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Naòmi Morgan (Traducteur)
EAN : 9782330137359
304 pages
Actes Sud (07/04/2021)
3.5/5   14 notes
Résumé :
À l’aube du XXe siècle, la guerre fait rage en Afrique du Sud, où l’armée britannique parque femmes et enfants boers dans des camps de concentration. En 1901, l’une de ces prisonnières, Susan, âgée de 17 ans, est déclarée morte après avoir été violée et sauvagement battue par des officiers. Recueillie et soignée par un couple basotho, elle se rétablit lentement et parvient à gagner Le Cap sous une fausse identité. C’est le début d’un long périple à travers le monde,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Fille à soldats raconte l'histoire incroyable de Susan Bell. Bien que François Smith l'ait romancée pour s'attarder sur l'intime,cette histoire est bien réelle. Fille de métayers en Afrique du Sud,elle est Boer et à ce titre vivra dans sa chair,son coeur et son âme la barbarie de la guerre anglo- Boer. Elle a 17 ans en 1901 lorsqu'elle tombe du corbillard qui la conduit avec d'autres au cimetière. Elle a pourtant déjà vécu le pire dans le Camp de concentration de Winburg. C'est un Mosotho qui la ramasse,la cache dans une grotte pour la soigner avec sa femme. Son périple la conduira ensuite au Cap puis aux Pays bas où elle deviendra psychothérapeute. Infirmière psychiatrique lors de la première guerre mondiale,elle part à la rencontre des " névrosés des tranchées" et retrouvera l'un de ses bourreaux...mais son parcours ne s'arrête pas là.
C'est un livre très fort mais que j'ai trouvé difficile à lire. La souffrance est omniprésente car la guerre plane en permanence ,non pas par la description de batailles ou de stratégies militaires mais par son impact destructeur .
Le travail de l'auteur est remarquable parce qu'il maîtrise autant le sujet politique, historique que la psychanalyse.
Si j'ai trouvé complexe ma lecture cela est également dû à la façon dont F.Smith donne vie au personnage. le traumatisme que Susan a subi et sa quête, inconsciente pour finir " sa propre guerre" en font une femme que j'ai ressentie toujours en décalage,perdue entre réalité et ressenti, perturbée par le regard de l'autre,envahie de peurs et d'interprétations. Un peu comme si elle flottait en permanence autour d'elle même jusqu'au moment où elle peut se réapproprier son histoire qu'elle remonte à contre courant,de la mort vers la naissance,de l'obscurité vers la lumière.
L'émotion n'est pas manifestée et cela semble évidemment une volonté de l'auteur,voire un immense talent car par son écriture il réussit à nous faire ressentir la mise à distance vitale de cette femme envers ses affects si elle veut survivre à ses peurs.
F.Smith offre un bel hommage aux descendants des afrikaners en retraçant cette histoire qui relate le drame d'un conflit peu abordé,me semble t'il...
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Voici un roman qui avait tout pour me plaire.
Le romancier sud-africain, François Smith, raconte l'histoire d'une jeune fille internée dans un camp de concentration lors de la seconde guerre des Boers, violée sauvagement par des officiers de l'armée britannique, laissée pour morte, recueillie par deux Noirs qui la sauveront, la soigneront et l'aideront à s'enfuir, devenue infirmière en psychiatrie, qui, par le plus grand des hasards (?) se retrouvera face à l'un de ses agresseurs, hospitalisé pour névrose des tranchées dans le service où elle officiait durant la première guerre mondiale. Quelle chance, si on peut appeler cela une chance, y avait-il pour qu'une jeune femme se trouve face à son bourreau, 16 ans après, à des milliers de kilomètres où elle a vécu son calvaire? C'est en tout cas un excellent point de départ pour un roman ou un film (d'aucun se souviendra de la jeune fille et la mort). Sauf qu'il s'agit d'une histoire vraie, celle de Susan Nell. C'est à partir de cet épisode que François Smith tisse le canevas de son histoire, alternant les époques et les points de vue, entre une narration à la première personne et un récit à la troisième, comme pour permettre à son personnage de prendre de la distance et de la hauteur quant à son propre vécu.

L'histoire, le point d'ancrage de l'histoire (je vous invite d'ailleurs à ne surtout pas oublier de lire la note de l'auteur à la fin, mais après avoir lu le roman) sont captivants. Sous couvert de raconter une histoire, l'auteur nous emmène dans les méandres de la psyché, voire de l'âme. Il s'agit bien entendu d'un roman, et, mis à part les grandes lignes, on ne sait trop ce qui relève de la réalité ou de la fiction, mais on ne peut s'empêcher d'éprouver de l'empathie et du respect pour cette infirmière qui, très courageuse, n'en reste pas moins très humaine. Je ne pouvais m'empêcher de me demander ce que j'aurais fait, moi, à sa place. Aurais-je fait comme si de rien n'était? Aurais-je voulu ne pas le reconnaître? Aurais-je tout fait, au contraire, pour que lui soit sûr de me reconnaître et de savoir qu'il était désormais à ma merci? Voici quelques-unes des questions que je me suis posées tout au long de ma lecture, faisant bien malgré moi, et en même temps, l'expérience de la vengeance et de la résilience.

