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Dominique Nédellec (Traducteur)
EAN : 9782267021394
510 pages
Christian Bourgois Editeur (13/01/2011)
3.57/5   23 notes
Résumé :
Un policier en fin de carrière reçoit pour mission de neutraliser une bande d’adolescents se livrant à des actes violents dans un quartier de Lisbonne. Ses rapports destinés à la hiérarchie cèdent la place à des divagations amères. Au fil des dix-neuf chapitres, près d’une vingtaine de narrateurs se succèdent, tous concernés à des titres divers par l’enquête.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
« Mon nom est légion », d'Antonio Lobo Antunes, traduit par Dominique Nédellec. (2011, Christian Bourgois, 512 p.) emprunte son titre à l'Evangile selon Marc. Il s'agit d'un homme possédé par des démons « environ deux mille » qui dit à Jésus : « Mon nom est Légion, car nous sommes en grand nombre ». Mais, Antonio Lobo Antunes cite en exergue les neuf premiers versets de ce passage biblique. Par contre, il passe sous silence les onze suivants, qui racontent la délivrance du Démoniaque.
En fait, il répond bien « Mon nom est Légion, car nous sommes nombreux ». le texte se poursuit « Et il le priait instamment de ne pas les envoyer hors de ce pays. Or, il y avait là, le long de la montagne, un grand troupeau de porcs qui paissaient. Et les démons suppliaient Jésus, disant : « Envoyez-nous dans ces pourceaux, afin que nous y entrions ». Il le leur permit aussitôt, et les esprits impurs, sortant du possédé, entrèrent dans les pourceaux, et le troupeau, qui était d'environ deux mille, se précipita des pentes escarpées dans la mer et s'y noya ». Comme quoi, l'anecdote se termine de façon pratiquement morale, car ils ont beau être nombreux, ils auraient mieux fait d'apprendre à nager. On n'insistera jamais assez sur la prévention des noyades a bord de la mer pendant la saison touristique.
Ceci dit, et comme souvent pour ses romans, Antonio Lobo Antunes choisit le titre généralement après avoir terminé d'écrire.
Le récit débute à Lisbonne, quartier 1ero de Maio. C'est au sud de la ville, dominant le Tage, avec le Bairro Alto. le récit débute avec le rapport du policier Gusmão, sur le point de prendre sa retraite. Ce rapport signale un groupe de jeunes qui commencent à commettre des vols, des viols et des meurtres. La police se déplace ensuite vers le quartier d'où sont originaires les garçons, une banlieue décrite par différentes voix tout au long du récit. C'est donc une plongée dans les origines des habitants de ces quartiers lisboètes.
En ville, les habitants du quartier 1º de Maio sont en fait des habitants exilés. Ils n'appartiennent plus à l'Afrique, ou de l'Angola, d'où ils sont venus. Riche bourgeoisie dans une colonie du pays, ils se retrouvent pauvres, ou déclassés par rapport à la bourgeoisie de caste locale. Ils n'ont pas non plus été accueillis par les portugais européanisés. Au contraire, ils sont diabolisés et victimes de la haine sociale, triste portrait de la véritable mondialisation. La figure mythique du colonisateur qui intègre de manière harmonieuse les peuples colonisés est ici une nouvelle fois remise en question. Dans plusieurs passages, le racisme et le conservatisme des personnages se révèlent. « Dans une forêt de bruyères, dans quoi ce pays est tombé avec la démocratie messieurs, le manque de respect, la mauvaise gouvernance, les noirs, mes entrailles jusqu'à ce qu'elles fonctionnent efficacement, huilées, calmes et s'il vous plaît, ne me donnez pas l'argument selon lequel l'âge est différent parce que ce n'est pas l'âge, c'est le salut de ceux qui peuvent qui se transmet aux organes, les voilà, chacun de leur côté, fonctionnant seuls, que je sens les surrénales et le pancréas égoïste, les tourmenter farouchement. Je me vernis les ongles sous le buffet sur le ventre, je vais finir comme ma fille à étendre les couvertures et à secouer les tapis après des semaines passées à méditer dans un bureau des brevets. / Je respire, je respire, n'est-ce pas ? ». L'exclusion et le racisme, voilà bien le décor des « vrais » portugais, tout comme il pourrait servir de modèle dans