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EAN : 9782384820054
Philippe Rey (01/02/2024)
4.08/5   12 notes
Résumé :
Un premier roman qui rend hommage aux rêves déraisonnables, au courage d'une héroïne quittant le Cameroun pour s'accomplir en France. Depuis son plus jeune âge, Andoun rêve d'un ailleurs. Son père le lui a suffisamment répété : elle est spéciale. Alors elle a fini par le croire. Ses nuits sont peuplées de champs aux fleurs étranges, des boules d'un jaune hypnotisant qui la poussent à imaginer d'autres vies, loin du chemin connu.
Quand elle quitte le village d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
C'est un premier roman remarquable rendant hommage aux rêves d'une vie meilleure, hors des sentiers tracés par des sociétés conservatrices où la femme n'est pas en capacité de choisir sa vie. le sujet a été souvent traité ces dernières années mais ici la forme et le style étonnent… J'ai été immédiatement captivé par le souffle puissant de la narration. L'histoire du personnage central, Andoun ou Anne-Marie (changer de prénom pour s'inventer une nouvelle vie…) est inspirée de celle de la grand-mère de Kiyémis. D'ailleurs le pseudonyme de l'autrice est la contraction des prénoms de sa mère et de sa grand-mère.

Andoun naît à Nyokon au Cameroun, village à la vie rythmée par le travail de champs vert émeraude des cultures d'arachides. Son père, très aimant, la qualifie de fille spéciale. Elle a en effet une forte personnalité et n'entend pas rester dans la routine de sa famille. Elle n'abdique jamais alors que les obstacles sont nombreux : volonté d'étudier contrariée, grossesse imprévue, dépendance à un mari imposé… Chaque pas vers une nouvelle étape de sa vie la transforme, elle et ceux qui croisent sa route. de Nyokon à Douala, puis Paris où elle rejoint son frère Stéphane, Andoun affronte avec panache la résistance d'un environnement contraire à ses projets. Tiraillée entre son envie d'appartenance et ses désirs, elle tente de dépasser les préjugés. de 1954 à une période récente, on suit une femme libre au prise avec son envie d'émancipation.

La cuisine est très présente ici, avec des mets typiquement camerounais. Il est question de salade de papaye et tapioca, de miondo (bâton de manioc) accompagnant le poisson braisé, de plantains frits, de délicieux ntoumba (gâteau de manioc frais fermenté, malaxé et mélangé à l'huile de palme rouge, cuit à la vapeur). Évoqué habituellement pour ses problèmes politiques apparaît ici un Cameroun méconnu, avec son environnement foisonnant, ses richesses, un véritable grenier à provision généreux avec des « forêts aux arbres d'un vert d'or », des champs de tomate, d'arachide...

Les hommes offrent leur protection afin de séduire des femmes en manque de droit propre. Elles peuvent être des proies faciles. Avantage d'être en uniforme comme Roger, une première expérience avec à la clé la naissance de la petite Freya. Ensuite Andoun est mariée avec le marchand de poisson, Isaire Koundéré, qu'elle rejette. Attirée par l'aventure et ses désirs, elle croise la route de Solè, l'homme de pouvoir aux promesses envoûtantes. Il y a aussi à Paris, Renaud, l'éternel étudiant et dernier recours pour Anne-Marie et Freya avant la rue quand son frère Stéphane lui a dérobé toutes ses économies.

Les personnages sont bien campés, complexes et divers, permettant au lecteur de voyager dans des thèmes universels mais avec une forme peu rencontrée jusqu'alors. Les femmes suivant leurs désirs d'indépendance doivent jouer de leur beauté, séduire pour survivre à défaut d'autre carte à jouer (Stéphane lorsqu'il l'accueille dans son petit logement en banlieue parisienne lui confisque son passeport). A Paris elle rencontre Johanne qui lui montre le chemin :

Langue fleur, langue paradis, le style capte la poésie de l'instant ; de courts paragraphes alternent avec des retours constants à la ligne pour des vers libres, puis des poèmes – alignés à gauche ou à droite, cherchant leur place ? – reprenant le récit sous une autre forme. Des ouvertures de guillemets jamais refermées, comme des paroles qui ne s'éteignent pas. de cette forme foisonnante émergent des fleurs rares de langage que le lecteur cueille et réunit comme il l'entend dans des bouquets multicolores et sensibles :
« Baignée par la lumière des pétales, elle avait l'impression de danser avec des milliers de soleil. »

