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Claudine Layre (Traducteur)
EAN : 9791036001727
224 pages
L’Atalante (08/02/2024)
4/5   10 notes
Résumé :
Pour célébrer ses 65 ans, Faller réunit ses anciens collègues policiers, la procureure Chastity Riley et bien d'autres dans un bar de Hambourg. La soirée vire au cauchemar lorsque douze hommes armés s'introduisent dans l'établissement, prenant les clients en otage. Le récit alterne avec l'histoire d'Henning qui, en 1984, part s'installer en Colombie où il vit du trafic de drogue.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Service de presse.


Ce sont des phrases affutées comme des scalpels, saisissant en quelques mots l'atmosphère d'un lieu ou les contours de la personnalité d'un personnage qui font de l'écriture de Simone Buchholz une expérience narrative à nulle autre pareille où l'intensité de l'intrigue se conjugue avec le spleen imprégnant l'ensemble des récits mettant en scène la procureure Chastity Riley,  ses collègues de la brigade criminelle ainsi que ses amis du quartier rouge de Hambourg. La particularité de l'ensemble de la série réside également autour de l'interaction entre une procureure qui s'efface parfois au profit de son entourage dans une déclinaison de relations d'amitié dont certaines d'entre elles prennent la forme de liaisons à la fois denses et tumultueuses. Afin d'en saisir toute l'évolution subtile, il conviendra d'appréhender le parcours de la procureure Chastity Riley dans l'ordre chronologique, ce d'autant que la publication en France a fait l'impasse sur certains romans de la série débutant avec Quartier Rouge publié en 2015 par Piranha Editions qui n'a pas poursuivi l'aventure. Mais c'est en 2021 que l'oeuvre de Simone Buchholz prend son essor dans le paysage de la littérature noire francophone avec l'initiative des éditions de l'Atalante inaugurant sa nouvelle collection de polars avec Nuit Bleue (Atalante/Fusion 2021), sixième opus des enquêtes de Chastity Riley (Chas pour les intimes) se poursuivant avec Béton Rouge (Atalante/Fusion 2022) et Rue Mexico (Atalante/Fusion 2023) qui ne font que confirmer l'engouement pour cette enquêtrice atypique que l'on retrouve donc avec Hôtel Carthagène, un huis-clos s'articulant autour d'une prise d'otage prenant, comme l'on peut s'y attendre, une tournure plus que déroutante.  

***
De nos jours à Hambourg, rien ne va plus à l'hôtel River Palace où douze hommes hommes armés débarquent dans le bar situé au dernier étage de l'établissement en prenant en otage l'ensemble de la clientèle dont fait partie Chastity Riley célébrant l'anniversaire d'un collègue retraité qui a également invité ses anciens partenaires de la brigade criminelle. Une longue nuit d'attente et de tension en perspective, ce d'autant plus que les revendications des preneurs d'otage sont plutôt floues.
En 1984, Henning Garbarek débarque en Colombie et prend ses quartiers du côté de Carthagène en quête d'une nouvelle vie alors que plus rien ne l'attend en Allemagne. Assimilant rapidement la langue du pays, le jeune homme va jouer le rôle d'intermédiaire entre des truands de Hambourg et le boss du cartel de la région qui l'a pris sous son aile. Mais peut-on vivre durablement du trafic de drogue ?
***

