Un psaume pour les recyclés sauvages

Ayant entendu de bonnes critiques sur ce livre de SF apparemment abordable pour des non-initiés du genre, c'est la beauté de sa couverture qui a fini de me séduire. Et hop, un de moins sur l'étalage.

Déstabilisée au départ par l'écriture inclusive – question d'habitude – je me suis rapidement laissée bercer par ce petit livre tout doux. On se projette aisément dans le futur imaginé par Becky Chambers, loin des prévisions catastrophiques où l'Homme mène inévitablement le monde qu'on connait aujourd'hui à sa perte. Dans cette vision du futur, nous avons pris conscience à temps de l'inéluctabilité d'un changement de mode de vie comme condition sine qua non de la perpétuation de la planète. La nature y reprend ses droits, l'éthique est la première guide de l'espèce humaine, l'harmonie règne.

Dans ce cadre idyllique, deux personnages, un.e moine de thé et un robot, se rencontrent et évoluent ensemble autour d'un objectif plus ambitieux qu'il n'y paraît : répondre à la question qui consiste à savoir ce dont les individus ont besoin.

Une parenthèse agréable que j'ai rapidement prolongée par la lecture du second tome.

On ne peut pas s'empêcher de se dire que ça commence bien. Un titre pareil, faut l'inventer et puis le porter à bout de bras durant un peu plus de cent pages, histoire de ne décevoir personne.
Quant à l'illustration de couverture, dûe à Feifei Ruan, elle est adorable. Toute en douceur printanière, avec des papillons, des fleurs de tapisserie médiévale, une charrette de contes de fées… Elle décline au gré des volutes du chemin la belle itinérance de deux personnages que tout oppose.
Nous sommes dans le monde de Panga. Un monde agréable et harmonieux. Les robots qui ont aidé les hommes à construire des usines et qui n'avaient plus guère d'utilité se sont retirés dans les forêts et y vivent en paix, loin des hommes. Froeur Dex, le moine-thé, parcourt Panga en offrant son breuvage bienfaisant à qui est un peu stressé, ou simplement triste. Et il va rencontrer bientôt le robot nommé Omphale Tachetée Splendide qui veut retourner vers les hommes, savoir ce qu'ils sont devenus et quels sont leurs besoins actuels. D'abord réticent, Dex accepte la compagnie du robot et tous les deux font route ensemble, chacun apportant ses connaissances.
Très douce première partie avec Dex seul qui quitte son monastère pour devenir moine-thé itinérant. Délicats passages de ce il-elle, de cet homme/femme, de ce moine/nonne qui se love amoureusement dans sa charrette tous les soirs sous la lune exquise.
Rencontre bouleversante et surprenante avec ce robot qui chamboule Dex et le déstabilise dans ses convictions mais qui le charme par sa naïveté et sa volonté d'apprendre.
Le chapitre « poule de bruyère, tombée de légumes » est, à mon avis, un chapitre essentiel pour l'évolution des personnages : si le repas préparé ensemble n'est pas partagé, il ne peut y avoir de bonheur entre les convives. Nos deux protagonistes devront jouer d'adresse et d'habileté pour arriver à trouver un équilibre entre eux.
Ce sont peut-être les derniers chapitres qui m'ont un peu déçue (le terme est un peu fort). A la légèreté du non-dit, ou de la narration, succèdent de longs dialogues, un peu trop chargés et dogmatiques à mon goût. Je pense (je dis bien « je ») que tout pouvait être dit, le « message » délivré de manière plus aérienne, par des gestes, des actions, des regards, des silences. Notre auteure a le sens du dialogue certes, mais de dernier se déploie ici avec trop de véhémence et en devient lourd, voire pesant.
Petit bémol donc en cette fin de roman, mais qui n'ôte en rien le plaisir que j'ai eu à lire cette histoire, bien au chaud sous la couette. Sans chercher obligatoirement à en retenir une morale de vie. Je crois qu'il faut la déguster comme on savoure une délicieuse tasse de thé vert de la Montagne Jaune.

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Quel condensé de douceur, de bonté et d'humanité !

C'est le premier roman de Becky Chambers que je lis, et quelle découverte incroyable que son univers optimiste et bienveillant, sa plume brillante et délicate, c'est si rafraîchissant de lire un roman d'anticipation qui ne soit pas une dystopie post-apocalyptique où l'humanité tente de survivre tant bien que mal au milieu d'un monde désolé.

Ici, nous découvrons le monde de Panga, où l'humanité vit en harmonie avec la nature après que les robots aient pris conscience et quitté leurs fonctions pour vivre dans la forêt, plusieurs siècles auparavant. Leur existence ne subsiste plus que dans les mythes et les contes. C'est dans ce contexte que nous faisons la connaissance de froeur Dex, moine de thé non-binaire, dont le travail consiste à donner un peu de bonheur à des gens qui ont besoin de ralentir : "Tout le monde a parfois besoin d'une tasse de thé. Une heure ou deux, tranquille, agréable, avant de retourner à ses activités".

