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EAN : 9782330101213
209 pages
Actes Sud (11/04/2018)
3.91/5   11 notes
Résumé :
Juste avant de rendre son dernier souffle, Abdellatif demande à ses enfants, deux hommes et une femme, de l'enterrer dans son village natal, à proximité de la tombe de sa soeur. Testament des plus ordinaires, mais pas en Syrie où les routes sont disputées par des hommes en arme de toutes obédiences qui arrêtent, enlèvent, rançonnent ou tuent, selon leur humeur du moment, ceux qui n'appartiennent pas à leur communauté confessionnelle.  Dans le voyage de Damas, Annabi... >Voir plus
Que lire après La mort est une corvéeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un grand choc que ce livre... qui curieusement, alors que le sujet est "abominablement" sombre, qui ne parle quasiment que de la mort, s'infiltrant partout... reste un texte combatif, d'une vitalité rare exprimée à travers un humour corrosif, mais aussi par des fulgurances poétiques, d'instants de répit [ si rares... qu'être en vie prend une valeur
démultipliée ..]

Dans mes dernières lectures,je me disperse aux 4 coins de la planète, entre la Chine, l'Inde, l'Algérie et cette fois, la Syrie !...
Je fais connaissance pour la première fois avec cet écrivain syrien, Khaled Khalifa.

Un humour acide...Une fratrie de 3 enfants doit enterrer leur père, selon ses dernières volontés, aux confins d'un pays, en guerre ! Et nous verrons, ce n'est pas une mince affaire !!
Une sorte de "MISSION IMPOSSIBLE" !...où les obstacles s'ajoutent sans fin, où la fratrie passe par tout un éventail d'émotions et de sentiments ambivalents, les uns envers les autres !

Des frères et des soeurs qui n'ont pas eu l'occasion de se retrouver réunis depuis une éternité...
Chacun , selon sa sensibilité réagit fort différemment à l'événement, et ne sont pas tous d'accord pour respecter les dernières volontés de leur père !

Une sorte de farce macabre, où le transport de la dépouille paternelle et son enterrement sont le prétexte d'une radioscopie du pays en guerre...où la vie et la mort n'ont plus la même valeur... Lorsque je caractérisais l'humour de cet écrivain d'acide, je pensais à sa manière de parler de LA MORT omniprésente....où rester en vie tient quotidiennement du miracle !

"Au cours des derniers mois, plus personne ne se posait de questions sur la mort et sur ce qui l'avait causée. Il était de notoriété publique qu'on pouvait mourir sous les bombardements, sous la torture dans les lieux de rétention, après un enlèvement pour exiger une rançon, ou victime de la balle d'un franc-tireur, sinon au combat. Mais mourir de tristesse ou mourir par défection du corps était devenu rare. La mort qui ne suscitait pas la colère était suspecte." (p. 49)

Cet ouvrage raconte avec une fausse neutralité la vie quotidienne dans un pays, en état de siège constant, depuis un grand nombre d'années...où la population survit comme elle peut, alors que les assassinats de la population civile sont légion, mourir de mort naturelle devient même suspect !!.


Un écrit des plus sobres, épuré pour dire l'horreur de la guerre, de la barbarie et de la mort omniprésente.....Même au milieu des bombardements, restent toujours l'espoir, les histoires d'amour....la poésie, le courage, la solidarité...

Sur la lancée de cette chronique, une envie d'établir une sélection personnelle de littérature syrienne...que je méconnais totalement. Je crois, sans hésitation, que c'est le premier écrivain syrien que je lis ! A la fois pour me familiariser un tant soit peu avec l'histoire de ce pays, et pour tenter de comprendre la tragédie qui perdure en Syrie, depuis de si longues années !

Un roman qui frappe droit au coeur, car il n'y a aucun pathos, aucune once de larmoiement, l'ensemble du récit s'en trouve renforcé dans son propos....