Même si c'est très bien écrit - et je tire aussi mon chapeau à la traductrice, on les oublie bien souvent - c'est peut-être à ce niveau que mon enthousiasme retombe.
Le roman est court, un peu moins de 300 pages, mais j'ai dû faire une pause durant ma lecture pour reprendre ma respiration. Non pas à cause de l'histoire, comme j'aurais pu le craindre, mais à cause de la narration que j'ai trouvée un poil trop complexe. J'aime la belle littérature - et il en est bien question ici; j'aime les changements de focalisation - je trouve que cela apporte souvent de la richesse à l'histoire; j'aime l'alternance des époques et ne cherche pas à ce que le récit soit linéaire. Oui, j'aime tout cela mais quand la lecture reste fluide. Et même si j'ai compris l'intention de l'auteur - en tout cas celle que je lui prête, à tort peut-être - il m'a perdue à certains moments et je crois que sa narration en rebutera plus d'un. Et c'est bien dommage car, je me répète, la plume est excellente.

En résumé, une histoire, de l'Histoire, une héroïne à plusieurs facettes, un roman qui permet de réfléchir sur les violences faites aux femmes, se rendre compte, même si on le sait déjà, que ce n'est pas nouveau; un roman sur la (re)naissance et sur la capacité de l'être humain à se remettre de ce qu'un autre être humain peut lui faire subir.
Un roman tout en nuance servi en prime par une plume affirmée même si elle peut paraître quelque peu abrupte à première vue.
Un roman qui a le mérite d'exister et de mettre en avant des pans historiques qu'on préférerait ne pas savoir.

Lu en juin 2021
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Un lent et long processus de résilience

Afrique du Sud 1901. La guerre des Boers
Dans un camp de concentration où l'armée anglaise parque les Boers, Suzan, 17 ans est sauvagement agressée et violée par des soldats britanniques. Laissée pour morte, jetée dans la charrette des morts, elle est recueillie dans une grotte par un couple de Cafres qui la soignent grâce à des médecines traditionnelles et l'aident à gagner la ville du Cap. Là, de bons samaritains l'aideront à se reconstruire. Après des études de psychologie aux Pays Bas, commencera alors pour elle une autre vie :celle d'une d'infirmière psychiatrique oeuvrant dans différents pays .
En 1918, envoyée dans un hôpital du Devon en Angleterre pour y soigner les névrosés des tranchées, elle découvre que l'un des malades qui lui sont confiés est l'un de ses bourreaux.

C'est autour de cette scène que François Smith organise tout le roman qui retrace le parcours de son héroïne . Qu'il retrace, ou plutôt qu'il évoque, dans un récit éclaté par touches successives, sans souci de chronologie . La rencontre avec le prédateur a réouvert le traumatisme du viol et ébranler le fragile équilibre que Suzan avait su trouver .

Se plaçant le plus souvent du point de vue intérieur de la victime, le narrateur soumet le lecteur au parcours d'une pensée qui, en un mouvement pendulaire, oscille entre passé et présent. Des bribes de souvenirs tentent de refaire surface, des images récurrentes, floues de l'agression et de la grotte où elle a été « rescuscitée » reviennent la hanter. Tout ce qui s'est déposé « comme un sédiment au fond de son esprit » se presse, se bouscule, remonte et frappe à la porte de sa conscience.

Un roman, comme le signale la postface, inspiré de la vie remarquable de la psychologue Suzan Nell.
Un roman grave, dense, à la fois troublant et poignant notamment lorsque Suzan se sentant marquée à jamais par le poison de la souillure d'avoir été une « fille à soldats , une putain » souffre à se comporter normalement avec des hommes « je pue la saleté et la pourriture du péché » 
Un roman qui se mérite ! le lecteur, immergé lui aussi dans le labyrinthe des « eaux troubles de la mémoire » de Suzan, peut se sentir désorienté, au milieu d' épisodes d'une vie partagée entre Afrique du Sud , Pays Bas, Angleterre mais il ne peut que sortir enrichi de cet ouvrage qui explore le lent et long processus de résilience de celles qu'on qualifie souvent de victimes collatérales des guerres et qui gardent dans leur âme et dans leur corps les stigmates de leur avilissement .
Je remercie Lecteurs.com de m'avoir permis la lecture de ce roman dans le cadre du Cercle livresque


