Mozart, Tome 3 : Le frère du feu

Lors d’un bal masqué organisé dans les vastes salles de la Redoute, la bonne société viennoise prit plaisir à se déguiser et à plaisanter sans aucune retenue. On célébrait ainsi une sorte de fête des fous, à laquelle participèrent Anton Stadler et Mozart, dissimulé sous l’habit d’un philosophe indien.

Il distribua des feuillets comportant plusieurs énigmes et des enseignements attribués au sage Zoroastre{98} né au VIe siècle avant Jésus-Christ. Parmi les devinettes, l’une connut un beau succès : « Nous sommes de nombreuses sœurs. Cela fait mal tant pour nous avoir que pour nous perdre. Nous habitons un palais qu’on pourrait aussi nommer prison, puisque nous y sommes enfermées pour nourrir l’homme. Le plus curieux, c’est qu’on nous ouvre souvent la porte, le jour comme la nuit, et que nous ne sortons pas. Qui sommes-nous ? les dents ! »

Chapitre 38

— Monté contre elle par les échotiers, le peuple déteste Marie-Antoinette. Une reine étrangère, une Autrichienne dédaigneuse et dépensière ! On l’accuse d’être à l’origine de la misère et de mépriser les pauvres. Quant à Louis XVI, il manque de poigne et croule peu à peu sous le poids de l’héritage catastrophique de Louis XV. (...)

— J’ai vu la mort rôder. La tourmente s’abattra sur ce pays, incapable de résoudre ses problèmes autrement que par la violence.

Chapitre 20

— La magie ne passe pas par la raison. Quel Franc-Maçon comprend réellement les rituels et les symboles ? Analyser, disséquer, expliquer… Autant d’impasses ! Voilà le génie de Mozart : il ne s’adresse ni à ses Frères ni aux profanes, mais à l’âme de l’univers, et répand des ondes lumineuses qui peuvent toucher tous les êtres et les orienter vers la Lumière de l’initiation. Jamais action ne fut plus subversive et plus dangereuse.

Chapitre 42

Officiellement président du gouvernement de Basse-Autriche, fonction qu’il remplissait avec d’exemplaires compétences, Joseph Anton vouait son existence au service secret qu’il dirigeait depuis plusieurs années afin de ficher tous les Francs-Maçons de préparer l’anéantissement de cette redoutable société secrète dont les véritables buts étaient le renversement des trônes et la destruction de l’Église, au prix d’une révolution politique et sociale.
Malheureusement, l’empereur Joseph II s’appuyait sur quantité de Francs-Maçons d’envergure qui soutenaient ses réformes et sa lutte contre l’archevêque de Vienne, un catholique réactionnaire et borné. Cette alliance de circonstance freinait l’action de Joseph Anton. Prudent, l’empereur entendait néanmoins contrôler étroitement les Loges et avait ordonné au comte de Pergen de poursuivre sa mission occulte.

Chapitre 2

Alors que le pays subissait une grave crise économique, la reine Marie-Antoinette, coquette, dépensière, irresponsable et détestée des Français, aurait déboursé plus d’un million et demi de livres{40} pour acheter un collier de 2 800 carats aux joailliers Böhmer et Bassenge.
D’aucuns attribuaient la responsabilité de ce scandale au cardinal de Rohan, disciple de Cagliostro, et désireux d’obtenir les bonnes grâces de la souveraine qui le tenait à l’écart depuis plusieurs années. « L’affaire du collier » prenait une telle ampleur que le pouvoir ne parviendrait pas à l’étouffer.
Impliqué, Cagliostro devait témoigner en innocentant le cardinal. Aussi quitta-t-il le convent, persuadé qu’il dissiperait sans peine les soupçons pesant sur lui et qu’il regagnerait bientôt son quartier général de Lyon, où il dénoncerait les inepties de Willermoz.

Chapitre 20