Attention !!! Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donne rendez-vous chaque samedi à 13h30 pour vous faire découvrir leurs passions du moment !
Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici !
Mémoires de Raymond Aron, Nicolas Baverez aux éditions Bouquins
9782221114025
Patience dans l'azur : L'évolution cosmique de Hubert Reeves aux éditions Points
9782757841105
Poussières d'étoiles de Hubert Reeves aux éditions Points
https://www.lagriffenoire.com/poussieres-d-etoiles-reedition.html
Car un jour de vengeance de Alexandra Julhiet aux éditions Calmann-Lévy
https://www.lagriffenoire.com/car-un-jour-de-vengeance-1.html
Une Fille de Province de Johanne Rigoulot aux éditions Les Avrils
https://www.lagriffenoire.com/une-fille-de-province.html
Nous traverserons des orages de Anne-Laure Bondoux et Coline Peyrony aux éditions Gallimard Jeunesse
https://www.lagriffenoire.com/nous-traverserons-des-orages.html
La Vie selon Chaval - Dessins choisis et présentés par Philippe Geluck de Chaval et Philippe Geluck aux éditions du Cherche Midi
https://www.lagriffenoire.com/la-vie-selon-chaval.html
Les Gardiens du phare de Emma Stonex aux éditions Livre de Poche
https://www.lagriffenoire.com/les-gardiens-du-phare-1.html
Autobiographie d'une Courgette de Gilles Paris, Marie-Luce Raillard aux éditions Flammarion
https://www.lagriffenoire.com/autobiographie-d-une-courgette-2.html
Les 7 vies de Mlle Belle Kaplan de Gilles Paris aux éditions Plon
https://www.lagriffenoire.com/les-7-vies-de-mlle-belle-kaplan.html
La boîte à Berk de Julien Béziat aux éditions École des Loisirs
https://www.lagriffenoire.com/la-boite-a-berk.html
Les crayons fêtent Halloween de Drew Daywalt, Oliver Jeffers aux éditions Kaléidoscope
https://www.lagriffenoire.com/les-crayons-fetent-halloween.html
Gare aux fantômes, Palomino de Michaël Escoffier et Matthieu Maudet aux éditions École des Loisirs
https://www.lagriffenoire.com/gare-aux-fantomes-palomino.html
À pied d'oeuvre de Franck Courtès aux éditions Gallimard
https://www.lagriffenoire.com/a-pied-d-oeuvre.html
Harry Potter - le Guide Ultime de Collectif, Jean-François Ménard aux éditions Gallimard Jeunesse
https://www.lagriffenoire.com/harry-potter-le-gu
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La capacité de recommencement des femmes, et des hommes parfois, me terrasse, et m’émeut. C’est là, c’est donné, il suffit de regarder et d’écouter. Les femmes surtout, certaines, comme elles sont vaillantes, comme elles veulent y croire, et paient de leur personne, de tout leur corps qui fabrique les enfants, et les nourrit ; et elles se penchent, vêtent, nouent les écharpes, ajustent les manteaux, consolent vérifient admonestent caressent, ça ne finit pas. Comme elles sont dévorées et y consentent ou n’y consentent pas ou n’y consentent plus mais peuvent encore, font encore, parce qu’il le faut et que quelque chose en elles résiste, continue. C’est chaque jour et au bout des jours ça fait une vie.
L’homme n’a jamais beaucoup parlé ni compris ce besoin que les femmes ont, souvent, pas toutes les femmes mais presque toutes, de mettre des paroles sur les moments, sur les choses et sur les gens, entre eux, à leur propos, de dire pourquoi et de dire comment, de justifier et d’expliquer, de raconter, de remonter aux sources, de comprendre, de juger, de condamner, d’absoudre, de pardonner, d’éreinter les phrases et les mots, toujours les mêmes phrases et les mêmes mots.
Il aimait les mots fou, folle, folie, s’affoler, follement, toute cette famille d’allumés que la psychiatrie officielle était en train de ravaler au rayon des insuffisants notoires et autres caricaturaux mal embouchés ; il les aimait pour le souffle, pour l’élan, pour l’éclat cru, parce qu’ils sont dansants et disent les choses et sont francs du collier ; fou était son préféré pour l’arrondi des lèvres qu’il suppose, comme un baiser tendre.