Dédié à Alan Rickman, on comprend rapidement que l'intrigue empruntera quelques aspects propre aux films d'action tels que Die Hard permettant à Simone Buchholz de rendre ainsi hommage à l'acteur britannique qui s'est fait connaître avec ce rôle emblématique de terroriste allemand. Et l'on doit bien avouer que la romancière s'y entend pour construire un récit agité et rythmé qui ne s'embarrasse pas de détails ce qui confère au texte cette sensation fulgurante qui convient parfaitement à la tonalité du récit et plus particulièrement pour tout ce qui a trait à la prise d'otage où Chastity Riley joue davantage un rôle d'observatrice que de partie prenante. Il faut dire que, blessée à la main, notre héroïne est atteinte d'une fièvre que la consommation d'alcool, n'arrange sans doute pas ce qui l'entraine dans une démarche introspective délirante où elle passe en revue les rapports qu'elle entretient avec les différents partenaires qui ont partagé sa vie en prenant la forme d'une espèce de manège psychédélique où embarque chacune des personnes présentes dans le bar. On observe également les rapports ambigus qui se nouent entre Chastity Riley et le leader des preneurs d'otage tout en se demandant qu'elles sont les motivations de ce groupe de malfrats qui s'en prennent plus particulièrement à l'un des clients de l'établissement. Pour en avoir une idée, on trouvera la réponse avec Henning Garbarek, dont le parcours s'insère en alternance dans le déroulement de cette prise d'otage. On y découvre ce jeune homme en quête d'une autre vie que celle que l'on pourrait lui offrir à Hambourg, le conduisant à embarquer sur un cargo qui le conduira à Carthagène. A mesure se dessine le destin tragique d'un homme entraîné, presque à son corps défendant, dans les aléas du trafic de drogue et plus particulièrement de l'émergence de la cocaïne, des cartels et de la violence qui découle. Et il faut bien admettre que Simone Buchholz s'y entend pour saisir l'atmosphère de cette ville d'Amérique du Sud dont elle restitue la part de rêve mais également la partie cauchemardesque bouleversant de manière brutale la vie de ceux qui croient avoir échappé à leur destin. Tout cela s'achève sur un final explosif que la romancière décline avec une habilité saisissante pour bousculer, une fois encore, l'existence de Chastity Riley désormais en quête de ses origines du côté de Glascow et dans ce qui va apparaître comme l'ultime récit de la série. Il ne nous reste plus qu'à espérer que les premiers romans mettant en scène notre procureure hambourgeoise préférée soient traduits, ce d'autant plus que Simone Buchholz semble avoir révisé les textes des deux premiers ouvrages et qu'ils mériteraient bien le regard expert de Claudine Layre qui a su restituer en français la quintessence d'une écriture hors norme. 


Simone Buchholz : Hôtel Carthagène (Hotel Cartagena). Editions de l'Atalante/collection Fusion 2024. Traduit de l'allemand par Claudine Layre.

A lire en écoutant : Fever interprété par Peggy Lee. Album : Fever. 1960 - BNF Collection 2014.
Lien : http://www.monromannoiretbie..
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Aujourd'hui. Dans un des nouveaux immeubles du port de Hambourg, quelques membres de la Criminelle ainsi que la procureure Chastity Riley se sont réunis pour fêter dignement les 65 ans de Faller, leur collègue fraîchement retraité. On attend encore Stepanovic qui tarde à arriver, lorsque des coups de feu éclatent... Prise d'otages.

1984. Henning, dix-neuf ans, désoeuvré et rêvant d'une vie meilleure, traîne dans le quartier de Sankt Pauli à Hambourg. Il se considère comme un raté et n'est pas loin de la vérité. Entre son père décédé, sa mère alcoolique et ses potes délinquants, il attend le déclic salvateur et, peut-être, un navire qui l'emmènera ailleurs.

Sankt Pauli était violent, gris et plein de gens tristes avec de la merde dans la tête.

Cet été 1984 décida de son sort. Il embarque sur le premier rafiot en partance et atterrit en Colombie, à Carthagène. Il y vit deux années de rencontres, de soleil, de musique, avant que l'Allemagne ne se rappelle à son bon souvenir en la personne d'Esteban, narcotrafiquant local en mal d'expansion.
Henning accepte de recruter à Hambourg de nouveaux acheteurs pour la cocaïne d'Esteban et bientôt c'est un trafic juteux qui se met en place... Et ses conséquences…

La procureure Chastity Riley est un personnage récurrent dans l'oeuvre de Simone Buchhholz, de même que l'équipe de policiers hambourgeois qui l'entoure (il s'agit du neuvième ouvrage la concernant, cinquième pour ce qui concerne les traductions françaises). Dès lors, c'est comme si l'auteur partait du principe que son lecteur savait déjà à qui il avait affaire, qu'il connaissait les atmosphères glauques, poisseuses, qui traversent ses précédents romans. Si tel est le cas, tout va bien, mais dans le cas contraire, difficile d'apprécier la longue mise en place qui concerne Riley et ses collègues. Il manquera sans doute tout l'historique, tout le vécu de ces personnages emblématiques pour les apprécier à leur juste valeur.
En délaissant les rues obscures du port de Hambourg pour un lounge aseptisé et une forme de huis clos, Simone Buchholz perd le décor qui participe à son âme et sa particularité, tout en gardant heureusement son piquant et sa franchise.
D'autant qu'à l'autre bout du monde, on assiste passivement à la mise en place sur quelques années d'un trafic international de cocaïne, au centre duquel un homme est impliqué sans pouvoir jamais se défaire de l'emprise du cartel, au point d'y perdre ce qui constituait la saveur de sa vie.
La relation entre les deux parties de l'intrigue tardant à émerger, on se retrouve simple spectateurs, dans l'expectative. Les hors d'oeuvre sont savoureux, mais on attend le plat de résistance...

