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Citations sur Chanson bretonne - L'enfant et la guerre : Deux contes (69)

Nous aimions bien aller chaque soir, avant la tombée du jour, à travers la lande jusqu’à cette petite maison isolée au milieu des ajoncs, contre les dunes, qui ressemblait à une maison de fées. Quand nous arrivions, avant même d’entrer dans la grande pièce, nous sentions l’odeur chaude des vaches – en hiver, une fenêtre percée dans le mur de la maison laissait venir la chaleur de l’étable. Nous entrions en écarquillant les yeux parce qu’il n’y avait pas de lampe, seulement un quinquet à pétrole qu’elle allumait le soir, et dans la pénombre les choses luisaient étrangement, la lourde table de bois, les tabourets, les marmites, et contre le mur du fond près de l’âtre, les deux lits-clos cloutés de cuivre, l’un pour Mme Le Dour et son mari, l’autre pour leurs deux filles adoptives. Le sol était en terre battue, le plafond était barré de solives noircies par la fumée, entre lesquelles on voyait l’envers des bottes de chaume de la toiture. Pour nous qui avions passé une partie de notre enfance en Afrique, au Nigeria, cela ne nous paraissait pas rudimentaire, mais ici en Bretagne, cela donnait un charme presque magique de l’ancien temps, comme si cela sortait d’un conte de Perrault illustré par Doré. « Pauvreté » ne serait pas le mot juste, c’était le sentiment d’un lieu hors du temps, oublié du monde moderne. Oui, comme d’entrer dans un dessin.
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Tous les grands voyageurs, aventuriers, avides de connaître d'autres mondes, d'autres sociétés, d'autres univers, à un moment donné réduisent leur périmètre d'action ou d'investigation, finissent par faire un choix entre le Pôle nord et le Sahara par exemple et finissent aussi par connaître comme les spécialistes d'une région en particulier, polarisent en quelque sorte leur action, leur eldorado n'est jamais disséminé, car tout simplement tout connaître est impossible et pour un artiste comme ici, l'important est de savoir de quoi on parle autrement que par fragments.
Le voyage forme la jeunesse dit-on et c'est vrai, mais tout est relatif.
Je considère que pour un écrivain qui tire par exemple des enseignements à partir de ses missions en tant qu'ambassadeur qui a sillonné le monde et qu'il finit par dupliquer ses histoires sous prétexte qu'il connaît est d'un ridicule achevé, et en tout cas ce n'est pas ce que j'ai envie de lire. Le savoir est essentiel en toute chose.
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Quelque chose du mystère de la Bretagne s'est transmis ici, est resté vivant malgré la modernité. Cela passe par certains hommes, certaines femmes, héritiers de traditions ancestrales, peut-être parce qu'ils ont été éduqués par la terre, par le vent et les saisons plutôt que par l'école communale. [...]
C'est à eux que je voudrais dédier ce petit conte, non comme une confession ou un album de souvenirs, mais comme une chanson bretonne, un peu entêtée et monotone, de celles que dit encore dans les tempêtes la Roche qui chante, ou de celles, j'imagine, que mes ancêtres ont répétées jadis en frappant la terre du pied, dans la chaleur des fêtes de nuit, avec le fond sonore aigrelet du biniou et de la bombarde, et que le vent a emportées.
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Sur des photos en noir et blanc, prises par un amateur, après le bombardement de Berlin, des enfants errent en haillons, sur fond de ruines fumantes. Dans cette imagerie de la guerre, il n'y a pas de bons ni de méchants. Il n'y a pas d'ennemis. Il y a d'un côté des enfants, de l'autre la machine aveugle et féroce, aux mains d'adultes que leurs uniformes et leurs armes mettent à l'abri de toute identification.
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Dans un coin de la côté, à l'abri du vent, nous avons allumé un feu de varechs séchés et de bois flotté, et dans une vieille boîte de conserve un peu rouillée nous avons cuisiné notre pêche à l'eau de mer, et je crois que je n'ai rien mangé d'aussi bon, malgré l'odeur de l'iode et le vague parfum de mazout des goémons. C'était comme de manger la mer.
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La nostalgie n'est pas un sentiment honorable. Elle est une faiblesse, une crispation qui distille l'amertume. Cette incapacité empêche de voir ce qui existe, elle renvoie au passé, alors que le présent est la seule vérité.
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Être né dans une guerre, c’est être témoin malgré soi ...
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La douceur des champs de pommiers autour de Quimper, ou la joliesse des vallons près des villages, en Cornouaille, au pays de Léon, ou dans l'intérieur du Morbihan, près du Blavet ou de l'Ellé, le secret de la Laïta, cela n'a pas cessé d'exister, mais cela semble des îlots au milieu de l'urbanisation galopante.
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C’est le temps qui ne passe pas. Dans la paix, la vie des enfants est rythmée par les jours, les activités, les rencontres, les jeux, les fêtes. Pour nous qui étions enfermés, tous les jours étaient identiques, toutes les nuits se ressemblaient. Même si les enfants très jeunes ne savent pas qu’ils appartiennent à une famille, à un pays, ils devinent que cela existe, qu’il y a un dedans et un dehors, des limites, une maison, et au-delà l’inconnu, l’étranger, le danger.
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Être né dans une guerre, c’est être témoin malgré soi, un témoin inconscient, à la fois proche et lointain, non pas indifférent mais différent, comme pourrait l’être un oiseau, ou un arbre. On était là, on a vécu cela, mais ça n’a pris de sens que par ce qu’on a appris par les autres, plus tard (trop tard ?).
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