"Tu as besoin de bonté et de compassion pour ne pas être confronté à toi-même, et devoir reconnaître la dure vérité. Se préserver d'une mort absurde est un devoir autant sacré qu'égoïste." (...)
La mort en période de guerre est aveugle, elle ne prend pas le temps de regarder ses victimes. (p. 124)

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Je viens de terminer la lecture de deux romans de l'écrivain syrien Khaled Khalifa. Même s'ils ont bien sûr plusieurs points communs, d'autant que je les ai écoutés, lus en anglais par le même narrateur, les deux romans sont très différents. le premier « La Mort est une corvée » se passe pendant la guerre civile. Abdel Latif, un leader des forces d'opposition, meurt dans hôpital de Damas. Il fait promettre à son fils, Bolbol, de l'enterrer dans son village natal d'Anabiya, près d'Alep. le fils embarque le corps de son père dans un minivan et convainc sa soeur Fatima et son frère Hussein de l'accompagner dans ce périple.
Le voyage se fait lentement, au gré des multiples check-points instaurés par les différentes factions, gouvernementales et puis islamistes, qui contrôlent successivement les territoires sur le parcours. le récit de Khaled Kalifa mêle désespoir et humour, alors que la fratrie se déchire et puis se réconcilie, que les souvenirs amoureux reviennent en mémoire et que le corps paternel se décompose lors de ce voyage funèbre qui n'en finit pas.
Autant on peut lire « La Mort est une corvée » comme une allégorie de l'interminable guerre civile syrienne, autant « No One Prayed Over Their Graves (Personne n'a prié sur leurs tombes) » apparaît d'abord comme une célébration de la Syrie d'autrefois. le livre, qui n'est pas encore traduit en français, commence à la fin du XIXème siècle, alors qu'Alep est encore sous domination ottomane. Hanna, un chrétien et Zakaria, un musulman, sont amis depuis l'enfance quand les parents du second ont accueilli le premier dont la famille a été massacrée. Tous les deux viennent de milieux aisés : ils passent leurs jeunesses dans les plaisirs, voyagent jusqu'á Venise et font construire à Alep, par un ami juif architecte, une « citadelle » pour y accueillir les plus belles courtisanes.
Cette vie de débauche et d'insouciance, que leurs mariages respectifs n'interrompent pas, s'arrête brutalement lorsqu'une inondation ravage leur village en dehors d'Alep, semant mort et désolation dans leurs familles. Ce roman fleuve nous emmène alors au fil de l'histoire de la Syrie, de la chute de l'Empire Ottoman à la naissance de la République syrienne, en passant par l'arrivée des survivants du génocide arménien et l'occupation française. Marqués par la tragédie, Hanna et Zakaria maintiennent leur amitié, envers et contre tout, alors qu'autour d'eux un monde s'écroule.
La bourgade dans les environs d'Alep dans lequel Hanna et Zakaria retournent après la tragédie s'appelle aussi Anabiya. le même nom, fictif, que celui du village où Bolbol a promis d'enterrer son père. Khaled Khalifa est lui aussi né près d'Alep. Malgré la censure, la torture (arrêté lors d'une manifestation en 2012, il ressort de prison avec la main brisée) et la guerre, il n'a jamais quitté la Syrie. Il est mort d'une crise cardiaque à Damas en septembre 2023.

