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sur 369 notes
De Marion Fayolle, l'on connaissait jusqu'ici surtout les dessins, dans la presse et dans ses bandes dessinées récompensées au festival d'Angoulême. Son premier roman révèle un vrai bonheur de plume et un auteur aussi doué avec les mots qu'avec le crayon pour nous saisir de ses mémorables images.


Ce sont les souvenirs d'enfance, lorsque la jeune Marion n'avait de hâte que de quitter l'étroit logement familial de la vallée d'Eyrieux, en Ardèche, pour rejoindre, là-haut, la ferme et les « bêtes » de « pépé » et « mémé », qui nourrissent cette histoire, une ode à la ruralité et à une époque révolue, quand les générations cohabitaient dans une existence tout entière organisée autour des animaux. « Ici, on fait toute sa vie sous la même toiture, on naît dans le lit de gauche, on meurt dans celui de droite et entre-temps, on s'occupe des bêtes à l'étable. » Certainement pas paradisiaque mais hérité du fond des âges, l'immuable quotidien est simple, souvent rude. Les tempéraments aussi, volontiers taiseux mais débordant d'une humanité généreuse et directe, à l'image de la mémé donnant à l'orphelin engagé sur la ferme, « en un seul repas, tout l'amour qu'il n'a jamais eu, comme pour corriger l'injustice. »


A sa façon simple et directe elle aussi, en une économie de traits si justement et joliment croqués qu'ils en dessinent des silhouettes saisissantes de vie et de vérité, la narration qui, centrée sur des noms génériques – la mémé, l'oncle, la gamine, le gosse, les anciens… – prend un caractère universel en semblant parler de tout le monde, raconte les liens entre les générations, le rapport au temps, au paysage et aux bêtes, tout un mode de vie rattrapé par la mort et la modernité jusqu'à disparaître progressivement. Déjà différente de ceux restés là-haut à demeure, l'enfant palote à l'appétit d'oiseau, à la constitution trop frêle et à l'imagination poétique a beau sentir ce terroir couler dans ses veines, elle n'en quittera pas moins ces lieux et ces racines, à la recherche d'un nouvel équilibre dont les ellipses du récit laissent mélancoliquement deviner les manques et les fêlures.


Une bien jolie révélation que cette nouvelle plume si naturellement chantournée qu'elle ne manquera pas de mener bien des lecteurs au coup de coeur.

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Marion,
permettez-moi de vous écrire ces quelques lignes pour vous remercier des moments de bonheur que vous m'avez offerts. Votre roman ne comporte que peu de pages, c'est mon seul regret. Mais peut-être avez-vous raison, le beau se doit d'être rare. Votre écriture m'a transporté. J'imagine tout le temps que vous avez dû passer pour que chaque mot, chaque phrase touche à ce point votre lecteur. Hommes, bêtes, nature, tous se mélangent, s'entremêlent dans un récit d'une poésie rare. Vos personnages n'ont pas de nom, quelle importance ! Ils sont si vivants. Je n'évoquerai pas le sujet de votre livre, d'autres le feront mieux que moi et puis à trop en parler je craindrais de l'abîmer. Vous êtes mon premier coup de coeur de cette nouvelle année littéraire. Votre roman est à offrir aux gens qu'on aime.
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La porte de la maison claque, puis celle de la voiture, voiture qui s'éloigne de la ferme ardéchoise pour toujours. Aucun jeune n'a voulu la reprendre, la ferme, trop de travail, plus de vacances, des journées à rallonge. Alors, la mort dans l'âme, il a fallu se résoudre à vendre et se détacher de sa propre histoire.
Le pépé, la mémé sont morts, bientôt il n'y aura plus pour se souvenir que les photos Mais les photos sont incomplètes, elles sont trop lisses, sans odeurs, peinent à restituer les douleurs et les petites joies…
Marion Fayolle connue jusqu'à présent en tant que dessinatrice signe là son premier roman. Elle a besoin de mettre en mots ce qu'il lui semblait impossible, cette fois, de mettre en images.
La ferme est là dans sa tête, avec ces vaches auxquelles le pépé et la mémé ont tout sacrifié. Mais bon, qu'auraient-ils bien pu faire d'autre à la place ? Pas grand-chose, cette ferme c'était toute leur vie, mais aussi celle de leurs parents, grands-parents, arrière-grands-parents…
Un style brut, rugueux en accord avec le milieu dépeint, dur, les lapins qu'on dépèce, les hommes qui boivent bien plus qu'il ne faut. Les vieux taiseux qui ne savent pas y faire avec les sentiments. Alors on fait les choses ensemble, on équeute les haricots verts, plutôt que se dire je t'aime.
L'ensemble agréable est cependant décousu, manquant parfois de liant, un peu comme des cases de BD qu'on n'aurait pas pris le temps de bien enchainer les unes aux autres. L'absence de prénoms m'a comme d'habitude agacée, les personnages ne sont désignés que par la mère, le pépé, la mémé. La gamine (la narratrice) se retrouve ainsi toujours nommée, passé trente ans, même quand elle devient mère à son tour.
Un regard sur la ruralité qui se meurt intéressant, assez agréable à lire mais qui n'apporte rien de très nouveau non plus.
Je l'ai surtout ressenti comme un cri d'amour de Marion Fayolle à ses racines, sa famille, même si ses portraits parfois vachards ne feront pas sûrement pas plaisir à tout le monde.
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Ils sont la somme de ceux qui les ont précédés, héritiers des traditions, des secrets et des non-dits qui se tissent au fil des générations. Ces "petitous" se mêlent au monde avec l'insouciance de ceux qui n'ont pas encore vécus, mais porteurs déjà de leurs racines et de tout ce qui les constituent. Parmi eux, il y a la “gamine”, celle qui doit apprendre à vivre avec les bêtes qui se déchaînent en elle, sous le regard irrité de la mère mais avec la bienveillance de la mémé. Petite fleur sauvage qui pousse entourée de garçons, partageant leurs jeux et leurs aventures jusqu'à ce que les formes se dessinent sur les corps et que les jeux changent…

