Il était toujours en colère, une colère bien installée qui avait fait son nid dans les noeuds de ses cheveux.
« Les têtards, vous savez, il y a des gens qu’il ne faut pas approcher. Vous apprendrez ça. Il y a des gens qui vont vous assombrir le ciel, qui vont vous voler la joie, qui vont s’asseoir sur vos épaules pour vous empêcher de voler. Ceux-là, vous les laissez loin de vous… P 26
la vie est une grande soupe dans un mixer au milieu de laquelle il faut essayer de ne pas finir déchiqueté par les lames qui vous attirent vers le fond.
Ma mère m'a soignée du mieux qu'elle a pu, et elle était plutôt douée...
Peut-être qu'elle souffrait de se sentir inutile la plupart du temps. Et qu'elle avait besoin qu'on ait besoin d'elle.
Ce qui expliquait sa passion pour ses chèvres, ses plantes et sa perruche. C'étaient des êtres qui dépendaient d'elle.
Les histoires, elles servent à mettre dedans tout ce qui nous fait peur, comme ça on est sûr que ça n’arrive pas dans la vraie vie.
Àla maison, il y avait quatre chambres. La mienne, celle de mon petit frère Gilles, celle de mes parents et celle des cadavres.
(Incipit)
Elle a souri un peu, sa tristesse est partie faire un tour dehors.
Du côté de ma mère, il n'y avait plus que ma grand-mère, malade et vieille. On allait la visiter une fois par an dans une maison de retraite qui sentait l'ennui, le renoncement et le beurre rance.
J’ai toujours aimé les préparatifs de la rentrée. L’odeur des cahiers neufs, des crayons, de la gomme, les intercalaires, la liste qu’on coche au fur et à mesure, les choses qu’on possède pour la première fois (cette année-là, je découvrais avec bonheur le compas). J’aimais tout ce qui avait trait au commencement. Ce moment où on imagine que les événements vont se dérouler selon un schéma planifié, que chaque nouvel élément va nous arriver sur un tapis roulant comme un colis dans un centre de tri et qu’il nous suffira de le ranger à l’endroit approprié. Les titres en bleu, les sous-titres en rouge. La gomme pour le crayon, l’efface-encre pour le stylo-plume. Le goûter dans la poche avant du cartable, la gourde dans son emplacement latéral. Le classeur de maths, avec un intercalaire pour les fractions, un autre pour la géométrie, un troisième pour les tables de multiplication et un dernier pour les exercices. Quelques heures douces et chaudes comme un ventre maternel, pendant lesquelles je pouvais entretenir l’illusion de posséder un semblant de maîtrise sur le cours de mon existence.
"On dit que le silence qui suit Mozart, c'est encore du Mozart. On ne dit rien du silence qui suit un coup de feu. Et la mort d'un homme."