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EAN : 9782754309707
124 pages
Livre Actualité (30/11/2021)
4.63/5   20 notes
Résumé :
Vous aimez les poètes, ne les nourrissez pas ! Ce titre, vous fait-il penser à des moineaux des parcs urbains ? C’est un roman rongé de vers comme le granit de lichen. C’est un roman nourri de vers comme une vie d’une passion. C’est un roman qui nous ressemble, moi qui notais, lui qui dribblait, et nous shootions, nous nous pendions chacun à son panier de rêves…

« Sur quoi oeuvres-tu, maman griffonneuse, dactylographieuse, maman engloutie ?
— J... >Voir plus
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« Sur quoi oeuvres-tu, maman griffonneuse, dactylographieuse, maman engloutie ?
— J'écris sur les arbres, les hommes aussi, car je les confonds, voisinant parfois dans le même cadre…
— Tu aimes ton végétal comme un vrai humain ?
— J'aime plutôt l'homme comme une pinède ! »

Chers lecteurs et amis Babelio, après un bienheureux piétinement poétique de cinq ou six ans, je me suis relancée dans le roman !
Mon titre, vous rappelle-t-il les oisillons des parcs urbains ? C'est une prose rongée de vers comme le granit de lichen. C'est une prose bénie de vers comme une vie d'une passion. Galilée s'émerveilla : « Et pourtant elle tourne ! » Pourtant c'est un roman ! ai-je envie de crier. Récit où je slame et m'exclame… Vous trouverez cela barbant si vous ne prisez pas l'aspect dense, et même cursif, rabougri, de la poésie contractée. C'est une fiction qui nous ressemble, moi qui notais, lui qui dribblait, et nous shootions, nous nous pendions chacun à son panier de songes…
J'ai traversé le Rhin, écouté Novalis, je me suis cachée dans le myosotis romantique pour réunir l'onirisme et le monde réel, comme un trouvère en quête de l'amour absolu.
En un camaïeu volubile et hyperbolique, mon dégradé de vert, abreuvant mon âme avide, j'ai décliné à loisir mes tags de prédilection : rêve, pluie, ardeur, poème, liane, sylve, lac, lilas… Vous, feuilles, troncs et branches, mes membres, mes torses, mes peaux ! Bourrée comme un coing de rimes, je me suis muée en Ève !




La suite, ce n'est ni une critique ni un préambule mais un texte qui révèle le caractère du livre, plonge dans son ambiance et ses exaltations gardant le « je » initial de la narration. Commencer par un épilogue, n'est-ce pas une bonne approche ?
La vie, versatile, est impossible à cerner. Elle persévère alors que ce livre se fige. Il n'est qu'un oeil-de-boeuf parmi d'autres éclairant le creux de ma paume... Dès qu'une fin fragile point, une nouvelle intrigue se dessine déjà à l'horizon.

