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EAN : 9782715260269
160 pages
Le Mercure de France (31/08/2023)
4/5   309 notes
Résumé :
Ce poignant récit s'ouvre sur un vol d'étourneaux dont le murmure dans une langue secrète fait écho à toutes les migrations et surtout à celle d'aïeux, partis d'un village d'Inde en 1872 pour rejoindre l'île Maurice. C'est alors le début d'une grande traversée de la mémoire, qui fait apparaître autant l'histoire collective des engagés indiens que l'histoire intime de la famille de Nathacha Appanah.
Ces coolies venaient remplacer les esclaves noirs et étaient ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (75) Voir plus Ajouter une critique
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Un roman court mais intense en émotion et bouleversant, un livre qui m'a mise dans le questionnement. C'est avec pudeur, sensibilité, subtilité et poésie, que l'auteure ,nous laisse entrer, dans un pan de sa vie, la quête de ses origines. Elle remonte le cours de l'histoire , jusqu' à ses trisaïeux, surnommés les "Déplacés". Ces derniers , ayant quittés l'Inde, vers l'île Maurice pour travailler dans les plantations de cannes à sucre, une main d'oeuvre à moindre coup pour les exploitants. Des hommes et des femmes , marqués par un numéro pour pouvoir les identifier, eux qui pensaient retrouver un sens à leur vie, un retour à leur dignité ,
L'auteure voue un amour pour ses grands parents, principalement son grand père, cet homme fort qui a osé se rebeller face à cette situation, un homme qui dégage de l'empathie, L'auteure dévoile , son enfance, sa vie avec parents et ses grands parents, eux seuls pourront trouver, combler les réponses aux questions qu'elle se posait Un livre remarquablement documenté , une partie de l'histoire que je ne connaissais pas, le début qui commence par le vol d'étourneaux qui migrent comme chaque année, un reflet de l'histoire de l'auteure, à travers la migration de sa famille et également d'autres personnes, Tout est écrit avec une grande délicatesse
A lire de toute urgence.

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Le temps délave la mémoire, et souvent même, il la réécrit, en un palimpseste infini. Alors, comme pour la préserver en la fixant, Natacha Appanah en entreprend la traversée, explorant avec pudeur et tendresse la vie de ses aïeux jusqu'à sa propre enfance et retraçant, en même temps que l'histoire intime de sa famille, celle collective des engagés indiens à l‘île Maurice.


« Tant qu'il y aura des mers, tant qu'il y aura la misère, tant qu'il y aura des dominants et des dominés, j'ai l'impression qu'il y aura toujours des bateaux pour transporter les hommes qui rêvent d'un horizon meilleur. » Comme la poétique ouverture de son récit interroge inlassablement les indéchiffrables et éphémères motifs tracés dans le ciel par les nuées d'étourneaux s'élançant chaque année dans leur long voyage migratoire, cela fait vingt ans, depuis qu'elle a commencé à prendre la plume, que l'auteur revient, encore et toujours, sur les traces de sa propre histoire de migration. Ses trisaïeux, réduits à l'état de matricules - 358444, 358445 et 358448 pour leur fils – ont débarqués à l'île Maurice en 1872. Ils avaient emprunté cette route qui, de 1834 à 1920, devait mener à Port-Louis des centaines de milliers d'engagés indiens, aussi appelés coolies, pour pallier au manque de main d'oeuvre consécutif à l'abolition de l'esclavage. « Volontaires » contraints à l'exil par la misère, ces hommes et ces femmes qui rêvaient d'une vie meilleure se sont en fait retrouvés dans un système de servage dont bien des aspects évoquent, selon les historiens, ni plus ni moins qu‘une « nouvelle forme d'esclavage ». Celle-ci est simplement passée au travers des mémoires européennes, comme le constate l'auteur chaque fois qu'en France, où elle vit depuis ses vingt ans, on l'interroge sur ses origines.


