Une merveille qui accompagne la mort, bien que ce soit la mort des grand hommes mais la mort reste la mort...en fait par la beauté et la profondeur des mots, on n'oublie par moment qu'il s'agit bien de la mort...
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Longtemps, je me suis demandé : pourquoi tant aimer ces oraisons ? Etant athéiste de mon état, je ne pouvais y trouver, à priori, que bien peu d'intérêt. En bonne logique j'aurais même du les exécrer. Mais non, et la raison en est simple : en dehors de leur côté religieux, ces oraisons sont avant tout des textes universels. Elles le sont, tout d'abord par leur grande beauté, et ensuite parce que leur auteur dresse un tableau de la vie. Dans une prose magnifique, il nous donne à contempler les figures des grands, mais aussi leurs exploits ou leurs malheurs. Ainsi de la guerre civile anglaise ( Oraison d'Henriette ), ou encore de la bataille de Rocroi ( Oraison de Condé ). Il nous peint également le portrait de la vie, et qui vaut non seulement pour les grands mais pour tous : le rapport au temps, comment supporter la mort, la vanité d'une grande partie de nos occupations, l'orgueil que nous mettons dans notre propre contemplation. A recommander, peu importe votre foi; ou, comme moi, votre absence totale de foi.
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La prose classique en sa plus grande beauté.
Une philosophie ferme - des traces de courtisanerie, mais ramenées à l'appui de sa thèse, qui est bien entendu chrétienne, et surtout morale.
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Nous commençons tous notre vie par les mêmes infirmités de l'enfance : nous saluons tous, en entrant au monde, la lumière du jour par nos pleurs ; et le premier air que nous respirons, nous sert à tous indifféremment à former des cris. Ces faiblesses de la naissance attirent sur nous tous généralement une même suite d'infirmités dans tout le progrès de la vie ; puisque les grands, les petits et les médiocres vivent également assujettis aux mêmes nécessités naturelles, exposés aux mêmes périls, livrés en proie aux mêmes maladies. Enfin, après tout arrive la mort, qui, foulant aux pieds l'arrogance humaine, et abattant sans ressource toutes ces grandeurs imaginaires, égale pour jamais toutes les conditions différentes, par lesquelles les ambitieux croyaient s'être mis au-dessus des autres : de sorte qu'il y a beaucoup de raison de nous comparer à des eaux courantes, comme fait l'Ecriture sainte. Car de même que, quelque inégalité qui paraisse dans le cours des rivières qui arrosent la surface de la terre, elles ont toutes cela de commun, qu'elles viennent d'une petite origine ; que, dans le progrès de leur course, elles roulent leurs flots en bas par une chute continuelle, et qu'elles vont enfin perdre leurs noms avec leurs eaux dans le sein immense de l'Océan, où l'on ne distingue point le Rhin, ni le Danube, ni ces autres fleuves renommés, d'avec les rivières les plus inconnues : ainsi tous les hommes commencent par les mêmes infirmités ; dans le progrès de leur âge, les années se poussant les unes les autres comme des flots : leur vie roule et descend sans cesse à la mort par sa pesanteur naturelle ; et enfin, après avoir fait, ainsi que des fleuves, un peu plus de bruit les uns que les autres, ils vont tous se confondre dans ce gouffre infini du néant, où l'on ne trouve plus ni rois, ni princes, ni capitaines, ni tous ces autres augustes noms qui nous séparent les uns des autres ; mais la corruption et les vers, la cendre et la pourriture qui nous égalent. Telle est la loi de la nature, et l'égalité nécessaire à laquelle elle soumet tous les hommes dans ces trois états remarquables, la naissance, la durée, la mort. (Oraison funèbre de Henri de Gornay.)
Quoique Dieu et la nature aient fait tous les hommes égaux en les formant d'une même boue, la vanité humaine ne peut souffrir cette égalité, ni s'accommoder à la loi qui nous a été imposée de les regarder tous comme nos semblables. De là naissent ces grands efforts que nous faisons tous pour nous séparer du commun et nous mettre en un rang plus haut, par les charges ou par les emplois, par le crédit ou par les richesses.