***
Je quitte très tôt mon appartement. La nuit règne encore sur ma promenade. Gisent sagement sur l'échiquier sombre d'un plan d'eau étroit les paons aquatiques. Je ne compte que sur les lampadaires, épouvantée par le désert des lieux. le givre m'enjôle couvrant chaque brin. Tout endolori, près de se casser, mon index semble un bâton de cannelle. Mon pompier agile qui n'est pas venu éteindre le feu de ma foudre en boule, que je voudrais épier sa tenue de course par ces temps gelés, l'entrevoir d'un oeil ! A-t-il un bonnet ? Est-il en collant, sous un coupe-vent, ou toujours sans rien ?
Loin de notre idylle, j'opère mes boucles de Paris-boudeur. C'est ainsi qu'un schéma de la Ville-Lumière se montre à ma vue : dans sa fraise clownesque, juche une tête ronde fendue par la Seine, sa bouche maussade presque édentée ! Bannies soient les cartes !
Ô détail divin ! Sous le pont d'Iéna, le torrent grommelle, remue son prénom, renouvelle encore mon flux de désir. Dans le brouillard bleu du fleuve évolue un petit navire que mon éros berce. Entre les piliers de la Flèche Eiffel, les Sainte Nina et Sainte Rita, les cordes moussues ancrent les péniches. Ces humbles pylônes m'attisent sans fin.
Ma Tour ne sort pas, et c'est le covid qui s'est invité, ennuyé sans elle ! Mais voici mon grog, aux agrumes-mots, une décoction de mes veillées longues, au vin de syllabes, au miel de virgules. Qu'en toutes circonstances, tu demeures ivre ! Quatre pétales de « v », pour ailer ton coeur, et sept pincées d'« i », pour un sourire ample, assaisonnées d' « e », très euphorisants, comme d'une essence naturelle exquise. Puis, à volonté, points d'exclamation !
Mon châle persan, pour ma délireuse ! Tu pionces ou tu brûles, tu racles la gorge murmurant une strophe, apte à distiller une mélodie de ta maladie. Ne sois enrhumée que d'une narine, ne sois obscurcie que du côté gauche ! Vivent nos remakes !
D'un coup j'aperçois le tronçon d'un fût flottant sur les ondes comme un short géant. Salut, mon Baumier, mon témoin muet ! Une mouette grise se pose à mes pieds…
Je tweete et retweete mes « selfies » pour lui, sur un air de Brel. Mais mes lieds cryptés, ma radio de Londres, n'éclaire que moi…
Ce matin hiémal, j'ai froid à la langue à bader la figue au bord de la Seine, à béer devant les arches brumeuses, à foncer depuis trois heures entières dans la vie fermée pour qu'elle s'éventre ! Yeux écarquillés ! Hier, j'ai soufflé ma flamme amoureuse comme une chandelle. Je vais devenir une Laponie ! Et, comme les vieux, tout asymétrique ! Mes encourageuses seront mes deux larmes, mes humeurs du nez !
J'entre aux Tuileries aux piétons épars, hantés de virus. Les paros houssés offrent leur silhouette ou plutôt leur spectre. Je me crois à Vienne où mes doigts de bois peinaient pour capter un lunch d'écureuils, les derniers seigneurs d'un château royal.
Sans raison, je suis montée sur la butte du pont desservant le Palais Bourbon. Là, ma perle rare, je l'ai dénichée ! C'était un trou vague de soleil timide, une lueur baroque, l'éclat tamisé d'un jaune de Naples crevant les nuages et le smog ambiant ! Sous les réverbères encore allumés, dans l'optique amène des ponceaux voûtés, mon Paris loukoum, poudré, impalpable, cité de poupée, s'est ouvert à moi !
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« Souris aux lys, sinon ils fanent ! Badine au ciel, sans quoi il s'étiole ! »

Ce ne fut pas une rencontre gagnée d'avance. Mais il a eu raison de moi. Ce livre. Cela fait un moment que je l'ai à mes côtés, à chaque fois que je l'ouvrais je ne savais pas par quel bout le prendre, preuve en est à quel point je suis formatée par un type de poésie, une poésie plus cadrée, celle des alexandrins d'un Baudelaire, celles des poésies sans rimes mais cependant structurée d'une Andrée Chédid par exemple ou d'une Anise Koltz, et surtout celles des tankas que j'aime lire et écrire. Les tankas de Akiko Yosano et son somptueux « Cheveux emmêlés » est mon oreiller d'herbes depuis une dizaine d'années, l'épure de ses tankas m'apaise. Alors comment accueillir cette poésie fleuve, libre, rebelle, imprévue qui me donnait le tournis dès que j'en approchais mes yeux fermement corsetés, guindés dans l'étau de leurs oeillères…

J'aime regarder
Les immensités sans borne
Le ciel et la terre –
Oublier les sens, les formes
Des lignes et des frontières

Pourtant, elle prévient dès le départ Maryna : « Notre bavardage exalte. Ou il ennuie. Cela dépend de qui nous a apprivoisés ». Il faut donc l'apprivoiser. Oui mais comment ? Quelques indices cependant « la macaronée, rare et non paginée, se consomme en quantités réduites. Ce n'est pas systématiquement du miel apaisant, de l'huile luisante. C'est souvent de l'ail ou de la moutarde, ou du hareng saur ». Très bien, j'aime l'idée. Une poésie qui a du caractère à consommer par petites doses donc. Je relève le défi.