Mais ce délavage des réalités historiques n'est pas le seul fait d'une mémoire collective sélective. Lorsque, au-delà des archives et des documents officiels par lesquels elle a commencé ses investigations, elle entreprend de recueillir les souvenirs familiaux, c'est au filtre très émotionnel de la transmission intergénérationnelle qu'elle se heurte. de leur vécu dans les plantations de canne à sucre, ses grands-parents ont toujours pensé protéger leur descendance en gardant leurs mots et leurs sentiments au plus secret d'eux-mêmes. Pour écrire sur eux, pour eux, il lui faut remonter patiemment le fil des souvenirs, ceux de sa propre enfance et ceux égrenés par ses parents et ses grands-parents au gré de résurgences aléatoires et fragiles, qu'avec une infinie délicatesse, elle assemble dans le touchant souci de leur rester fidèle.


« Il y a ces minutes étranges, gris-bleu, glissantes, quand le soleil s'en va et quelque chose venu du fond des âges remonte et se rappelle à nous. » Cette chose, Nathacha Appanah nous la fait toucher du doigt au travers de ses reflets mouvants et délavés, accomplissant un essentiel devoir de mémoire et adressant à ses grands-parents un hommage magnifique de sincérité et de tendresse.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Dans un magnifique premier chapitre plein d'incertitudes, de questions et de poésie, Natacha Appanah nous parle du mystère que constituent les murmurations d'étourneaux, ce qui lui permet de commencer à s'interroger sur ce qu'est la mémoire. La Mémoire délavée nous propose une réflexion sur la mémoire et son fonctionnement autant qu'un récit sur les origines familiales. Entre 1834 et 1920, après l'abolition de l'esclavage, les colons manquèrent brusquement de main d'oeuvre et trouvèrent dans certains pays où la misère est endémique, l'Inde entre autres, une main d'oeuvre bon marché (très bon marché). On transporta cette main d'oeuvre en bateau, dans des conditions souvent épouvantables, là où le besoin se faisait sentir, dans les plantations de canne à sucre de l'île Maurice, par exemple. Les arrivants s'engageaient à servir pendant plusieurs années, d'où le nom de cette pratique, l'engagisme. Contrairement à ce qu'elle avait toujours cru (ou voulu croire, nous explique-t-elle), à savoir que c'étaient ses arrière-grands-parents qui étaient arrivés sur l'île Maurice au début du XXe siècle et qu'ils avaient rejoint une communauté déjà installée, elle découvre que ce n'est pas le cas. En 2022, elle entre en possession de trois fiches des archives qui lui prouvent que c'est le grand-père de son grand-père qui est arrivé le premier, dans les conditions que l'on connait, et non pas dans celles que sa mémoire lui renvoyait : « Mon esprit les a lavés, ces ancêtres, essuyé leurs visages, coiffé leurs cheveux, habillé de vêtements propres, éloigné des cales de bateaux et de la perspective du labeur quotidien des champs de canne. C'est une image presque proprette. C'est une mémoire délavée » (p. 30). Natacha Appanah possède bien peu de renseignements sur les deux générations qui ont précédé celle de ses grands-parents, mais elle s'attache ici à recueillir tout ce qu'elle peut. Elle retracera surtout la vie de ses grands-parents, toujours en s'interrogeant sur la mémoire et sur son étrange fonctionnement, avec ses détours, ses oublis, ses transformations, sa réécriture, en somme… Je reste sous le charme de l'écriture de l'autrice et de la forme qu'elle a donné à cet ouvrage. On y sent toutes ses interrogations, ses hésitations, ses doutes, son envie de transmettre des souvenirs « vrais » tout en étant consciente de la gageure. Elle s'interroge beaucoup sur la transmission volontaire des souvenirs et sur la mémoire transgénérationnelle, sans apporter de réponse, bien sûr, mais avec une sincérité et de fréquents retours sur soi qui m'ont infiniment touchée. Un très beau livre.

[Lu dans le cadre du Grand Prix des lectrices de Elle de 2024]
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Ce récit est un retour aux origines. A l'histoire familiale dans ce qu'elle a gardé grâce aux transmissions orales. Depuis l'arrivée des arrières grands-parents, père, mère et trois enfants, affublés d'un numéro d'identification et immédiatement affectés à une plantation pour un salaire de misère, permettant à peine de se nourrir. Et puis il y aura ce grand-père qui a osé la rébellion et a entrainé toute la famille dans la disgrâce.

