu sur cette dernière. Elle a fait le voyage depuis Paris où elle travaille d'arrache-pied pour intégrer une classe préparatoire. Joignant l'utile à l'agréable, elle révise avec son amant Stéphane, mais elle sait déjà que leur histoire ne durera pas.
En parlant de révisions, Maxime laisse entendre qu'il a travaillé sa philo avec Clarice, alors qu'ils n'ont fait que baiser. Il faut dire qu'au sortir de l'adolescence, leur libido est un élément primordial de leur vie provinciale. Clarice se rêve actrice et remercie Max qui vient de lui affirmer qu'il a envoyé sa vidéo à son beau-père, producteur à Hollywood. Un mensonge qui lui permet de voir Clarice fondre d'amour pour lui. le jeune homme, quant à lui, arrondit ses fins de mois sur internet. le geek a mis au point un système d'arnaque qui permet à ses clients d'accéder à des sites pornos qu'il déverrouille et rassemble.
Pendant ce temps, à Tulsa en Oklahoma, les frères Steve et Tyler assistent à la projection du troisième film de la série The last Fighters, une franchise au succès planétaire dont on suivra la production jusqu'à l'opus 4 intitulé Aux racines de la colère.
Mais auparavant, on aura refait un voyage dans le temps, en avril 1995. L'occasion de découvrir les vies des parents et grands-parents des personnages si bien dépeints dans les chapitres initiaux. On y découvre notamment Isabelle que la naissance de Maxime traumatise, son père parti commémorer la fin de la Seconde guerre mondiale sur les Champs Élysées et croiser Mitterrand et Chirac qui vient tout juste d'être élu, tandis qu'aux États-Unis un attentat vient de souffler un immeuble fédéral d'Oklahoma City. Parmi les fonctionnaires blessés figure Bill, le père des deux frères, qui sera marqué à vie physiquement, mais surtout psychologiquement.
Si la galerie de personnages est loin d'être complète, elle permet cependant de bien comprendre l'intention d'Édouard Jousselin, tirer des fils entre les différents personnages et les différentes époques, développer cette géométrie des possibles –un excellent titre – et ce faisant explorer la complexité de notre époque. Car à l'image des acteurs de ce roman choral, on va constater combien les années vont les changer, que la vérité de l'instant n'est plus celle de ceux qui vont suivre. Et que l'analyse à chaud n'est pas forcément la plus pertinente. le 11 septembre 2001 en est l'exemple le plus saisissant, parce qu'il «se vit en mondovision comme une finale olympique.» L'événement va saisir les personnages quasiment en direct. «Ben Crawford à Los Angeles, Jessica Dahlgren à Paris, Cándido Rincón dans sa loge de gardien de l'Arroyo Blanco, Isabelle et Dominique Richard à Quarré-les-Tombes, Lucien Michot sur son canapé, William et Lucy Smith dans le matin de l''Oklahoma, Bruno Landisier quelque part sur la route d'un festival du film ou sur un plateau de tournage, tous reçoivent un flux d'ondes décrivant la trajectoire d'hommes se jetant d'une tour en flamme pour s'écraser à une vitesse folle sur la dalle new-yorkaise. Aucun ne peut détourner le regard ni éteindre son émetteur radio. Aucun ne comprend complètement ce qui se déroule. Aucun n'ose y croire.»
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. En vous y abonnant, vous serez par ailleurs informé de la parution de toutes mes chroniques.


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Qu'ont en commun une famille du Morvan, un producteur américain, un flic du FBI, un migrant mexicain ? Pour le savoir, il vous faut lire les 600 pages de la géométrie des possibles. Un roman choral palpitant , une photographie de la France (et des États Unis) de ces 30 dernières années (avec de nombreux rappels à notre mémoire collective).
Bien que dense et d'une chronologie atypique, le récit est totalement addictif grâce à des personnages bien croqués, attachants, faillibles et des problématiques societales (précarité, dark web, racisme) finement mises en lumière et analysées.
Enfin, chapeau bas à Edouard Jousselin pour sa maitrise de la construction (et de la narration) : les trajectoires des uns et des autres s'emboîtent et se télescopent avec une vrai maestria pour former un texte puissant.
Une fresque envoûtante.
Et un très joli ❤️
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Le hasard, c'est peut-être le pseudonyme de Dieu quand il ne veut pas signer. (Théophile Gautier).