Comme à chaque expérience de littérature, la lecture à voix haute m'a ensuite donné les clés d'approche. Et je fus littéralement émerveillée lorsque la porte s'est enfin ouverte. La poésie de Maryna Uzun est une poésie qui pétille, qui claque, qui explose, qui tourneboule, qui ose, qui crie par moment, qui apaise aussi. Une poésie primesautière. En l'espace d'une ou deux pages, elle nous entraine dans une multitude de sentiments, de beautés, d'émotions. Et me voilà impressionnée et tellement imprégnée par ma lecture que je me surprends à voir émerger des images provenant de son imagination à elle dans ma vie à moi…Ainsi, me baladant, à la vue de des premières feuilles, voilà que surgit un dragon crachant du vert tendre.

La poésie de Maryna, c'est une poésie qui se dépiaute, qui se lit et se relit, qui cache des images derrière d'autres images, dont la richesse se met peu à peu à flotter sur l'eau de nos yeux ébahis à chaque petit chapitre. Elle se picore la riche et roborative poésie de Maryna, elle nous nourrit, nous lecteurs chanceux, en en un rien de temps…
« Une femme aptère, la mouche sans ailes, pour qu'elle demeure près de son mari ? La poupée en argile, épouse ininflammable, qui résistera à l'amour subit ? Non, je ne suis pas conçue pour me mariner ni pour me complaire en fleur éplorée ! Je suis immariable : je vais m'envoler ! ».

La poésie de Maryna convoque tous les sens, c'est un festival d'odeurs, de sons, de couleurs qui explosent en mille et un confettis.

« Ma fantaisie imminente, que nous buvions à nos fragilités réunies ! Que nos subtilités s'entrelacent ! Je serai ta bonne mauvaise herbe ! Que nos matins fleurissent en jaune ! Nos mille coucous printaniers, nos appels de canari, inquièteront le bosquet ! A nos plumes citronnées ! ».

Pourtant, la poésie de Maryna raconte avec pudeur les douleurs d'un mari bousilleur de songes et jaloux de la créativité de la poétesse, la détresse de l'amour dans « sa brumaille et ses embrouilles », narre au contraire avec bonheur et délicatesse l'enfant avec qui elle se sent en totale connivence. Assurément, elle a gardé la fraîcheur de son âme d'enfant, cette âme qui voit la beauté des lieux, cette âme qui fait surgir des images insolites, cette âme qui fête sans cesse ses étonnements, cette âme qui invente des noms, cette âme un brin espiègle qui joue sans relâche, ne prenant pas la gravité de la vie ou les déceptions amoureuses au sérieux, qui les écrase à coup d'optimisme envers et contre tout, et cette fraicheur fait tellement de bien, elle nous éclabousse de sa pureté, de sa beauté. Elle est salvatrice.

« J'ai rêvé qu'on s'offrait une spacieuse maison, seulement pour nous deux, située sur une place rumoreuse et peuplée d'humbles réverbères, sous un ciel de crépuscule, bleu-orange-violet. Sur un mur pendouillait une photo de couple, pas de nous mais d'heureux inconnus aux regards flous, qui nous magnétisait des phrases de cinéma, immortelles, éthérées, trompeusement faciles…Je voulais, avec mon enthousiasme intact, nettoyer de fond en comble cette demeure. Cependant elle était déjà propre et ensoleillée. Je courais d'un niveau à l'autre pour rien. Sauf pour la découvrir et te la raconter ! Ce n'était ni en ville, ni à la campagne, ni dans une station balnéaire quelconque. Je crois qu'elle était sous le ciel d'Italie.
- Mouais…, marmonnait le mari sans lâcher sa souris. Mouais… , répétait-il encore, ce bousilleur de songes ! »

La poésie de Maryna est d'une beauté à couper le souffle, d'une élégance folle, d'une créativité sans limite dans laquelle la musique est toujours présente en filigrane. Des arbres qui s'allument, des clairs de lune debussystes, des saillies lisztiennes, des endroits rumoreux, du jus de ciré, des complots sylvestres, des aubades tartares, des yeux glaneurs, une dévoreuse d'aube, des carrosses de syllabes, des vers blancs assaisonnés de pluie…C'est une poésie connectée avec la nature qui sait sans relâche s'étonner et s'émerveiller. Elle nous donne des clés magnifiques pour regarder différemment, envers et contre tout, surtout envers et contre tout.

