J'ai beaucoup aimé
Paris-Brest ; même sans doute un peu plus que cela. Je me suis attachée à cette histoire, ou plutôt non, c'est elle qui s'est attachée à moi. Trop de résonances. Il faut dire que l'auteur raconte des trucs que j'ai vécu, dont je me souviens. Les repas au Cercle (au foyer du marin), moi aussi j'en ai fait. Ce n'était pas avec ma grand-mère, ou plutôt si, elle était là, mais c'est sa soeur qui nous invitait. La gare de Brest, le trajet en voiture jusqu'à la Pointe Saint Mathieu puis plus loin, cette côte sauvage d'où on devine Ouessant entre ciel et océan, ce côté un peu malaisant de la ville, et la vue sur la rade… tout cela je l'ai en moi. le pompon, dans ma lecture (j'en ris encore rien qu'à l'écrire), ça a été les millions absents des caisses du Stade Brestois, en 1991. Alors là. Que le père du narrateur soit mêlé à ça ! La crise de rire. C'était page 35, je crois bien que j'ai lu le livre d'une traite, ensuite.
Dans
Paris-Brest,
Tanguy Viel écrit un roman familial autour du roman familial de son narrateur. Et quelle famille ! Gast. Ici on ne s'aime pas ; ici on compte. Il y a la mère, bourgeoise dans son acception la plus vénale et hypocrite, l'argent à la
Balzac. Il y a Louis, le narrateur, suivi de près par son double maléfique, le fils Kermeur. Il y a la grand-mère, qui hérite dix-huit millions d'un vieux monsieur rencontré au Cercle. Et le père, qui lui n'a pu justifier l'absence de quatorze millions des caisses du Stade Brestois, quand il en était vice-président. Les parents s'exilent dans le sud de la France, Louis reste à Brest, dont il ne partira pour Paris que lorsque eux rentreront… Avant d'en revenir pour un Noël, valise alourdie d'un manuscrit, lui plus léger de l'avoir écrite, cette histoire de famille.
Il y a un rythme étonnant dans ces pages. le livre est minutieusement construit, tout en donnant l'impression que le lecteur découvre le texte en temps réel de son écriture. La prose affiche un faux débraillé étudié. Tout au long du livre on grince des dents, on perce des mystères, aucun des personnages n'en ressort sympathique, et pourtant l'ensemble est attachant. Et cet humour ! Les sacs en plastique de la mère, le briquet aux armes de Palavas-les-Flots.
Tanguy Viel explore, questionne. Et moi, hais-moi, aime-moi… Et toi ?
Vraiment très heureuse d'avoir sorti ce roman de ma pile à lire (acheté il y a des années chez Dialogues, d'ailleurs), je sais déjà que j'en lirai d'autres de cet auteur !
« Quand chaque phrase venue d'elle, à peine franchie ses lèvres, on aurait dit qu'elle tombait en chute libre pour s'écraser au sol. Alors lui, je ne sais pas, comme plein d'indifférence, à son tour on aurait dit qu'il se baissait tranquillement puis qu'il les ramassait, chaque phrase gisante au sol, et qu'il y répondait. »
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