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EAN : 9782021524857
176 pages
Seuil (05/01/2024)
3.69/5   31 notes
Résumé :
Le brave soldat Sam ne dispose plus que de quelques fractions de secondes avant d’être enveloppé par les flammes d’une vague de napalm qui se précipite sur lui. C’est l’occasion de s’inventer en urgence une biographie et de se raconter des histoires. Il s’entoure alors de personnages féminins hauts en couleur : des grand-mères centenaires qui dirigent le clan, des cousines à la volupté épanouie, et surtout des tantes sorcières, jeunes femmes attirantes, sexuellement... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
« Après tout, pour cet ultime pétillement d'agonie, plutôt que visionner le film de ma vie, cette suite apocalyptique que je connais par coeur et qui ne m'apportera aucun plaisir de découverte, autant composer un roman. Un petit roman hurlé en accéléré, à toute vitesse. A la va-vite. (...) Voyager une dernière fois. Dire tout, inventer tout, ne pas s'affoler en face de l'indicible. C'est dans mes cordes. Et vu comme ça, au jugé, je dispose d'une seconde. J'ai donc tout mon temps. »

Le prologue pose clairement le cadre. le narrateur, un soldat nommé Sam, va mourir brûlé dans les flammes du napalm. Aucune échappatoire possible, aucune fuite possible. Et dans la seconde qui lui reste à vivre, il va inventer un monde autre, marqué par le feu qui s'apprête à le tuer, et se donner ainsi une autre vie pleine d'autres souvenirs ; la vitesse de l'action se décalant totalement avec la vitesse de la narration qui elle se dilate. Comme Shéhérazade racontant des histoires pour échapper à la mort, Sam étire le temps de son récit dans un déploiement narratif qui brouille tous les repères classiques.

Les chapitres portent le nom d'un membre de sa foutraque famille imaginaire, quasiment que des femmes puissantes, toutes sorcières et magiciennes dont les apparitions semblent venues du fonds des temps pour lui donner des leçons de feu afin de l'aider à s'accoutumer à son destin : entrer dans le feu tout en continuant à y exister, « faire l'éternité entre deux flammes », le Graal.

Chaque tante, grand-mère, oncle ou cousine est associé à une scène à l'action fugace comme la flamme d'une allumette que l'on vient de gratter, mais qui laisse une empreinte forte et visuelle dans la tête du lecteur : un féroce oiseau de feu, une collection d'homoncules qui se collent contre le verre de leur boîte-prison, un étrange voyage initiatique sur une voie ferrée au coeur d'une montagne accessible après une longue chevauchée dans les steppes.

C'est ma première incursion dans l'oeuvre post-exotique de Volodine. Je n'ai pas cherché à comprendre ce qui m'était raconté ou à y chercher une lecture psychanalytique ou métaphorique. Je me suis laissée porter par la superbe écriture chamanique de l'auteur, je me suis mise « en mode onirique » comme certains personnages dans le livre. J'entendais la voix du narrateur comme s'il narrait à haute voix un très vieux conte plein de sagesse, de malice, de cauchemar et de poésie.

Et j'ai aimé cette expérience à la fois inclassable et stimulante. J'ai aimé cet ailleurs littéraire qui convoque un imaginaire très excitant, m'évoquant l'univers d'Enki Bilal avec en bande-son lancinante et mystique le This is the end des Doors, susurré et hurlé par Jim Morrison.

La fin m'a totalement décontenancée car je ne l'ai pas vue arriver, j'avais l'impression qu'il me restait encore plein de pages à lire. C'était brutal, et j'étais déçue qu'elle ne revienne pas factuellement sur le prologue en le complétant ou apportant une réponse. J'attendais bêtement un bouquet final classique. En relisant les dernières pages, je les ai finalement trouvées certes frustrantes, mais cohérentes, en écho à la dernière seconde qu'il reste à vivre à Sam. Des dernières gouttes de vie à suspendre pour l'éternité.
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« Je flambe dans le brasier à l'ardeur adorable ».

Cette citation d'Apollinaire sied à merveille au dernier opus d'Antoine Volodine. Goutte essentielle d'huile volodinienne, « Vivre dans le feu » concentre avec tendresse et facétie en effet tous les éléments de l'univers chamanique de ce singulier auteur qui a su développer, au fil des livres, un monde à nul autre pareil.