«La géométrie des possibles», Édouard Jousselin (Éditions Rivages, 2024), est le premier roman publié par ce jeune auteur, très talentueux.

Édouard Jousselin nous plonge dans une fresque humaine captivante, où les destins de plusieurs personnages se croisent et s'entrelacent sur plusieurs décennies.

Des brumes du Morvan aux plages californiennes, des profondeurs du Darkweb aux paillettes d'Hollywood, Jousselin tisse une toile narrative complexe et fascinante, où le hasard et la fatalité se rencontrent dans une danse envoûtante.

Cette intrigue palpitante, qui nous transporte à travers le temps et l'espace, excite l'intelligence du lecteur, tout en le maintenant en haleine jusqu'à la dernière page.
 
Au-delà d'intrigues  palpitantes, Jousselin explore des thèmes universels et intemporels qui résonnent profondément avec le lecteur, et plus encore exacerbés dans nos sociétés post modernes : l'amour, la perte, le mensonge, la violence et la quête de sens et d'identité sont autant de fils conducteurs qui traversent le roman et nous invitent à réfléchir à la condition humaine. Mais également, le  pouvoir, l'ambition et ses dangers potentiels, les liens complexes entre la place du hasard et le déterminisme dans nos vies, les dangers du monde numérique et de la société de consommation.

Au fond, Jousselin ne se contente pas de raconter une histoire, il nous offre une véritable réflexion sur la vie, ses contradictions et ses complexités, grâce à un talent indéniable pour conter des histoires. Son style est précis, élégant et maîtrisé, capable de décrire avec justesse, les émotions les plus complexes et de donner vie à des personnages inoubliables.

L'intrigue est rythmée et ponctuée de rebondissements inattendus qui nous transportent dans un univers où tout est possible.

L'un des points forts du roman réside dans la richesse et la complexité des personnages. Jousselin nous offre une galerie de portraits saisissants, loin des clichés et des archétypes. Qu'il s'agisse d'une jeune femme en quête d'identité, d'un hacker talentueux ou de personnages cyniques et corrompus. Mais chaque personnage est développé avec profondeur et humanité dont leur histoire permet de s'identifier, voire de s'attacher à eux.
 
Cependant le récit n'est pas exempt de défauts. Certains passages peuvent sembler longs et digressifs, et la complexité de l'intrigue peut parfois dérouter le lecteur. de plus, la fin, bien que surprenante, peut laisser un sentiment d'inachevé.
 
Malgré ses quelques imperfections, je conseille tres vivement la lecture de « La géométrie des possibles », un roman exceptionnel, une ode à la vie et à ses contradictions, une exploration des profondeurs de l'âme humaine et une réflexion puissante sur le destin et le libre arbitre.

Bonne lecture.

Michel.

 

 

 

 

 

 




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Mon premier gros gros coup de coeur de cette rentrée d'hiver 2024 !
Des familles, qui, a priori n'ont aucun point commun (pays différents, milieux sociaux différents, centre d'intérêts différents) et très peu de chances de se rencontrer... et pourtant.
Une trame narrative totalement addictive grâce à la fois à des personnages tellement attachants et si bien campés qu'on a l'impresion de les connaître , mais aussi à des titres qui sont des dates auxquelles on suit chacun sur son propre parcours et qui ne sont pas dans l'ordre chronologique. J'ai aimé aussi que l'on suive plusieurs membres d'une famille sans savoir qui est le personnage auquel on doit prêter le plus attention. Et puis des coups de maitre sur les croisements de destins des personnages. L'ensemble est vraiment génial, on se laisse prendre au jeu du « je lis encore un peu pour savoir ce qu'il va lui arriver à lui, puis à elle, puis à eux » et on avale les 600 pages en un temps record et une jubilation intérieure que je n'avais pas ressentie à la lecture d'un roman depuis très longtemps ! Une vraie saga en un volume. Une vraie réussite ! Merci Monsieur Jousselin et surtout bravo !
Une fois commencé, vous ne le lâcherez plus ! Un roman dont on devrait entendre parler !
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La 4ème de couverture annonce un roman choral où on va chercher le fil invisible reliant de multiples personnages. « Des forces mystérieuses tressent leurs vies pour les plonger dans la tourmente, hantées par l'ironie de l'Histoire, son cours impitoyable. » L'ambition, le mensonge, la fatalité les attendent au tournant. Il est ensuite question de ce deuxième roman, qualifié d'audacieux et addictif, confirmant le talent d'Édouard Jousselin. Avant l'envolée lyrique qui en promet trop à mon avis : « Sous sa plume se déploie une oeuvre-monde foisonnante, chronique vertigineuse de notre époque. »
A ce stade j'étais plutôt inquiet. Il faudrait éviter de lire les 4ème de couverture et celle-ci particulièrement.