« le Chêne sort droit du moyen-âge. C'est une cathédrale ondulante d'un vert gothique aux maints moulages, aux plâtres fins sur la corniche. Un Cèdre, c'est toujours bohème, ses rameaux poussent en désordre. C'est un géant au dos voûté qui, débonnaire, ouvre les bras. C'est aussi un sorcier, en loques, baissant les branches face à la mode. Arbre vétuste, poivre et sel, il n'a jamais le vent en houppe, tandis que les Magnolias luisent comme des autels habités (…) Il fait bon tromper son mari avec les plantes séculaires ».

Espiègle Maryna, touchante Maryna, facétieuse Maryna, l'incroyable dentellière d'amour…Sa poésie est d'ailleurs très souvent sensuelle, voire érotique, l'air de rien, toujours par images interposées.

« Toi, mon prochain amour, je t'attends ! Que ton bout-rimé se pose sur le mien comme une libellule ! Sur la tige rouge de mon dos tortillant, qu'il s'endorme en souriant ! ».

« Mon mamelon dans ton oreille te joue la musique d'une baignade d'animaux, buffles et zèbres, dans un lagon. Je suis heureuse et amoureuse, et caressante et caressée. C'est mon soupirail de l'Invisible que je promène autour du lac… »

Voilà, je ne sais comment exprimer mon émotion mais réelle elle est. J'avais à mes côtés un trésor depuis de longs mois sans même le savoir. L'importance d'être constant ou celle d'être aléatoire, questionne-t-elle ? Elle a su me sortir de la constance de la poésie cadrée pour me plonger sans bouée dans les flots de sa poésie aléatoire qui regorge de merveilles, de force, de féminité, de sensualité. J'ai perdu pied avec délice dans ses délires lacustres, dans sa poésie pleine de circonvolutions et d'arabesques insolites, sur ces chemins sylvestres nostalgiques rongés par les vers sur lesquels je l'imagine vagabonder avec grâce.
Merci infiniment et chapeau bas chère Maryna pour tant de beauté, pour tant de créativité et pour cette leçon : « Je peux être heureuse grâce à mon chaos ». Je reviendrai picorer sans cesse dans cet écrit qui n'a pas fini de me nourrir.


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"Oh lis moi sans délai, je ne t'attendrai pas!" me fit un quatrain quand je le dépassais. Ce sont mes vers-lapins qui minent, sapent, creusent des souterrains..." nous prévient Maryna Uzun.
Un petit hommage à "Vous aimez les poètes, ne les nourrissez pas!"


Maryna ...
M comme:
Ma vie de couplets enragés et de légumes encombrants, et de précautions inutiles où j'ignorais les dinosaures..


A comme:
Aèdes courtois, ne m'appelez pas "ma petite fleur", j'ai peur qu'on me mette un jour dans un vase,


R comme: Réveille moi, feu vert ardent. Rappelle moi, fontaine fraîche. Je me rue à ta rencontre, la rue de nos révélations. Notre coeur-à-coeur est étrange...


Y comme:
"Y a pas le feu, madame!
J'ai envie de répondre: Comme menace, il y a pire. C'est la ménopause!"


N comme: Néanmoins où puis-je aller ailleurs? J'aurais beau être chez moi, affalée sur le divan, azimuter Casimir, l'écouter continuellement se plaindre...


A comme:
"A mes amours, ce soir, j'avoue: les utopies qui ne sont pas réalisées sont des cauchemars...Casimir prétend que j'entends tout de travers.


