L’Église n’aime pas les questions – elle a déjà répondu à toutes.
(page 123)
Viola ne tenait jamais en place. Il en devenait presque difficile de l’observer. Elle était belle, à sa façon, c’est-à-dire à l’opposé de la fille Giordano. Sa féminité n’était pas dans ses formes mais dans l’austérité sensuelle de leur absence, cette manière anguleuse de se mouvoir comme si elle évitait en permanence d’invisibles obstacles, en jouant des coudes et des genoux. Ses yeux presque trop grands sous une chevelure noire ébouriffée, ses traits martelés à même l’os, couleur d’or sombre, accréditaient la thèse des origines méditerranéennes des Orsini.
(pages 92-93)
La vie est une succession de choix que l'on referait différemment s'il nous était donné de tout recommencer, Mimo. Si tu es parvenu à faire les bons choix du premier coup, sans jamais te tromper, alors tu es un dieu. Et malgré tout l'amour que je te porte, malgré le fait que tu sois mon fils, même moi, je ne crois pas avoir donné naissance à un dieu.
__Imagine ton œuvre terminée qui prend vie. Que va-t-elle faire? Tu dois imaginer ce qui se passera dans la seconde qui suit le moment que tu figes, et le suggérer.
Une sculpture est une annonciation.
J'avais grandi dans un monde où l'on grognait beaucoup. Parler était au mieux un luxe, le plus souvent une frivolité.
Même la musique a besoin de silences.
- Non, Mimo, c'est vrai.Toute ma vie, j'ai eu besoin de toi pour être normale.Tu es mon centre de gravité, raison pour laquelle tu n'es pas toujours drôle. Mais il y a en moi une anormalité que même toi, tu ne soigneras jamais : c'est que je suis une femme et que je n'en ai rien à faire.(...)
- Partir ne changera rien. La pire violence , c'est l'habitude. L' habitude qui fait qu'une fille comme moi, intelligente, car je pense l'être, ne peut pas disposer d'elle-même.À force de me l'entendre dire, j'ai cru qu'ils savaient quelque chose que j'ignorais, qu' ils avaient un secret.Le seul secret, c'est qu'ils ne savent rien. Voilà ce que mes frères, voilà ce que les Gambale, et tous les autres, essaient de protéger.
( p.558)
En attendant, Mimo, un conseil. Sois patient. Sois comme ce fleuve, immuable, tranquille. Tu crois qu’il s’énerve, l’Arno ?
Le 4 novembre 1966, l’Arno fracasserait ses digues, déborderait de ses rives et dévasterait la ville.
(page 240)
- Alors, qu'est-ce que tu bois ?
- Je crois que j'ai assez bu.
- Tu plaisantes ? Tu as vu la tête que tu tires ? Quand un homme fait une tête pareille, il y a deux raisons possibles. La première, une femme.
- Et la seconde ?
- Une femme.
Un homme ne pleurait pas, dans ces milieux, sauf s'il était une femme.