Cependant, je connaissais pas mal de personnes qui détestaient les Allemands et méprisaient les Juifs, jusqu’à leur reprocher d’être responsables de l’occupation nazie. Une logique qui m’échappait
- Tu devrais écouter Papa, faire profil bas, travailler dur en espérant t’en tirer au mieux. Arrête tes bêtises ! Tu es trop intelligent pour ça.
Difficile de ne pas s'endurcir en affrontant l'inhumain, à moins d'être surhumain.
La vie a le don de briser nos attentes mais, tant qu'il y a de l'amour, les vestiges de nos rêves brisés peuvent se recoller, même s'il en résulte une mosaïque.
Des souvenirs ressurgissent. Je pense aux baisers de mon grand-père, à son rire qui illuminait une pièce. Il aimait la vie. Il la prenait même à bras-le-corps et ne manquait pas une occasion de faire le bien, de donner de l’amour.
Quand on a croisé le regard de son frère mort, on n’est plus une enfant ! Quand on a vu son père innocent mourir sous les yeux de tout le village, on n’est plus une enfant !
Parfois, j'ai l'impression que ce n'est qu'un long cauchemar. C'est fou, non ? Après ces années, c'est devenu une forme de normalité, sauf que rien n'est normal. Le matin, à mon réveil, il m'arrive d'oublier pendant quelques secondes. J'oublie tout ce que j'ai perdu. J'oublie qu'il ne nous reste guère d'espoir. Je me contente d'exister. J'aime ces instants de répit. En revanche, un jour comme aujourd'hui, je me demande si nous retrouverons jamais le bonheur de l'insouciance. Quand on a vu ces horreurs, peut-on reprendre une vie normale ? Même si la guerre s'arrêtait demain, je serais brisée pour le reste de mes jours, sans pouvoir me l'expliquer et encore moins le comprendre.
Tant qu'il y a de l'amour, les vestiges de nos rêves brisés peuvent se recoller, même s'il en résulte une mosaïque.
Votre volonté de venir ici prouve la force de votre amour pour votre grand-mère. C’est peut-être une partie de votre histoire que vous aviez perdue jusqu’à présent. J’ai déjà aidé des gens à retrouver leurs racines. Certains détails sont parfois intenses.
Moi aussi, j'avais pris de mauvaises décisions, en proie à la panique, pour protéger ma famille. Et j'avais payé le prix cher pour apprendre que même un échec n'empêchait pas le salut.