Lors d'un voyage, Dex va faire l'inattendue rencontre d'Omphale Tacheté Splendide, un robot dont le projet est de découvrir de quoi l'humanité a besoin. Une question difficile à laquelle Dex aura du mal à répondre, ne sachant pas iel-même de quoi iel a besoin.

Entre éthique et sagesse, bon sens et morale, ce roman prend des accents d'essai philosophique et questionne avec profondeur la nature humaine. de quoi avons-nous besoin ? Quel est notre but sur Terre ? A-t-on besoin de justifier sa propre existence ? Autant de questionnements auxquels Becky Chambers répond avec une justesse incroyable, sans jamais tomber dans un discours creux et cliché. "Tu n'arrêtes pas de demander pourquoi ton travail ne suffit pas, et je ne sais pas quoi te répondre, parce qu'exister dans le monde et l'admirer, ça suffit".

Je suis ressortie de cette lecture profondément émue. Chamboulée, émerveillée, admirative, troublée.

Une superbe découverte et 5 étoiles largement méritées. J'en mettrais même 6 si je pouvais !

Sans surprise, j'ai vraiment eu un coup de coeur pour cette belle lecture : petite par la taille mais très riche pour ce qu'elle apporte. Si Omphale arrive à la moitié du roman, je l'ai autant aimé que Froeur Dex : leurs échanges sont le coeur de ce roman, le levier pour parler de sujets importants et surtout pour amener des divergences de point de vue qui conduisent à une réflexion. Omphale, un robot, et Froeur Dex, un moine. Deux être conscients qui, alors que les interactions entre les deux espèces ont été rompues, décident de faire un bout de chemin ensemble et de philosopher sur le monde qui les entoure, philosopher tout en poésie. La plume de Becky Chambers est absolument incroyable : rien n'est arrêté, tout peut évoluer. On a vraiment la sensation de voir le monde « bouger » lors des échanges des deux personnages.

Omphale est une force tranquille, un être qui s'émerveille tout en ayant les pieds sur terre, qui aime apprendre sans juger et sans se mettre de barrière. Froeur Dex est dans une quête de lui-même : ce qu'iel est, ce qu'iel représente et ce qu'iel veut et ressent.

Le message écologique est presque passé en arrière plan pour moi, même s'il est bien présent, laissant plus de place aux êtres et à l'importance de vivre en harmonie avec ceux (et ce) qui nous entoure. L'autrice sait tirer le positif malgré les erreurs du passé sur Panga.
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J'aurai jamais cru lire une utopie qui ne me donne pas un sentiment de malaise et un gout de plastique dans la bouche. Pourtant, Becky Chambers a réussi cet exploit avec Un psaume pour les recyclés sauvages !

L'écriture de novella est un exercice difficile. Trop long pour une nouvelle, trop court pour un roman... Il faut faire des choix dans la narration et la construction de son histoire. Des choix que Becky Chambers a saisi avec brio ! Sa plume est d'une poésie douce et pleine de simplicité. Rien ne sert de faire de grands discours et d'utiliser des mots savants pour faire du beau. Un psaume pour les recyclés sauvages est poétique, doux et simple. C'est une lecture qui coule entre les doigts, qui apaise comme les thés de Dex.

Dex est quelqu'un de marquant. Iel est poète, dous et simple comme les mots de Becky Chambers. Je ne peux que couvrir de fleurs la traductrice Marie Surgers et L'Atalante pour avoir respecter la non-binarité de Froeur Dex et d'avoir pris le parti pris de l'inscrire dans l'orthographe et la traduction d'Un psaume pour les recyclés sauvages. La représentation, la diversité, c'est également un acte politique. Merci de ne pas avoir s'effacer ça, c'est important.

Un psaume pour les recyclés sauvages est une novella douce, qui nous porte sur une réflexion sur notre mode de vie et de pensées, sur ce qu'est le bonheur et ce qui nous anime. Une lecture nécessaire lorsque les fins d'années se font de plus en plus sombres.
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Ouvrage d'une grande douceur qui porte une vision optimiste de notre futur. Ça fait du bien. Pourquoi pas, même si c'est une utopie que nous n'atteindrons sans doute jamais. Enfin un peu d'oxygène dans notre quotidien anxiogène.

Tout en tendresse et poésie, l'on suit l'improbable duo d'un moine du thé et d'un robot qui voyagent ensemble à bord d'une roulotte à vélo. Cela se lit vite (trop vite ?) et donne envie d'y retourner pour s'envelopper de nouveau dans le calme paisible de ce doux monde. Belle lecture dont je ne dévoilerai rien de l'intrigue. Ce serait gâcher le plaisir que d'en faire un résumé.

L'écriture inclusive m'a assez surprise, c'est le premier ouvrage que je lis avec un tel narrateur. On finit pas s'y faire, même si c'est très surprenant lorsqu'on a été formaté dès petit au format il/elle.

Si comme moi vous en avez plein le dos de l'avalanche de dystopies auquel on a droit depuis des années tous supports confondus, vous pouvez vous tourner vers cette belle utopie reposante signée Becky Chambers.
Ici pas de cataclysme, de dictature sordide peuplée d'habitants en haillons, de gangs de cannibales ni de zombies affamés.