d'autres pays. Avec en arrière-pensée, l'opinion que les personnes à peau foncée, Angolais ou Cap Verdiens, ne sont pas du même monde. « Peut-être qu'elle sourirait aussi comme les Blancs le font dans leurs conversations de Blancs donnant des noms à des émotions et à des choses, une chaise, tristesse, verre, faim, ma mère également seule et ignorante ça seul parce qu'on ne sait pas ce que seul signifie, nous sommes noirs » Voila pour l'opinion des exilés d'Angola. Et pour leur vie quotidienne « On vit comme des lapins et des taupes, on fuit tous ceux qu'on approche nous, nous avons peur (on ne sait presque rien mais on connaît la peur) Et nous trottons plus vite que la peur en nous accroupissant ». Ou bien « Je meurs en espionnant la peur de loin, je n'ai pas peur de mourir, nous n'avons pas la peur de la mort puisque mourir signifie que le corps change de lieu et c'est tout, Nous avons peur que le quartier ne soit pas d'accord avec nous et nous chasse ».
Dans l'évangile de Marc, ils étaient deux mille. A Lisbonne, ls ne sont plus que huit, habitants du Bairro 1º de Maio – un quartier connu en raison de « la dégradation physique » et des problèmes sociaux inhérents. Ce sont des groupes de gens qui travaillent peu. « Les hommes et les femmes qui s'abritent dans ces quartiers sont transparents en tant que travailleurs, en tant qu'ouvriers du bâtiment, comme servantes, comme cuisinières ». Ce qu'ils ont fait : voler deux voitures en une nuit, commettant dès lors ne séquence de dégradations tout au long de la matinée. Un scénario métropolitain portugais dans lequel les blancs, les noirs et les métis, descendants d'immigrés africains, occupent une place inférieure dans la hiérarchie sociale. Analysé ainsi, « Mon nom est Légion » assume à sa manière le récit qui problématise et stéréotype les discours raciaux. On donne même leurs noms ou pseudos, ce qui en dit long sur leurs capacités mentales. « Capitaine, Chien, Guerrilla, Enfant Hyène, Heartthrob, Gros, Ruço ». Beaucoup de métis parmi eux, âgés de douze ans à dix-neuf ans. Accusés d'avoir commis plusieurs délits parmi vol et homicide divers au petit matin. D'où une opération de police pour les arrêter. Cette action se traduit par un incendie dans le Bairro 1º de Maio, en plus de causer la mort de certains membres du groupe. le quartier lui-même est « un pudding de matériaux non nobles, fragments d'échafaudages, chutes d'aluminium, roseaux » dans lequel se mélangent indifféremment personnages, corbeaux, pigeons, chèvres et cactus. « C'était le bêlement d'un corbeau, c'était le vent dans les hêtres, c'était le chevreau qui n'hésitait plus sur le chemin et libéré filait au trot en direction de la nuit ».
Les Angolais et Cap Verdiens y migrent car le Portugal reste exclu, marginalisé socialement, économiquement et géographiquement. Ce qui sera décidé, c'est « la postérieure élimination par les moyens jugés nécessaires dudit groupe ou gang ». Dans le mode « circulez, il n'y a rien à voir ».
Quoique technique, le rapport de Gusmão est imprégné de réflexions, de digressions, de commentaires personnels. « Ce que ce pays a en abondance, ce sont des métis et des noirs ». Il poursuit avec « les « semi-Africains » et les noirs sont des créatures plus sujettes à la cruauté et à la violence gratuites que les blancs ». Il les disqualifie d'emblée ne serait-ce que ce terme de créatures. En outre, il mêle à cela des souvenirs personnels, une relation difficile avec sa mère et son père et, plus tard, avec son beau-père. Un mariage qui s'est terminé par un divorce et ses tentatives frustrées d'établir un lien avec sa fille. « Par famille, j'entends non seulement mes parents et mon beau-père mais mon ex-femme et ma fille, je ne veux pas y entrer là-bas, je me limite à enregistrer ce qui existait dans mon passé et à ma fille un peu actuellement un dimanche par mois à au nord où je le visite pour une raison quelconque, je crois en l'espoir d'un dialogue que nous n'avons pas eu et que nous continuons de ne pas avoir ». « j'étais vieux, épuisé, avec retour d'Ermesinde [...] concluant que rien ne méritait le voyage, certainement pas ma fille ».
