Il est rare qu'une seule et même oeuvre se révèle être à la fois une réussite littéraire, cinématographique et musicale. «
Petit Pays » du rappeur et primo-romancier
Gaël Faye, fait sans nul doute partie de ce comité restreint.
Nous sommes au Burundi, dans les années 90. Gabriel – surnommé Gaby – est métis. Son père est français et sa mère est une Rwandaise d'origine Tutsi. Avec sa soeur, il mène une vie pépère, rythmant ses journées entre l'école et les bêtises avec ses copains.
Toutefois, son monde va s'écrouler : il y a d'abord le divorce de ses parents, puis les tensions politiques voire ethniques entre les Hutus et les Tutsis qui vont aboutir au génocide du Rwanda et une guerre civile au Burundi. Gaby se sent étranger à tout cela mais la réalité va vite le rattraper.
À la manière d'un Petit-Nicolas qui aurait été pris dans le génocide Rwandais, le drame côtoie un humour et une légèreté héritée de l'enfance, avant que l'insouciance ne s'efface au profit de la gravité de la situation. En somme, l'histoire d'un paradis perdu.
Ce livre est est avant tout une histoire personnelle douloureuse (la séparation d'un couple, un enfant malheureux) doublée d'un contexte historique dramatique (le coup d'État au Burundi, le génocide au Rwanda).
Gaël Faye raconte sans prendre parti, avec un talent indéniable et une tendresse remarquable. Les événements gagnent en gravité au même rythme que Gaby, notre jeune narrateur, est arraché au bonheur et à l'innocence de son enfance le lecteur assiste au fil de sa lecture à la métamorphose du personnage qui, au début, apparaît clairement comme un enfant puis, qui grandit en parallèle de la guerre.
Ce passage entre l'insouciance et la conscience se matérialise également dans une évolution du style d'écriture : Gaby quitte son habit de petit enfant candide et le récit se révèle plus grave, plus lourd.
On notera également l'hommage rendu au pouvoir de la lecture : Gaby se réfugie dans les livres pour oublier la guerre et ses conséquences qui éclatent dans son «
petit pays ».
Prix Goncourt des Lycéens en 2016, "
Petit pays" fait partie de ces livres dont vous avez régulièrement pu apercevoir la couverture dans les transports en commun, tant ce roman partiellement autobiographique de
Gaël Faye, a été un best-seller. Que le cinéma ait fini par s'en emparer n'est donc pas surprenant, et c'est à
Eric Barbier que le long métrage est revenu, après son adaptation de “
La Promesse de l'aube” de
Romain Gary. Une adaptation cinématographique fidèle au roman qui se termine avec la chanson éponyme de
Gaël Faye, tout autant réussie.
En résumé, “Petit” pays mais “grande” oeuvre… Avant tout une réussite littéraire - grâce notamment à une narration évolutive ingénieuse - mais également un film et une chanson remarquables.
Lien :
https://www.instagram.com/p/..