N'oublions pas cependant qu'il s'agit d'une prise d'otages... Tout est long dans une prise d'otages. Lent. Les heures sont interminables avant que les choses se dénouent et s'accélèrent. Et c'est bien ce que montre et met en scène Simone Buchholz. La fatigue aidant, la lucidité n'est plus de mise, d'autant qu'être retenu dans un bar, avec accès libre aux alcools divers et variés, n'aide pas à garder les idées claires.
Dès lors, c'est un jeu d'introspection qui se met en place. Chastity a sous les yeux les hommes de sa vie, ses amis, ses collègues, et une blessure au pouce qui, tel le sparadrap du capitaine Haddock, ne veut plus la lâcher. C'est l'heure du bilan, comme un écho aux première phrases du texte.

Tout est lié, on s'en doute, mais pas tout à fait comme on pouvait s'y attendre.

Un roman inclassable qui navigue entre les genres, réservé à mon avis à ceux qui ont déjà apprécié les aventures de la procureure Chastity Riley et les ambiances concoctées par Simone Buchholz. Les « novices » pourront cependant y apprécier le style et le mordant de l'auteur, notamment dans ses descriptions fines et percutantes :

L'homme à qui les autres semblent obéir (...) a posé un doigt sur ses lèvres et nous dévisage. Ses cheveux sont coupés hyper ras. Son visage est très marqué mais il est malaisé de dire ce qui l'a buriné à ce point : le soleil, la mer, le vent, ou les gifles que lui a flanquées la vie. Peut-être tout cela à la fois. Il ressemble à un phare éteint. Sombre, abandonné, un peu froid - on arrive cependant à se l'imaginer quand la lumière y brillait encore.
Lien : https://polartnoir.fr/livre...
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L'art policier non conventionnel de Simone Buchholz à son sommet dans ce presque huis clos panoramique, subversion punk et réjouissante du film de casse et de vengeance. Un chef d'oeuvre d'intensité et de malice.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/04/17/note-de-lecture-hotel-carthagene-simone-buchholz/

La fine fleur de la Brigade Criminelle de Hambourg s'est réunie, avec quelques amies et amis proches, compagnons des bons et des mauvais jours, pour célébrer l'anniversaire du vétéran Faller. le lieu choisi détone sans doute un peu avec les habitudes de cette bande de cowboys et de cowgirls, aussi hétéroclite que farouchement efficace, aussi professionnelle lorsqu'il le faut que prompte à dégainer bières et alcools après le service, lorsqu'il faut refaire le monde et le match de football en cours devant la télévision d'un bar enfumé de Sankt Pauli. Au dernier étage du River Palace, le bar chic offre l'une des plus belles vues imaginables sur la ville et sur son port. Chastity Riley, la procureure de choc établie au coeur de la bande, n'est pourtant pas vraiment à l'aise : pour la première fois depuis longtemps, la voici obligée de côtoyer ensemble, pour la durée de cet événement chaleureusement festif, son ex et ses deux amants du moment, que l'on serait tenté de simplifier en les désignant par amant de coeur et amant de corps (mais c'est naturellement beaucoup plus compliqué).

Lorsque douze hommes lourdement armés font irruption dans le bar pour prendre tous les présents en otage, le poids de la coïncidence est terrible : sans aucun lien avec le groupe policier – et amical – assemblé dans les lieux, une vengeance doit avoir lieu (et une série somptueuse de flashbacks entre l'Allemagne et la Colombie, quelques années plus tôt, nous en fournira le moment venu les clés). Alors que les éléments traditionnels et passages obligés d'une prise d'otages contemporaine se mettent inexorablement en place, Chastity Riley doit affronter un ennemi supplémentaire : une blessure accidentelle d'abord bénigne est en train de rapidement dégénérer, dans la fièvre intense, en septicémie.