Kiyémis est née en région parisienne de parents originaires du Cameroun. Elle est un sacré numéro, une femme « spéciale », si je reprends l'expression utilisée par le père d'Andoun concernant celle qui est pour une partie le double de la grand-mère de Kiyémis dans le récit. En 2017, elle est inscrite en master d'histoire et de sciences politiques à l'Université Paris-VIII. En 2018, elle publie son premier recueil de poèmes, "À nos humanités révoltées". Blogueuse féminisme, engagée dans l'antiracisme et de la lutte contre la grossophobie, "afropéenne qui fait du bruit", elle est une femme très talentueuse, ce premier roman particulièrement attachant le montre amplement qui parvient à donner une si belle floraison à notre littérature. Et, refleurir est un superbe message incitant à continuer de lutter contre la fatalité que seraient les dominations.

J'ai lu ce roman dans le cadre de ma participation au jury Orange du livre 2024. C'est un des livres qui m'ont fortement impressionné. Il pourrait bien être dans la sélection des 5 finalistes le 13 mai prochain ? Réponse le 14 mai...
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« Andoun, tu n'es pas comme les autres ». Dans ce village, reculé du Cameroun, dans les années 50, cette phrase répétée par son père n'est pas forcément un compliment. Pourtant, cette sentence, qui signe sa singularité, elle y puisera une force qui lui permettra de s'extraire de la destinée toute tracée de ces femmes villageoises pauvres. Elle y trouvera aussi la force de dire « non ». Non aux travaux des champs, pour partir à Douala chez sa soeur et son beau-frère. Non à la fatalité, quand elle se retrouvera fille-mère. Non à un mariage sordide imposé pour sauver la réputation de sa famille. Non à la résignation, quand la vie qu'elle avait rêvé en France, s'avèrera grise et terne.
Portrait lumineux et plein de tendresse d'une femme déterminée à faire refleurir sa vie et à faire vivre ses rêves.
.
Inspirée à l'autrice par la vie de sa grand-mère, ce texte est un très bel hommage aux femmes qui se battent. Contre le déterminisme social, contre le machisme ordinaire, contre la misère ou contre le carcan des traditions, contre le patriarcat et le racisme aussi. Il serait réducteur de le résumer au combat de la femme africaine. Andoun/Anne Marie, incarne avec majesté, toutes les femmes seules et sa couleur de peau qui renforce ses difficultés, n'atténue en rien l'universalité de son message. Avec un tel sujet, on pourrait craindre un texte plombant, il n'en est rien. C'est au contraire, lumineux, en grande partie, grâce aux pages en vers qui croisent le récit. Une poésie qui avec délicatesse vient apporter de la douceur aux épisodes les plus sombres ou de la profondeur à des émotions que le récit suggère. Et cette originalité donne toute la beauté du texte.
Je suis tombée sous le charme de cette belle lecture. Un très beau texte aux multiples sujets, la résilience, la maternité, la transmission et l'exil. Un roman au message féministe fort et un hommage vibrant à sa famille. Les jurés des prix ne s'y sont pas trompés. @kiyemis est en lice pour le prix Orange et elle a obtenu cette semaine le prix Régine Desforges. Bravo à elle et aux @editions_philippe_rey pour leur flair à nous offrir toujours de beaux textes. Longue vie à ce beau roman
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MEGA COUP DE COEUR INTERGALLACTIQUE

Andoun grandit dans un petit village de campagne au Cameroun. Depuis qu'elle est toute petite, son père lui répète qu'elle n'est pas comme les autres. Et pour cause, la jeune fille a des rêves qui vont au-delà des champs et de la culture d'arachides. Et c'est la tête pleine de rêves et d'ambition, qu'elle partira vivre chez sa soeur qui a fait un "beau mariage" et qui habite en ville. Mais une fois sur place, Andoun déchante : entre sa volonté d'étudier contrariée, une grossesse imprévue et une indépendance arrachée, la jeune femme ne cessera de se battre pour faire affirmer son droit d'exister et de rêver toujours plus grand.
De Nyokon à Paris en passant par Douala, Andoun sera tiraillée entre ses désirs de flamboyance et ses racines familiales.