Nous découvrons dans cette novella un monde où les humains vivent en parfaite harmonie entre eux et avec la nature. Les robots ont accédé à la conscience et sont partis vivre dans la forêt il y a des siècles, sans qu'on ne les revoit.
Froeur Dex, moine de thé en plein questionnement existentiel, va pourtant en croiser un...

En une petite centaine de pages, l'autrice développe un univers atypique et bienveillant, proche de ceux que l'on retrouve habituellement dans le cinéma d'animation ou certains jeux vidéos indépendants (Season: A Letter to the Future par exemple). La rencontre entre l'humain à la recherche de lui-même et le robot curieux est l'occasion d'une discussion sur le sens de la vie, en abordant beaucoup de sujets d'actualité (décroissance, écologie, identité de genre, "grande démission" et recherche de sens dans son travail...).

Le voyage est agréable et sans remous, l'ambiance et la plume de Becky Chambers sont plaisantes. C'est une bouffée d'air frais et un créneau que je trouve plutôt sous-représenté dans la littérature SF. Une belle surprise.

Ce livre se distingue des autres livres de science-fiction en cela qu'il n'y a aucuns effets spéciaux, de magie, de fin du monde, d'apocalypse. Il est du genre « solarpunk ». Ah ! Connais pas ! En fait, après recherche, « le solarpunk est un mouvement artistique, scientifique et politique gravitant autour d'une idée commune : imaginer, inventer et organiser des futurs alternatifs positifs pour l'humanité. » Tout le contraire du « Cyberpunck ».

Becky Chambers nous emmène dans un monde où les humains se sont rapprochés de la nature et vivent en symbiose avec elle, sans pour cela mettre un terme au confort et au plaisir. Une vie simple et riche.

Cela n'empêche pas, malgré le bien-être et le confort de cette vie, à Dex de se sentir désemparé. Il ou elle (on ne sait pas), devient « moine du thé ». Dans une roulotte aménagée, Dex part sur les routes, va de village en village, proposer aux gens un moment où ils peuvent poser « leur valise ». Dex est là pour les écouter et leur apporter du réconfort en leur proposant du thé.

Ce fut un peu ardu au départ, et il s'est vite rendu compte qu'il devait d'abord se former avant d'en faire son métier. Au bout de 2 ans, il est un des meilleurs moines du thé de Panga. Cependant, il ressent toujours un vide en lui.

« Quelque chose ne va pas. Je devrais avoir honte, non ? Qu'est-ce qui cloche en moi ? J'ai tout ce dont je pourrais rêver, tout ce dont j'ai toujours rêvé, et malgré tout chaque jour est un fardeau.»

Un vide qui va le ou la conduire à prendre un chemin de traverse. A sa grande stupéfaction, il va rencontrer «Omphale ». C'est « l'éveil ». Omphale est un robot venu rendre visite aux humains. Il veut savoir « de quoi ont besoin les humains ? » Vaste question.

Ils vont faire un bon bout de chemin ensemble, où l'un comme l'autre, apprendront à se connaître.

Un livre positif, qui donne une autre version de ce que pourrait être le futur. Où les sentiments humains complexes sont soumis à bien des questionnements.

Seul petit bémol : je n'apprécie pas du tout l'emploie du « iel » pour il et elle et le « lea » pour le et la. Cela ne sonne pas particulièrement bien à l'oreille.

J'ai beaucoup aimé ce livre. J'ai ressenti une grande plénitude lorsque je l'ai refermé. A chaque fois que j'y repense, je me sens apaisé.

L'autrice commence son livre par « Pour vous qui avez besoin de souffler ». Tout est dit.

Le Prix Hugo du meilleur roman court 2022, et puis ce titre magnifique m'avaient vraiment attiré. Et puis sans vraie déception le livre m'est assez vite tombé des mains, je n'ai pas trop compris l'histoire ou bien celle ci ne m'a pas touché et le côté SF ou anticipation m'a plutôt ennuyé. le côté dé-genré ne m'a pas dérangé- mais ce n'est pas mon truc- et donne même une touche étrange et originale à l'écriture. 136 pages cela reste très court et ce fut une expérience littéraire inattendue. Évidemment mon propos est très personnel et n'a rien d'universel - comme disait Montaigne j'adore échanger avec quelqu'un qui ne pense pas comme moi - Alors pardon Becky mais bien sûr respect à tous les auteurstrices ou autricesteurs, comment dit-on en fait ?

A propos de la difficulté d'écrire des utopies, Alain Damasio, en entretien pour "Le 1 des libraires" disait ceci :
"Un scénario, c'est vrai, a besoin de conflit, mais on peut instaurer du conflit au sein d'un cadre utopiste, des difficultés à surmonter des querelles".
Est ce que ce livre manque un peu de conflit ? de colère ? de rebondissements ? Peut-être. Mais c'est aussi sa force de proposer une utopie résolument positive et optimiste. Ce livre a un véritable effet "feel good" (dans le sens positif du terme) : on aimerait pouvoir vivre sur cette terre de tolérance où l'Homme partage enfin un territoire qui ne lui appartient pas.