Ce roman est situé, comme tous les autres romans de l'auteur et également les romans de ses nombreux pseudonymes, dans le courant post-exotique qu'on pourrait qualifier, pour imager grossièrement, de post-post apo, la catastrophe étant désormais plus qu'un vague souvenir et la société entièrement détruite, quelques âmes errent et seul le clan a valeur de refuge. le post-exotisme c'est la dystopie ultime qui l'éloigne ainsi de la science-fiction pour former un courant singulier et marginal où les repères spatio-temporels ont explosé, où les codes sont autres, où rêve et réalité se confondent.

Nous faisons la connaissance du soldat Sam destiné à finir dans le feu. En effet, alors que lui et ses hommes, en terrain découvert, font face à l'arrivée inéluctable d'un nuage orangé de napalm déversé par avion, ne pouvant plus ni fuir ni se cacher, puisqu'il est certain de mourir, qui plus est dans d'atroces souffrances, il décide de faire un pied de nez à l'inéluctable et, les quelques secondes restantes, de composer un roman, un petit « roman hurlé, en accéléré ». Quelques microsecondes suffisantes, le temps d'un craquement d'allumettes, le temps d'un clignement de paupières, ou encore d'un ultime pétillement d'agonie, pour fuir dans l'imaginaire à défaut de fuir physiquement, avec dignité, face à la douleur sans doute inouïe qui déferle.

« Et vu comme ça, au jugé, je dispose d'une seconde. J'ai donc tout mon temps ».

Dans cette grandiose mais brève aventure imaginaire, Sam invente une histoire fantastique et fantasque, il s'imagine membre d'un clan composé de tantes et de grands-mères, d'une petite poignée d'oncles aussi. Les tantes de Sam cherchent à lui apprendre à « vivre dans le feu ». Des femmes belles et fortes, chamaniques, des femmes ancestrales, sans âge, qui ne sont menacées que par ce qui reste de la société, tueurs en tout genre, hommes et femmes davantage mus par la violence et les instincts primaires que par la volonté de refaire société. Cette dernière, en tant que telle, est détruite depuis bien longtemps.
Manuel pour débutants expliquant comment être dans les flammes, mentionnant la déformation de l'espace-temps à l'intérieur des flammes, travaux pratiques, expériences, anecdotes, voilà ce que lui transmettent ces tantes et grands-mères, certains hommes de la famille ayant pour destinée de vivre dans le feu. Pourquoi pas Sam ? Ainsi décident-elles de lui transmettre le flambeau si on peut dire, de lui donner de solides leçons de feu pour savoir exister dans le feu et arrêter d'être étranger au feu. Faire l'éternité entre deux flammes.

« L'habituation au feu n'est pas chose facile. J'en parlerai plus tard si les événements ne se précipitent pas ».


Si le feu nucléaire de Terminus radieux laisse place ici aux flammes du napalm, les paysages sont très proches de ceux traversés dans les autres livres de l'auteur, un paysage redevenu sauvage composé d'immenses steppes aux herbes hautes et sèches, ondulantes, vertes et argentées, aux fleurs et graminées comme les aime l'inventif Volodine, « touffes d'avoine sauvage, mirmine-bréhaigne, fière-mirmine, shizane –violette », immensités entrecoupées par endroit par des étendues désolées, anciennes mines, vestiges éparpillées d'anciens déserts industriels, ou casses immenses. La poésie émane de ces lieux désolés et hypnotise, un peu à l'image des photographies de lieux abandonnés, l'urbex.

« Jeep hors d'usage, berlines cabossées, écrasées, autocars désossées, démantelés, incendiés, caravanes éventrées, citernes vides, déchirées, camionnettes, camions, machines agricoles aux fonctions indiscernables, engins de chantier, matériel de l'armée. Coulures d'huile de vidange, odeurs jamais disparues de pneumatiques, de peinture en désagrégation, de carburants divers, de matières plastiques déjà en miettes. Un monde silencieux, puant, dangereux et désert. Un immense labyrinthe, trois dimensions qui s'étendait sur des kilomètres ».

