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Patrick Honnoré (Traducteur)
EAN : 978B0D6WS7KGD
Belfond (22/08/2024)
3.5/5   4 notes
Résumé :
Yayomanekufu est né sur l'île de Sakhaline, au milieu de sa tribu, les Aïnous. Orphelin très jeune, il a été confié à des membres de la famille et a subi le déracinement à Hokkaido imposé par les Japonais. Pour échapper au racisme et à l'oppression, il a pris un nom japonais, changé ses papiers, tenté de se fondre dans la masse. Mais il n'a jamais oublié ses racines et rêve de retourner sur la terre de ses ancêtres, à Sakhaline.
Bronislaw Pilusudski est polon... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Pendant la seconde moitié du 19ème siècle, l'île de Sakhaline, à l'extrême est de la Russie et au nord du Japon, a fait l'objet de partages et de disputes incessants entre ces deux pays, qui ne se préoccupaient guère de demander leur avis aux différents peuples autochtones occupant l'île.

Parmi eux, les Aïnous, qui vivent principalement de la pêche, dans le sud de Sakhaline.

Yayomanekf est un Aïnou né sur l'île, mais a été « déplacé » par les Japonais, avec la majorité de la population aïnoue, sur Hokkaido. « Japonisé » malgré lui, il n'aura de cesse de retourner sur sa terre natale.

Pendant ce temps-là, à l'autre bout de l'Empire russe, Bronislaw Pilsudski, Polonais né dans l'actuelle Vilnius, a dû lui aussi renoncer à sa langue maternelle en raison de la politique russe d'assimilation. Nationaliste et socialiste, il est impliqué dans un complot contre le tsar, et se voit condamné à quinze ans de travaux forcés sur l'île de Sakhaline.

Sur place, pendant ses rares moments de temps libre, il rencontre les Aïnous, s'intéresse à leur culture et leurs traditions, prend conscience et s'offusque de l'impact de la colonisation sur leur mode de vie. Il se lie d'amitié avec eux et Yayomanekf en particulier, apprend leur langue, leur enseigne le russe en échange, et réchauffe son âme à cette chaleur humaine qui lui faisait si cruellement défaut dans son exil abrutissant.

Au fil de bien des rencontres et des péripéties, devenu anthropologue autodidacte, imprégné de ses idéaux nationaliste et socialiste et de l'idée qui le porte à aller « vers le peuple, parmi le peuple », Bronislaw passera une bonne partie de sa vie à tenter de sauvegarder l'identité et la culture aïnoues en les documentant et en leur faisant prendre conscience de leur dignité et de leurs droits.

« Source de chaleur » est un roman historique dont tous les personnages ont existé (Bronislaw étant le frère de Jozef Pilsudski, artisan de l'indépendance polonaise). Il retrace une histoire d'amitié entre deux hommes coupés de leurs racines et contraints d'intégrer une autre culture, une histoire de colonisation et de liberté, de guerres et de supériorité raciale supposée.

Le style n'est pas extraordinaire ni toujours très abouti (peut-être à cause de la traduction?*), et manque de souffle romanesque. On s'y perd parfois entre les différents fils narratifs, mais on en apprend beaucoup sur cette région du monde, son histoire et ses habitants.

*j'ai de plus en plus souvent l'impression que les textes sont d'abord traduits par une IA puis revus (ou pas) par un « vrai » traducteur « artisanal ». Sans compter les coquilles d'édition et l'accord du participe passé.

En partenariat avec les Editions Belfond via Netgalley.
#soichikawagoe #NetGalleyFrance
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Soichi Kawagoe nous livre ici un roman d'aventures, un roman historique, un roman troublant, qui fait remonter en nous peu à peu, une rage et une tristesse inépuisées, en nous faisant revivre l'horreur et l'ignorance crasse du colonialisme et de l'impérialisme.

Plongés au coeur de l'île d'Hokkaidô, nous partons à la rencontre d'une population fort méconnue et pourtant pleine de richesses, les Aïnous.
Malheureux témoins des affres géopolitiques confrontant russes et japonais, ils vont tenter tant bien que mal de préserver leur culture et leur identité.