En espérant que ces quelques extraits vous donneront envie de lire ce livre. Mais, qu'est ce qu'un "Casimir":)
"Canapé ou Ampoule au pied?
Sérénade ou Intempérie?
Mamelles t'aimantant à l'oreiller ou Isthme éventé au point du jour?
Refixe ton choix: des becs drus ou patins moelleux?"


Elle ouvre la source des larmes
Et les fait doucement couler.
Ses "vers-lapins" ont les plus doux charmes
Et moi émerveillé, je m'y laisse couler .
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Toutes les nuits , notre primesautière s'accroche à la lune et voyage dans sa vie au gré de ses récits .

" Mon lit grince au rythme de la Marche Funèbre : je me lève la nuit pour tambouriner mes strophes . Je laisse mes doigts galoper sur le clavier sans que quelqu'un me gronde pour la lampe allumée . " P. 10

Ce qui séduit la jolie petite brune , c'est d'exister au rythme d'un tango de mots qu'elle a concoctés dans un éternel rubato .
Mais quand son amie sélénite se teint en lune rousse , elle éveille ses tourments et lui donne la frousse . Casimir , si terre-à-terre , va encore lui faire vivre l'enfer avec ses paroles féroces , infécondes et maudites .

" Quand votre " moitié " , votre trou béant , vous vomit de bon matin : " tu ne vaux rien ! ", il vous chagrine , quoiqu'il vous vaccine contre les blessures futures , contre les maux et les aphtes de la versification importune , contre tous les affres de la plume ! " P. 10

Voilà pourquoi , elle se tourne régulièrement vers la nature qui jamais ne l'abjure et lui révèle combien elle est fascinée par les jolis mots qu'elle a inventés pour la dessiner .

" J'ai pris en balade un quatrain pleureur , et nous avons aperçu un oiseau hors pair : canard mandarin , à l'état sauvage , échappé on ne devine de quelle cage . " P. 11

Ces philtres magiques qu'elle façonne comme une pro de la musique , elle les doit à tous ces maestros qui lui ont appris le sens du tempo .
Donizetti a enfanté " Nemorino " dans "l'Elixir d'Amour " et " Une furtive Larme " a émotionné la dame qui s'est accaparé du prénom et nommé ainsi son mômichon .
En grandissant , il devient son confident , et pas seulement .
Ensemble , ils marchent dans les allées du parc où tant d'amis , comme le Chêne , le Cèdre , le Saule , le Cerisier et le Pommier , frissonnent de joie à leur passage .
Que de challenges ils se disputent en dribblant , en se défiant au lancer de ballon .

Mais un poète subsiste grâce à ses luneries ; ses paroles folles proviennent des branle-bas qui secouent son coeur , à la vue d'une fleur , à l'aube d'un nouveau bonheur qui peut remettre toute sa vie en question .

Ainsi , elle rêve , incante , échafaude ; elle se nourrit de pieds , de vers , de strophes , en cadence ! Elle vit !

Et surtout , elle a rencontré un magnifique " houppier "qui doit lui rappeler un monde évaporé !

" Simha ...
Mes méprises de l'espoir : te tenir pour quelqu'un d'autre ou prendre quelqu'un pour toi ! "






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Fidèle sur Babelio, je suis toujours très attentive aux citations mises en ligne sur le site, elles me permettent ainsi d'approcher modestement l'identité d'un auteur. Aussi, le livre de Maryna entre les mains, je me suis demandée si le « Taureau » que j'étais serait à même d'appréhender le côté surréaliste de son écriture. Question vite résolue. Dès les premières pages, il m‘a été agréable de savourer son environnement serein et bucolique où je me sens à ma place.

« Vous aimez les poètes, ne les nourrissez pas » ! Ce titre m'a tout de suite fait penser à ces pancartes que l'on rencontre dans les parcs et jardins publics « Vous aimez les oiseaux sauvages, ne les nourrissez pas ». Maryna m'invitait-elle à la flânerie dans un parc comme le suggère la couverture de son livre ?