Voilà une histoire qui m'a touchée en plein coeur

D'abord parce qu'elle aborde des thèmes qui me sont chers : la résilience, l'intégration, la liberté, la maternité, les racines, la construction personnelle... J'ai lu que l'autrice s'était inspirée de l'histoire de sa grand-mère pour rédiger ce roman. Bien évidemment, je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec ma propre histoire familiale, étant moi-même fille d'immigrée.
J'ai pensé aux combats qu'il a fallu mener contre les préjugés, à l'abnégation dont il a fallu faire preuve pour permettre aux générations futures d'accéder à l'école et de leur donner une chance de réussir dans la vie, au courage et à la détermination qu'il a fallu montrer parce qu'on attendait d'eux "toujours plus".

L'écriture de Kiyémis est particulièrement brillante, d'autant plus que chaque chapitre est ponctué de poésies que je trouve particulièrement belles et touchantes. Elle nous raconte le destin d'une femme hors du commun. Tantôt Andoun, tantôt Anne-Marie, tantôt Coco, on ne peut qu'être ému par cette femme qui ne cherchait qu'à vivre à sa façon.

Cette histoire rend hommage à celles et ceux qui rêvent plus grand, à ces parents qui ont du lutter pour une vie meilleure, aux enfants qu'ils ont fait passer en premier, à la résilience infinie, à l'amour d'une petite fille pour sa grand-mère.
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Kiyemis s'est inspirée de sa grand-mère maternelle et camerounaise pour dresser ce portrait.
Une femme déterminée sur un parcours souvent raconté : le désir d'école, la grossesse non désirée, le mariage forcé, les espoirs, les rêves, les désillusions, la résilience.

Ce que j'ai aimé dans ce récit, c'est l'absence totale de mélo et la volonté de rebondir après chaque échec.
Ce que j'ai aimé aussi, et qui nous la rend très proche, ce sont ses illusions souvent déraisonnables par rapport à la réalité. Souvent tiraillée entre le besoin et l'envie d'une vie amoureuse et les hommes qu'elle rencontre.
Sa mère, qui est pourtant restée au pays, le lui explique, en toute franchise :
« Ne crois pas que les hommes de la ville sont si différents de ceux du village ma fille. Ils sont les mêmes, partout à Douala, à Nyokon, et je suis sûre que dans ton pays de Blancs, c'est la même chose.(…)
Audoun, croie-le ou non, j'ai vécu ça. Ton père avait d'autres familles, tu le sais autant que moi. J'ai passé mon temps à être jalouse et à être jalousée. »

Ce que j'ai moins aimé, c'est cette impression de « déjà lu ». Les extraits poétiques insérés dans le récit auraient pu constituer la touche originale mais, en fait, je les ai trouvés un peu laborieux et surtout beaucoup trop systématiques.

En conclusion, un roman bien maîtrisé, mais qui ne m'a pas touchée.

Lu dans le cadre du prix Orange 2024.
Merci à Lecteurs.com et aux Editions Philippe Rey.