Donc d'emblée, les habitants du quartier sont déshumanisés. « Les métis les enterreront repos puisque les singes s'enterrent les uns les autres, c'est la nature. Des animaux à creuser avec leurs ongles sans comprendre pourquoi, leurs instincts ». D'autant plus que ce n'est pas que l'opinion de Gusmão, mais aussi de sa famille, de son beau-père. « (ils s'accouplent comme des animaux) disparus dans les fissures, les grottes [...] (même les coléoptères les ont mangés, je vous le garantis) [...] les attitudes qui ne sont pas comprises par les animaux et les noirs n'attendent probablement rien car la mort ne les inquiète pas, [. ..] les métis ne pleurent pas parce que le mécanisme des larmes n'est pas né avec eux [...], ils partagent des tripes dans leur long langage de consonnes ». Incluant également son épouse. « Bien sûr, elle est métisse et alors méchants, indiquez-moi un vrai homme noir, travailleur, honnête et malgré tous leurs efforts, ils n'en trouveront même pas ». Une métisse dont l'odeur était « plus dense que celle des renards en chaleur ». Cela me rappelle un certain chef d'état qui se plaignait, lui aussi des odeurs. Mais il faut savoir ce que l'on veut dans la vie « étant donné que les femmes les femmes blanches nous volent toujours moins ».
Il y a bien des relations entre blancs et métis, comme celles de Gordo, un jeune noir, qui fait commerce avec Georgete, une prostituée blanche d'une cinquantaine d'années. Elle affirme que le jeune homme noir vivait « en se frottant le visage plein de cernes », désireux de « se purifier de sa couleur ». « Je suis noir dans mon odeur noire parce que ce que j'avais en moi Je l'ai perdu ». Et la cause de cette misère ? le rejet de la couleur noire se retrouve également dans le discours de la mère de l'un des délinquants, qui demande « Pourquoi je ne suis pas blanc ? / Parce que nous ne le sommes pas tout blanc ? /Parce que nous ne vivons pas à Lisbonne parce qu'ils nous traitent mal parce que nous n'avons pas d'argent ».
Les habitants du quartier reproduisent le racisme, mais cette fois, en tant que victimes. Ils font entendre leur voix dans le roman. « Peut-être qu'elle sourirait aussi comme les Blancs le font dans leur conversations de Blancs donnant des noms à des émotions et à des choses, une chaise, tristesse, verre, faim, ma mère également seule et ignorante ça seul parce qu'on ne sait pas ce que seul signifie, nous sommes noirs, On vit comme des lapins et des taupes, on fuit tous ceux qu'on approche nous, nous avons peur (on ne sait presque rien mais on connaît la peur) Et nous trottons plus vite que la peur en nous accroupissant sur un Je meurs en espionnant la peur de loin, je n'ai pas peur de mourir, nous n'avons pas la peur de la mort puisque mourir signifie que le corps change de lieu et c'est tout, Nous avons peur que le quartier ne soit pas d'accord avec nous et nous chasse ». Tous ces personnages viennent avec tous des fantômes du passé, de l'abandon, de la solitude, de la souffrance, de l'injustice, des obsessions, de l'absence, des faiblesses, de l'abus de la douleur, de la violence. Ils sont tous déchiré par la vie qu'ils ont ou n'ont pas eu.