Depuis quelques années (depuis 2008 si l'on tient à être précis), avec la série de romans construits autour de la procureure hambourgeoise Chastity Riley et de sa bande de collègues policiers et d'amis de Sankt Pauli, l'Allemande Simone Buchholz a introduit quelque chose de bien spécifique, me semble-t-il, dans le polar mondial contemporain. Police procedural qui ne se soucie vraiment pas de la résolution d'enquête proprement dite (l'autrice confiait encore récemment en entretien, en allemand – ici, à quel point cet aspect lui semble négligeable), enchaînement véritablement punk de situations intimes et politiques, galerie intraitable de portraits soumis à la confusion des sentiments et au poids d'une histoire, ancienne ou récente, qui se refuse souvent à simplement passer : à bien des égards, cette série est unique.

Surtout, Simone Buchholz a décidé une fois pour toutes que ses lectrices et ses lecteurs étaient ses complices intelligents : à l'opposé de pratiques honteuses à la Donna Leon – mais sans aller jusqu'à ce point de non retour, trop d'autrices et d'auteurs succombent aujourd'hui, un peu ou beaucoup, mais toujours trop, à l'envie d'expliquer -, elle manie souverainement l'art de l'implicite, de l'information juste nécessaire (et toujours fournie via une pérégrination ou un détour dotés de leur logique propre), de l'interprétation ouverte et éventuellement variable, bref, de la littérature spéculative dans toute sa splendeur – ce qui reste relativement rare au sein du genre dit policier, David Peace mis à part évidemment – quoique utilisant d'autres moyens langagiers et littéraires, magnifiques, que ceux mis en oeuvre avec tant de brio par l'autrice allemande.

Publié en 2019, « Hôtel Carthagène », neuvième volume de la série – mais quatrième à partir du reboot partiel, au moment du changement d'éditeur allemand, de Droemer à Suhrkamp, avec « Nuit bleue » -, traduit en février 2024 chez L'Atalante par l'excellente Claudine Layre, constitue sans doute la démonstration la plus aboutie à ce jour de la puissance spécifique de cette série noire-là. Davantage encore que dans « Béton rouge » ou dans « Rue Mexico », que l'on aurait pourtant volontiers crus insurpassables, ces 200 pages, nourries des motifs du film de casse contemporain, de la série « Ocean's 11/12/13 » à « La Casa de Papel », pour mieux s'en jouer (on se souviendra le moment venu, dans un autre type de subversion, de l'inoubliable « Bacchantes » de Céline Minard), savent tirer une tension nerveuse exceptionnelle de l'usage de l'implicite, du non-dit et de l'ellipse. Atteignant une étonnante pureté, une concentration optimale, en jouant aussi bien du vrai-faux huis clos dans ce bar panoramique hambourgeois et de la montée inexorable de la rationalité vengeresse de ses flashbacks que de la fièvre intérieure, clinique et alcoolisée, vécue par son héroïne principale (mais jamais seule, au sein de ce grand collectif bizarre et bigarré imaginé par l'autrice) et de la présence salvatrice des métaphores footballistiques développées par les policiers présents (de fait) incognito pour discuter tactique de coup de force et d'échappée devant leurs geôliers. Par bien des aspects, cet « Hôtel Carthagène » noir et cristallin constitue le sommet à date de l'art si particulier – et si réjouissant – de Simone Buchholz.
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Dernier étage du River Palace à Hambourg. Une soirée comme une autre. Une tablée de collègues policiers, Faller fête ses 65 ans. La procureure Chastity Riley est de la partie. Puis douze hommes armés entrent et prennent tout le monde en otage. A qui en veulent-ils ?
Simone Buchholz est de retour pour le cinquième tome des aventures d'une procureure pas comme les autres. Chastity Riley est une femme à découvrir et ce récit ne fait pas exception. Elle se retrouve au coeur d'un huis clos tendu et angoissant. Son collègue et ami Stepanovic ronge son frein supportant mal de savoir Riley au milieu d'une prise d'otages....
On suit une double narration. Parallèlement à l'intervention de ce groupe armé, on suit l'histoire de Henning qui, d'Allemagne, part vers la Colombie en 1984, pour un nouveau départ, pour une vie facile grâce à l'argent du trafic de drogue.
L'autrice allemande a un style bien à elle. Elle nous immerge dans la tête de son héroïne. Et ça secoue ! Des phrases courtes, un rythme trépidant, il est difficile de lâcher Chastity Riley une fois qu'on y a goûté. D'autant que la fin de ce tome semble dessiner un tournant pour une Riley en quête de ses origines...
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Quels peuvent être les points communs entre le plus grand port allemand et l'une des villes colombiennes qui porte le même nom d'une ville espagnole? le bord de mer et la drogue. Hambourg avec son port qui arrose le nord de l'Europe est une plaque tournante , au même titre que Rotterdam et elle reçoit des palettes de blanche par bateaux venant d'Amérique du sud en général, de Colombie en particulier et Carthagène précisément. Les connexions entre les deux ports ne sont pas touristiques ou diplomatiques mais plutôt narcotiques. L'autrice allemande Simone Buchholz utilise les deux localités comme terrain d'écriture dans "Hôtel Carthagène", son dernier roman paru en France, traduit par Claudine Layre et édité par les éditions de l'Atalante dans la collection Fusion.