Cette marche dans le Bardo nous plonge en mode onirique au sein d'une zone ténébreuse. L'aventure des morts ou des quasi-morts qui vont dans l'espace noir en direction d'une hypothétique renaissance ou simple survie, est une nouvelle fois mise en valeur, ici de façon très réaliste.
Roman tribal par ailleurs, cette famille dysfonctionnelle semble davantage régie par les lois claniques d'une tribu dans laquelle le noyau familial classique, père/mère/enfant, n'existe pas. La parenté concerne les oncles, les tantes et les grands-mères. le clan est la structure centrale dans l'éducation de Sam et la transmission familiale porte sur des valeurs étranges, des dons non-humains. Un clan qui casse les codes avec nos propres structures familiales et notre acception de la transmission. Les codes sont différentes, j'en veux pour preuve l'inceste qui n'est ici pas un tabou.

Alors que le sujet est atroce, mourir dans du napalm n'est pas sans rappeler de sombres moments historiques depuis l'holocauste en passant par l'image insoutenable de cette petite fille au corps ravagé, j'ai trouvé que l'humour noir était très présent et d'ailleurs dès l'incipit. Humour noir et humour fantastique lorsque l'on pense aux homoncules de Tante Yoanna qui a, en modèle réduit et à sa merci, dans une sorte de terrarium, des hommes qui dans la vie l'importune…De quoi leur faire faire ce qu'elle veut. C'est croquignolet à souhait…


Toujours aussi sombre, étrange, radicale, mais peut-être un peu moins sensorielle et poétique que mon préféré de Volodine, Des anges mineurs, mais paradoxalement plus facétieux, voire drôle, la dernière pierre de l'édifice post-exotique de Volodine n'est certainement pas la plus importante de l'édifice mais c'est sans doute la plus accessible du fait de la malice évoquée. Ce livre est d'autant plus important qu'il s'agirait du dernier livre signé Volodine dans l'épopée post-exotique, terminus incandescent qui en rend la lecture d'autant plus touchante.

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« Ma dernière cendre sera plus chaude que leurs vies » carnets de la poétesse russe Marina Tsvetaieva réunis par Tzvetan Todorov dans ‘Vivre dans le feu'.

Gros Plan sur l'image du napalm, symbole de la violence de la guerre et de l'impuissance des populations civiles.
Au coeur du tableau, dans une guerre innommée, le soldat Sam : il va mourir, c'est une affaire de secondes, le temps que la fureur du feu le saisisse.
Puisque l'on va mourir, « autant composer … un petit roman hurlé, en accéléré ». Avant que tout se termine, il faut « voyager une dernière fois », « dire tout, inventer tout, ne pas s'affoler en face de l'indicible ».
Et nous découvrons des « narrats », plus ou moins longs, une narration éclatée. Vont se succéder d'étonnantes figures féminines, cousines, tantes ou grands-mères, unies dans le brigandage et le chamanisme.
Réduction des pères en homoncules évoluant dans un monde souterrain .Funérailles traditionnelles du grand-père Bögdrom : découpe et abandon de sa dépouille aux vautours. Sam raconte sa formation aux techniques permettant d'entrer dans « le monde noir » et de vivre enfin, dans le feu.
Ce dernier livre signé Volodine, écrit avec limpidité, sans les complexités langagières et narratives des précédents pourrait désorienter certains lecteurs déjà accoutumés à l'auteur.
Pour les autres, au contraire, ce sera une introduction au « Post exotisme ».
Elli Kronauer, Manuela Draeger (pour la jeunesse) Lutz Bassmann, Antoine Volodine et même un collectif '' Infernus Iohannes ‘', (peut-être d'autres !), sont les écrivains de ce mouvement. Mais, tous, sont des pseudonymes derrière lesquels se cache le nom du seul véritable auteur de ces romans.
Chacun de ces écrivains devient «réel», avec sa maison d'édition, son style.
D'abord sans vision d'ensemble, la suite des oeuvres aboutit à une somme qui se différencie de la science-fiction. se signale par sa radicalité, son étrangeté, son humour noir, sa poésie.
Ils construisent un monde onirique, hanté par l'histoire des tragédies humaines du XXe siècle, la révolution et sa violence, où le chamanisme et le livre des morts tibétain ont leur part.
On a parfois tenté de le décrire comme une tentative de « créer un univers étranger à la culture française et francophone et d'écrire en français une littérature étrangère ».
D'abord orienté politiquement par l'effondrement des rêves humanitaires : fin des idéologies, basculement de la révolution vers sa caricature, sa trahison.
Puis évoluant vers le refus d'une « écriture de la clarté », une mise en cause des romans qui se veulent politiques parce qu'ils abordent des sujets sociaux mais ne développent par là que des écrits plats. Persuadé que littérature et politique ne peuvent se rencontrer que dans l'invention formelle et l'imagination.
Bien sûr, les lecteurs de ces ouvrages ont le sentiment d'appartenir à une communauté, comme celle des proustiens, qui sait que les temps les plus sombres peuvent avoir aussi les « éclats trompeurs de la transparence communicante ».