De l'universel à l'intime, le récit célèbre la mémoire de ces ancêtres, mémoire en partie estompée par les non-dits et les erreurs volontaires ou non.

Hommage émouvant à ceux dont les vies ne comptaient guère pour ceux qui ne voyaient que le profit à tirer cette main d'oeuvre soumise.

160 pages Mercure de France 31 août 2023
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Le drame et la grâce

Des photos de ballets d'étourneaux, images poétiques évoquant la migration,la transhumance organisée,l'histoire de ces coolies qui ont remplacé les esclaves noirs dans les champs de canne après l'abolition de l'esclavage. C'est ainsi qu'ont débarqué les ancêtres de Natacha Appanah dans une île à sucre,l'île Maurice. Ils portent des numéros et passeront toute leur vie dans la plantation,lieu d'asservissement du pouvoir colonial en place.Un monde oublié qui renaît par fragments, un statut figé,une mémoire délavée par le temps.
En évoquant cet exil volontaire, ces générations d'hommes et de femmes analphabètes mais riches de leurs traditions et de leurs croyances, l'écrivaine veut redonner une juste place aux siens et cherche ce qui est enfoui en questionnant ses grands-parents. D'une plume sensible,délicate et aimante,elle parle de ces vies minuscules qui ont ouvert la voie à une descendance qui a su voler vers d'autres horizons grâce à leur force et à leur courage. A travers les gravures et photos qui parsèment le champ des mots,on découvre,le coeur serré,ce qui fait une vie et comment le passé conditionne le futur.Un très beau récit dans la collection Traits et portraits.
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critiques presse (7)
LaLibreBelgique
20 octobre 2023
Nathacha Appanah a fouillé les vestiges de la tradition orale, parmi ses proches, avec tout ce que cela compte de trous et de silence, pour recomposer cette "mémoire délavée"
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LaCroix
25 septembre 2023
Dans un beau récit, Nathacha Appanah raconte l’exil de ses ancêtres, partis d’un village d’Inde pour rejoindre l’île Maurice. Un retour aux origines poétique et profond.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Culturebox
25 septembre 2023
On suit volontiers l'auteure qui voyage dans ses propres souvenirs, ceux de sa famille, et les met habilement en perspective avec l'histoire réelle. Un travail de mémoire nécessaire, et bienvenu.
Lire la critique sur le site : Culturebox
LeFigaro
07 septembre 2023
Ses aïeuls faisaient partie de ces Indiens déplacés à l’île Maurice. Ils pensaient y faire fortune et déchantèrent. Un récit poignant.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Actualitte
05 septembre 2023
Le bel ouvrage est agrémenté de photos, et on bascule dans l’apparition, la survivance, la présence capturée pour l’éternité.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LeMonde
04 septembre 2023
"La Mémoire délavée", parle d’enfance, de signes, et de ces fils invisibles qui relient les êtres au-delà des distances et des longues années.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
01 septembre 2023
La Mémoire délavée est un petit livre du silence et de la tendresse. Qui emporte tout doucement.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (54) Voir plus Ajouter une citation
Mes parents et mes grands-parents me transmettaient des connaissances et des savoir-faire qu’ils jugeaient utiles pour ma vie future. Ils éliminaient au fur et à mesure certains savoirs ou coutumes, comme la manière d’utiliser cette roche cari par exemple ou certaines recettes de cuisine trop compliquées. Ce « délestage » graduel n’est pas extraordinaire chez les descendants de déplacés ou d’exilés. Ils font, de manière instinctive, un choix entre ce qu’il faut garder de sa culture originelle et ce dont on peut se passer. C’est quasiment un choix de survie, basé sur ce qu’ils imaginent être le monde dans lequel leurs enfants évolueront et pour lequel ces derniers doivent être préparés.
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Un poème.
J’écris mes grands-parents et mes parents et mon enfance et cette maison à Piton et ce domaine sucrier à Antoinette et cette plantation à Camp Chevreau et toutes ces histoires cousues ensemble dans un grand poème en vers libres. Un mot en étourneau des mots des étourneaux une phrase une forme une beauté. Je tords la langue pour qu’elle adopte cette forme, mon père surgit avec sa voiture au coin d’un vers et disparaît, je ne peux pas le retenir, pas comme ça, pas dans ce moule. Je noircis des pages et des pages de ce que j’appelle poésie et ma grand-mère est statique comme sur les photos, mon grand-père est flou, il manque quelque chose. Je dis esprit mais je veux dire cœur. Je voudrais que ça coule comme du miel, que le chapeau se métamorphose en voile mais les mots sont lourds, du béton on dirait.
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C’est peut-être plus loin encore dans le temps que cette chose se trouve. Avant la naissance de mes grands-parents, sur ce bateau qui a transporté mes ancêtres et ça pourrait ressembler à un récit d’aventures avec le noir de la mer, le gris des houles, le bleu de l’île et le vert des champs de canne mais ce serait encore travestir cette histoire avec des couleurs et les atours de la fiction. Ce serait, quelle ironie, un autre exotisme.