A Hambourg, hôtel River Palace, l'inspecteur Faller célèbre ses 65 ans avec ses anciens collègues flics , et parmi eux Calabretta ou encore la procureure Chastity Riley. Malheureusement ils ne sont pas seuls à vouloir profiter de la soirée. Une douzaine d'hommes armés débarquent et les prennent en otage. Pourquoi eux? Pourquoi maintenant? Quelles sont les motivations de cette équipe qui sait bien que leur opération va mobiliser toutes les forces spéciales de la ville? La motivation est peut-être à trouver de l'autre côté de l'Atlantique , en Colombie ou sur l'île de Curacao, il y a quelques années de cela...

Et nous voilà de nouveau à Hambourg avec ce quatrième opus des affaires de la procureure Riley éditées en France. Alors disons-le tout de go, ce n'est pas l'épisode hambourgeois que j'ai préféré. La procureure n'y fait que de brèves apparitions , ne mène pas d'enquêtes avec son approche bien à elle de la procédure et des codes de la représentation de la magistrature. La couverture est ici partagée par Henning ou Henk côté malfrat et Stepanovic côte force de l'ordre, prêt à tout pour déloger les preneurs d'otage et sauver Chastity Riley. Alors le style est là, cette scansion propre à Simone et toujours aussi bien traduite par Claudine Layre qui satisfera les fans. C'est probablement le sujet et parti pris de départ qui m'ont beaucoup moins accrochés, frustré peut-être de ne pas retrouver Chastity dans ses oeuvres.
Lien : http://www.rcv99fm.org
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Je tente de déchiffrer les visages des autres personnes présentes dans la pièce. D’un côté, le personnel du bar, deux hommes et une femme. Les deux types se ressemblent énormément. Même coupe de barbe, mêmes lunettes en nickel, mêmes bretelles sur la même chemise noire, comme si c’était leur uniforme de boulot. La barmaid porte elle aussi ces bretelles ridicules par-dessus son chemisier cintré ; cependant, son visage est particulier – à la regarder, on se dit qu’elle pourrait tout aussi bien travailler dans un troquet trois rues plus loin. Cheveux noués en une tresse stricte. Traits reflétant le genre de vie de ceux qui ne veulent faire partie de rien. Elle connaît peut-être plus de jurons qu’un métallo écossais. Avec ses sourcils relevés qu’elle refuse de baisser, elle dégage une ironie, une assurance et une nonchalance hallucinantes. Elle indique clairement que cette situation ne lui plaît pas, mais qu’au fond elle se contrefiche de ce qui se passe.
J’en prends note mentalement pour plus tard.
Au cas où il faudrait savoir à un moment ou à un autre sur qui on peut compter ou pas. En général, je me fie à cent pour cent aux gens comme elle, à ceux qui ne sont pas dans la norme.
La plupart des clients qui se retrouvent pris en otage avec nous ont l’air d’être des touristes qui avaient emmené à tout hasard des vêtements plutôt chics pour passer une soirée dans un établissement de ce type ; ils ont peut-être assisté juste avant à une horrible comédie musicale. Seules quatre personnes tranchent nettement sur les autres. Parce qu’elles sont différentes, qu’elles se distinguent de la classe moyenne habillée moyennement : deux hommes sont vêtus de costumes sombres visiblement très coûteux et de chemises à la coupe étroite et au col un tout petit peu trop ouvert. Le ventre de l’un d’eux a tendance à sortir, mais son propriétaire le rentre sans arrêt. Ils sont en compagnie de deux femmes au look très étudié, avec petite robe noire et talons d’une hauteur vertigineuse. Je dirais que ces deux hommes sont là pour le business : les femmes aussi, mais leur business, ce sont ces deux hommes.