Voici un bien joli roman, plein de poésie, de délicatesse mais aussi de rudesse pour dire le quotidien de la vie à la campagne et le travail à la ferme, rythmé par la répétition, l'entretien des bêtes, le dur labeur qui tasse et fait se courber l'échine. Récit d'une vie à l'ancienne, où l'on vit tous ensemble, sous le même toit, où l'on prend soin les uns des autres, accompagnant les plus vieux jusqu'à la mort, veillant sur les plus faibles, accomplissant ses obligations par devoir, sans jamais faillir. Une vie de sacrifices, de labeur et de don de soi trop ingrate pour attirer la jeune génération, qui aspire à davantage de liberté et de légèreté, fuyant peu à peu ces campagnes désolées au profit des villes.

Un roman qui tait les noms des lieux et des gens, pour favoriser l'universalité de cette voix qui s'ancre dans le milieu rural, où la vie est modelée autour des odeurs d'étable et du bruit des bêtes, des sons que l'on sait reconnaître et interpréter tant les liens sont forts. Un monde qui signe sa fin quand vient le silence et qu'alors ne reste plus que le chagrin et le souvenir de ce qui n'est plus… C'est beau, c'est juste, c'est touchant et le résultat offre un premier roman tout à fait réussi !
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Une grande originalité de ton pour ce roman, qui met en lumière la vie simple d'une famille, trois générations sous le même toit. Pour une vie humble, un labeur difficile et sans relâche, avec les regrets que personne ne reprenne le flambeau.

Une famille unie dans l'adversité, un fils dont la différence s'intègre sans aucun obstacle dans la vie quotidienne de la ferme, une « môme » recueillie à la suite du décès de ses parents, et le sentiment de la fin d'un mode de vie. le récit n'est pas daté et les lieux restent ignorés, mais le texte touche à l'universel, débarrassé de tout ce qui fait l'artifice de nos vies contemporaines.

A lire lentement, au rythme du quotidien que ne bouleversent que la naissance d'un veau ou les drames vécus comme autant de fatalités contre lesquelles il serait vain de se révolter.


Découverte d'une autrice à la plume remarquable

105 pages Gallimard 4 janvier 2024
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Les hommes, les bêtes et la nature

Marion Fayolle réussit son entrée en littérature. Servie par une langue poétique, sa chronique de la vie dans une ferme de montagne résonne avec l'actualité la plus brûlante. En partageant le quotidien de cette famille, qui rassemble plusieurs générations sous un même toit, on comprend la difficulté de tenir le cap.

