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Gilles Perrault (Préfacier, etc.)
EAN : 9782020591911
176 pages
Seuil (20/06/2003)
3.55/5   42 notes
Résumé :

Tout commence par une photo : celle, traditionnelle, prise dans la cour d'une école primaire de Belleville, en classe de CP. Une photo qui, à elle seule, raconte bien des histoires. Et pose bien des questions sur l'avenir des enfants qui y figurent .... Thierry Jonquet habite Belleville depuis plus de quinze ans. Ce récit montre des instantanés, des croquis de la vie quotidienne, des choses vues, et compose un portrait iconoclaste de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Il y eut, avec Henry Miller, des Jours tranquilles à Clichy. En 1999, Thierry Jonquet publie ses Jours tranquilles à Belleville, qui préfigurent l'excellent roman Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte , qui sortira dix ans plus tard.
Jonquet vit à Belleville avec sa famille. Derrière la carte postale de ce quartier mythique ancré dans l'imaginaire des Parisiens, de ce quartier ouvrier et populaire, depuis longtemps lieu d'accueil pour les immigrés, Jonquet observe les murs qui se lézardent, au propre comme au figuré, le paysage urbain de plus en plus contrasté, la ghettoisation, la délinquance, l'insécurité qui pourrit la vie quotidienne des habitants.

Jonquet est écrivain. Quand les habitants des banlieues où la situation est plus grave encore, subissent et ne peuvent se faire entendre, lui va raconter à travers ces chroniques, la lente déliquescence de Belleville, les pouvoirs publics qui se refilent la patate chaude, les architectes qui s'attellent aux problèmes engendrés par la pauvreté, le trafic de drogue, les agressions, en dynamitant le quartier -adieu les arrière-cours, les ruelles, les passages, le mobilier urbain - la fragmentation ethnique qui sépare dès la petite enfance les habitants, et ce à l'échelle modeste d'un quartier.

Jours tranquilles à Belleville est certes une vision subjective, celle d'un écrivain de gauche qui reproche à cette même gauche son silence assourdissant et à l'extrême-droite la récupération systématique de la question sécuritaire.
Car, si la violence est de nature économique et sociale elle se double aussi d'une visibilité ethnique, visibilité d'autant plus criante que depuis des décennies, Belleville accueillait des vagues successives d'immigrés qu'elle avait réussi à intégrer jusqu'à la fin des années 70.

Dans sa postface, Jonquet rend compte de la petite déflagration provoquée par la parution de son ouvrage, coincé entre le marteau et l'enclume, entre une certaine gauche pour laquelle l'immigré, vêtu de probité candide est par essence une victime, et une extrême-droite qui prospère et ramène systématiquement tous les maux de la société à l'immigration nord africaine et subsaharienne.
Vingt ans après la parution de ce court ouvrage, force est de constater que le phénomène a fait tache d'huile dans d'autres arrondissements de la ville, au détriment de tous ceux qui y vivent, laissant entrevoir un avenir « à l'américaine », un Paris labellisé « ville fractale ».
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Belleville, terre d'immigration depuis un siècle et quartier multi-culturel par essence : l'arrivée de polonais, d'arméniens et de juifs à la fin de la seconde guerre mondiale a été suivie de la communauté maghrébine, puis de la communauté asiatique. Superbe laboratoire pour étudier comment les choses se passent réellement sur le terrain, car ceux qui chantent le plus haut les vertus du vivre-ensemble sont généralement ceux qui le pratiquent le moins.

Ce livre en dresse un portrait plutôt sombre : les différentes communautés, se sentant peu considérées et protégées, se replient souvent sur elle-mêmes ; quelques mafias locales se développent, profitant des baisses régulières des effectifs de police qui ne parviennent plus à gérer la situation, entraînant dans son sillage trafic de drogue et prostitution.

Loin de l'idée du quartier populaire grouillant de vie, l'auteur nous dépeint plutôt un quartier qui s'enferme, à grands coups de portes blindées et de barbelés, pour conserver des îlots de tranquillité à l'écart de la rue qui symbolise avant tout le danger.

