Un soupçon de justice

En juillet 1929, Jeannette Routier, jeune journaliste, est prise à l'essai dans la rédaction du quotidien le plus populaire de Gironde : La Belle Garonne. Elle forme un binôme avec Antonin Lavoir, un chroniqueur judiciaire. Cet électron libre ne cache pas son agacement de devoir faire son apprentissage. Il est déterminé à l'ébranler et à la malmener. Il est un fervent défenseur de la peine de mort : il connaît le pouvoir de ses articles et s'emploie à contrer les éventuelles commutations. Pour lui, « cette année sera exceptionnelle. […] Quatre exécutions. » (p. 22) Une affaire lui tient, particulièrement, à coeur : celle de l'assassinat de Bernard Davon, l'avocat général avec qui il était ami. le rédacteur en chef aimerait une interview de la meurtrière, or, depuis son arrestation, elle s'est retranchée dans le silence. Jeannette saisit sa chance. Elle est persuadée de pouvoir recueillir les confidences d'Odette Dubreuil : « Une femme parlera à une autre femme ! » (p. 24)

Rapidement, Jeannette comprend que l'acte d'accusation n'est pas exact. Elle est persuadée que Bernard Davon n'a pas été tué pour les raisons évoquées dans la presse. Elle pressent que si Odette parlait, elle pourrait bénéficier de circonstances atténuantes. Elle est déterminée à sauver, malgré elle, cette femme que plus rien ne raccroche à la vie, depuis la mort de son fils. Sa mission dérange Antonin Lavoir : il se bat pour que les femmes montent sur l'échafaud comme les hommes. Pour l'éloigner, il lui confie d'autres tâches, comme celle d'interroger la mère d'un bagnard. Misogyne, il veut aussi contrer l'ascension professionnelle de Jeannette. Cette dernière évolue dans un milieu masculin et se heurte à un machisme constant et virulent. J'ai admiré sa force de caractère. Elle s'impose et manie l'ironie avec brio. J'ai, aussi, apprécié le portrait de la société dressé par Florence Tachoires, sous l'angle de condition féminine, mais aussi judiciaire.

Cependant, Antonin n'est pas le seul à être embarrassé par les investigations de la jeune femme. Sa quête de vérité la met en danger, mais elle n'abandonne pas. Même si elle perçoit certaines menaces, sa jeunesse et sa fougue l'aveuglent. J'ai aimé ce mélange de témérité, de ténacité et de naïveté. Je pense que l'expérience et la maturité lui auraient évité certains pièges, mais ses erreurs apportent de la crédibilité au personnage. de plus, elle possède des armes précieuses : son intelligence, son sens de la justice et sa sincérité. Elle est extrêmement attachante. J'ai adoré son authenticité, les valeurs qui la portent et ses questionnements perpétuels sur le bien-fondé de ses actes. J'ai partagé ses hésitations, ses interrogations, ses affres au sujet de la frontière entre le bien et le mal et celles sur le poids de la vérité.

Enfin, j'ai aimé le rythme trépidant, en raison de l'urgence de révéler la vérité, avant le procès d'Odette Dubreuil. J'ai été emportée par ce récit, empli de mystères, de mensonges et secrets.

J'ai adoré Un soupçon de justice.

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Fort de son succès, le dernier roman en date de Florence Tachoires fait une entrée remarquée dans la collection Terre d'Histoires de City Edition. L'action se situe en 1929, un meurtre vient d'être commis sur les marches du palais de justice de Bordeaux. La presse s'empare rapidement de ce drame pour en faire ses choux gras, sous la houlette d'un célèbre journaliste résolu à réussir l'impensable : faire guillotiner une femme. Rien ne peut l'arrêter, d'autant que la condamnée, mutique, refuse de se défendre. C'est là qu'intervient Jeannette, sa pétulante stagiaire. Tel un vieux limier, elle démonte patiemment la trame de cette affaire cousue de fil blanc. Outre le plaisir d'une lecture alerte aux nombreux rebondissements, ce drame bâti sur des faits historiques invite à réfléchir entre autres sur le sens de la justice, la résonance des médias, l'égalité des sexes dans la société. Corsé et généreux. Un très bon cru.

J'ai connu "Un soupçon de justice" sous le titre "Sur les marches du palais" lorsqu'il était en auto-édition. Grâce à ceux qui l'ont lu, qui en ont fait une chronique et aux efforts de Florence Tachoires, le roman a gagné en visibilité et a conquis les éditions City. J'ai aussi été ravie de le découvrir dan une librairie indépendante proche de chez moi pour vous dire ! Comme le dit Nicolas Picard dans la préface, pour rédiger un roman le plus fidèle possible à l'époque souhaitée, il faut faire des recherches longues et approfondies pour ne pas dire de bêtises ! En plus de recherches sérieuses, l'auteure a tenu à mettre en avant des aspects sociétaux qui persistent encore aujourd'hui mais qui étaient beaucoup plus prononcés auparavant : le harcèlement sexuel, le harcèlement de rue, le sexisme, l'absence d'égalité homme/femme et le respect des femmes ainsi que la peine de mort (abolie depuis 1981).