Pâles et cravatés, altiers, encadrant leur mère en grand deuil, escortés par leur tante non moins endeuillée, Paul et George Lachalme se sont tenus devant le caveau orgueilleux, dans le froid bleu et mordant du pays haut. Ils ont serré des mains, embrassé des joues, balbutié les formules d'usage, reconnu des visages vieillis, ravalé des sourires et masqué des perplexités dont ils se feraient plus tard l'aveu, entre frères, dans l'intimité de la maison douce et chaude.
Je ne crois en rien, nous sommes seuls et nous ne serons pas secourus, mais j'aime les églises alanguies dans le creux des après-midi. Je ne parle pas des cathédrales orgueilleuses ni des basiliques perchées, ni de la Madeleine ni de Saint-Germain-des-Prés, ni de Saint-Etienne-du-Mont ni de Saint-Sulpice, je parle des églises sans qualité, des églises de semaine, assoupies, à peine frottées de catéchèse par des dames de bonne volonté que chapeaute de loin un prêtre encore jeune, expéditif et souriant. Même dans les villes, même à Paris, à l'heure du goûter, la trépidance ordinaire reflue dans le ventre des modestes églises de quartier ; la température y est à peu près constante, la lumière aussi, le temps s'y oublie, on y berce à bas bruit des douleurs irrémédiables, personne ne demande rien à personne, le confessionnel est vide, les araignées s'affairent, ça sent la poussière froide.
Isabelle disait que le chant réparait, et consolait de tout parce qu’il montait du ventre pour se mélanger à l’air, à la lumière, à d’autres voix, à la musique ; elle disait que le chant inventait de la joie.
Les trois prénoms reviennent toujours dans ses listes; trois enfants, trois prénoms, trente-trois hectares, trente ans.Elle s'accroche à ses listes.
La cour est vide ; à cette heure les poules sont dans le pré, derrière la maison, et les chiens sont descendus à l’étable avec lui ; ils le suivent quand il se lève de sa sieste, ils lui obéissent, ils filent. Quand elle voit revenir les chiens, qui restent dans la cour et n’entrent pas dans la maison, quand les chiens passent devant le portail du jardin où se couchent derrière l’érable, elle sait qu’il n’est pas loin.
(pages 23-24)
Il faut que la jeunesse rie, elle soulignait cet adage de son index droit pointé, et appuyait sciemment sur le "e" final du verbe rire. Quand elle me faisait réciter mes conjugaisons, à l'école primaire, elle choisissait toujours des verbes joyeux, nous les appelions les joyaux de la couronne, récite-moi un joyeux joyau du troisième groupe Jeanne, et détache bien les lettres que je vois si c'est su ; nous avions des favoris, revivre, comprendre, résoudre, elle détestait conquérir et moudre ou traire, mais rire était notre préféré. Nous avions beaucoup ri avec Karim ; en cela aussi nous avions été jeunes. Aujourd'hui, dans le métro, dans le bus, ou dans la rue, ici dans l'avenue, devant le collège Courteline, il m'arrive encore de surprendre ces rires irrépressibles, cascadés, qui secouent à l'unisson et rassemblent une grappe mouvante de filles ou de garçons oublieux du monde sous le regard interrogateur, furibard, effaré des autres, des adultes, des vieux, des gens, des tristes, des assis, des rassis.
La tante dit, en détachant bien chaque mot, on ne mélange pas les torchons avec les serviettes ; ou qui va à la chasse perd sa place, ou qui dort dine, ou qui sème le vent récolte la tempête, ou les chiens ne font pas les chats. Il sait par cœur toutes les phrases de la tante, surtout celles qu'il ne comprend pas, et les récite parfois, en silence, mot à mot, pour s'endormir, ou pour se calmer, pour se refroidir, comme maintenant, quand il sent qu'il voudrait sauter d'un seul bond les six marches de l'escalier et se poser sur l'épaule d'Antoinette, comme une hirondelle. La tante dit aussi, une hirondelle ne fait pas le printemps.