Maryna joue avec les mots. le charme de son écriture opère, je suis fascinée. Parfois je me trouve décontenancée, parfois je pénètre le sens profond de ses phrases. Une intimité se crée entre nous deux, nous sommes proches et subitement, un terme, une figure, nous sépare. Elle sait si bien jongler avec le sens des mots, avec ses pensées, elle sait si bien envoyer les mots contre un fronton imaginaire pour mieux les voir rebondir sous une autre forme. de sa méthode, une vibration se dégage, apaisante, mélancolique, qui berce, qui interroge. La musicalité parfois laisse place au sens, à la poésie puis de nouveau, la musicalité prend le dessus et on se laisse porter par les mots sans chercher à comprendre, simplement se perdre dans cette mélodie où il est question d'un amour contrarié, d'un élixir d'amour inefficace à moins qu'il ne soit que le fruit de l'imagination de Maryna, nourri par son admiration pour Simha. Puis elle revient me susurrer à l'oreille une confidence sur Casimir, son époux.

Quel joli vagabondage insolite dans ce si romanesque paysage intérieur. Je me suis laissée transporter dans une autre dimension. Maryna aboli les frontières entre les mondes. le rêve se fait poésie, pose un regard bienveillant sur dame nature, dévoile une bien jolie personne « mes ongles sont coupés trop courts pour qu'ils griffent » dit-elle en s'adressant à son « runner ». Il y a de très jolis passages qui font penser à des mouvements lyriques d'une grande douceur et parfois si languissants devant ses espoirs d'amour déçus. Je la ressens si vulnérable :

« Ma coupe verte était prodigieusement pleine. C'était un matin désert, un week-end de chassé-croisé des vacanciers bougillons. Comme si, dans la plupart des cas, chacun buvait des prunelles et emportait avec lui une poignée de l'eau vive.
Sur la barbe de cent nuits d'aiguilles ocre de pin, j'errais sans trop d'espoir. Les rafales soulevaient le sable.
Il est apparu subitement quand je l'attendais le moins. Il m'a demandé : « Ca va ? » aussitôt se détournant.

Je ne suis ni faible, ni forte, je suis vide. Lui, ni distant ni engageant : du vent. Un livre de poche effeuillé traîne à terre à l'endroit où on s'est coupés sans agir aucunement. Je suis pour lui sans importance hors de conteste. Il est pour moi encore plus beau mais sans âme. »


Que d'amertume et de poésie dans ces lignes. L'alliance des mots et de la musicalité qui émane de la prose de Maryna, me fait penser à une partition de musique pour un Opéra. C'est comme un sortilège ou un ballet et dans la tête, la chorégraphie ou la scénographie projette les images et le livre devient vivant.


Chère Maryna, c'est avec un réel plaisir que j'ai reçu votre livre et vous prie de me pardonner le temps que j'ai mis à rédiger ce billet, un souci de santé m'ayant tout particulièrement ôté ma capacité de concentration. Je tenais à vous réitérer mes excuses.