Écrit au début des années 2000, l'auteur déplore que les politiques continuent de faire l'autruche et refusent d'aborder les problèmes de sécurité de peur d' « apporter de l'eau au moulin du Front National ». Vingt ans plus tard, il apparaît que ne pas parler d'un problème ne le fait pas magiquement disparaître. Il serait intéressant d'avoir une suite, pour voir comment ce quartier a évolué, une génération plus tard.
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Thierry Jonquet "Jours tranquilles à Belleville", deuxième édition publiée au Seuil dans la collection "Points" en 2003, avec une préface de Gilles Perrault et une importante "Postface" de l'auteur lui-même (ISBN 978-2-02-059191-1).

Ce témoignage est important pour trois raison au moins.
La première réside dans la description sans fard et au plus près, de la vérité des moeurs qui se sont installées ces dernières décennies dans ce qu'il est convenu "les cités", les "banlieues", les "ghettos" etc : Jonquet décrit la dégradation de l'habitat, la destruction des relations de sociabilité, les agressions de la bande à "Nique ta mère", le communautarisme qui s'installe inexorablement, la démission des instances publiques.

La deuxième réside bien évidemment dans le fait que ce soit précisément Jonquet qui expose de descente vers la barbarie : toute autre personne fournissant le même témoignage est suspectée immédiatement de connivence avec l'extrême droite, avec les racistes, avec les anti-d'jeun's, bref avec toutes les noirceurs de l'âme humaine vilipendées par le discours dominant de la gôôôche caviar bobo germanopratine qui verrouille la plupart des médias de grande diffusion.

La troisième raison tient dans la postface écrite par l'auteur lui-même, présentant les réactions suscitées après la parution de la première édition de ce témoignage en 1999 : toute la bien-pensance s'employant à verrouiller le langage et les informations lui était tombée dessus, surtout chez ses propres amis de la gauche extrême.

Depuis ce temps, depuis plus de quinze années donc, rien, absolument rien n'a changé, si ce n'est que la situation s'est encore aggravée et continue de se détériorer, si ce n'est qu'il est de jour en jour plus manifeste que les cercles politiques dirigeants (quelle que soit leur appartenance proclamée) n'ont aucune intention d'enrayer ce phénomène de destruction de la société, bien au contraire. Et les observations sur le verrouillage du langage et des médias sont toujours aussi actuelles...