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Ce dernier roman de Volodine se présente comme une sorte de chronique familiale à la première personne : le narrateur et héros, Sam, sur le point d'être consumé dans un bombardement au napalm, emploie sa dernière seconde de vie à raconter, en douze chapitres, ses rencontres avec une infinité de grands-mères et de tantes variées, dans un univers post-apocalyptique situé dans un avenir lointain, bien après l'effondrement de la civilisation telle que nous la connaissons. le lecteur rencontrera les éléments familiers qui font le charme des autres romans de Volodine, et ce sera pour lui un plaisir de redécouverte et de retrouvailles. En revanche, qui voudra savoir si le romancier a progressé et fait évoluer son univers, s'il n'a pas caché dans les replis de ses pages quelques malices post-exotiques, numérologiques et bardo-tibétaines, devra soumettre ce petit roman à un examen et à un épluchage minutieux qu'il ne me semble pas absolument mériter. Faire loger tout un univers et ses récits dans la dernière seconde de vie d'un héros, est un procédé qui rappelle Clive Barker, si je ne me trompe, et aussi Jorge-Luis Borges, mais je n'ai pas poursuivi plus loin l'analyse. Que d'autres, plus passionnés et plus intéressés, s'y consacrent.
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J'ai lu mon premier Volodine en 1985 et si j'en crois la quatrième de couverture celui-ci est le dernier . Tel qu'en lui-même l'éternité le change , l'auteur nous entraine dans son monde habituel :une sorte de Mongolie (plaine , yourte et cavaliers) où se rencontrent les traces d'un monde post-soviétique après apocalypse. le narrateur , Sam ,prêt à être carbonisé au napalm revoit sa vie au sein de son clan .A travers une série de portraits de parents (principalement des femmes , grand-mères, tantes ,cousines) il peint son apprentissage magique le préparant à « vivre dans le feu » . le lecteur doit se dire ,comme le narrateur, « il fallait que je me trouve comme un poisson dans l'eau dans le bizarre » . Et comme toujours Volodine nous y immerge et c'est bon !
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critiques presse (4)
LeMonde
26 février 2024
L’écrivain très secret qui signe, entre autres pseudonymes, Antoine Volodine affirme être près d’achever son œuvre avec la parution de « Vivre dans le feu ». Une bonne raison de profiter de son incandescence littéraire, avant que le froid ne gagne.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
22 février 2024
Ce qui frappe surtout, c’est qu’il n’y a rien de pesamment testamentaire dans ce roman nerveux, d’une alacrité étincelante, plutôt bref et bien dans la manière d’un écrivain définitivement singulier.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
02 février 2024
Dans un instant Sam est mort. Il le sait. C’est là qu’arrive l’idée qui porte le livre : en lieu et place de sa vie, c’est « un petit roman hurlé en accéléré » qui va défiler dans sa tête, procédé narratif efficace qui fascine d’emblée le lecteur. « Je dispose d’une seconde donc j’ai donc tout mon temps », dit Sam, ce qui est très volodinien.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeFigaro
09 janvier 2024
On commence "Vivre dans le feu" par le début, mais on pourrait tout aussi bien le prendre par la fin. Il est un cercle. Infernal.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Je ne résistais plus guère, mais je prenais mon temps.
Quand on y pense, j'avais encore une grosse seconde devant moi.
Peut-être même deux. Ça me laissait de la marge pour voir venir.
………………..

