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Aline Azoulay (Traducteur)
EAN : 9782264047403
384 pages
10-18 (04/09/2008)
3.93/5   1021 notes
Résumé :
Chez les Kazanci, Turcs d'Istanbul, les femmes sont pimentées, hypocondriaques, aiment l'amour et parlent avec les djinn, tandis que les hommes s'envolent trop tôt - pour l'au-delà ou pour l'Amérique, comme l'oncle Mustafa.

Chez les Tchakhmakhchian, Arméniens émigrés aux Etats-Unis dans les années 20, quel que soit le sexe auquel on appartient, on est très attaché à son identité et à ses traditions.
Le divorce de Barsam et Rose, puis le remar... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (156) Voir plus Ajouter une critique
3,93

sur 1021 notes
C'est simple : j'ai adoré ce roman !

Très beau et touchant, avec beaucoup d'humour - j'ai tout particulièrement aimé les jeux de contrastes et de miroirs entre les personnages; car Elif Shafak a mis en scène des personnages aux opinions (politiques, religieuses,...) très différentes.

Tout d'abord j'ai été embarquée par les portraits de femmes que fait l'auteur. Tant qu'elle nous fait le portrait de ses personnages, plus différentes et atypiques ( mais à la fois familières) les unes que les autres, le rythme du récit est assez nonchalant. Cela m'a donné l'impression d'assister à des moments de vie, un peu comme dans les nouvelles.

Puis les deux adolescentes du roman se rencontrent : Asya et Armanoush. L'une est Turque, l'autre Américaine avec des origines arméniennes. En dépit des apparences, les deux filles se ressemblent bien plus qu'elles ne l'imaginent. Avec cette rencontre, chacune mène sa quête des origines. Les deux ne s'accordent pas toujours sur la place que le passé doit avoir dans l'histoire d'un individu et dans l'histoire d'une nation.
Et là le roman devient juste génial ! Elif Shafak dresse un beau tableau de son pays, une belle mosaïque de gens, de couleurs et de goûts !

En bref, un roman sensoriel et original qui donne des envies d'ailleurs et bien d'autres choses encore - que je vous laisse découvrir !
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Un roman de femmes qui permet de découvrir la Turquie à travers le destin de la « bâtarde », fille d'Istanbul, et la belle-fille de son oncle, fille d'un Arménien et d'une Américaine.

Les personnages principaux : deux jeunes filles à l'âge de la quête de soi, qui partagent des interrogations communes aux jeunes, qui cherchent à se définir par rapport aux générations précédentes, à trouver à la fois leur individualité et leur place dans leur groupe social. Mais pour une Turque née de père inconnu et une Américaine d'origine arménienne, l'identité c'est aussi la question de la tradition et de la nationalité et ce n'est pas une mince tâche que de se trouver soi-même dans des tribus matriarcales aimantes et protectrices, protectrices aussi de lourds secrets de famille.

Ce n'est pas véritablement un roman historique, mais un roman où le poids de l'Histoire est très présent. le génocide arménien de 1915-16 est évoqué, avec ses conséquences sur la diaspora, mais aussi sur les Turcs dont le pays nie les événements, un pays où la prise de parole peut encore conduire en prison.

Comme la ville qui l'abrite, cette famille stambouliote sans homme est colorée et pleine de contrastes. On respecte les traditions autour de la nourriture, on mange d'ailleurs beaucoup dans ce roman! La religion musulmane est présente, mais on consulte le passé ou l'avenir avec l'intervention de la magie des djinns. On y trouve aussi des femmes qui portent le voile et leur soeur, indépendante, qui travaille court vêtue.

Un bout d'histoire, des intrigues, des émotions féminines dans un pays machiste, dans une ville magnifique qu'on quitte à regret. J'y retournerai volontiers!

