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EAN : 9782080296597
176 pages
Mialet Barrault (13/03/2024)
4.56/5   9 notes
Résumé :
Servir et obéir. C’est ainsi que les militaires légitiment le droit de tuer impunément. Mais doit-on obéir quand l’ordre reçu est immoral ? Aujourd’hui, les généraux russes sont confrontés à ce dilemme. Doivent-ils continuer d’obéir à Poutine ?
Cette interrogation a conduit Lionel Duroy à s’intéresser au destin du maréchal Friedrich Paulus, commandant de la VIe armée allemande à Stalingrad et, à ce titre, comptable de la mort de milliers d’hommes. Pourquoi a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Le dimanche 31 janvier 1943 se produit un tournant décisif de la Seconde guerre mondiale. Ce jour-là Friedrich Paulus, commandant la VIème armée allemande, fait la veille Generalfeldmarschall (maréchal) par Hitler, est capturé par les Soviétiques dans le sous-sol du grand magasin de Stalingrad où il avait établi son poste de commandement. Quelques heures plus tard, transporté dans un village des environs qui abrite le quartier général de la 64ème armée soviétique, il présente sa reddition au général Rokossovski. Une bataille de plus de six mois s'achevait
Si Lionel Duroy a manifestement lu le « Stalingrad », paru en 1945, du romancier allemand Theodor Plivier, la grande référence en la matière à côté de « Vie et destin » (1980) de Vassili Grossman, s'il a aussi sans aucun doute étudié de près « La Bataille de Stalingrad » de Boris Laurent (Nouveau monde Editions, 2014), qui donne à lire les carnets de Friedrich Paulus retrouvés après sa mort en 1957, il situe son livre sur un tout autre plan et lui assigne une tout autre finalité. Car il s'agit moins pour lui de raconter une nouvelle fois cette bataille dont on connaît très précisément le déroulement, les enjeux stratégiques et le bilan terrible, que d'interroger les motivations d'un officier général qui longtemps avait obéi sans sourciller aux ordres du Führer. Faut-il rappeler que la bataille de Stalingrad entraîna la mort de 400 000 soldats allemands, de 500 000 à 1 million de soldats de l'Armée rouge et de près de 100 000 civils soviétiques ? Que 120 000 Allemands furent faits prisonniers ? Faut-il rappeler aussi qu'il fallut attendre le 20 juillet 1944, pour qu'en Allemagne des militaires de haut rang organisent un attentat contre Hitler ? Dans son livre, présenté sous l'appellation de roman, Lionel Duroy donne la parole à Paulus. le Generalfeldmarschall devient le narrateur à la première personne d'une histoire dont il fut l'un des principaux acteurs. Non pas pour quelque plaidoyer pro domo d'avance voué à l'échec, mais pour tenter de comprendre les causes de sa soumission. En 2012, dans « L'Hiver des hommes » (Julliard), Lionel Duroy avait pareillement interrogé le parcours de criminels de guerre dans l'ex-Yougoslavie. Dans le cas d'espèce, Paulus n'était pas un nazi, mais pas davantage un opposant. L'ascension puis l'accession au pouvoir des nationaux-socialistes n'avaient en rien affecté ce militaire de carrière dressé dans le culte prussien d'une obéissance aveugle. En 1918, après la défaite de l'Allemagne et le déclenchement de la révolution spartakiste, il s'était engagé dans les corps francs, avait combattu dans les pays baltes. Un profil typique de la droite nationaliste de l'époque. Et un terreau fertile pour les aventures à venir.