Un témoignage à lire, à relire, à faire lire, sans espoir aucun.
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Un livre des années 1990, écrit par un résident de Belleville depuis une quinzaine d'années.
L'auteur nous a quitté depuis et ne pourra pas faire une mise à jour de l'actualité de cette ville dans la ville.
Ce livre n'est pas un roman mais une série d'anecdotes puisées dans le quotidien et de réflexions sur les conduites à tenir.
Le thème résume bien le piège dans lequel toute une partie de la gauche et de l'extrême gauche est tombé... on excuse la violence car la dénoncer serait raciste sous le prétexte que l'agresseur était juif, arabe, noir, asiatique ... choisissez !
Nous, bien-pensants avons donc décidé de nous taire, de chercher des excuses et de tout justifier sous le prétexte fallacieux que nous étions coupables de ne pas faire ce qu'il fallait pour que tout le monde soit bienveillant.
Nous avons laissé à d'autres la dénonciation de ce qui n'est pas supportable ... nous n'étions pas directement concerné par cette violence, ces trafics ... nos quartiers étaient à l'abri ... ce ne doit pas être difficile à vivre au milieu des seringues usagées jetées n'importe où, près des jardins publics transformés en pissodrome ou en cacadrome.
Je suis née à Belleville, j'ai quitté ce quartier dans les années 80, j'y suis retournée dans les années 2000. Je n'ai pas été témoin des modifications urbanistiques et sociologiques du quartier ... mais je les ai constatées.
Le Belleville populaire de mon enfance n'est plus, Paris, tout comme Belleville est devenu un lieu boboïfié. Les taudis dans lesquels tant de personnes ont fini leur vie, ont disparu, ce n'est peut être pas plus mal !
PS
J'ai eu un coup au cours d'apprendre que la boucherie de la rue du buisson saint Louis était devenu en quelque sorte un nouveau cercle de jeux ... mes grands parents ont tenu cette boucherie des années 49 aux années 60, mon père y a appris son métier ... dans ce temps là, le fils prenait la suite du père ... après vérification, la boucherie familiale est devenu un salon de coiffure et la nouvelle boucherie s'est déplacée un peu plus haut dans la rue !
Lors de mon prochain voyage à Paris, j'irais voir ce qu'est devenu le Belleville de mon enfance.
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onquet excellent écrivain de polars fait ici l'inventaire du quartier de Belleville Il excelle pour rendre l'atmosphère de ce quartier grouillant de vie de ce début de siècle.
Avec beaucoup d'états d'âme mais sans concessions il retrace le quotidien des différentes communautés qui ont colonisé les unes après les autres ce morceau de Paris
livre polémique car politique et engagé mais qui dit des choses qu'il ne faudrait pas dire surtout pour quelqu'un de gauche : sujets tabous !
En fait Jonquet a écrit une chronique de Belleville mais d'une telle intensité de véracité qu'elle est devenue, dès sa parution il y a vingt ans, un véritable bouquin sociologique qui pourrait faire rougir de honte les sociologues professionnels aménageurs de nos sociétés.
Il convient de dire ici bien que ce n'était pas du tout l'intention de Jonquet de parler sociologie mais seulement de décrire avec nostalgie et regretter la dégradation du quartier dans lequel il vivait
Il dénonce la violence derrière l'aspect folklorique et bariolé du quartier, les problèmes de drogue récurrents et qui se développent et l'impéritie des politique à juguler le phénomène. Impéritie qui fait le bonheur des investisseurs immobiliers et bétonneurs car les prix du m² à Paris s'envolent et il est plus intéressant de démolir que de restaurer car cela a la mérite de repousser la racaille migrante vers les banlieues et la population s'embourgeoise . Toutefois la création d'une association « la Bellevilleuse » évitera la destruction complète du Bas-Belleville
L'habitat redevient réhabilitable et la population Bellevilloise peut rester dans ses murs
Aujourd'hui vingt ans plus tard y aura-t-il un écrivain de sensibilité humaniste et raisonnable, comme Jonquet, pour reprendre cette chronique et nous dire ce qu'est devenu Belleville ? La gentrification des coeurs de villes (phénomène mondial de boboïsation) a-t-elle fait son oeuvre et fossilisé ce quartier ? Belleville est-elle devenue un musée à ciel ouvert ?
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Au-delà des apparence idylliques, quelle détresse! Pensez donc! Quelle était belle, la rue des Envierges, aux pavés disjoints et luisants sous la pluie, quand les gamins tuberculeux y crachaient leur sang! Comme ils étaient séduisants, les escaliers moussus de la rue de la Mare, du temps où les "yids" s'entassaient dans les soupentes, où les Arméniens dansaient devant le buffet! Qu'il faisait bon vivre, dans ce Paris désormais disparu, à l'époque où les moricauds rescapés des massacres de 14-18 -chair à canon déportée des colonies, hébétée, hachée par la mitraille- tendaient leur sébile dans les flonflons des bal patriotiques! Comme ce devait être doux de prendre le funiculaire du faubourg du Temple pour regagner le taudis rongé par les poux, la gale et les punaises, après un journée de travail de plus de douze heures! Qu'elles devaient être charmantes et pittoresques, "gouailleuses, n'est-ce pas, les putains de la place des Fêtes, elles, qui, épuisées après des journées entières à s'user la santé au tapin, s'installaient à califourchon sur des bidets de fortune pour avorter , et qui parfois finissaient par mourir d'hémorragies, la main encore crispée sur l'aiguille à tricoter qu'elles s'étaient enfoncée entre les cuisses..
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Voilà en effet que Belleville, ce Belleville de légende, devient à la mode. On s'arrache les albums de photographies anciennes, les cartes postales, toutes empreintes de nostalgie, qui nous montrent un Paris de rêve, avec ses courettes fleuries, ses artisans bourrus, ses marchandes de quatre-saisons à la poitrine généreuse, ses gosses de la rue, gavroches maigrichons et insolents, ses cafetiers et ses cochers. Elle ont le charme des images d'un passé dont on se plaît à évoquer les douceurs. Qui peuvent-elles séduire ? Les nouveaux occupants de lieux, pardi ! Claquemurés dans nos clapiers de luxe, protégés de la racaille par nos digicodes, nos systèmes d'alarme, nous rêvons au temps où la rue était « conviviale », où Belleville n'était pas encore devenu un sinistre clone de la banlieue. Il m'arrive parfois de feuilleter les albums de Willy Ronis. Je me laisserais presque attendrir.

