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Citations de Mathieu Belezi (173)


Soyez sûrs, braves gens ici rassemblés, que le gouvernement de la République veillera sur vous comme un père veille sur ses enfants. Le jour comme la nuit, en toutes occasions il sera là pour vous donner un coup de main. Quoi qu'il arrive ne désespérez jamais du gouvernement de la République. Il a les yeux grands ouverts, l'oreille aux aguets de la moindre de vos plaintes, et il fera tout ce qui est en son pouvoir – absolument tout ! – pour que la rude besogne de chacun soit récompensée à son juste prix. Parce que vous êtes la force, l'intelligence, le sang neuf et bouillonnant dont la France a besoin sur ces terres de barbarie. Et que cette force, cette intelligence et ce sang neuf sont infiniment précieux.
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comme si nous étions sourds, et débarqués de la dernière pluie, et encore tout empotés sous le joug du barda militaire, alors que depuis notre débarquement à Sidi-Ferruch nous en avons fait du chemin, mis le feu aux villages, tranché des têtes, éperonné le ventre de pas moins de cent mille femelles et troué à la baïonnette combien de centaines de milliers de poitrines barbares ? combien ? en quinze ans de conquêtes sur ces terres de malheur nous sommes bien incapables d’en faire le compte
(pages 29-30)
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- Le gouvernement de la France, conscient des luttes quotidiennes que vous devez mener, s’occupe et de votre santé, et de votre sécurité, soyez-en sûrs !
S’occupait-on vraiment de nous dans les bureaux des palais d’Alger et dans les ministères parisiens ? Nous n’en étions pas si sûrs, nous tous colons d’Algérie, et c’est sans doute pour cela qu’un beau jour on a vu arriver le gouvernement de l’Algérie en personne, et le général Mac-Mahon, et le général Canrobert, en grandes tenues militaires sur leurs beaux chevaux piaffant d’impatience, ils nous ont félicités, flattés, encouragés, du haut de leurs montures sur lesquelles ils se tenaient comme des pachas ils voyaient loin, ils voyaient grand, prêts à verser sans compter le sang de leurs soldats pour que nous puissions récolter fortune et bonheur.
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je m'efforçais de croire que tout ça n'était qu'un mauvais rêve, et que pour en sortir il me suffisait de rejeter les draps qui me couvraient et le cauchemar prendrait fin,
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- N’y aura-t-il donc jamais de justice sur cette terre ?
Et en moi-même je me disais que la justice était un mot inventé par les riches pour calmer la colère des pauvres, mais que tout bien réfléchi ça n’existait pas la justice, qu’il fallait apprendre à vivre sans elle et accepter le sort que Dieu réserve à tout être humain qui pose les pieds sur la terre.
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Et sans qu’il nous soit demandé notre avis, sans que nous puissions émettre une quelconque protestation, nous autres colons qui n’avions rien fait de mal avons été plongés dans les flammes d’un enfer à peine imaginable
enfer qu’avec ma naïveté de femme je croyais limité aux dessous de la terre, là où règnent le diable et ses démons aux fourches assassines, et que j’ai vu de mes propres yeux sortir de ses obscurités malfaisantes pour envahir la terre et y semer la terreur, triompher de notre communauté de colons en fauchant à grands coups de faux hommes, femmes et enfants dans leurs cabanes de planches, et cela en toute impunité, je dis bien en toute impunité puisque le ciel et ses représentants divins jamais ne sont intervenus
sainte et sainte mère de Dieu, pourquoi nous avez-vous abandonnés ?
Jamais ne se sont portés à notre secours pour éteindre ces flammes qui nous dévoraient
dites-moi au moins pourquoi
jamais n’ont fait un geste pour retenir la lame de cette faux qui nous coupait le souffle
oui, dites-moi au moins pourquoi.