Mais, de toutes façons, chez Antonio Lobo Antunes, l'intrigue passe au second plan. Ce qui importe, c'est la façon dont elle est racontée. le diable est dans les détails, on s'en doute. Puis, le narrateur du livre donne la parole à un personnage qui représente symboliquement une classe qui a rarement une voix dans la littérature portugaise. C'est ainsi que à la fin du récit, on assiste au rapprochement entre les paroles de Tiny, l'un des accusés des crimes relatés au début du récit et ceux des autorités qui prennent acte de ses déclarations. C'est le moment où Tiny dit « n'avoir peur de rien ». Moment où il fait allusion à ses mains dans les poches, un geste qui dérange tant les autorités. Cet adolescent « métis de treize ans malingre, malnutri, efflanqué » se laisse envahir par ses souvenirs d'enfance, comme celui d'une vieille dame du quartier. « Mon petit elle disait. Mon petit. Après elle est morte, bien fait pour elle ». Ce n'est pas de la méchanceté de sa part, plutôt une sorte de compulsion. En fait, c'est replacer une solitude et un manque d'affection par un autre. Cela rejoint l'opinion des gens du quartier sur les Africains. Les Nègres « tout aussi dépenaillés qu'autrefois, nous léchant les mains avec l'espoir de trouver un maître vu qu'ils ont besoin qu'on s'occupe d'eux pour ne pas mourir de faim à mâchonner des racines ».
Finalement, que ce soient les regrets du policier Gusmão, un homme vieillissant aux fanfaronnades d'un gamin de treize ans, le trajet est le même d'une implacable cohérence. Un quartier avec « toujours plus de baraques, toujours plus de cabanes, toujours plus de venelles, de poules féroces et de chiens moribonds » dans lequel un habitant s'écrie « Dieu ne m'aime pas ». Faut-il pour autant qu'ils aillent se jeter dans le Tage ?

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Il est le plus souvent question pour « Mon nom est légion » de splendeur de la langue et de poésie. Il me semble que l'écriture apoétique de ce roman est au contraire volontairement brute et désarticulée. Tout y apparaît délirant et en ordre dispersé, le traducteur parle d'ailleurs d'un lyrisme aux pattes cassées. L'écriture nécessairement inesthétique est haletante, pulsionnelle, interrompue par des tirets, des passages incessants à la ligne, des répétitions obsessionnelles et des phrases coupées nettes. Perdue, submergée – comme nous mêmes –une partie de la critique semble s'accrocher désespérément aux basques d'un Lobo Antunes première manière.

Je pense qu'il est question de tout à fait autre chose avec « Mon nom est légion ». Je crois que Lobo Antunes a repoussé encore un peu plus loin les limites littéraires pour dire une nouvelle fois, sans la compassion qui masque son horrible réalité et sans la haine qui empêche de la comprendre, l'inhumanité de certains êtres inaboutis et déchirés par la vie.
Toute l'horreur des faits est révélée dès le premier chapitre. Huit adolescents volent des voitures. Dans une station service qu'ils viennent de cambrioler, équipés d'un fusil à pompe et d'un pistolet, ils assassinent un balayeur ; ils brisent à coups de crosse l'épaule d'un conducteur de fourgonnette avant de le descendre à son tour. Dans la même soirée, ils dévalisent une boutique de téléphone ; ils arrêtent au hasard un couple d'automobilistes, brisent avec leurs armes les dents des passagers et violent. Pas de bon camp. Un policier en fin de carrière, tapis à la frange d'un quartier de relégation va éliminer systématiquement et sans état d'âme ce qui n'est pour lui qu'une racaille noire et néfaste. Dans la suite du récit, les voix nombreuses, sans souci de linéarité, se succèdent. le policier divague entre le récit des opérations et ses ratés familiaux et sentimentaux ; une vieille prostituée est invitée par l'un des délinquants à venir vivre avec lui ; le beau-père d'un des métis se remémore son enfance chaotique ; un vieillard impotent et haineux, en rapport avec les voyous, se souvient de sa première femme ; un professeur d'une institution, dans laquelle un des délinquants a été placé, parle de son travail …
Avec « Mon nom est légion » il faut accepter de ne pas tout comprendre, l'auteur ne suggère-t-il pas de lire ses romans dans le noir. Il faut laisser aller toute sa sensibilité. Les pensées surviennent en ordre dispersé, elles se juxtaposent, s'entrechoquent pour dirent la misère, la violence, le racisme la solitude et la mort d'individus réduits à leur seule animalité, d'individus sans enfance, sans amour, sans consolation possible. Comme Faulkner, Lobo Antunes entrecroise les flux de pensées de ses personnages, il raconte l'intérieur de toutes ses vies. L'enlacement complexe des voix n'est jamais gratuit, il permet de cerner des affects inaccessibles au langage ordinaire. le Prix Nobel américain révèle une humanité sans parole, Antunes lui fait surgir miraculeusement une empathie pour des personnages sans parole et sans humanité. « Mon nom est légion » est un vaccin contre la haine et le ressentiment pour ceux qui n'ont pas voulu, ou qui n'on pas pu, déserter les « Quartiers du premier mai ».