En 1939 on le retrouve en Pologne puis sur les fronts de l'Ouest. Promu général de division, il participe à l'élaboration des plans d'invasion de l'Union Soviétique. En janvier 1942, il prend le commandement de la VIème armée sur le front de l'Est. Mais à l'encontre de son prédécesseur, le Generalfeldmarschall Walter von Reichenau, il refuse d'appliquer l'ordre de liquider les commissaires politiques de l'armée rouge, qui contrevient à la convention de Genève. Comme si quelque chose en lui subsistait d'un surmoi, d'une ancienne éthique même fortement entamée par son passage dans les corps francs. Lionel Duroy, avec un admirable doigté, démêle cette complexité. Lorsque le 11 juillet 1942, sur ordre personnel d'Hitler, Paulus lance l'offensive sur Stalingrad, verrou sur la route du Caucase, les difficultés matérielles de l'opération lui apparaissent rapidement. S'il en fait part, le haut commandement se montre intraitable : on doit aller vite, on ne change rien. Alors Paulus obtempère et ne change rien. Comme si la divergence était exclusivement d'ordre technique, sans incidence pour le facteur humain. Il envoie au combat ses hommes mal équipés et mal ravitaillés, avec les pertes massives que l'on sait.
Paulus restera dix ans détenu en URSS. Une durée propice à la réflexion. En juillet 1943 il rejoindra le « Bund deutscher Offiziere » (Ligue des officiers allemands), proche du « Nationalkomitee Freies Deutschland » (Comité national pour une Allemagne libre) impulsé par les communistes en exil. Une conscience était-elle venue à ce technicien de la guerre ? Commençait-il de mesurer quelles monstruosités pouvait engendrer le devoir d'obéissance ? C'est en tout cas l'hypothèse, déjà suggérée par le titre du livre, qui ressort du monologue imaginé par Lionel Duroy à partir des carnets. Confortée par le témoignage à charge de Paulus contre les responsables nazis lors du procès de Nuremberg en 1946. En 1953, en pleine dénazification, les autorités soviétiques autorisent Paulus à gagner la RDA, créée en 1949 à partir de la zone d'occupation soviétique. Celui-ci contribuera alors à la mise sur pied de la « Volksarmee » est-allemande, apportant un peu plus d'eau au moulin de ceux qui voyaient d'abord en lui un froid technicien déshumanisé. Lionel Duroy ne clôt pas le débat, il en met au contraire toutes les pièces sur la table. En évidente résonance avec les actualités bellicistes du moment.

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Ce livre traite du dilemme de l'obéissance -vertu militaire par excellence- opposée à la conscience de se montrer humain vis-à-vis de ses troupes. Peut-on rester un militaire si on désobéit à sa hiérarchie et rester un homme si on fait massacrer tous ses soldats ? le général allemand Frederich Paulus est confronté à ce cas de conscience. Il finira par désobéir – sûr d'être mené à l'abattoir par un tyran sanguinaire- éclairé en cela par les propos de sa propre épouse. le livre traite en parallèle de la soumission des masses à une propagande habile et à la subjugation de tout un pays devant un dictateur qui a su utiliser le ressentiment des Allemands devant la défaite de 1918 et surtout devant un humiliant traité de Versailles. Ce phénomène de subjugation (ou plutôt de grégarisme) qui voit des personnes censées perdre tout raisonnement logique pour se laisser envahir par une passion irrationnelle a bien été analysé par René Girard. L'auteur Lionel Duroy a été lui-même confronté à ce phénomène à une échelle moindre celle de l'affaire de la Motte du Caire dans les Alpes de Haute Provence Malgré les premiers témoignages qui innocentaient Richard Roman, malgré les analyses ADN qui accablaient Didier Gentil, une foule en délire continuait de désigner Roman comme seul et unique coupable. Pourquoi ? Parce qu'il était issu de la bourgeoisie et Gentil du bas peuple. « Un « pauvre type » disait la foule. Et un pauvre type est forcément innocent. Sauf que quantité de « pauvres types » se sont révélés être des tueurs en série (je tais les noms pour ne pas être censuré Il vous suffit de consulter les ouvrages traitant des criminels en série français). Encore aujourd'hui même, ne voit-on pas des autrices comme Joane Rowling et -plus près de nous- Marguerite Stern et Dora Moutot subir un véritable lynchage médiatique et des menaces pour avoir affirmé une réalité scientifique à savoir que le sexe de l'être humain est défini par son identité chromosomique et que toutes les mutilations possibles ou greffes en tous genres ou injections d'hormones ne changeront rien. Nous voyons bien que la passion l'emporte -là sous nos yeux- sur la raison et la vérité scientifique. Et cela à cause d'un matraquage médiatique mené par des lobbies et groupes de pression surpuissants financièrement.