Je n’éprouve aucune sympathie particulière pour ces femmes, mais encore moins pour ces hommes. Parce que, manifestement, ils estiment que s’acheter des femmes est une bonne idée. Que c’est légitime et qu’ils le font uniquement parce qu’ils peuvent se le permettre.
Mais je suis peut-être injuste, comme souvent quand j’ai envie de mettre le feu au capitalisme. Il s’agit peut-être tout simplement de deux couples fortunés qui ont oublié que le très onéreux peut aussi être de très mauvais goût. À la réflexion, je me dis que c’est plutôt ma première interprétation qui est la bonne.
En tout cas, quelles que soient mes sympathies pour tel ou tel, tous les visages dans ce bar arborent la même expression, y compris ceux des preneurs d’otages : celle d’une voiture qui serait tombée dans l’Elbe. Nous savons que notre situation n’a rien de normal, que notre vie vient de prendre un sacré tournant et qu’après cet épisode plus rien ne sera comme avant. Il se peut que nous mourions tous cette nuit, demain matin ou dans deux jours.
Chaque visage affiche de légères variations concernant ce savoir, n’empêche qu’il nous lie.
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MON CŒUR FAIT UN DRÔLE DE BRUIT
Murs en verre, lampes rondes à lumière tamisée se balançant au plafond noir et à nos pieds, le port de Hambourg avec ses illuminations nocturnes. Ce lounge attache tellement d’importance aux apparences que je me méfierais des cocktails que je n’aurais pas mixés moi-même. Trop de beauté tape-à-l’œil, trop de trucs genre attirer-le-regard-à-tout-prix, trop de diversion. Impossible de se concentrer sur son verre d’alcool ici.
Mes collègues sont assis à une grande table au fond de la pièce.
Devant se trouve un méli-mélo d’échasses, une quantité de tables hautes et de tabourets de bar, et à côté un comptoir élégant tout en longueur. Ligne de fuite sombre avec vue spectaculaire sur la ville à chaque extrémité.
Que Faller ait décidé de fêter son anniversaire ici est une énigme : nous sommes aussi peu à notre place qu’une horde de chiens errants dans un sac en plastique. Pourquoi ne pas être accoudés au zinc poisseux du Silbersack à boire de la bière en bouteille. Ou dans une obscure pizzeria à faire du boucan. Au fait, où est le foutu jukebox ? Ah, y en a pas, bon, y a juste ces deux hommes dont la simple vue suffit à me broyer le cœur, même si je les aperçois uniquement du coin de l’œil.
Je les regarde une seconde bien en face, d’abord Klatsche puis Inceman.
Mon cœur fait un drôle de bruit.
Je dis « salut » à la cantonade, également pour détourner l’attention de ce bruit.
Tous : « Salut ? »
Oui, je sais, je suis un peu en retard.
« Désolée pour le retard, les amis.
– Pas de souci, ma fille. »
Faller s’empare de mes mains en souriant.
Il est tout beau.
Il porte un pull-over noir à col roulé – chapeau et imper sont au vestiaire comme ceux des autres collègues. Faller lâche mes mains, je les enfonce dans les poches de mon blouson aviateur bleu foncé. Moi, jamais je ne déposerais une veste ou un manteau au vestiaire. Ce serait comme d’y laisser mon armure, c’est juste pas possible, on se retrouve sans aucune security.
« Choisissez-vous une bonne place », me propose Faller.
Facile à dire.
Il n’y a plus qu’une seule chaise de libre. Entre Brückner et Calabretta, c’est une très bonne place, sauf que Klatsche est assis juste en face, donc c’est aussi très compliqué.
Je m’y installe quand même, je m’efforce de ne regarder nulle part. « Il est où, Stepanovic ? Ils ne laissent pas entrer les cowboys ici ou quoi ?
– Si c’était le cas, la moitié d’entre nous ne serait pas là », répond Faller.
Carla ajoute : « On pensait que tu le savais. » Ces sous-entendus. « Que vous viendriez ensemble. »
