Depuis la nuit des temps, l'homme s'est fié à son instinct de conservation, un instinct qui lui dicte d'avoir peur et de fuir devant ce qui est étranger, inhabituel, bizarre. Et il avait bien souvent raison. Cela lui a sauvé la peau.
Aujourd'hui, cet instinct est encore présent en nous, et il nous trompe parfois.
L'étranger qui fuit son pays, à cause de la guerre, des persécutions, de la faim, de la violence, nous ressemble. Mettons-NOUS un instant à sa place et alors, nous devenons EUX. Quel homme ne chercherait pas à fuir pour sauver sa peau, pour permettre à sa famille de ne pas trembler sous les bombes, de pouvoir penser librement, de manger à sa faim … de vivre dignement ?
C'est un instinct naturel, l'instinct de survie.
L'immigré d'hier, l'étranger, est devenu un Français, un Canadien… il a apporté sa force, sa différence, il nous a enrichis. Les immigrés d'aujourd'hui, qui se massent à nos frontières, sont l'Européen, l'Américain… de demain. Il n'y a pas de frontière pour l'humanité, la générosité.
Cela me rappelle les mots d'une petite fille :
« C'est pas parce qu'on est né dans un pays qu'on n'a pas le droit d'aller dans un autre, parce que la terre elle appartient à tout le monde. C'est pas parce qu'on est né à un endroit que cet endroit nous appartient à nous et pas aux autres. »
(Lila. le racisme vu par les enfants de Mantes-la-Jolie, Enfants de tous les temps de tous les mondes.)
Et puis, selon la Déclaration universelle des droits de l'homme :
" Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne."
Un texte de Daniel Pennac pour réfléchir sur nos peurs, les balayer, éliminer leur ombre, afin de raisonner avec plus de clarté.
Huit petits textes de Jessie Magana et Carole Saturno, comme les huit lettres du mot Réfugié, pour comprendre la notion de Réfugié, Étranger, Frontière, Urgence, Guerre, Immigration, Économie, Solidarité.
Un petit livre simple et efficace qui devrait être lu par le plus grand nombre, surtout les plus jeunes, pour se faire une idée des Réfugiés, d'Eux, autre que celle véhiculée dans les médias. Pour comprendre qu'Eux c'est nous.
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Quarante éditeurs jeunesse ont créé un collectif pour « porter un message de bienvenue et de solidarité » aux réfugiés.
Sur la couverture, un regard plein de détresse, la posture d'un enfant (ou d'un adulte) malheureux, terrifié, perdu, affamé, gelé.
Huit pages dans lesquelles Daniel Pennac évoque le drame des réfugiés.
Huit lettres, R.É.F.U.G.I.É.S., pour huit mots-clefs que développent Jessie Magana et Carole Saturno : R comme Réfugié, É comme Étranger, F comme Frontière, U comme Urgence, G comme Guerre, I comme Immigration, É comme Économie, S comme Solidarité.
Le tout illustré par Serge Bloch, dessinateur de la série 'Max & Lili'.
Des rappels salutaires, pour réfuter les idées reçues et combattre les amalgames faciles et trompeurs. Ces messages ne convaincront peut-être que ceux qui y adhèrent déjà, mais il n'est jamais trop tard pour les transmettre à nos enfants et adolescents. Quelques idées importantes :
• l'afflux de réfugiés n'est pas une « invasion » menaçante - rapporter le faible nombre de demandeurs d'asile (1 million ?) aux populations française (66 millions d'individus), européenne (508 millions), mondiale - malgré les termes et images relayés par les médias (exode, masses, hordes, déferlement, multitude, marée humaine...)
• Pennac conclut que « ce n'est pas une question de nombre, mais de volonté »
• on doit vaincre notre peur naturelle de l'autre
• depuis un siècle, la France s'est peuplée et enrichie grâce à l'immigration (Juifs, Arméniens, Russes, Espagnols, Italiens, Grecs, Polonais, Portugais, Maghrébins, exilés d'Amérique latine, etc.)
• d'ailleurs un Français sur quatre est d'origine étrangère par ses grands-parents
• les étrangers ne sont pas des assistés, mais contribuent au contraire à la vie économique d'un pays
• les réfugiés quittent un pays dans lequel ils sont en danger
• nous les accueillons au compte-gouttes : depuis le début de l'année 2015, plus de 3 000 hommes, femmes et enfants ont perdu la vie en tentant de traverser la Méditerranée. En 2014, seulement 28% des réfugiés ont obtenu l'asile.
• or la France est l'un des six pays les plus riches du Monde, il reste encore de la place et des ressources à partager...