P. A. : Merci à la Babeliote Under_The_Moon qui m'a suggéré cette lecture.
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Il s'en passe des choses en Turquie ! Encore ce week-end j'ai vu des images à la T.V. : leur président à la tribune. Mais je n'ai vu que ces grandes bannières descendant du plafond jusqu'au sol. Ces grands drapeaux turques : Rouges Sang. Je ne vois plus qu'eux, que peut valoir un discours devant un mur aux drapeaux rouges flottants ? Et soudain, impérieusement, le passé, d'autres bannières, un autre moustachu, vient se superposer. Pardon, cela n'a rien à voir et pourtant : toujours du sang ! Qu'importe quel génocide, quel massacre, quel viol : oh tout ce sang. Oh l'Histoire, les grandes marches, les déracinements. Honni ! le bannissement !

Alors je lis. Après Neige d'Orhan Pamuk, La Bâtarde d' Istanbul, tant qu'ils sont encore disponibles. Vite. Car je pressens les bûchers, question de temps... Mais là j'écris le futur à la plume du passé, avec plein de mâle ressentiment. C'est pourquoi j'ai tant besoin d'Elif Shafak, de sa clairvoyance, de la tendresse de son regard, de son intelligence du coeur, pour tenter, tenter au moins, d'accepter l'espoir d'une réconciliation. Une écriture envoûtante dont les volutes pourraient donner une petite chance à la paix. A saisir, et se ressaisir d'urgence. Ecoutez ceci : "Il fut et ne fut pas un temps dans un pays pas si lointain où des êtres humains aux manières détestables traversaient une époque difficile." p.276 s'en suit et le précède un lumineux roman.

J'ai jadis croisé un Arménien : je comprends le Hai Dat*. Mais bâtir et faire dépendre son identité d'un tiers c'est aussi entraver sa liberté. Moi je n'ai évidemment aucune légitimité pour le dire, Elif Shafak si. Une famille d'Arméniens émigrée à San Francisco, une famille turque à Istanbul comme deux mains qui s'agitent. Se rejoindront-elles ? Quête d'identité des communautés, des familles et au sein même des familles grâce à la culture et la gastronomie, pour se ressourcer, pour se restaurer. San Francisco, Istanbul manger pour combler la faille ? le mal est profond, le danger est grand, mais quand même partager un repas. Partager le goût ! La gastronomie est un plaisir et une ouverture à l'autre, elle est mémoire des générations passées, elle est omniprésente dans le récit. Saveurs, senteurs, son et toucher Elif Shafak gratifie tous nos sens dans cette magnifique traversée.

Véritable hymne à la tolérance, une invitation au coeur des deux cocons familiaux, une magnifique amitié naissante entre Armanoush et Asya, il y a tout dans ce roman y compris, je le suppose, une bonne part autobiographique dans ce solaire portrait d'une figure féministe Zeliha, merveilleuse de dignité. Mais je tremble pour tous ces écrivains turques qui me semblent aussi fragiles que les verres à thé décrits dans le bouquin. p.319 "C'est juste que je n'avais pas misé lourd sur leur durée de vie. Je trouvais qu'ils se brisaient trop vite. Mais apparemment même les verres à thé peuvent durer pour raconter leur histoire." Puisse cela être vrai et le monde d'Elif Shafak se matérialiser.

En attendant le Bosphore fait le gros dos sous le poids des chalands qui le lui labourent dans une impression de quiétude toute passagère, pour combien de temps ? Alors que le bonheur aussi nous tend les mains et que quelque soit notre identité, nous sommes avant tout humain. Ah que ce roman est juste et fait du bien !

*Lutte pour la reconnaissance du génocide
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Cela faisait un moment qu'un livre ne m'avait pas autant emportée (et valu quelques cernes et réveils difficiles car impossible de s'en détacher).