Heureusement c'était le premier roman choral lu dans le cadre du Prix du livre Orange. Il y en avait plusieurs. Ce type de roman, s'il confirme le talent des auteurs pour entremêler des histoires, n'est pas le plus facile à lire, encore moins à analyser puisqu'on est très occupé à suivre les personnages. Ici on fait la connaissance avec une belle brochette d'individus originaires de France (Morvan ou bordelais), des États-Unis et du Mexique, pour qui la vie ne va pas être facile.

Casting en France : Max est hacker, il gagne de l'argent via le dark web et les sites pornographiques. Son curieux grand-père, résistant (ou se faisant passer comme tel) participe à toutes les commémorations officielles, côtoyant l'élite. Marine, la soeur de Max, est en prépa avec Stéphane (que l'on retrouvera auteur à succès sans scrupule). Clarisse, petite amie de Max au début, est une starlette de la télé-réalité prête à tout pour percer. Bruno, amant d'Isabelle, la mère de Max, fait des études de cinéma. Casting aux États-Unis : Benjamin (et ses « ambitions académiques ») devient directeur au FBI. Il est amoureux de Jessica, sa colocataire, qui partira enseigner à Paris. William, dit Bill, est le père de Steve et Tyler. Bill sera gravement handicapé suite aux attentats d'Oklaoma city en 1995. Je ne dis pas que Steve à la dérive deviendra parricide, ce serait divulgâcher... Càndido est un exilé exemplaire cherchant une intégration improbable, alors que sa femme America est restée au Mexique (notez l'ironie des prénoms...).

La première partie permet de faire connaissance avec les personnages avant que le récit ne prenne son envol. Il y a ces listes qui indiquent que les biens et la nourriture sont omniprésents pour ceux dont on raconte l'histoire, liste de marques décrivant mieux les individus que leurs traits et caractères, formant une toile de fond de l'environnement économique. Celui-ci est là, on peut le relier à l'aliénation, le vide de la plupart des personnages… La construction est complexe et ne laisse que peu de place pour creuser les caractères qui apparaissent flous.

On traverse l'histoire sur plusieurs décennies en quelques lignes lapidaires, sans nuances, sur les gilets jaunes, sur Chirac, Mitterrand, la cgt, la sncf... On s'attarde un peu plus sur les attentats d'Oklahoma et ceux du 11 septembre, mais ces éléments sont donnés comme des titres sur les chaînes d'info en continu, comme si pris dans la tourmente, plus personne ne saisit les causes et les enjeux.

Comme il le dit dans une interview, l'auteur est parti d'histoires qui l'ayant accompagné. Il s'est inspiré de son parcours, particulièrement à l'aise pour parler des grandes écoles, d'un milieu ayant accès à des positions élevées dans la société… dont la traversée de l'océan est une simple routine. Quelle place prend Édouard Jousselin dans tout ce discours ? Faut-il lire au second degré ou interpréter à notre guise alors que les biais et raccourcis cognitifs sont innombrables... Les clichés sont-ils ceux des personnages alors que certains sont indiqués en italique et d'autres pas, le lecteur ne pouvant faire la différence entre ce qui sort de la bouche des personnages et ce qui émane du narrateur, bien présent derrière tout cela.