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non, nous ne sommes pas des anges, mais des soldats foutredieu ! des soldats !
des soldats qui ont un besoin urgent de sang, de ce sang chaud, de ce sang frais pour combattre palu, chiasse et fièvre jaune, autrement plus efficace que le sulfate de quinine qu’on vend pourtant à prix d’or aux colons pataugeant dans la puanteur des marais de Boufarik
- Alors gorgez-vous de sang, mes braves !
(page 36)
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Il était loin le paradis que le gouvernement de la République nous avait promis, et on n’était pas près de l’atteindre, nous tous entassés sous les tentes militaires au milieu de nulle part, dans ce trou perdu que l’autorité militaire avait osé appeler colonie agricole, on n’était pas près de l’atteindre, et peut-être qu’on ne l’atteindrait jamais, ce paradis tant vanté, peut-être qu’on ne l’atteindrait jamais parce qu’il n’existait pas, qu’il n’avait jamais existé et qu’il n’existerait jamais, tout au moins pour des gens comme nous.
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(…) il pointe le doigt en direction des nuages qui pèsent de tout leur poids d’un bord à l’autre de l’horizon, et qui laissent si peu d’espace entre la terre et le ciel que nous nous demandons si nous aurons encore la place d’avancer debout, s’il ne faudra pas ramper sur les coudes dans cette chienne de poussière que le vent touille comme un brouet de sorcier (…)
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Suffit ! Suffit ! Quel miracle devrait donc venir du ciel ! les miracles c’est nous soldats qui nous en occupons, c’est nous soldats qui débarrassons cette terre d’Algérie de ses fanatiques, qui créons des villes, des routes, asséchons vos marais de malheur, inventons le sulfate de quinine, plantons des milliers d’arbres pour sucer les miasmes de vos terres maudites, alors ne venez pas nous reprocher de forcer la porte de quelques maisons pour réchauffer nos os qui ont froid et sont fatigués, ne venez pas nous reprocher d’égorger quatre ou cinq moutons pour donner à manger à nos ventres qui ont faim, laissez-nous au contraire nous vautrer sur la paille sèche, nous rouler tranquille dans la laine des tapis, nous remplir les poumons de ce tabac turc qu’on trouve à tous les étals des boutiquiers d’Alger
- Si nos jours sont de plus en plus sombres et sanglants, qu’au moins nos nuits se dépoitraillent et s’ouvrent à tous les débordements de nos corps ragaillardis !
Crient les uns
- Oui, que nos nuits pétaradent !
Répondent les autres
- Qu’elles débordent de foutre et de cris étouffés !
Répondent et s’excitent quelques-uns.
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l’enfer avait disparu, mais nous n’étions pas près d’oublier qu’il était là, sous nos pieds nus allant et venant en toute ignorance, et qu’il pouvait à n’importe quel moment rouvrir ses abîmes et disposer à sa guise de nos vies, sans que notre Dieu s’émeuve d’une quelconque manière – alors que nous n’avons jamais cessé de le louer depuis des siècles
comment croire après cela ?
(page 65)
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et puis, parce que tout doit être oublié ou pardonné dans cette vie, nous avons fini par enfouir bien au fond de nos entrailles nos peines les plus vives, celles qui jamais ne s'éteignent
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- Nom d’un bordel, votre têtue caboche de moricauds finira-t-elle par comprendre ?
Et sa voix d’ogre résonne dans le silence comme une voix venue du ciel
- La France a pour mission divine de pacifier vos terres de barbarie, d’offrir à vos cervelles incultes les ors d’une culture millénaire ! Que ça vous plaise ou non !
Et ceux qui refusent notre main tendue seront renversés, écrasés, hachés menu par le fer de nos sabots et de nos baïonnettes !
Roule et tempête comme une charge de cavaliers, mais pas un de ces chiens ne se montre pour lui offrir sa soumission, il a beau attendre dans ses bottes de sept lieues et sa gandoura de pacha, ce qu’il attend n’arrivera jamais, nous qui avons usé nos grolles sur toutes les routes de ce foutoir à moricauds, on en est certains
on se regarde en tétant le tuyau de nos pipes, et on se dit qu’il ne faudrait pas qu’un de ces jours il tourne fou, notre capitaine, non, il ne faudrait pas, parce que si ça lui prenait de tourner fou au milieu de ces déserts de sable et de rocaille, qu’est-ce qu’on deviendrait nous autres ?