C'est aux côtés de Yayomanekh que nous suivons le peuple Aïnou. Né sur l'île de Sakhaline, il subit de plein fouet ce déracinement forcé par les Japonais qui traitent son peuple et ses proches comme des sauvages à qui il faut absolument tout apprendre. La condescendance et l'irrespect le plus total avec lesquels les Aïnous sont considérés sont insupportables. Yayomanekh sera même contraint d'adopter de manière officielle, un nom et un prénom japonais pour avoir le droit de retourner sur ses propres terres d'origine afin de rallier sa famille. L'absurdité de la situation est désarmante de bêtise et d'injustice.

Du côté opposé du combat en cours ralliant la Russie, l'on se rapproche de Bronislaw, citoyen polonais, à qui l'on interdit pourtant de parler sa langue maternelle. Il doit s'assimiler le plus rapidement possible et parler russe. Ces directives le font souffrir et bouillir de l'intérieur.

Entouré de résistants, de tracts dissimulés et de manifestations prohibées, Bronislaw tente de rester loin de tout cela afin d'éviter les pires ennuis. Il se retrouve malgré tout accusé de complicité lors d'un attentat visant à éliminer le Tsar. Il est immédiatement condamné et envoyé sur l'île de Sakhaline pour y purger sa peine.

Les deux hommes subissent une situation similaire. Un déracinement forcé, des contraintes culturelles insensées et la cruauté de leur envahisseur respectif.
Le destin va finir par les réunir et les lancer dans un projet de grande envergure. Ils vont ensemble tout mettre en oeuvre pour garder à jamais une trace de la richesse de la culture Aïnoue, en enregistrant tout ce qui est possible de préserver. Histoires ancestrales, musique, chants, coutumes… absolument tout ce qui se rattache à cette culture inspirante et par de nombreux aspects, exemplaire.
Les Aïnous ne doivent perdre ni leur mode de vie ni leurs droits les plus fondamentaux.

La tragédie qui se joue entre la Russie et le Japon est extrêmement lourde à appréhender. Tant de chaos, de violence et de cruauté pour une guerre aux idées rétrogrades, nationalistes et liberticides, qui n'ont jamais servi de leçon à quiconque. Certaines scènes m'ont brisé le coeur.

La fameuse « intégration » que Yayomanekh essaie de respecter, il la ressent plutôt comme un engloutissement. Il a l'impression qu'une partie de son être disparaît. Se voir traité de barbare et de sauvage est d'une violence inouïe. Sa culture et ses traditions sont appelées : « pitreries de ces indigènes arriérés ». Il est considéré comme un des « sauvages qu'il faut éduquer et rectifier ». Cette déshumanisation est une terrible souffrance.

Terrorisme, torture, interrogatoires, emprisonnement, maladies, mort… La guerre est toujours annonciatrice d'une liste de calamités…

C'est à travers l'amitié et l'amour que le roman nous procure des bouffées d'oxygène et des moments de douceur réconfortants.

Source de chaleur est un magnifique roman qui nous entraîne au coeur des pires et des meilleurs élans de l'espèce humaine.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
En définitive, l'homme soulignait ce qui paraissait du bon sens établi pour une immense majorité de l'élite intellectuelle de l'Europe de l'époque moderne. A savoir que les humains sont divisés en races portant chacune des caractéristiques innées spécifiques, caractéristiques qui induisent naturellement une hiérarchie entre les races, hiérarchie elle-même justifiée par une hiérarchie des capacités. Le niveau de développement des peuples et des races formait naturellement une échelle linéaire et orientée, avec la race blanche européenne seule en tête du développement, et tous les autres peuples derrière à essayer en pure perte de suivre ses traces, les autres peuples étant catégorisés comme définitivement inférieurs, par définition. Ainsi, c'est sous le couvert d'humanisme que la domination européenne des peuples non européens se trouvait justifiée, et justifié le fait que les Européens inculquent aux peuples inférieurs la mentalité d'envier et d'adorer les Européens.
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