Il faut enlever le vernis sur chaque page, éplucher cette peau-apparat sous laquelle le récit est nu, le récit est sincère, le langage est celui de l’eau, de la terre, de la nuit. Il y a des absences, de grands pans d’histoire tombés dans le vide et je reste des jours au bord de ces gouffres, je n’arrive pas à les contourner, je voudrais fouiller les abîmes avec mes yeux me salir les mains à force de les plonger dans cette matière retrouver le goût de ce qui est perdu mais elles le sont à jamais, ces absences.
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Au-delà des représentations documentées des Indiens « dociles », des Indiens « bons travailleurs », le camp, pour les engagés, est également un lieu où ils se sentent un peu protégés. Le système patriarcal à plusieurs niveaux (le propriétaire puis le contremaître puis le laboureur et, au bas de l’échelle, la femme) agit comme une écluse qui retiendrait ensemble ce monde. Le propriétaire domine, protège et paie ses employés ; le contremaître répond directement au propriétaire, surveille le travail du laboureur mais hors du travail, il est son égal et parfois un membre de sa famille ; le laboureur a peur de son propriétaire mais confiance dans son contremaître et peut prétendre, s’il travaille bien, à devenir lui-même contremaître ; la femme n’a pas de rôle autre que l’immense charge mentale et quotidienne du foyer et dépend directement de son mari/son père/son fils. Le « respect mutuel » qu’a évoqué Shiamdass est une illusion, je crois. Ce système « plantationaire » ne fonctionne que par le jeu de dominants-dominés et comme dans un engrenage, il faut de l’eau, de l’huile, un lubrifiant quelconque pour que la machine avance. C’est ce jus qui est appelé docilité, respect mutuel, entente, obéissance ou je ne sais quoi encore.
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La déshumanisation immédiate que provoque l'attribution d'un numéro à un être humain ne m'échappe pas. C'est un couperet qui marque l'avant et l'après ; c'est une marque au fer rouge qu'on applique, brûlante et grésillante.

Alors je les apprends par cœur aussi et de temps en temps, tout bas, je les récite. 358444, 358445, 358448. Ce n'est ni une prière ni un mantra, c'est pour ne pas oublier.
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Vidéo de Nathacha Appanah
Nathacha Appanah était présente pour présenter son nouvel ouvrage : La mémoire délavée paru aux éditions Mercure de France. le roman s'ouvre par un magnifique vol d'étourneaux. Un vol au premier abord innocent mais dont le murmure dans une langue secrète fait écho à toutes les migrations et surtout à celle d'aïeux, partis d'un village d'Inde en 1872 pour rejoindre l'île Maurice. L'autrice traverse alors la mémoire de sa famille. le centre de l'ouvrage est marqué par un magnifique hommage à son grand-père qui travaillait dans un champ de cannes.
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