Blanche (la couverture), blanche (l'écriture), noire (l'histoire). Rouge (sang et coquelicot) également. Ici, le
cutter ne sert pas à découper la moquette ou à fabriquer un sous-main (moche) baveux de colle au cours d'un atelier de travail manuel (souvenir personnel et douloureux de collège).
Le
cutter aime les tissus vivants (testicules félines, joues humaines…) Même si le
cutter est parfaitement innocent dans le meurtre déguisé en suicide. le
cutter, s'il joue la vedette, reste un personnage secondaire. D'autant que nullement animé d'une vie propre, l'instrument est soumis à l'utilisation que certains font de lui.
L'oncle Pithiviers, par exemple, au patronyme parlant. Pithiviers, Pithiviers, ce n'était pas le camp dans lequel quelques enfants juifs…? le vilain oncle Pithiviers donc cumule les travers comme d'autres collectionnent les grains de beauté. Comme lui son
cutter est prosaïque.
Lili, pas encore seize ans, que l'on voit peu mais que l'on plaint beaucoup. On est heureux de ne pas en savoir davantage. On écrirait presque à
Yves Ravey pour le remercier de nous épargner ainsi. On lui prêterait le
cutter à Lili si on le pouvait.
Lucky, son frère, plus jeune. le
cutter émotif ou justicier. C'est lui qui raconte. Placé comme sa soeur en institut. En stage de grouillot des jardins grâce à tonton; un jour par semaine (le mercredi) chez le bon Marius Kaltenmuller et la belle Adélaïde. Mais comme chacun sait, trop bon, trop c… Et ce sont les meilleurs qui partent en premier. Exit donc le brave Marius en costume du dimanche, sur le siège avant de sa Ford Taunus. Asphyxié.
Entrée de Saul le flic qui n'est pas prêt à s'en laisser compter.
Lucky, pas si demeuré qu'on le dit, raconte, navigue à vue entre les adultes, l'affection toujours en bandoulière. Dans cette pitoyable série B - trop de whisky, une tache suspecte sur une robe, deux amants, une montre en or disparue , une boite à sucre vide ou vidée, un chantage, l'enfance malmenée - le mystère littéraire éblouit.
Sans chichi, sans pose ni morale,
Yves Ravey ravit.