Lien : https://www.lecturesdevoyage..
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Nabil, surnommé Boulboul, assiste son père mourant et lui fait la promesse de l'enterrer dans son village natal. Mais ils sont à Damas, et il faut se rendre pour cela dans le nord de la Syrie, un pays en guerre. Boulboul a vite regretté sa promesse, mais il entraîne son frère et sa soeur dans cette épopée. Il faut y arriver coûte que coûte.
Khaled Khalifa nous raconte ce voyage avec beaucoup de talent. Il décrit ainsi la vie quotidienne de bien des Syriens, leurs choix douloureux, les petites lâchetés, le courage de certains, la place de la femme à travers les souvenirs de Boulboul et de son père.
Car le voyage est plus long que prévu : cela laisse le temps de se remémorer des souvenirs.
Le sujet de ce livre est grave mais j'ai pris plaisir à le lire parce qu'il décrit des relations entre êtres humains dans un contexte particulier. Il décrit des hommes qui se prennent pour des héros devant la femme qu'ils aiment, mais se retrouvent bien faibles confrontés à leurs propres peurs.
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Avant de mourir à l'hôpital de Damas, Abdellatif al-Sâlim a demandé à son fils Nabil, que tout le monde appelle Boulboul, de l'enterrer dans son village natal de ‘Anâbiyya, près d'Alep, à côté de la tombe de sa soeur Leila. Plus facile à dire qu'à faire. Boulboul, son frère Hussein et leur soeur Fatima embarquent le cadavre du père avec quelques pains de glace dans un microbus pour un trajet qui devrait durer moins d'une journée et qui va en prendre trois. Pour aller de Damas, tenue pas le régime, à ‘Anâbiyya, en zone rebelle, il faut en effet franchir de nombreux barrages contrôlés par divers groupes armés. Ces check-points sont les lieux de tous les risques si l'on n'a pas les bons papiers, le bon lieu de naissance ou le bon nom de famille. A une occasion la dépouille est même mise temporairement aux arrêts. C'est l'occasion pour l'auteur de nous dresser le tableau terrifiant d'une Syrie détruite et d'une société laminée par la guerre et la violence qu'elle a engendrée.

Pour affronter ce voyage éprouvant en compagnie du cadavre en putréfaction de leur père, les frères et soeur ne peuvent guère compter sur un quelconque amour familial : depuis des années ils se fréquentent le moins possible et cela leur convient tout à fait. Boulboul, le personnage principal, est un homme timoré qui s'est accoutumé à une vie étriquée, essayant simplement de survivre. Ce périple est l'occasion pour lui re reconsidérer toute l'histoire des relations familiales et de mettre à jour les mensonges de son père sur lesquels elle était bâtie. Malgré cette prise de conscience la fin n'offre guère d'espoir. Comment pourrait-il en être autrement ?

Un point négatif au sujet de la traduction : elle comporte des maladresses de français (concordance des temps) voire même, plus problématique, des passages difficilement compréhensibles.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Elle parcourait calmement les rues désertes, regardait les obus s'abattre sur le village, et se disait qu'ils ne pouvaient plus tuer que la peur, vu qu'il n'y avait plus personne au village. (...)
Une guerre longue porte en elle ses vents, qui se lèvent sur tous, n'épargnent rien, transforment les êtres, les idées et les rêves, et mettent à l'épreuve la capacité de résistance des hommes. (p. 108)
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Heureux ceux qui vieillissent avec leur amour. La vieillesse est une reconquête délibérée de l'enfance. Entre l'enfance et la vieillesse, il y a quelques années à occuper ou à perdre, qui sont néanmoins nécessaires pour arriver à saisir le véritable sens du temps. (p. 96)
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Très souvent Boulboul observait son père et sa mère qui passaient de longs moments dans leur jardin. Ils prenaient leur temps pour récolter les fruits des trois oliviers. Ils le faisaient à la façon des journaliers. Ils prenaient leur petit-déjeuner sous l'arbre et discutaient pour déterminer les quantités d'olives à offrir aux amis. Boulboul disait à Lamia que les fleurs de la maison étaient la clé de l'amour qui liait son père à sa mère. (p. 78)
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Au cours des derniers mois, plus personne ne se posait de questions sur la mort et sur ce qui l'avait causée. Il était de notoriété publique qu'on pouvait mourir sous les bombardements, sous la torture dans les lieux de rétention, après un enlèvement pour exiger une rançon, ou victime de la balle d'un franc-tireur, sinon au combat. Mais mourir de tristesse ou mourir par défection du corps était devenu rare. La mort qui ne suscitait pas la colère était suspecte. (p. 49)
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La peur qui avait longtemps accompagné Boulboul se réveilla. Il souhaita que sa maison fût proche, il aurait pris un bain, se serait lavé le corps de toutes les odeurs qui lui collaient, l'odeur du cadavre, l'odeur de la famille, l'odeur de la révolution et l'odeur du régime, avant de retrouver sa paix intérieure. (p. 182)
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