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Critique de LecturesdeVoyage


Je viens de terminer la lecture de deux romans de l'écrivain syrien Khaled Khalifa. Même s'ils ont bien sûr plusieurs points communs, d'autant que je les ai écoutés, lus en anglais par le même narrateur, les deux romans sont très différents. le premier « La Mort est une corvée » se passe pendant la guerre civile. Abdel Latif, un leader des forces d'opposition, meurt dans hôpital de Damas. Il fait promettre à son fils, Bolbol, de l'enterrer dans son village natal d'Anabiya, près d'Alep. le fils embarque le corps de son père dans un minivan et convainc sa soeur Fatima et son frère Hussein de l'accompagner dans ce périple.
Le voyage se fait lentement, au gré des multiples check-points instaurés par les différentes factions, gouvernementales et puis islamistes, qui contrôlent successivement les territoires sur le parcours. le récit de Khaled Kalifa mêle désespoir et humour, alors que la fratrie se déchire et puis se réconcilie, que les souvenirs amoureux reviennent en mémoire et que le corps paternel se décompose lors de ce voyage funèbre qui n'en finit pas.
Autant on peut lire « La Mort est une corvée » comme une allégorie de l'interminable guerre civile syrienne, autant « No One Prayed Over Their Graves (Personne n'a prié sur leurs tombes) » apparaît d'abord comme une célébration de la Syrie d'autrefois. le livre, qui n'est pas encore traduit en français, commence à la fin du XIXème siècle, alors qu'Alep est encore sous domination ottomane. Hanna, un chrétien et Zakaria, un musulman, sont amis depuis l'enfance quand les parents du second ont accueilli le premier dont la famille a été massacrée. Tous les deux viennent de milieux aisés : ils passent leurs jeunesses dans les plaisirs, voyagent jusqu'á Venise et font construire à Alep, par un ami juif architecte, une « citadelle » pour y accueillir les plus belles courtisanes.
Cette vie de débauche et d'insouciance, que leurs mariages respectifs n'interrompent pas, s'arrête brutalement lorsqu'une inondation ravage leur village en dehors d'Alep, semant mort et désolation dans leurs familles. Ce roman fleuve nous emmène alors au fil de l'histoire de la Syrie, de la chute de l'Empire Ottoman à la naissance de la République syrienne, en passant par l'arrivée des survivants du génocide arménien et l'occupation française. Marqués par la tragédie, Hanna et Zakaria maintiennent leur amitié, envers et contre tout, alors qu'autour d'eux un monde s'écroule.
La bourgade dans les environs d'Alep dans lequel Hanna et Zakaria retournent après la tragédie s'appelle aussi Anabiya. le même nom, fictif, que celui du village où Bolbol a promis d'enterrer son père. Khaled Khalifa est lui aussi né près d'Alep. Malgré la censure, la torture (arrêté lors d'une manifestation en 2012, il ressort de prison avec la main brisée) et la guerre, il n'a jamais quitté la Syrie. Il est mort d'une crise cardiaque à Damas en septembre 2023.

Lien : https://www.lecturesdevoyage..
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