Une ferme familiale, comme il en existe de moins en moins, mais qui dessine nos campagnes. Celle-ci est perchée à quelques encablures de la source de la Loire. Autour du chef de famille et de son épouse, il y a les grands-parents, les enfants et un beau-frère différent. «Ici, on fait toute sa vie sous la même toiture, on naît dans le lit de gauche, on meurt dans celui de droite et entre-temps, on s'occupe des bêtes à l'étable.»
C'est autour de la vie de celle qu'on appellera tout au long du livre la gamine que va se centrer cette chronique pleine de sensualité. Une gamine qui a eu du mal à arriver et qui a une enfance difficile, qui chouine et renâcle, qui ne fait pas honneur aux repas qu'on lui sert. En s'acharnant sur les morceaux de viande, «c'est toute sa famille qu'elle dissèque, qu'elle décortique dans l'assiette. le travail de toute une vie qu'elle abîme, qu'elle recrache, qu'elle n'arrive pas à déglutir, tout cet amour qu'elle refuse d'avaler, c'est ça surtout qui fait mal au coeur.»
Car ici les hommes, les bêtes et la nature vivent en symbiose, avec leurs bruits et leurs odeurs, avec leur instinct et leurs peurs.
L'activité se concentre autour de l'élevage, de l'entretien des bêtes, des vaches qu'il faut aider à mettre bas, des poules qu'il faut nourrir, des repas qu'il faut préparer. Une vie qui ne permet pas de trop s'éloigner ou de prendre des vacances.
Alors la gamine s'évade par un imaginaire puissant qui déroute les siens. Quand elle regarde une vache, elle voit bien davantage que ses taches. Elle s'évade. «Il y a, vers ses hanches, des petites îles, un archipel de taches de rousseur. Personne ne voit que c'est beau, que cette vache, ce n'est pas un vieux torchon sale mais un tableau, une percée sur le monde, une promesse d'évasion.»
Construit autour des chapitres thématiques qui peuvent ressembler à des nouvelles qui disent la gamine, le beau-frère, les bêtes, l'orphelin ou encore la mort, le cimetière et l'héritage, ce roman à l'écriture poétique raconte toutefois avec force détails le quotidien de ces paysans de montagne au moment où leur fin approche, où le cycle de la vie, de la naissance à la mort, va laisser la place au vide. Car continuer à «résister à la solitude et au climat» est devenu impossible.
À l'heure où les agriculteurs reviennent au coeur de l'actualité, ce premier roman éclaire bien davantage la dure réalité de ce métier qui est d'abord un sacerdoce, que des colonnes de statistiques. Mais il dit aussi l'attachement à la terre et la peine que l'on peut éprouver quand il faut la quitter, se séparer du troupeau. Alors résonnent les paroles du pépé Il a souvent répété «que le jour où il n'y aura plus de bêtes, ça ne sera plus vivable.»
Si on peut inscrire ce roman dans la lignée des autres chroniqueurs de famille d'agriculteurs que sont Serge Joncour avec Nature humaine et Chaleur humaine et d'Éric Fottorino avec Mohican, on trouvera davantage de points communs avec Corinne Royer et Pleine Terre et surtout Marie-Hélène Lafon, à commencer par cette écriture qui trouve sa sève dans la poésie. Une référence qui prouve que Marion Fayolle a brillamment réussi son entrée en littérature !
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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Marion Fayolle est dessinatrice et autrice de romans graphiques. Jusqu'à maintenant le dessin est son expression. Pourtant le sujet qu'elle veut aborder lui semble ne pouvoir être exprimé par des dessins.
Marion Fayolle a donc écrit son premier roman du même bois " et c'est une réussite totale.
J'ai eu la chance de rencontrer Marion Fayolle à La fête du livre de Bron en mars. sa dédicace dit tout :
" Belle promenade dans mes paysages"
et puis un dessin simple : Des nuages et une ligne de montagne pour horizon Une fois le dessin tourné à 90 degrés apparaît un visage.
Nous sommes en Ardèche , sur le plateau, aux confins des sources de la Loire.
Nature, hommes et animaux s'entremêlent dans un court récit magnifique au tour de trois générations d'ardéchois. Et chacun sur ce plateau ardéchois fait partie du cycle perpétuel de la vie, de la mort et de la transmission. La vie et la mort imprègnent les hommes, les femmes mais aussi la pierre, la montagne, les animaux de la ferme.