Au-delà des apparences idylliques, quelle détresse ! Pensez donc ! Qu'elle était belle, la rue des Envierges, aux pavés disjoints et luisants sous la pluie, quand les gamins tuberculeux y crachaient leur sang ! Comme ils étaient séduisants, les escaliers moussus de la rue de la Mare, du temps où les « yids » s'entassaient dans les soupentes, où les Arméniens dansaient devant le buffet ! Qu'il faisait bon vivre, dans ce Paris désormais disparu, à l'époque où les moricauds rescapés du massacre de 14-18 – chair à canon déportée des colonies, hébétée, hachée par la mitraille – tendaient leur sébile dans les flonflons des bals patriotiques ! Comme ce devait être doux de prendre le funiculaire du faubourg du Temple pour regagner le taudis rongé par les poux, la gale et les punaises, après une journée de travail de plus de douze heures ! Qu'elles devaient être charmantes, et pittoresques, « gouailleuses », n'est-ce pas, les putains de la place des Fêtes, elles qui, épuisées après des journées entières à s'user la santé au tapin, s'installaient à califourchon sur des bidets de fortune pour avorter, et qui parfois finissaient par mourir d'hémorragie, la main encore crispée sur l'aiguille à tricoter qu'elles s'étaient enfoncée entre les cuisses...

Malgré toute cette misère, Belleville était une véritable terre d'accueil et de fraternité, dont les habitants savaient se reconnaître les uns les autres. Un fleuve de béton a noyé ce paradis modeste et discret. Mieux vaut ne plus en parler.
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Tous les soirs, le journal télévisé dresse le hit-parade de la souffrance planétaire, du Kosovo à Timor, quasi in extenso. Entre guerre, massacre et famine, on s'y perd. La France, avec des efforts méritoires, produit désormais ses propres crève-la-faim, en masse, et se refuse à en importer. Aux marches de l'Europe, dans le détroit de Gibraltar, les gardes-côtes espagnols font la chasse aux fous embarqués sur des rafiots de fortune et qui cherchent à se faufiler entre les mailles du filet. Les boat people de l'an 2000 auront la peau noire. L'immigré sera refoulé dans les eaux de la Méditerranée. Il n'atteindra plus Belleville, son Chinatown, ses cités de béton, ni ses jardins, ses squares où fleurissent les seringues, les épluchures de citron, et où s'abat le clodo, son frère d'infortune, celui-là même qui, parfois animé d'un sentiment patriotique saugrenu, ne rechigne pas à flétrir le bicot, les nègre menaçant de venir lui disputer les pièces de dix francs que distribuent les nantis.
— Mendiants de tous les pays, unissez-vous ? Lui suggère-t-on.
— La France aux Français ! proclame-t-il, la voix pâteuse, la main rivée sur son kil de rouge.
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La dégradation est très lente. Les riverains, mithridatisés par les coups portés à leur environnement immédiat, s'y accoutument imperceptiblement. Un tag par-ci, un clodo calfeutré dans une encoignure de porte par-là, un panneau de signalisation renversé, une mobylette à demi démontée et abandonnée dans une flaque d'huile un peu plus loin, une seringue dans un caniveau ; et le tour est joué. Infesté à la toxine de la misère à dose homéopathique, l'Homo bellevillus oublie peu à peu à quoi ressemble une ville digne de ce nom. À l'abri derrière sa porte blindée, la mémoire saturée d'images de fil de fer barbelés et de grilles, de portes anti-vandales, bientôt sans doute armé de caméras de détection des intrus en bas de chaque immeuble, il voit son univers se rétrécir aux dimensions d'une cellule bien douillette hors de laquelle il ne fait pas bon s'aventurer.
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Brise les chaînes ? Quelle idée saugrenue ! Blindages, barreaux, barbelés fleurissent à l'envi dans tout le quartier, au contraire. C'est une véritable architecture de dissuasion qui se met en place. À quand les douves, les meurtrières ?
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Vidéo de Thierry Jonquet
Chronique consacrée aux grands noms de la littérature policière, et animée, depuis octobre 2018, par Patrick Vast, dans le cadre de l'émission La Vie des Livres (Radio Plus - Douvrin). Pour la 29ème chronique, le 12 juin 2019, Patrick présente l'auteur Thierry Jonquet. Patrick Vast est aussi auteur, notamment de polars. N'hésitez pas à vous rendre sur son site : http://patricksvast.hautetfort.com/ Il a également une activité d'éditeur. À voir ici : https://lechatmoireeditions.wordpress.com/ La page Facebook de l'émission La Vie des Livres : https://www.facebook.com/laviedeslivres62/
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