Ce livre est d'une grande finesse :
- l'histoire est subtile malgré la lourdeur des événements (déportation des arméniens, liberté d'expression en Turquie, poids de la religion sur la vie des femmes)
- les personnages sont ambiguës alors qu'il aurait été tellement facile de tomber dans les clichés musulmans, chrétiens, turques...
- la cuisine...mon dieu ! Si les marques essaient encore de perfectionner le marketing olfactif, lisez ce livre et vous verrez comme au fil des pages on sent la cannelle, le sésame, les grenades...
- l'écriture d'Elif Shafak est un enchantement

A cause de ce livre, j'ai envie de me replonger dans l'histoire de l'Empire Ottoman, d'aller en Turquie, d'apprendre le turc et de devenir goûteuse de tous les plats turcs et arméniens !!!
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Famille Kazanci, Istanbul début du 20 ème. Dans le konak famiiial , vivent uniquement des femmes , les hommes étant fauchés au mieux autour de 40 ans .
Ces femmes sont fonctionnaires, tatoueuses, proches de la folie ou encore diseuses de bonne aventure et imprégnées de religion.
Elles ont un frère , Mustapha, qui est partie aux USA, pour fuir la malédiction. Il vit avec Rose, ex compagne d'un arménien dont la famille est aussi issue de Turquie.

Deuxième incursion dans l'univers d'Elif Shafak et un peu le même sentiment: Les personnages ne sont qu'un support à l'envie que l'auteure a de nous faire découvrir l'histoire de son pays, sa cuisine et son quotidien.
Certes la dernière partie donne enfin un peu de coffre à l'histoire .
Il y a beaucoup de questions autour des rapports Turcs Arméniens et pour ça , les personnages sont bien choisis. Si la réflexion n'est pas approfondie, ce n'est pas le thème principal , elle a le mérite de donner la parole à tout le monde . L'idée pour les uns que les massacres ont été commis par une autre entité que la Turquie et pour les autres qu'ils n'existent qu'en tant que victimes est intéressante.
On ressent aussi le dilemme d'un pays qui tangue entre est et ouest, entre capitalisme et conservatisme.
Mais là aussi , les personnages sont tels qu'ils s'en accommodent très bien.
J'ai déjà atteint mon nombre de mots moyen et je n'ai pas parlé de la fiction , confirmant mon impression première . Alors oui, le coté un peu caricatural des quatre filles les rend sympathiques , les relations entre les familles un peu tirées par les cheveux apportent des rebondissements.
On ressort , enfin moi, un peu frustré , comme si pour faire passer quelques idées , on avait créé une trame un peu à la va vite, autour de clichés visant à grossir le trait.
Cela reste toutefois une lecture agréable avec une vision ' de haut' de la question arménienne et un regard éclairant sur la société turque avant l'arrivée du despote.
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Citations et extraits (119) Voir plus Ajouter une citation
Ces foutus richards ! Ils accumulent de l'argent toute leur vie, pour quoi faire? C'est stupide ! Est-ce que les linceuls ont des poches ? Car nous finirons tous dans le même linceul de coton. Pas de vêtements chics, pas de bijoux. Ils pensent pouvoir emporter leurs smoking ou leurs belles robes de soirée dans leur tombe ? Qui dirige les cieux, selon eux ? Personne ? Dans ce cas, pourquoi le ciel ne nous tombe-t-il pas sur la tête ? Je ne vois aucune colonne pour le retenir, moi. Et vous?
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« Tu sais le mot Fin n’apparaît jamais quand tu termines un livre. Ce n’est pas comme au cinéma. Quand je referme un roman, je n’ai pas l’impression d’avoir terminé quoi que ce soit, si bien que j’ai besoin d’en ouvrir un autre, la taquina Armanoush, inconsciente de sa beauté exaltée par la lumière du soleil couchant…………….
Comme de trop nombreuses familles de la diaspora arménienne, rescapées mais traumatisées à jamais, la sienne était à la fois fière et inquiète de son attirance pour la littérature. Il n’était jamais bon de s’écarter du chemin des gens ordinaires. Sans compter que, si les livres étaient potentiellement nocifs en général, les romans étaient les plus dangereux de tous. Car la fiction pouvait facilement vous attirer dans des univers simplistes, chevaleresques, aussi propices aux surprises qu’une nuit sans lune dans le désert. Vous pouviez être transporté au point de perdre tout contact avec la réalité. Cette vérité rigoureuse et sans relief dont aucune minorité ne devrait trop s’éloigner, au cas où le vent viendrait à tourner. Le naïf se mettait en danger en s’imaginant que rien de mal ne pouvait arriver, car le mal survenait toujours. La magie envoûtante de l’imagination était périlleuse pour celui qui se devait de vivre dans le monde réaliste, et pour les êtres condamnés au silence, les mots pouvaient se transformer en poison. Un enfant de survivants avait bien sûr le droit de lire et de méditer, mais il devait le faire sans brui, avec une certaine appréhension, et toujours choisir l’introspection plutôt qu’une manifestation passionnée de ses goûts littéraires. »
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- Le samedi 24 avril 1915, à minuit, des douzaines de notables arméniens d'Istanbul furent arrêtés et conduits de force au quartier général de la police.
Ils étaient tous vêtus élégamment, comme s'ils se rendaient à une cérémonie. On les garda longtemps sur place sans leur fournir d'explication, puis on les sépara en deux groupes et ils furent déportés à Ayach et à Cankiri.
Un triste sort attendait le groupe d'Ayach.
Les déportés de Cankiri furent tués plus graduellement. Mon arrière grand-père appartenait à ce dernier groupe.
Des soldats turcs les escortèrent dans le train de Cankiri.
Là on les obligea à marcher les 5 km qui séparaient la gare de la ville.
Jusqu'ici on les avait traités décemment, mais au cours de cette marche, on les battit avec des cannes et des manches de pioche.
Komitas, le grand musicien, perdit la raison après avoir vu ce que firent les soldats turcs ce jour-là.
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Ce n'est pas un hasard si la Turquie est aujourd'hui le terreau d'une grande littérature.
Celle-ci naît toujours des fractures, des blessures, des déséquilibres et des incertitudes .
Elle naît de l'illégitimité sociale ou culturelle , du porte-à-faux et du malentendu.
Elle naît — pour reprendre le mot forgé par Pessoa — d'une intranquilité .