Je capte très bien ce que ‘elle veut dire. J’essaie de le lui faire comprendre par un sourire discret. Oui, je pensais me pointer avec lui parce que, lui et moi, ça en jette quand on se pointe ensemble quelque part, mais depuis quelques mois, c’est devenu légèrement difficile entre nous.
Lors d’un moment plein de bière, bon, d’accord, plutôt lors d’un bain de bière, je lui ai confié que je couchais régulièrement avec Inceman. Il a trouvé ça nul et pas qu’un peu.
J’ai eu l’impression que c’était vraiment un problème pour lui.
Mais je n’y peux rien. C’est comme ça : je suis plutôt une femme du genre insaisissable.
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J’essaie au contraire de mettre un peu d’ordre. Dans la situation et à l’intérieur de moi.
Faller est au bout de la table et veut fêter son anniversaire.
À sa gauche sont assis Inceman, Schulle, Brückner et moi.
En face de Faller, Calabretta.
À côté, Anne Stanislawski, Klatsche et Rocco.
Vient ensuite Carla, qui pose sa main sur l’avant-bras gauche de Faller et lui demande s’il va bien.
Il hoche la tête.
Cette question et cette réponse me font réaliser en un éclair que nous ne sommes pas là pour nous, que nous n’avons aucune espèce d’importance. L’amitié, ça veut dire aussi être capable de sortir de ses cercles d’égocentrisme.
Nous sommes là pour Faller, et peu importent tous les gazons et toutes les fleurs que nous avons foulés du pied ensemble au cours des dernières années. La question de Carla est la seule qui compte : comment va le vieux bonhomme ?
Si je déchiffre correctement son visage, il rayonne de satisfaction. Malgré tout ce qu’il a vécu. Il y a d’abord eu la mort de deux femmes, des prostituées, bref, des femmes dont l’existence n’avait déjà rien de rose avant que Faller ne surgisse dans leur vie. Il a aimé la première, Minou. Elle est morte parce qu’il l’aimait, qu’il pensait que c’était simple, qu’il avait le droit d’aimer et de sauver qui bon lui semblait. Il ne connaissait même pas la seconde. Il n’avait pas eu besoin de faire sa connaissance pour avoir un rapport avec sa mort. Il avait suffi qu’il s’en prenne à la mafia albanaise. Et hop, la petite avait été assassinée. Retrouvée dans ses dessous sanglants, allongée sur un lit à côté d’un Faller groggy. Je me demande comment l’âme d’un homme peut surmonter tout cela. Bon. En fait, les dégâts sont toujours visibles, du moins pour ceux qui s’y connaissent un peu en dégâts. Puis, par ma faute, il a pris une balle dans l’épaule, qui a sans doute laissé quelques échardes dans sa mémoire. Après avoir vécu tous ces événements, il a recommencé il y a quelques années à se battre pour la justice, pour son âme, pour venger ses morts. Le voilà aujourd’hui entouré des gens qui l’aiment bien. Parfois, cette amitié ressemble même à de l’amour – je ne peux parler évidemment que pour moi et peut-être aussi pour Calabretta. La lumière du bar dépose un filtre doré sur le visage de Faller, adoucissant la profondeur des rides autour de sa bouche, son nez et ses yeux. Il nous dévisage les uns après les autres.
Le serveur vient me demander ce que je souhaite boire. Sur la table se trouvent toutes sortes d’alcools, chacun a commandé une boisson différente, ouh là là, encore un fût sans fond, est-ce que cela s’arrêtera un jour ?
Carla joue avec son verre. Je lui demande : « C’est un negroni ?
– Ça va de soi. » À l’entendre, on dirait qu’elle a inventé la formule du bonheur liquide.
J’en veux aussi.
« La même chose, s’il vous plaît. »
Klatsche me sourit d’un air, et quel air, insolent et sexy, quasiment irrésistible, mon Dieu, comme ce sourire m’a manqué.
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Henning aimait bien bavarder avec les gens. Mais c'était difficile avec ces débiles. Ils n'avaient pas assez de mots dans la tête pour mener une conversation.
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