Ce polar historique dont l'histoire se passe au début du XXe siècle relate le combat d'une vie digne d'une course contre la montre. Jeannette Routier, journaliste en herbe issue de Genève qui a posé pied à Bordeaux et pleine d'ambitions, a pris à coeur une affaire criminelle qui divise la ville de Bordeaux : le meurtre du haut magistrat Bernard Davon "sur les marches du palais" (petit clin d'oeil au précédent titre) de justice par Odette Dubreuil.

L'échafaud n'est plus très loin en raison de la tenue prochaine et imminente du procès le plus attendu. Odette se noie dans un mutisme volontaire, afin de rejoindre le plus vite possible son fils Émile, décédé beaucoup trop jeune, dans l'au-delà. Face au mutisme d'Odette et à la découverte de l'affaire dans les journaux, Jeannette décide de se consacrer entièrement à Odette pour la sortir de ce trou à rat qu'est le Fort de Hâ. Elle va alors endosser le calot des enquêteurs de police pour rétablir la vérité, en allant jusqu'au bout de son enquête peu importe l'issue et ce que pense les autres de son initiative. Peu la soutienne et vont lui mettre des bâtons dans les roues, sauf que Jeannette est tellement tenace, déterminée et n'a peur de rien qu'elle ne se laisse pas faire, sauf que l'amour qui la tiraille entre Paul et Roger va la troubler, au point de compromettre l'enquête de Jeannette ?

D'ailleurs, est-ce que cet absentéisme va tenir longtemps au fur et à mesure que la vérité éclate ? Est-ce que Jeannette va réussir à sauver Odette ? Une chose est certaine : les émotions sont intenses dans la mesure où on peut ressentir ce que vit Jeannette chaque jour pour parvenir à ses fins.

Genre : Roman historique
Avis : ÂPRE
Quand une femme ne veut pas lâcher l'affaire…
Les années folles, la femme qui travaille et qui veut être traitée comme les hommes, c'est l'environnement d'un roman dans lequel Jeannette, jeune diplômée en journalisme, va devoir couvrir le procès de l'année : le meurtre d'un magistrat, assassiné sur les marches du palais de justice de Bordeaux. Odette Dubreuil, la meurtrière, inspire de la compassion à la jeune femme qui se met en tête, envers et contre tous, de la défendre en révélant la vérité. Mais en sera-t-elle capable ? Est-ce qu'on la laissera faire ? Que feront les hommes qui ont le pouvoir ?
J'ai trouvé ce roman addictif car on se prend au jeu de soutenir Jeannette dont l'inexpérience pourrait être un frein à la découverte des secrets que tous les hommes autour d'elle veulent lui cacher. L'opiniâtreté est le mot qui convient comme trait de caractère d'un personnage principal qui porte tout le livre sur ses épaules. Elle est omniprésente avec ses failles et ses volontés.
Si je n'ai pas trouvé le contexte des années 30 explicitement décrit, en revanche la condition féminine et les dessous de la justice sont largement étayés. le mélange du suspense des actions liées aux enquêtes, avec les émotions et les sentiments d'une jeune femme embarquée sans le vouloir vraiment hors d'une vie quotidienne classique, est habilement maîtrisé. J'ai noté une belle relance de l'action au tiers du livre ainsi que des rebondissements réguliers qui gardent l'intérêt du lecteur, constant.
L'écriture est agréable et aérée par des dialogues percutants, le monde du journalisme et des relations avec le pouvoir est bien décrypté. le fond est documenté, le fictionnel est sérieux et dynamique. On ne peut qu'avoir envie de suivre Jeannette… le visuel de la couverture nous permet de l'appréhender au mieux.
Je remercie l'amie Michelle Mazoué qui a souhaité me faire découvrir Florence Tachoires. Elle est éditée, comme elle, chez City Editions, dans la collection Terres d'histoire.

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1929. La jeune Jeannette Routier vient d'être engagée au sein du journal « La Belle Garonne » à Bordeaux. Mais voilà, étant volontaire et obstinée, elle ne souhaite pas se contenter de traiter la rubrique des chiens écrasés. Une affaire brûlante la fascine : une femme est sur le point d'être condamnée à mort pour avoir assassiné un haut magistrat. Jeannette veut l'interviewer. Elle va ensuite investiguer à ses risques et périls pour faire éclater la vérité. Arrivera-t-elle à éloigner l'échafaud de cette femme que tous accusent ?

Florence Tachoires nous entraîne dans le monde des reporters de la fin des années 20 avec beaucoup de talent. J'ai adoré parcourir les couloirs du journal en compagnie de Jeannette (alias JR). Dans ce milieu d'hommes, malgré les humiliations, elle se bat comme une lionne et sa détermination sans failles permet à l'histoire de se dérouler avec énergie. Tous les personnages sont très bien dépeints et certains sont délicieusement détestables. La plume est directe et dynamique. L'intrigue est pleine de rebondissements. La peine de mort appliquée aux femmes est un sujet trop peu connu et encore moins exploité dans les romans. Un triangle amoureux apporte une touche de romantisme pour adoucir le monde impitoyable au sein duquel Jeannette lutte pour ses convictions. La région de Bordeaux et les années folles sont minutieusement reconstituées grâce à de nombreuses recherches qui ne peuvent qu'être saluées et rendent le roman immersif. Bref, c'est un premier roman très réussi et j'attends le suivant avec impatience !