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Citations et extraits (89) Voir plus Ajouter une citation
Simha, yearling aux yeux bas, je revis mon ultime coup d’œil sur toi… Oh admire tes runnings ! Elles ont l’air épatantes, tes épouses ravissantes gardant leurs pensées pour elles ! Ton polo du dernier cri, oh n’en sois jamais marri ! Déclare-moi, à plein gosier, mariée à la rue-carillon !
Mes mythes ne se greffent pas sur les souches. Mes ongles sont coupés trop court pour qu’ils griffent. Polo sans col, tu me plais trop, sans remède, pour que je puisse t’égratigner de mes lignes ! Mes lèvres bleues, baisers bruineux ne se posent que sur les bouches de métro, peu farouches.
Simha, darling défendu, ma suprême caresse pour toi… Mes méprises de l’espoir : te tenir pour quelqu’un d’autre ou prendre quelqu’un pour toi.
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Cependant c’est la chute du Rideau, comme au théâtre de Corneille ou à la commedia dell’arte. Le rideau des cataractes ! Mon histoire s’achève. Abasourdie d’étonnement, que je n’oublie pas d’applaudir ma fabuleuse aventure intérieure ! Fini, spectacle de la rue ! Le dehors sera mon chef-d’œuvre bizarre, admiré dans le plus profond des vacarmes !
L’écorce des platanes est en tempête : l’humidité écaille les troncs moussus inclinés. Les copeaux d’idées se détachent de moi. Madame La Crue, j’inonderai la Seine !
Néanmoins, à force, je craque… Mes manches sont mouillées, mes doigts paralysés, et je m’aperçois comme une clocharde bénévole, malvenue, misérable, lapidée de marrons, charroyant sur mes épaules le gris inexorable, ne fantasmant que d’être au sec, au chaud, devant ma tasse.
Mon parchemin se déchire sous ma main malhabile, mon monde se désagrège. La pluie ravive les pavés. En revanche, elle estompe le reste. Mon euphorie et mon chagrin, complètement abêtis, ne râlent plus rien. Je n’écoute que mon imper qui n’en peut plus. […] Mon ode aux flots tarit, elle aussi. C’est mon nez qui prend le relais : il coule, et moi, je passe…
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Il est une image troublante qui me hante depuis longtemps. Elle m’est venue dans mon sommeil, c’est la composition de ma vie ! J’aurais tant aimé la saisir, je ne suis qu’une piètre peintre… Ce sont des charmes majestueux, toutefois, dans leur feuillage abondant, se cachent des vitraux d’église appelant au ravissement. Ce plan est éblouissant, formé de touches de soleil… Dans la sylve sombre, tel un temple sans éclairage, silencieux, je serais vite épouvantée. Pourtant les « rosaces » sont colorées en rouge, en jaune, en rose, en bleu ! L’ensemble est pénétré de lumière…
Tel l’alignement de colonnes d’une cathédrale invisible, les pins supportent le berceau, ces géants gris sont Pierres et Pauls ! Je veux que le vent joue de l’orgue, que l’immense forêt enchantée verselle, loin de ma maison enrouée. L’arbre à prières ne sera ni consumé ni déraciné. Chacune de ses aiguilles tremble comme une oraison cristalline.
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Te dévorer de mes yeux, de mes lunettes, mourants, et chatoyer pour toi de mes dents si radieusement languissantes !
Dans cet espace gai et sans âge, mon âme a pris ta bouche pour cible. Sur ton torse viril, j’éparpille une poignée d’écailles perses comme un paquet de confetti sur un marbre en plein carnaval. Une bouffée de sperme jade semble me monter à la tête dans un coït hurluberlu. Arbres-époux, mes barbes vertes ! Fantaisies dignes de la potence comme les chairs d’Auguste Rodin !
S’il décidait de m’embrasser me voilà béotienne. Je ne sais plus me bécoter, j’ai perdu la lèvre, je me suis gâté la langue, comme quelqu’un la main. Mon escalope malicieuse, depuis l’adolescence, luxuriante en baisers, je suis frigorifiée, aux diamants dans les yeux.
(p. 84)
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Poli comme un galet marin, luisant comme un têtard géant, c’est un triton sorti du lac aux larges épaules humaines ! Rapidement il me devance. Presque instantanément j’entends une harpe dans mon cerveau qui ruisselle éperdument. Oui, c’est encore lui ! C’est du n’importe quoi, m’en faudrait-il si peu pour tomber en amour ?
Je t’ai vu dans un paysage de Klimt où les pins s’élevaient comme des rayures… Je me figure que tu sens leur résine aussi. Les striures grises pour te dérober ! Mes genoux fléchissent, mon cœur suffocant… Étire ta jambe contre un tronc puissant !
Je prends mon bain de conifères t’espérant venir, tu es un fils d’arbre, mon Jet infernal ! Comme une écorce, ta peau est chaude.
J’attendrai trois jours pour une seconde à côté de toi, mon joggeur filant ! Je suis raisonnable quand je perds la tête ! Si je me résigne je suis plutôt bête !
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