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L'histoire de Fille à soldats est incroyable mais ... vraie, du moins pour l'essentiel, l'auteur sud-africain François Smith ayant utilisé la licence du romancier pour s'introduire dans les pensées de son héroïne au destin invraisemblable. Placée en camp de concentration par les anglais durant la seconde guerre des Boers (1899-1902), Susan Nell, 18 ans, a été violée par des officiers puis, tenue pour morte, mise sur une charrette en direction du cimetière. La suite se découvre dans le livre, de façon parcellaire d'abord, dans un récit qui avance alternativement entre L'Afrique du Sud puis, près de 15 ans plus tard, aux Pays-Bas et en Angleterre quand Susan, devenue psychothérapeute, soigne des soldats frappés par la "névrose des tranchées". François Smith ne fait rien pour faciliter la tâche du lecteur, épousant les pensées d'une jeune femme traumatisée dont les souvenirs ne reviennent que par bribes, alors que ses cauchemars enfouis reviennent au moment où elle se confronte à ceux des combattants de la première guerre mondiale. Sa mémoire est un puzzle qui se reconstitue peu à peu et le livre suit cette reconstruction fragile et apeurée. le roman est très sombre et exigeant, parfois lyrique, toujours troublant et se poursuit même brièvement jusqu'aux années 50. La postface, très claire, précise les étapes de la vie de Susan Nell dans une chronologie succincte. Attention à ne pas la lire avant de commencer le roman, cela aurait pour effet d'annihiler les surprises d'un drame bâti comme un thriller déstructuré et à la combustion lente.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Fille à soldats est la biographie romancée de Susan Nell une jeune fille qui a connu les camps pendant la guerre de Boers.
Devenue infirmière psychiatrique en Hollande, elle se fait muter pendant la 1ère guerre mondiale dans un hôpital anglais où elle retrouve un de ses bourreaux. Cette rencontre permet d'aborder à la fois le passé et la succession de phases de reconstructions quand on subit une telle horreur. J'ai beaucoup aimé ce récit qui aborde un sujet encore tabou, la guerre entre Européens en Afrique du Sud. Tous les Afrikaners n'ont pas toujours été du même côté et des actes horribles ont été commis. La guerre est abordée sous forme de flashback ce qui permet de mettre en avant la manière dont on peut continuer à vivre après un traumatisme. L'histoire est racontée avec beaucoup de sensibilité et de poésie. Susan est une femme avec une force de caractère et une envie de survivre impressionnante. Tout au long du roman, on découvre à quel point la reconstruction après une telle horreur est un processus perpétuel mais qui n'empêchera pas Susan de vivre sa vie. C'est un roman intimiste très touchant et qui arrive à trouver un équilibre entre expérience personnelle et problématiques universels. La volonté d'avancer de Susan est impressionnante tout comme sa capacité d'auto-préservation. Cette histoire est bien loin d'un récit du vengeance que j'imaginais avant de le lire. Les retrouvailles avec son ancien bourreau sont le prétexte pour aborder le cheminement pour se reconstruire et continuer sa vie. C'est une biographie poignante dont j'ai apprécié la découverte.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
" je pense qu'une partie du problème réside dans le fait que les gens se définissent comme étant en guerre et rien d'autre. Alors l'ironie, c'est qu'ici vous devez les extraire de la guerre pour qu'ils s'y embourbent de nouveau".
" Du moins les soutenir psychologiquement au point de maintenir une distinction entre eux même et la guerre."
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Elle est partie à la recherche d’une personne à qui parler, à qui elle pourrait poser la question, mais tout le monde semblait soudain occupé par des affaires qui ne pouvaient être interrompues que sous peine de mort. Elle faisait face à un mur de dos gris.
C’est cela cette guerre, pense-t-elle, un spectre dans le brouillard, rien d’autre. Ce n’est pas ma guerre à moi. Rien de tout ceci ne peut m’enlever quoi que ce soit. Je vis, et mon rôle est de faire triompher la vie. C’est pour cela que je suis venue ici. Mais la vision du vaisseau fantôme ne la quitte pas et, chose curieuse, ne la bouleverse pas non plus.
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Au mo­­ment de descendre à terre, elle avait ressenti quel­que chose de familier dans ce pays où tout lui était totalement étranger, elle avait eu le sentiment que quelque chose – ou quelqu’un – l’attendait quelque part derrière une façade, une porte ou une clôture. Et voilà que cette sensation, de plus en plus forte, avait conduit son regard directement à l’oreille. Voilà ce qu’elle avait vu, tout d’abord : l’oreille. Et sa morsure, comme une entaille sur l’oreille d’un mouton. Là où l’on s’attendrait à voir le doux gonflement du lobe, le repli courbe s’estompe jusqu’au cou.
 
C’est sa marque à elle.
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Je sais à présent ce que j’ai vu. Mes propres pensées sanglantes qui sortent de ma tête, qui bouillonnent, qui jaillissent. J’ai déjà essayé de crier, ça fait si mal, mais je ne peux pas, parce que je suis allongée ici. Voilà ce que j’ai vu. Je suis couchée comme un mouton abattu aux veines bleues qui suintent et se renflent sur la panse blanche et visqueuse, une lame qui grince, qui grince, une biscotte qui tombe sur le sol en bouse de vache et qui s’effrite à l’endroit où mes orteils sont censés se trouver, ma bouche est fourrée de miettes pointues.
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Elle connaît l’excitation et la témérité innées que suscite l’union de l’homme et de la machine. Doucement maintenant, doucement… Elle sent des picotements lui gagner les côtes et lance un coup d’œil vers Jacobs. Elle se rend compte qu’il la surveille depuis le début, mais il détourne vite les yeux vers ce qu’il imagine avoir attiré son attention. Il explore les alentours du regard et finit par répondre, en hochant la tête : “Non, je ne sais pas, ce sont des maisons ordinaires.”
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