Lien : https://commelaplume.blogspo..
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Je remercie les éditions Philippe Rey et Babelio pour m'avoir envoyé ce livre dans le cadre d'une opération masse critique de janvier 2024. le livre, en tant qu'objet, est d'ailleurs très beau, avec une couverture à la fois sobre et originale, colorée, qui évoque parfaitement l'univers du roman.
Andoun, alias Anne-Marie, grandit dans un village du Cameroun dans les années 50. Très jeune, elle se montre déjà assez anticonformiste et déterminée à ne pas suivre la voie qu'on lui assigne : se marier et travailler la terre pour assurer sa subsistance, faire des enfants et servir sa famille. Soutenue par son père qui la considère « différente des autres », elle quitte le village pour rejoindre sa soeur mariée en ville à Douala : elle espère pouvoir y aller à l'école, étudier et s'extraire de sa condition. Mais, la vie en ville n'est pas aussi idyllique que ce qu'elle s'était imaginé : la domination masculine y règne, sa soeur vit sous l'emprise de son mari qui se montre violent à l'occasion, la pauvreté rend la vie plus difficile encore qu'au village… Andoun découvre aussi un mépris de la part des femmes issues de milieux plus favorisées, et un racisme systémique entretenu par les colons français. Elle se retrouve enceinte, et abandonnée du père de sa future fille. Elle rentre au village, sachant qu'elle apporte avec elle la honte pour toute sa famille, en devenant mère sans être mariée. Son père la recueille et la soutient malgré tout…Mais Andoun n'a pas renoncé à ses rêves de grandeur et de richesse…Sa fille lui donne encore plus l'envie de sortir de sa condition et elle va se démener pour lui offrir ce qu'elle n'a pas eu. Elle retourne en ville, travaille d'arrache-pied pour gagner sa vie et élever sa fille. Peu à peu, elle réalise que ça ne sera pas possible pour elle au Cameroun et elle décide de partir pour Paris où son frère aîné s'est installé. Pour elle, Paris, c'est la belle et grande vie à portée de mains…Elle va se confronter à une réalité tout autre…
Le récit de Kiyémis lui a été inspiré par la vie de sa grand-mère, et elle rend un bel hommage à sa détermination, à son courage à tout épreuve. C'est un témoignage du parcours de ces femmes, ou de ces familles qui ont refusé le fatalisme et ont tout risqué pour une vie meilleure…si ce n'est pour eux, au moins pour leurs enfants. Les poèmes qui font les transitions entre les différents chapitres sont très beaux, sensibles et émouvants, souvent percutants. Je les ai beaucoup aimés et ils sont vraiment une valeur ajoutée au récit.

Lien : https://deslivresetmoi72.wix..
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critiques presse (2)
MadmoizellePresse
12 avril 2024
Cette fresque épique et onirique se concentre sur la vraie vie de sa grand-mère Andoun, du village de Nyokon au Cameroun en 1954 jusqu’à Paris aujourd’hui, en passant par Douala. Grossesse involontaire, mariage forcé, parcours migratoire semé d’embûches, jobs alimentaires déconsidérés, mais surtout beaucoup de rêves : c’est une histoire de résilience sans aucune once de misérabilisme face au sexisme, au classisme et au racisme, qu’on trouve rarement en littérature française.
Lire la critique sur le site : MadmoizellePresse
LeMonde
04 mars 2024
A 32 ans, la poète, essayiste et animatrice de l’émission en ligne « Rends la joie » publie un roman, « Et, refleurir », sur le destin de sa grand-mère, du Cameroun vers la France.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Douala était une ville agréable lorsqu’on avait de l’argent. La nourriture y débordait de tous côtés, les loisirs et les circuits ne désemplissaient pas. Mais Douala était une ville à plusieurs étages. Et il était facile de retomber aux étages inférieurs.
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- Chacun ses rêves, ma chère. Je n’ai pas tout quitté, laissé ma famille, laissé mon continent pour être possédée par qui que ce soit. Bien ! Je te laisse à tes affaires. Voyons-nous samedi, d’accord, Je t’emmènerai au restaurant, d’accord ? Tu as l’air d’en avoir bien besoin ?
Et dans un nuage de couleur et de vêtements griffés, elle était partie. 
Anne-Marie resta longtemps sans rien dire. Heureuses les femmes qui n’avaient pas grandi avec la peur de tomber.
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Bientôt Eboa Lotin, bientôt Petit Pays, bientôt Grace Decca, bientôt Manu Dibango.
La veille, Anne-Marie avait retrouvé les fleurs jaunes.
Le Jaune, partout, était revenu.
Après toutes ces épreuves, tous ces silences, elle les avait revues, ces boules lumineuses.
Le champ reprenait peu à peu des couleurs, comme à chaque printemps.
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L’immobilité c’était l’antichambre de la mort.
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Baignée par la lumière des pétales, elle avait l’impression de danser avec des milliers de soleil.
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Vidéo de  Kiyémis
Kiyémis : " L'oppression des femmes noires, c'est l'oppression de l'humanité"
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