Oraison funèbre de Henri de Gornay.
Où en sont donc les impies ; et quelle assurance ont-ils contre la vengeance éternelle dont on les menace ? Au défaut d'un meilleur refuge, iront-ils enfin se plonger dans l'abîme de l'athéisme, et mettront-ils leur repos dans une fureur qui ne trouve presque point de place dans les esprits ? Qui leur résoudra ces doutes, puisqu'ils veulent les appeler de ce nom ? Leur raison, qu'ils prennent pour guide, ne présente à leur esprit que des conjectures et des embarras. Les absurdités où ils tombent en niant la religion deviennent plus insoutenables que les vérités dont la hauteur les étonne ; et pour ne vouloir pas croire des mystères incompréhensibles, ils suivent l'une après l'autre d'incompréhensibles erreurs. Qu'est-ce donc, après tout, Messieurs, qu'est-ce que leur malheureuse incrédulité, sinon une erreur sans fin, une témérité qui hasarde tout, un étourdissement volontaire, et, en un mot, un orgueil qui ne peut souffrir son remède, c'est-à-dire qui ne peut souffrir une autorité légitime ? Ne croyez pas que l'homme ne soit emporté que par l'intempérance des sens. L'intempérance de l'esprit n'est pas moins flatteuse. Comme l'autre elle se fait des plaisirs cachés, et s'irrite par la défense. Ce superbe croit s'élever au-dessus de tout et au-dessus de lui-même, quand il s'élève, ce lui semble, au-dessus de la religion qu'il a si longtemps révérée ; il se met au rang des gens désabusés ; il insulte en son cœur aux faibles esprits qui ne font que suivre les autres sans rien trouver par eux-mêmes ; et, devenu le seul objet de ses complaisances, il se fait à lui-même son Dieu. (Oraison funèbre d'Anne de Gonzague de Clèves.)
Sans ce don inestimable de la piété, que serait-ce que le Prince de Condé avec tout ce grand coeur et ce grand génie ?
Non, mes frères, si la piété n'avait comme consacré ses autres vertus, ni ces princes ne trouveraient aucun adoucissement à leur douleur, ni ce religieux pontife aucune confiance dans ses prières, ni moi même aucun soutien aux louages que je dois à un si grand homme.
il veut que ma faible voix anime toutes ces tristes représentations et tout cet appareil funèbre. Faisons donc cet effort sur notre douleur. Ici un plus grand objet, et plus digne de cette chaire, se présente à ma pensée. C’est Dieu qui fait les guerriers et les conquérants. C’est vous, lui disait David, qui avez instruit mes mains à combattre, et mes doigts à tenir l’épée. S’il inspire le courage, il ne donne pas moins les autres grandes qualités naturelles et surnaturelles, et du coeur et de l’esprit. Tout part de sa puissante main : c’est lui qui envoie du ciel les généreux sentiments, les sages conseils, et toutes les bonnes pensées ; mais il veut que nous sachions distinguer entre les dons qu’il abandonne à ses ennemis et ceux qu’il réserve à ses serviteurs.
Parmi les écrivains les plus illustres du XVIIe siècle, Corneille, Racine, Molière, La Fontaine, Bossuet, Boileau, Mme de Sévigné, Mme de Lafayette, figure La Bruyère. Avec Les Caractères ou les Moeurs de ce siècle, il a tendu au public de son époque un miroir qui nous reflète toujours. Bien des comportements de la société de Louis XIV ressemblent aux nôtres. Les temps changent, pas le fond des hommes.
Jean-Michel Delacomptée explore ce miroir et ce que ses reflets disent de nous.
De La Bruyère lui-même, on sait fort peu de choses. Quels milieux fréquentait-il ? Était-il misanthrope, misogyne ? A-t-il aimé ? Était-ce un orgueil blessé ? Quelle était la morale de cet auteur si grave et pourtant si drôle ?
Jean-Michel Delacomptée brosse le portrait captivant de ce classique de notre littérature. Il ouvre ainsi une porte dérobée dans les Caractères, dont il rappelle avec force l?intemporelle grandeur.
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