Celle de la Turquie est intense , puisque le pays s'est détourné de son passé ottoman et qu'il a renoncé à sa primauté au sein du monde musulman pour s'identifier à l'Europe ...


Amin Maalouf (préface ) . 2007 .

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Nous sommes piégés. Nous sommes coincés entre l'Est et l'Ouest. Entre des modernistes si fiers du régime séculier qu'ils ont instauré que la moindre critique est inacceptable, et des traditionalistes si infatués de l'histoire de l'Empire ottoman que la moindre critique est inacceptable. Ils ont l'opinion publique et l'autre moitié de l'Etat de leur côté. Que nous reste-t-il ?
(...)
Les modernistes nous disent d'aller de l'avant, mais nous n'avons pas foi en leur conception du progrès. Les traditionalistes nous disent de regarder en arrière, mais nous refusons leur ordre idéal. Nous sommes pris en sandwich. Nous faisons deux pas en avant et un pas en arrière, comme la fanfare de l'armée ottomane, en son temps. Sauf que nous n'avons pas d'instruments de musique!
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Ce mois-ci les membres nous parlent de: Je suis une fille sans histoire - de Alice Zeniter aux éditions L Arche Beauté fatale - de Mona Chollet aux éditions de la Découverte Les Vilaines- Camila Sosa Villada aux éditions Métailié La guerre n'a pas un visage de femme - de Svetlana Alexievitch aux éditions J'ai Lu Lait Noir – d'Elif Shafak aux éditions Phébus
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