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Ma première lecture d'Antonio a été son Livre de Chroniques IV. Il a beau discréditer ses chroniques en insistant avec force qu'il ne s'agit pour lui que d'exercices d'assouplissement du poignet avant de véritablement écrire (comme dans Mon nom est légion), j'ai été littéralement impressionnée par la traduction de Michelle Giudicelli qui fait de la prose poétique de l'auteur un exemple émouvant de virtuosité littéraire au service d'une grande sensibilité. Ce qui me touchait, c'était la saisie de milliers de petites choses que nous remarquons sans forcément nous les dire comme cette grand-mère, qui devient nôtre, ayant absolument besoin de ses soucis pour être heureuse...
Le regard d'Antonio Lobo Antunes est perçant et tendre et pour le restituer, il use de pirouettes et d' audaces stylistiques qui témoignent d'une grande liberté littéraire.
La lecture des Chroniques s'étant révélée suffisamment étonnante, j'ai sauté dès la parution sur la dernière traduction parue de Michelle Giudicelli qui ne peut qu'être poète elle aussi, traductrice et poète, et j'ai lu, lentement, en savourant, parfois en m'exaspérant mais le plus souvent en m'émerveillant Mon nom est légion.
L'expérience en est véritablement une. Elle est à déconseiller à tous ceux et celles qui aiment garder leurs repères, il faut aimer se perdre, perdre le fil, parfois la tête, les retrouver pour goûter et poursuivre la lecture de Mon nom est légion. Dès le départ, le compte-rendu officiel du flic, premier protagoniste, est un flux déconcertant de texte administratif, pensées, souvenirs, rêveries. Tout s'écrit, c'est ce qu'Antonio enseigne au lecteur. C'est une expérience humaine aussi, celle de pénétrer dans une pensée raciste-mais-pas-que, sensible, complexe. Puis, les je, les voix s'enchaînent et parfois s'interpénètrent, le lecteur ne sait plus très bien qui s'exprime puis il retrouve le fil et le reperd. Selon les moments de disponibilité, d'écoute au texte qu'est la lecture de chacun, cette construction circulaire en courtcircuitages et retours momentanés à une linéarité, ce procédé peut agacer (était-ce ma fatigue après le travail ou indisponiblité ? j'ai plusieurs fois posé le texte en cours de chemin), fatiguer ou permettre de grands et incroyables moments de poésie dont on ne peut nier l'intensité.
Snob Antonio ?
Absolument et pas du tout. Il permet une nouvelle (et déjà présente en chacun) appréhension de ce qui se passe dans la pensée, il s'agit d'écriture qui s'élabore avec la logique mais aussi la confusion des voix en nous (souvenirs, présence des autres en nous) et donc dans le livre. Lire Mon nom est légion, c'est être à l'écoute de ce qui se passe en chacun différemment mais avec un caractère universel, de ces voix qui rôdent au milieu, au cours de notre « propre? » fil de pensée, c'est une expérience de vérité.
