Un texte fort et touchant.
L'album abordera la relation un peu cassée très tôt entre un père absent, parti pour des raisons mystérieuses, sans doute familiales, expliquées par l'auteur car c'est un peu autobiographique.
On le percevra donc dans son jeune héros après coup, dans ce petit garçon qui nous parlera d'un rituel de son enfance dont il se souvient, instauré entre le papa et lui. Chaque matin au réveil du petit, le rdv sera fixé:
- Lui, ne sortant pas du lit, veillant au "Toc Toc Toc" à la porte de sa chambre.
Qui cela peut-il bien être?
C'est évidemment papa qui ouvre la porte.
C'est leur code secret d'identification.
Puis, c'est leur moment à deux, on entre dans les papotages et les confidences.
Et puis un matin, le Toc Toc Toc ne vient pas.
Avec l'album s'installera un non-dit.
Il n'est plus là et puis c'est tout.
C'est la situation vue par l'enfant.
Puisqu'on ne lui dit pas, il va alors adresser une lettre à son papa et la déposer dans le salon,
si un jour il repasse sans frapper...
On a aimé l'album.
Pourquoi tenter de l'expliquer autrement pour vous, jeunes lecteurs, alors que des mots justes seront là disponibles en postface, en dédicace par l'auteur Daniel Beaty?
Voyez vous-même:
"... Quand j'étais tout petit, c'est mon père qui restait à la maison pour s'occuper de moi.
Tandis que ma mère était au bureau, il changeait mes couches, me nourrissait et me portait sur ses épaules pour aller faire des courses à l'épicerie..."
On parlera d'un homme au foyer donc, ce qui n'apparaitra pas dans le récit.
Dans le récit, le père y sera un parent très complice, sans qu'apparaisse un rôle, une charge financière ou ménagère apparente.
L'album fera ressortir l'importance de la présence masculine, virile mais sous un angle sensible, qui sera affinée avec les explications de l'auteur où avec lui nous parlerons d'un parent très présent et très à l'écoute, non d'un référent symbolique.
L' auteur:
"... c'est aussi lui qui me réveillait chaque matin, avec notre petit jeu de toc toc toc.
Lorsque j'ai eu trois ans, il a été incarcéré. Ma mère m'a accompagné pour lui rendre visite en prison.
Une vitre nous séparait.
Ca a été particulièrement traumatisant pour moi, et je n'ai pas été autorisé à lui rendre de nouveau visite avant plusieurs années.
En grandissant, j'ai pris conscience de l'énorme vide crée par l'absence de mon père.
En devenant adulte, j'ai compris que je devais faire face à la douleur causée par cette séparation.
Plus tard, en tant qu'éducateur de jeunes enfants, j'ai réalisé que beaucoup de mes élèves étaient confrontés à l'absence de leur père, qu'il soit emprisonné, qu'il ait quitté la famille après un divorce ou même qu'il soit mort.
Cette prise de conscience m'a incité à raconter l'histoire de cette perte essentielle du point de vue de l'enfant, afin d'apporter à ces jeunes l'espoir qu'ils pourront se construire la plus belle vie possible..."
Aller de l'avent.
Tout est dit.
Cela fera sens pour certains, fera réfléchir les autres, sur la figure d'un père, la place d'un père, dans une famille et nous ne serons pas du tout sur une représentation de la sécurité matérielle mais bien sur un engagement affectif.
Ça sera un bel éloge aux pères qui s'investissent avec tendresse, écoutent, conseillent, épaulent ou bien ceux qui seront, malgré eux, absents pour l'avenir mais dont les riches attentions prodigués par le passé resteront dans le coeur des "orphelins" comme une précieuse graine plantée qui va germer.
Ils les ont aimé.
Malgré la frustration et le manque, la bonté ne s'oubliera pas (la méchanceté non plus, me direz-vous).
Graphiquement, l'album sera très esthétique, riche, avec un jeu de représentations réalistes en aquarelle et toutes garnies de collages qui apporteront de la profondeur, du volume.
L'illustration collera à l'histoire, certe mais elle sera aussi digne d'exister indépendemment, comme un ensemble de tableaux artistiques à admirer pour une expo d'originaux.
Chaque "tableau" racontera sa propre histoire, présentera un instantanée de la vie d'une famille noire américaine bourré d'émotion.
L'illustrateur
Bryan Collier aura eu la chance d'entendre déclamer le texte "
Knock Knock Knock" (toc toc toc en français) sur scène, par l'auteur lui-même. Il le racontera comme une rencontre coup de coeur avec un texte d'une grande résonnance sur l'enfance. de quoi lui inspirer les images du livre que nous tiendrons entre les mains.