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Citations de Claire Marin (479)


L'insomnie est l'impossible lâcher-prise, le refus du sommeil comme abandon. Passer par la nuit, accepter de disparaitre, dans l'oubli du jour passé et l'absence à soi, voilà ce dont une conscience vive a besoin pour affronter les lendemains. Mais la conscience sans sommeil étire indéfiniment le passé dont elle refuse qu'il s'efface. L'insomnie distend la présence, refuse la coupure du passé, s'épuise dans cet effort vain sans même s'en rendre compte. Il faut accepter la succession des jours et des nuits, nous dit Nietzsche, distinguer le clair de l'obscur, séparer ce que l'on peut embrasser du regard de ce qui est hors de vue. Il est des choses qui doivent rester définitivement hors champ. Celles qu'on ne peut plus voir, dans tous les sens du terme (pp. 141-142).
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Peut-être ne fait-on jamais que repriser ces trous de l'enfance. Réparer les blessures des premiers moments de la vie, soigner l'enfant que nous étions et qui nous empêche parfois de devenir pleinement adulte à notre tour. On répare les choses pour nous réparer nous-mêmes, on reprend le récit en première personne pour retrouver notre voix, on écrit notre histoire, pour rétablir notre perspective.
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Il est des rencontres éphémères qui nous bouleversent profondément, nous interrogent sur notre identité bien plus intensément que des années d'introspection. p. 112
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La rupture est une réparation quand elle nous permet d'en finir avec ce qui nous fait souffrir. Elle est libératrice quand elle nous défait d'un milieu, d'un mode de vie ou d'un personnage dans lequel nous étions malgré nous enfermés et qui nous rendait malheureux. Rompre avec son bourreau, qu'il s'agisse d'un adulte maltraitant, d'un collègue harceleur, d'amitiés destructrices, permet de réparer le sujet blessé. Avoir le courage de rompre est souvent le premier moment d'une réconciliation avec soi-même.
Rompre avec sa famille, avec son mari, rompre avec sa religion, est parfois une manière d'assumer une identité qui était obligée de s'effacer devant des figures d'autorité et d'affirmer sa majorité, au sens où l'entendait Kant : se défaire des tutelles et oser penser par soi-même. Et j'ajouterais : vivre par et pour soi-même. [...] C'est par fidélité à une certaine idée de soi qu'il faut rompre avec ceux qui nous empêchent d'être pleinement celui ou celle que nous avons le droit d'être (pp. 29, 30).
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« On n'aime personne que pour des qualités empruntées » : selon Pascal, c'est à l'amour des autres que l'on emprunte, dans un jeu de dupes, nos propres qualités. Parfaitement impropres. C'est pourquoi la séparation est cruelle. Soudain, je cesse d'être cette personne attirante, intelligente, généreuse ou drôle. Non pas que je l'aie vraiment été, mais je l'étais à tes yeux. C'est la certitude de mon identité qui vacille. L'illusion d'un moi s'évanouit. Qui suis-je encore maintenant que je ne suis plus rien pour toi ? (p. 42).
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On a parfois ce sentiment d'être pris dans notre quotidien comme dans un piège dont on ne peut s'extraire sans s'amputer d'une partie de soi, sans déchirure ni perte. p. 58
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La maladie est un moyen malhonnête, inavouable, de retenir l'attention de ceux qui ne nous aiment pas assez, pas comme on le souhaiterait. C'est un stratagème d'enfant, dans la vie d'un adulte fragilisé, infantilisé par la maladie, pour retrouver la franchise d'un amour sans fard. Parce qu'elle ouvre une parenthèse où s'exprime l'affection que l'on tait d'habitude par pudeur ou par timidité, la maladie offre des moments où la parole caresse, calme les angoisses. On sait qu'elle attire l'attention de ceux que l'on aime. On en a besoin (Éditions Allia, 2019, p. 108).
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Peut-être ne sommes-nous en réalité jamais que dans l'entre-deux, entre deux mondes, entre deux temps, entre deux manières d'être soi.
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Il faut parfois bifurquer quand le chemin emprunté semble tracé d’avance et n’est plus le fruit d’une découverte personnelle. Quand nos pieds marchent sans notre tête ni notre coeur.
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Dans la marge

C'est l'ambition de l'enseignant et sans doute de l'écrivain de transmettre à d'autres cette envie d'aller voir ailleurs qui ils sont.
Ainsi, lisant un livre, je le poursuis. Je l'annote, le souligne, je lui donne un relief particulier et me l'approprie, j'y laisse les traces de ma lecture et les échos personnels que j'y entends. J'écris dans les marges. Notre existence elle aussi se trame sans doute dans ce dialogue entre le texte central et nos remarques marginales. On ne coïncide jamais tout à fait avec le récit de notre vie.On se construit aussi en brodant à côté, dans les espaces de la page laissés vierges.
( p.227)
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Introduction