Voyager une dernière fois. Dire tout, inventer tout, ne pas s'affoler face à l'indicible.
C'est dans mes cordes.
Et vu comme ça, au jugé, je dispose d'une seconde.
J'ai donc tout mon temps.
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Les proches du défunt rémunèrent les fossoyeurs, mais ils les méprisent, ils les craignent, et pour rien au monde ils ne s’aventureraient à leur serrer la main. D’ordinaire. Mais grand-mère Abazane ne l’entendait pas ainsi. Elle avait été élevée chez des gens de très basse caste et elle ne ressentait sans doute aucun dégoût envers les misérables du bas de l’échelle, les travailleurs chargés de remettre le défunt aux envoyés du ciel. Peut-être aussi souhaitait-elle vérifier de visu que grand-père Bödgröm allait bel et bien être tronçonné, tranché et malaxé en boulettes jetées aux oiseaux, selon le rituel établi depuis des siècles. Les boulettes seraient englouties par les oiseaux, elles feraient un très court voyage à basse altitude et, qu’on le veuille ou non, elles finiraient sous forme de crottes puantes.
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Les chats. Des bêtes affectueuses, facilement ronronnantes, mais qui ne se laissaient caresser que par elle et qui crachaient quand on voulait leur faire des câlins. En réalité, une pure excroissance organique de ma grand-mère, des compléments fauves qui n’obéissaient qu’à elle. Zahime, Dadouk, Mimine, Chichi, Mitsuko. On avait envie de se frotter languissamment à eux et, dès qu’on approchait la main, on se prenait un coup de griffe.
L’air sentait le renfermé animal, la fourrure, les biscuits trempés dans du lait, le parquet de nombreuses fois compissé, les vêtements en laine. Sans oublier les aigreurs mal dissimulées d’un corps de vieillarde.
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L’avion a commencé son épandage de napalm en haut du village. Je ne sais à quelle civilisation modèle il appartenait ni en quel charabia le pilote conversait avec sa base et les donneurs d’ordre. Une langue d’assassins, forcément, mais peut-être pas de l’américain militaire basique.
(Incipit)
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J'ai laissé s'écouler un silence. Je ne suis pas grand orateur. Après une poignée de phrases, en général, je préfère me taire. Depuis toujours je suis conscient de la vanité de tout discours. Et je suis convaincu, par expérience, que ce que je formule avec difficulté est interprété de travers par mon interlocuteur. Quel que soit mon interlocuteur, femme ou homme, ami ou ennemi, indifférent ou non. Et, très vite, j'ai honte d'avoir pris la parole. Prendre la parole est une erreur, la plupart du temps c'est un geste de survie pitoyable. Une tentative misérable de faire exister au-dehors un petit quelque chose qu'on a en soi. On expose ça devant les autres, on se trahit, on se dénude, on est bêtement désarmé, c'est obscène et c'est raté.

p.15
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Vidéo de Antoine Volodine
Rencontre animée par Pierre Benetti
Depuis plus de trente ans, Antoine Volodine et ses hétéronymes (Lutz Bassmann, Manuela Draeger ou Eli Kronauer pour ne citer qu'eux), bâtissent le “post-exotisme”, un ensemble de récits littéraires de “rêves et de prisons”, étrangers “aux traditions du monde officiel”. Cet édifice dissident comptera, comme annoncé, quarante-neuf volumes, du nombre de jours d'errance entre la mort et la réincarnation selon les bouddhistes. Vivre dans le feu est le quarante-septième opus de cette entreprise sans précédent et c'est le dernier signé par Antoine Volodine. On y suit Sam, un soldat qui va être enveloppé dans les flammes quelques fractions de seconde plus tard, quelques fractions de seconde que dure ce livre, fait de souvenirs et de rêveries. Un roman dont la beauté est forcément, nécessairement, incandescente.
À lire – Antoine Volodine, Vivre dans le feu, Seuil, 2024.
Son : Axel Bigot Lumière : Patrick Clitus Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
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