Marion Fayolle nous raconte avec justesse, émotion et empathie l'histoire d'une ferme, de ces hommes ,de ces femmes et de ces enfants. Il n'y a pas nécessité à les nommer. le pépé, la grand-mère, le gamin, l'oncle, le père, la fille suffisent pour nous dire :
"Les enfants, les bébés, il les appellent les "petitous". Et c'est vrai qu'ils sont des petits Touts. Qu'ils sont un peu de leur mère, un peu de leur père, un peu des grands-, parents, un peu de ceux qui sont morts, il y a si longtemps. Tout ce qu'ils leur ont transmis, caché, inventé. Tout.
Du même bois.
Lien : https://auxventsdesmots.fr
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Un très court roman qui se passe dans une grande ferme en Ardèche.
On visualise très bien les bâtiments avec l'étable au milieu et la maison des paysans actuels a gauche, celle de l'ancienne génération à droite, le tout entouré de montagnes.
On voit les vaches au moment de la traite, les vêlages, le moment où on les sort dans les prairies. Il y a un chien, les hommes vont à la chasse. Les enfants ont un immense terrain de jeu et sont très libres.
Mais elle montre aussi la dureté de cette vie, le quasi esclavagisme des agriculteurs qui tous les jours doivent nourrir les bêtes et les traire. Pas de vacances possibles, pas d'ouverture sur le monde extérieur.
Témoignage d'un monde qui disparaît. Tristesse quand on vend les dernières vaches.
J'ai regretté cependant que les personnages n'aient pas de prénom, juste " la mère" la "mémé".
Touchant, juste, poétique. Une belle découverte. le même univers que Marie-Hélène Lafon.
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J'ai adoré ! J'ai dévoré ce livre et les frissons ne m'ont pas quitté avant la fin du livre. J'ai aimé sa poésie et les thèmes abordés comme la famille, la ruralité, la transmission et nos rapports aux bêtes.
Je trouve que le passage de la bande dessinée à la littérature est réussi pour Marion Fayolle qui a su m'embarquer facilement dans ce roman.
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Tout est à égalité, bêtes, murs, personnes, enfants, tous du même bois en quelque sorte. Tout se mélange et s'incorpore. Une même vie dans un même corps de ferme, avec les plus jeunes à gauche, les vieux à droite, et, au milieu, l'étable. Ils n'ont pas de noms, ni même de prénoms, ils sont seulement le Pépé, la Mémé, l'oncle, la fille, la gamine, l'orphelin, les enfants, le petitou, les vaches, les veaux, le chien, la poule faisane. Et aussi le frère du pépé et Papi, que l'alcool a emportés et qui reposent en paix.
Tout est lié, relié à la nature, aux saisons, à l'amour, tout a la même importance. En eux tout ”se chevauche, s'entremêle, se bagarre, se confond, les amours, les idées, les souvenirs”. Les choses et les objets s'animent, les bêtes se personnifient, les êtres s'animalisent. Car tout a une âme dans cette ferme, tout se vit et se transmet immuablement, jusqu'au jour où tout prend fin ou presque. "Le pépé disait toujours que, le jour où il n'y aurait plus de bêtes, ça ne serait plus vivable. Il a eu la chance de mourir avant. Et la mémé répète en boucle depuis que l'étable sent si bon : heureusement que le pépé n'est plus là pour voir ça". La crise du monde rural a eu le dessus et les crises de la gamine n'ont pas laissé de choix.
Marion Fayolle avec des mots simples, réalistes, merveilleusement poétiques, nous ouvrent les portes de cette ferme familiale, les portes de leur vie, de leurs coeurs, de leurs âmes. du même bois, elle réchauffe en nous des aspirations, des regrets, des solidarités, des souvenirs peut-être.
Aucun dialogue ne vient troubler le récit écrit au rythme de la vie paysanne. Sans tirets ni guillemets les paroles s'insèrent à même le texte, elles font partie du tout. Il nous prend alors envie de lire à voix haute pour goûter la musicalité du texte, pour partager la rusticité des personnages, entrer dans leurs habitudes, ressentir leurs différences. C'est tout simplement beau, émouvant, tellement touchant.
Un grand coup de coeur pour le roman du même bois, de Marion Fayolle, un bois brut d'une grande sensibilité et magnifiquement écrit. Un premier roman vraiment très réussi.
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