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Dans ce très beau roman, Lionel Duroy donne la parole au maréchal Paulus. Né en 1890, ce haut gradé de la Wehrmacht est surtout connu pour avoir été l'un des principaux « acteurs » de la bataille de Stalingrad où il décida, après tant de combats meurtriers, de rendre les armes. Ce texte prend la forme d'un long dialogue que le maréchal entame avec le lecteur et dans lequel il fait le récit des affrontements sur le front russe, de ses décisions et de ses questionnements. L'écriture débute en septembre 1943 alors que Friedrich Paulus est prisonnier des soviétiques et que ces mois de « calme relatif » lui permettent d'analyser son comportement avec recul et objectivité. Au fil du récit, il se confie sur le conflit intérieur qui a très rapidement commencé à le déchirer alors qu'il se sentait partagé entre le sentiment qu'en tant que militaire il devait une obéissance absolue à son commandement, et son âme et son « humanité » qui l'éloignaient de plus en plus et irrémédiablement de l'idéologie d'Hitler. Lionel Duroy est parvenu, avec une plume brillante, à évoquer les sentiments de cet homme qui finira par coopérer avec ses anciens ennemis. Il n'est pas question ici, ni d'excuser ni de pardonner ce qui fut commis, mais d'évoquer les états d'âme d'un homme soumis à son sens du devoir en dépit de ses convictions.
Un texte qui m'a beaucoup touchée et qui évoque bien évidemment le « devoir de désobéissance », lorsque la barbarie devient le moteur d'une guerre ou d'une politique.
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Se mettre dans la tête du Marechal Paulus ! ou comment l'esprit humain accepte l'inacceptable. La question de l'obéissance faisant argument face à l'ignominie. C'est applicable à l'échelle de l'individu, mais aussi à l'échelle du pays. Les Allemands auraient ils du / pu se révolter ?
Passionnant de se plonger dans les débats entre généraux allemands, face à face entre ceux qui ont remis en question leur soumission et ceux qui parce qu'ils sont soldats doivent obéir à Hitler !
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Comment avais-je pu prêter serment d'obéissance et de fidélité à un homme qui avait fait assassiner ses compagnons, qui humiliait les Juifs, terrorisait ses opposants et ordonnait de brûler les livres ?

Seconde partie. L'effondrement, p. 111
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Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n'ai rien dit, je n'étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n'ai rien dit, je n'étais pas syndicaliste.
Quand ils venus chercher les juifs, je n'ai rien dit, je n'étais pas juif.
Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester.
Martin Niemoller
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Tenus d’obéir, de mener leurs hommes au combat et de compter les morts, que pensent les généraux dans le secret de leur conscience ? Pour ce qui est de la Wehrmacht, il faut attendre le 20 juillet 1944 pour que s’exprime le désir d’en finir avec un dictateur de plus en plus imprévisible et sanguinaire.

Prologue, p. 7
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Videos de Lionel Duroy (66) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Lionel Duroy
Dans "Sommes-nous devenus des criminels", Lionel Duroy se demande si un militaire doit servir et obéir à n'importe quel prix, faisant ainsi référence aux crimes de guerre. Pour cela, il se glisse dans la tête du général Paulus, commandant de la 6ème armée allemande nommé par Hitler, qui a conduit l'offensive de Stalingrad dès 1942 sous les ordres impossibles du dictateur, jusqu'au jour où il a désobéi. L'auteur fait le parallèle avec la guerre entre l'Ukraine et la Russie, dans laquelle des officiers généraux russes, parce qu'ils obéissent au dictateur, "sont en train de commettre des crimes de guerre".
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