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… je ne pouvais pas oublier ce qu’il m’en avait déjà coûté de jouer les colons pour les beaux yeux de la République française, et j’en avais certains soirs de larmes de tristesse qui me coulaient sur les joues, d’autres soirs des larmes de rage
(page 134)
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Dans la grisaille du jour naissant il faut nous voir marcher au pas, en colonne quatre par quatre, dans un silence de plomb qui fait peur au soleil toujours caché derrière les montagnes.
Il faut nous voir.
On a la gueule des mauvais jours, une haleine de forçat, l'œil en couille de taureau tant la nuit a été dure dans ces ténèbres du diable.
Il faut nous voir.
Enroulé dans sa gandoura notre capitaine rumine sa vengeance, il ne regarde ni n'entend personne, il est déjà à la manœuvre, lançant ses guerriers sanguinaires sur le village endormi sans que l'ennemi ait seulement le temps d'attraper une pétoire ou un yatagan, et il en a la bouche toute pleine de salive, le cul qui gigote d'impatience sur sa selle.
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Parce que vous êtes la force, l’intelligence, le sang neuf et bouillonnant dont la France a besoin sur ces terres de barbarie. Et que, cette force, cette intelligence et ce sang neuf sont infiniment précieux
(pages 10-11)
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ensuite il immobilise son cheval tout écumant et nous crie
- Foutez-moi le feu à tout ça ! Razziez mes braves ! Razziez tant que vous pouvez
et il ne nous faut que le temps de cet ordre pour fourrer le tabac dans nos poches et commencer notre razzia, c’est la ruée, l’infernale et alléchante ruée qui nous fait bander dans nos frocs, nom de Dieu de nom de Dieu, et nos mains féroces éventrent les sacs et les coffres, roulent les tapis, arrachent au cou ensanglanté des moukères leurs breloques, tranchent les doigts chargés de bagouzes, et les oreilles des hommes tout aussi bien que celles des femmes qui valent leur pesant d’or, vous pouvez me croire, au marché noir d’Alger
nom de Dieu de nom de Dieu !
Ensuite on fout le feu aux gourbis pendant que les haches de quelques autres s’attaquent aux champs d’oliviers, aux amandiers et aux abricotiers qui sont abattus et jetés dans les flammes qui dévorent le villages
deux épaisses colonnes de fumée montent au ciel en dansant une gigue funeste, et ça se voit de si loin un incendie pareil, ça promet de telles horreurs, que les fils de Mahomet doivent en pisser dans leurs falzars
non, nous ne sommes pas des anges.
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… nous serons sans pitié, nom d’un bordel ! ça veut dire que nous n’hésiterons pas à embrocher les révoltés un à un, à brûler leurs maisons, à saccager leurs récoltes, tout ça au nom du droit, de notre bon droit de colonisateurs venus pacifier des terres trop longtemps abandonnées à la barbarie, comprenez-vous bien, soldats, ce que cela signifie ?
(pages 115-116)
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« Regarde-toi Henri, et regarde-moi, ne vois-tu pas
ce que nous sommes en train de devenir ? des guenilleux,
des loqueteux, des épaves, et plus que des épaves, des
ombres d’épaves, cette terre d’Algérie nous mange le corps,
malheur de malheur ! les poumons, le foie, les boyaux du
ventre, te rends-tu compte Henri ! et les reins, et le cœur,
et bientôt elle dévorera notre âme avec le même appétit.
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oui, il fallait que je me reprenne, que je retrouve la volonté de lutter, si ce n'était pas pour moi qu'au moins je lutte pour mes enfants qui ne demandaient qu'à vivre, qu'à passer ce mauvais cap à l'abri de mes bras de mère qui leur étaient tout autant nécessaires que le ventre d'une chienne pour ses trois chiots.
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