« Par le truchement de l'acte littéraire, par le coup de plume précis et cinglant, et en prenant le prétexte d'un personnage, ce Yannick qui est mon double, j'ai désiré viser un système tout entier. J'ai voulu taper fort. »

C'est Stéphane qui dit cela interviewé par Matthieu de Bailly pour l'émission télévisée Mots du monde qui le relance ensuite :

« Et ceux qui vous regardent, mon cher Stéphane, ce sont les jurys de prix littéraires. Vous êtes de toutes les listes, et l'automne s'annonce des plus fastes. »

La construction du livre a bien des qualités mais je suis resté perplexe devant ces destins issus d'un déterminisme, d'une fatalité dont on ne pourrait pas vraiment s'extirper. J'ai souvent pensé au malaise éprouvé lorsque j'ai lu Michel Houellebecq écrivant sur des situations possibles, réelles peut-être, sans que je n'arrive à accrocher.

J'ai lu ce roman dans le cadre de ma participation au jury Orange du livre 2024. C'est un des 20 livres de la première sélection établie lors des échanges et votes du 26 mars. L'avez-vous lu ?
Lien direct vers le blog, avec illustration, ci-dessous

Lien : https://clesbibliofeel.blog/..
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Le roman choral est un exercice particulièrement difficile. Il faut parvenir à tirer des fils qui a priori n'ont pas vocation à tisser la même toile, les réunir sans casser la trame, dessiner des motifs différents et parvenir quand même à l'harmonie. Alors quand on tombe sur un exemple parfaitement exécuté, suffisamment addictif pour que ses 600 pages soient englouties en trois jours on a juste envie de refiler le bon filon à tous les copains lecteurs. L'année commence bien.

Dans ce roman ambitieux, Edouard Jousselin nous promène entre le Morvan, Los Angeles, Paris et l'Oklahoma, multiplie les sauts dans le temps - grosso modo entre les décennies 1990 et 2010 - et parvient à capturer notre époque avec une acuité mordante. Ses points de repère sont des moments phares de notre histoire récente - périodes d'élections présidentielles, attentats spectaculaires et meurtriers - qui impactent le collectif autant que les individus. Les personnages qu'il met en scène ont leurs propres ambitions, agendas, aspirations mais ne peuvent s'extraire d'un destin plus global de la communauté humaine à laquelle ils appartiennent. Ceux que l'on croise ici n'ont a priori rien en commun : une mère de famille qui s'ennuie au fin fond du Morvan, un spécialiste de cyber criminologie au FBI, un supporter de l'AJ Auxerre, un migrant mexicain, un producteur de cinéma, un père de famille américain, une aspirante comédienne ou encore quelques étudiants ambitieux en école de commerce. Pourtant, sur un rythme fou et dans une spirale de plus en plus addictive, l'auteur nous les rend bientôt si familiers, nous intéresse tellement à leurs histoires qu'on a l'impression de les avoir toujours connus. L'intrigue se déplace comme une boule de flipper allumant à chaque fois un coin de la scène, navigant à travers les faux-semblants mais prenant le temps de focus suffisamment incarnés pour donner corps aux acteurs et aux situations. de l'élection de Jacques Chirac aux ronds-points des gilets jaunes, de l'attentat d'Oklahoma City à l'élection de Donald Trump, les destins individuels tentent de garder le cap chacun dans son univers.

Lucidité et férocité sont de la partie, carburant essentiel d'un jeu dont aucun des protagonistes ne possède toutes les cartes. La toile politique et sociétale structure l'ensemble en multipliant les angles de vue sous l'égide d'ancêtres morts et enterrés depuis longtemps, cohorte que chacun sait devoir rejoindre tôt ou tard. Mais pas avant de s'être beaucoup démené, agité dans tous les sens. Rendons grâce à l'écrivain d'en sublimer si bien la matière.

"Il existe une hygiène du mensonge. Il suffit de répéter les phrases, comme une récitation de cours élémentaire. Après un certain temps, mentir ne coûte plus rien. Cela devient aussi facile que de dire la vérité. Plus tard encore, le vrai et le faux se dissolvent l'un dans l'autre, comme deux solubles dans un même vase. Ce n'est pas qu'ils sont indissociables, non, ils disparaissent tout simplement, et laissent place à quelque chose de bien plus beau : une histoire."
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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