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Un flic mandaté par ses supérieurs pour mettre fin aux agissements d'une poignée de gamins ingérables. On pourrait penser à un autre roman policier, venu du Portugal mais Antonio Lobo Antunes se dégage très vite du genre pour nous livrer le point de vue d'une vingtaine de narrateurs. Ces témoignages sont réalistes ou fantaisistes suivant le cas et permettent à l'auteur de s'évader dans des digressions parfois plus personnelles et souvent existentielles. L' humanité n'en sort pas grandit. On quitte difficilement ce roman qui coule comme une saudade, violente et mélancolique.
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Le texte fait de chapitres entremêlés, sans ponctuation, en rend la lecture particulièrement pénible et insipide. Exercice de style branlatoire pour les belles âmes de la pensée littéraire qui ne manquent pas de s'extasier devant l'incompréhensible, comme devant “l'art moderne” et ses escrocs. Au moins quand on trempe la queue de l'âne de Duchamp dans la peinture on peut rigoler des commentaires des “critiques” et se payer leur fiole ! Dommage j'avais beaucoup aimé l'auteur de “Le cul de Judas”.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Dans une forêt de bruyères, dans quoi ce pays est tombé avec la démocratie messieurs, le manque de respect, la mauvaise gouvernance, les noirs, mes entrailles jusqu'à ce qu'elles fonctionnent efficacement, huilées, calmes et s'il vous plaît, ne me donnez pas l'argument selon lequel l'âge est différent parce que ce n'est pas l'âge, c'est le salut de ceux qui peuvent qui se transmet aux organes, les voilà, chacun de leur côté, fonctionnant seuls, que je sens les surrénales et le pancréas égoïste, les tourmenter farouchement. Je me vernis les ongles sous le buffet sur le ventre, je vais finir comme ma fille à étendre les couvertures et à secouer les tapis après des semaines passées à méditer dans un bureau des brevets. / Je respire, je respire, n'est-ce pas ?
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Peut-être qu'elle sourirait aussi comme les Blancs le font dans leur conversations de Blancs donnant des noms à des émotions et à des choses, une chaise, tristesse, verre, faim, ma mère également seule et ignorante ça seul parce qu'on ne sait pas ce que seul signifie, nous sommes noirs, On vit comme des lapins et des taupes, on fuit tous ceux qu'on approche nous, nous avons peur (on ne sait presque rien mais on connaît la peur) Et nous trottons plus vite que la peur en nous accroupissant sur un Je meurs en espionnant la peur de loin, je n'ai pas peur de mourir, nous n'avons pas la peur de la mort puisque mourir signifie que le corps change de lieu et c'est tout, Nous avons peur que le quartier ne soit pas d’accord avec nous et nous chasse
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« (ils s'accouplent comme des animaux) disparus dans les fissures, les grottes [...] (même les coléoptères les ont mangés, je vous le garantis) [...] les attitudes qui ne sont pas comprises par les animaux et les noirs n'attendent probablement rien car la mort ne les inquiète pas, [. ..] les métis ne pleurent pas parce que le mécanisme des larmes n'est pas né avec eux [...], ils partagent des tripes dans leur long langage de consonnes ». Incluant également son épouse. « Bien sûr, elle est métisse et alors méchants, indiquez-moi un vrai homme noir, travailleur, honnête et malgré tous leurs efforts, ils n’en trouveront même pas ». Une métisse dont l'odeur était « plus dense que celle des renards en chaleur
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Par famille, j'entends non seulement mes parents et mon beau-père mais mon ex-femme et ma fille, je ne veux pas y entrer là-bas, je me limite à enregistrer ce qui existait dans mon passé et à ma fille un peu actuellement un dimanche par mois à au nord où je le visite pour une raison quelconque, je crois en l'espoir d'un dialogue que nous n'avons pas eu et que nous continuons de ne pas avoir ». « j'étais vieux, épuisé, avec retour d'Ermesinde [...] concluant que rien ne méritait le voyage, certainement pas ma fille
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Peut-être qu'elle sourirait aussi comme les Blancs le font dans leurs conversations de Blancs donnant des noms à des émotions et à des choses, une chaise, tristesse, verre, faim, ma mère également seule et ignorante ça seul parce qu'on ne sait pas ce que seul signifie, nous sommes noirs
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