Ce tome comprend les épisodes 1 à 6 d'une nouvelle série commencée en 2011, par
Terry Moore (la série commencée après la fin de Echo). Il s'agit d'une série en noir & blanc.
Quelque part dans un bois, une jeune femme blonde coiffée avec une queue de cheval observe un endroit dégagé dans un large fossé. Une feuille morte sur le sol prend feu. Une main sort de terre, puis une jambe nue, puis une deuxième. Une jeune femme maculée de terre et de boue sort de cette tombe peu profonde, se redresse et se met à marcher sur une route de campagne. Elle est prise en stop par quelqu'un qui la ramène chez elle. Elle ne se souvient pas vraiment de ce qui lui est arrivée. Elle va reprendre contact avec ses amis pour déterminer ce qu'elle a fait les jours précédents et découvrir ce qu'elle est devenue. Elle commence par rendre visite à Johnny qui est thanatopracteur, à la morgue, puis à Jet qui est bassiste dans un groupe de rock local. La première jeune femme bonde apparaît également à Zoe Mann, une jeune fille d'une dizaine d'années. Plusieurs morts violentes s'en suivent.
La première chose qui attire l'oeil, ce sont les graphismes. Il se dégage un aspect pas fini de ses dessins. Il faut un peu de temps pour réussir à mettre le doigt sur ce qui déconcerte. Ce ne sont pas les proportions, ni les expressions des visages, ni les décors. L'élément un peu gênant est qu'il a une manière très particulière de figurer les textures sur les surfaces de tous types, naturelles comme manufacturées.
Terry Moore n'utilise pas les conventions habituelles de la bande dessinée pour représenter les textures ; il se contente de hachures (parfois entrecroisées) peu convaincantes qui donne un aspect de dessins amateurs. Il faut faire un effort d'abstraction de cette particularité pour pouvoir apprécier ses dessins à leur juste valeur. Il effectue lui-même le lettrage, et là aussi le manque de professionnalisme (lettrage irrégulier) étonne par rapport au travail habituel;
En effet
Terry Moore a développé un style déconnecté des comics de superhéros, original sans être expérimental. L'histoire commence avec une scène silencieuse de 9 pages. le nombre de cases varie de 4 à 6 par page, et la lecture est d'une fluidité parfaite, avec une compréhension immédiate. La curiosité naît tout de suite de cette situation bizarre, le lecteur est accroché et ne demande plus qu'à découvrir qui est cette femme ressuscitée. Moore crée des endroits plausibles et communs, il alterne les scènes en ville, en pavillon de banlieue, et dans la forêt. le rythme du récit est assez lent, sans être soporifique. le lecteur a tout loisir de flâner dans les cases pour profiter de chaque endroit. Moore semble profiter pleinement de la liberté que lui occasionne le fait d'être son propre éditeur ; en particulier la scène dans laquelle Johnny est en train de travailler sur un cadavre laisse à penser que Moore a déjà vu ce qu'il décrit.
Même si Rachel Beck a des mensurations parfaites, les autres personnages présentent des morphologies variées, en phase avec la réalité. Moore utilise le langage corporel de manière naturelle, sans pose exagérée. À part lors des scènes d'action, les personnages se comportent de manière normale, sans emphase délirante.
Terry Moore mélange des phénomènes paranormaux avec des attitudes raisonnées et posées d'adultes. Il sait aguicher le lecteur avec une situation de départ originale de la façon dont il la décrit et intrigante. Il y a un meurtrier en liberté, un crime brutal commis sous les yeux du lecteur, 2 femmes mystérieuses, une visite à la morgue, et des êtres humains complexes. Il y a quelques révélations en cours de route et quelques prémices de fils narratifs pour la suite. La lecture est divertissante, pas tout à fait assez accrocheuse pour impliquer totalement le lecteur car il faudra encore quelques épisodes avant que les personnages prennent plus d'épaisseur. Malgré le rythme en apparence nonchalant, il se passe finalement beaucoup de choses, et les personnages ont le temps d'exister petit à petit. Il n'est pas possible de parler de narration décompressée, c'est juste que comme pour tout début de série,
Terry Moore doit installer petit à petit les personnages et les situations. Il a choisi de le faire progressivement, plutôt que d'imposer de longs discours artificiels d'exposition. Si je n'ai pas été transporté par le récit, il est sûr que je serai au rendez-vous pour le deuxième tome, car le charme particulier de ce récit m'a séduit.