• « En Europe, pendant la seconde guerre mondiale, devant l'avancée des nazis, de nombreuses personnes ont quitté leur domicile et se sont réfugiées dans le Sud de la France ou à l'étranger. Cet exode a concerné 8 à 10 millions de personnes ». Donc EUX, C'EST NOUS (ça l'a été, ça le sera), CQFD.
Tendons nos mains - pour leur souhaiter la bienvenue, pas pour pousser dehors ceux qui sont déjà là...
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Un petit livre à mettre entre toutes les jeunes mains : puissant antidote à l'indifference, à l'intolérance, à l'aquoibonisme, à la défiance que les discours ambiants, depuis des annees, et singulierement depuis les attentats terroristes sur le territoire français , tentent d'instiller dans les cervelles!
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Ils montrent inlassablement les mêmes images : des images de foules. Des grappes humaines accrochées à des bateaux qui coulent, des foules parquées dans des camps qui ne peuvent pas les contenir, d’immenses colonnes de victimes jetées sur des routes jusqu’à l’horizon. Et pendant que nos yeux ne voient que ces images, nos oreilles n’entendent que ces mots :
EXODE
MASSES
HORDES
DEFERLEMENT
MULTITUDE
INVASION
Du coup, ce n’est plus l’homme qui souffre que nous voyons sur ces images, ni la femme ni l’enfant… Ce ne sont plus des êtres humains, c’est un grouillement, un pullulement, un déferlement. Une effrayante menace. Avec ces phrases qui bourdonnent comme des guêpes autour de ces images :
« Nous ne pouvons pas accueillir tout le malheur du monde ! »
« Pas la même culture… »
« Pas la même religion… »
« Pas les mêmes coutumes… »
Les mots 'étrangers' et 'étranges' ont la même racine. L'étranger, c'est « celui qui vient du dehors, de l'extérieur ». Souvent, face à l'inconnu, les premiers réflexes sont la peur et le rejet qui nourrissent la xénophobie (l'hostilité à l'égard des étrangers) et le racisme. Pourtant, tout au long du XXe siècle, la France a accueilli des réfugiés de tous pays. Elle a également fait venir des étrangers quand elle manquait de travailleurs. La plupart d'entre eux sont restés, se sont intégrés, et leurs enfants sont devenus français. Aujourd'hui, un Français sur quatre est d'origine étrangère par ses grands-parents.
(p. 18)
Combien sont-ils en réalité, l'homme, la femme, l'enfant qui fuient ces guerres et frappent à notre porte? Cinq cent mille? Un million? Deux?
Combien sommes-nous, ici, en France?
Soixante-six millions,
soixante-six fois plus!
Soixante-six Français ne sont pas assez nombreux pour accueillir un ou deux hommes qui souffrent?
Et, petit à petit, c'est comme si chacun d'entre nous se sentait seul et menacé par cette "marée humaine" qui n'a plus rien d'humain. Tout à coup, c'est comme si ces gens qui ne sont plus des gens, qui sont eux et pas nous, étaient beaucoup plus nombreux que nous. Comme s'ils étaient la majorité et nous, la minorité menacée. Et nous voilà tentés de nous refermer sur notre peur, sur notre refus d'aider, sur notre silence.
STOP !
Débranchons-nous. Concentrons-nous. Ecoutons un autre silence : celui dont nous avons besoin pour réfléchir un peu.
Et réfléchissons.
Un peu.
On oppose parfois les migrants qui quittent leur pays parce qu'ils n'ont ni travail, ni avenir, aux réfugiés contraints de partir à cause des violences mettant leur vie en danger. Mais n'est-il pas aussi humain de fuir la misère que la violence ?
Par Daniel Pennac
Dans le cadre du festival Italissimo 2024
Piero nourrit une passion pour les voitures de luxe, idéalement dérobées. Pendant un bref moment, le vol lui permet de s'échapper de la routine quotidienne, lui conférant l'agilité et la puissance d'un lynx. Une nuit de brouillard, il stationne sa flamboyante Alfa Romeo sur une aire de repos, prêt à piller la caisse d'un « restauroute ». C'est à ce moment-là qu'il croise le regard d'un adolescent égaré, dont l'assurance et la beauté singulière le foudroient, annonçant ainsi un bouleversement radical dans sa vie. Daniel Pennac, admirateur absolu de cette nouvelle de Silvia Avallone, nous offre une lecture inédite.
À lire – Silvia Avallone, le lynx, trad. de l'italien par Françoise Brun, Liana Lévi, 2012.
L'oeuvre de Daniel Pennac est publiée chez Gallimard.
Lumière par Hannah Droulin
Son par Lenny Szpira
Direction technique par Guillaume Parra
Captation par Claire Jarlan
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