Les ruptures sont nôtres, qu'on les décide ou qu'on les subisse. Rompre avec sa famille, ses amis, son amant, son milieu, changer de métier, de pays, de langue; les ruptures nous construisent peut-être plus encore que les liens.Notre définition est tout autant dans nos bifurcations que dans nos lignes droites, autant dans les sorties de route, les accrocs au contrat que dans le contrat lui-même (p. 13)
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Il faudrait parler de ce plaisir d'être nomade, de n'être que de passage, de découvrir ce que d'autres terres, d'autres visages, nous font devenir. Celui que l'on devient au contact de la différence et de l'altérité. Ce plaisir de n'être jamais installé, d'être toujours sur le départ, dans la projection d'un nouvel ailleurs. p. 47
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La nuit, moment de rupture, est le temps de la lucidité, mise en suspens des contraintes, des normes et des regards qui jugent. Elle offre cet espace où la représentation est acérée, les sens exacerbés. La nuit, le mensonge à soi-même n’est pas possible.
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Au coin du matin, sans raison particulière, le désir revient par surprise, alors qu'il semblait avoir déserté notre vie. On reconnaît sa mélodie. On se dit que c'est un souvenir mais il s'entête, nous habite. Et cette morsure de l'envie, de l'incertitude, de l'insatisfaction, de l'impatience n'est plus celle de la douleur. La douleur est désarmée. Elle passe au second plan. L'énergie revient. On oublie qu'on a mal.
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Il ne faut sans doute pas accorder d’importance à cette place qui m’échoit au fil des circonstances. Je découvre ainsi ma place dans le désordre, elle est le fait de différentes perturbations existentielles plus que d'une volonté ferme, d’une destination ou d’un ordre cosmologique. Je suis là un peu par inadvertance.
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Pourtant, on peut comprendre ce besoin de sortir des cases, qu'il s'agisse de prendre l'air ou de s'extraire de places trop étroites.
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Penser le déplacement

(***en exergue , phrase de J.B. Pontalis, " Traversée des ombres")

Que serait une pensée qui ignorerait le déplacement ? Une pensée qui ferait du surplace.
Ce serait une pensée qui voudrait que les choses soient comme elle les pense, une pensée peu généreuse à l'égard de la richesse infinie de la polysémie du monde sensible
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On ne se croit pas capable de renoncer à la vie qu'on s'est toujours imaginée. Pourtant, on y arrive. Et plus la maladie impose d'obstacles, plus on repousse les limites des situations qu'on pensait être capable de tolérer. On renonce à une certaine idée de la santé, de la beauté, de la dignité. On accepte l'humiliation quotidienne de l'hôpital, les blessures que creusent les remarques des autres. On évite ceux qui, à force de maladresse ou pour se rassurer, enfoncent un poignard à chacun de leur regard compatissant. On ne dit plus grand-chose. On s'éclipse discrètement lorsque les collègues racontent leurs petits maux. On passe peut-être pour quelqu'un d'intolérant. Mais ces petits malades nous exaspèrent (Éditions Allia, 2019, pp. 101-102)
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Il y a les débuts dont on décide et ceux qui s'improvisent, ceux qui s'invitent dans notre existence comme une éclaircie inespérée ou qui frappent comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Il y a aussi des débuts que l'on rate, par manque de courage, de confiance ou de lucidité, ceux qu'on attend en vain. Comment reconnaître l'esquisse d'un début et s'en saisir ? Peut-être grâce à une forme de vigilance, face à l'instant où le neuf affleure, instant gorgé de potentialités, prêt à les essaimer au vent. […]
On éprouve très tôt dans l'existence cette nostalgie des débuts. Mais on est aussi fébrile à l'idée d'un nouveau départ. Parce qu'ils exaltent le sentiment d'exister, ils suscitent espoir ou mélancolie. C'est la raison pour laquelle nous désirons tant les retrouver, les revivre autrement. C'est aussi celle pour laquelle nous désespérons à l'idée qu'il n'y ait plus dans nos vies de débuts. Analyser leur intensité permet de comprendre ce qu'elle dit de nos attentes, de notre temporalité psychique, affective. Nous n'avons pas l'âge que le temps imprime à nos corps, tant que nous continuons à espérer d'autres commencements. Ils manifestent le sentiment intime d'une irréductible jeunesse. Les débuts qu'on imagine encore traduisent notre rapport au possible et notre désir d'accueillir l'inattendu. […]
Aller au-delà de nous-mêmes, comme l'imprévu nous y exhorte, c'est ne pas renoncer à être nous-mêmes, ne pas se laisser contraindre par le cadre, mais continuer à se définir par le devenir plutôt que par la fixité et l'identité vide, redondante. L'imprévu, par sa puissance, ravive les dynamiques intérieures. Il crée un appel d'air dans une existence qui s'assoupit (pp. 16, 25, 32).
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Le rêve d'une place, d'un lieu défini qui nous correspondrait et nous exprimerait tout à la fois trahit plusieurs inquiétudes : l'errance qui nous fragilise, l'indétermination de notre existence, l'indécision fondamentale de notre être.
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