L'auteur espagnol
Julio Llamazares s'est prêté à un exercice, il a feuilleté les pages d'un album de photos, retraçant ainsi son enfance dans un village reculé du nord de l'Espagne. Donc,
Scènes de cinéma muet s'apparente davantage à une sorte d'autobiographie, de souvenirs épars qui remontent tranquillement à la surface. Il est le narrateur de sa propre histoire découpé en autant de chapîtres que de photos ou des souvenirs. Et ces derniers ne sont pas toujours présentés en ordre chronologique – bien que ça ne soit pas mélangeant du tout, d'ailleurs, ça apporte un certain recul appréciable. Mais ne cherchez pas une trame narrative à proprement parler avec un début et une fin. Laissez-vous porter par le flot de réminiscences.
Parce qu'on se laisse porter par cette lecture. Scène de cinéma muet se lit facilement, il y a quelque chose de fluide et de naturel dans l'évocation des souvenirs, peut-être aussi un peu vaporeux. Je dois admettre qu'à deux ou trois endroits, je me suis laissé aller à la rêverie, mes yeux continuaient le mouvement mais mon cerveau n'enregistrait plus les informations. Je n'ai pas repris mais j'ai plutôt continué. Tant pis pour les passages manqués. C'est que ce n'est pas toujours palpitant et que quelques paragraphes – ou pages – en moins ne provoquent pas de bris de compréhension. Comme je l'écrivais plus haut, tout est tellement coulant et facile qu'on s'y retrouve facilement.
Je ne veux pas donner l'impression que ce roman est trop facile ou fade. le vocabulaire est adéquat, même recherché par moments, et je retrouve son style si personnel, celui que j'avais apprécié dans
La pluie jaune. Un peu déconcertant au début, le temps de trouver ses repères, puis on en découvre la beauté. Je lui trouve des qualités visuelles, en ce sens qu'il arrive à créer des images dans ma tête. Par exemple, «Il y a toujours, sur chaque photo, un fantôme qui nous regarde.» (p. 18) ou bien «La musique de cette photo, j'ai tardé à la retrouver» (p. 56) ou encore «Ma première rencontre avec la mine, c'est la respiration de Luis, le voisin d'en haut.» (p. 66).
À travers cette multitude de photos et d'autant de souvenirs,
Julio Llamazarès aborde des thèmes liés à l'enfance pour la plupart assez universels comme la mort d'un proche, sa première rencontre avec des gens d'une autre culture, l'univers de la mine – l'auteur a grandi dans Olleros, un village minier –, l'apparition de la télévision, la mer, etc. Certains sont drôles, d'autres sont sympathiques. Tout le monde a été enfant et est capable de se voir à travers ces péripéties. Ceci dit, je n'ai jamais été complètement enthousiasmé par ces souvenirs. Il faut dire que Llamazares n'est pas un auteur que je connais beaucoup. de lui, je n'avais lu qu'un roman, que j'avais bien aimé, mais pas au point de développer un engoument ou un grand intérêt. Incidemment, ses souvenirs d'enfances, ils ne restent que des souvenirs parmi ceux de tant d'autres. Pour les siens méritent-ils d'être publiés et lus par les masses ?
Évidemment, je faisais de la rhétorique, si le bouquin existe, c'est qu'il y a un public, des gens pour le lire. Dans tous les cas, pas de grandes révélations. La vie, c'est tout. Et souvent c'est déjà beaucoup. Pour résumer, je trouvais la lecture de
Scènes de cinéma muet plaisante mais, une fois l'ouvrage terminé, il ne m'habitait déjà plus.