Petite virée en guerre civile, avec ce livre relativement bref qui narre l'absurdité qui anime de manière périodique l'humanité.
En deux temps. En commençant par la fin, celle de sa maladie, qui, du fait de la narration, semble la conséquence du récit qui va suivre. Une maladie auto-immune comme la maladie qui incite des peuples à s'auto-détruire.
Bien assis derrière leurs écrans, certains penseurs de canapé vitupèrent contre tout ce qui est différent, contre toutes les menaces qui risquent de les priver de leurs certitudes forgées par des années de pratiques. Alors se lèvent quelques démagogues qui sauront exploiter ce travers humain et cela recommencera. On le voit aujourd'hui au moyen-orient. Personne n'est au dessus de cette tentation, pas d'échappatoire à cette maladie qui ronge toutes les sociétés de l'intérieur. L'appartenance à un groupe, le sentiment national ne se définissent que par opposition à d'autres. Pas d'états-nations sans ennemis à combattre. Pas de peuple élu sans peuples à dominer...
Là, c'est l'ex Yougoslavie... Sans creuser la bio de l'auteur, on ne peut pas savoir à quel "camp" il appartient (le notre, celui des gentils? ou celui des autres, les méchants?).
C'est justement ce qui rend pertinent ce roman : la médiocrité, la bêtise, la souffrance sont sans frontières, sans nationalités. Bien sûr, dans son canap' on est sûr d'appartenir au camp du bien. Mais à l'épreuve de de la guerre, l'auteur nous montre la stupidité de cette posture.
Ce qu'il vit est aussi vécu par les autres en face. C'est moche, c'est cru, presque vulgaire par instants.
Mais justement, c'est ça la réalité de la guerre, quand on la fait réellement, c'est à dire au corps à corps, contre un ennemi équivalent. Loin des guerres asymétriques menées avec des drones et des bombardiers et des missiles guidés par satellites (un must), de loin, ici on suit les mouvements sans buts précis des simples exécutants, ceux qu'on a enrôlés ou qui se sont mobilisés pour la bonne cause (peu importe laquelle) et qui en tuant finalement assez peu, contribuent à la propagation de cette maladie auto-immune de l'humanité appelée guerre. Maladie qui profite essentiellement aux pires parasites qui s'en nourrissent mais qui ne la font pas, bien sûr.
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Un livre autobiographique en grande partie, cru et sans pathos, qui relate la guerre, la désertion, l'exil. L'idée que j'ai trouvée très forte de ce roman est sa structure, organisé en 3 parties dont la première se passe bien après les deux autres et tourne autour d'une maladie clairement somatique, conséquence de la partie II (la guerre de Bosnie) et III (la route de l'exil). La première partie est assez éprouvante en nous plongeant jusqu'au cou dans les affres d'une maladie de peau qui donne lieu à de fréquents séjours en milieu hospitalier avec, on s'en doute, son ambiance de misère et de désespoir.
Le flash-back, à partir de là, que va constituer la seconde partie est consacrée à la guerre. C'est à la fois la plus importante et la plus « attendue » ; nombre de livres de guerre, depuis le feu de Barbusse ou La peur de Chevallier, ont décrit le bourbier infâme de la guerre et les anti-héros que constituent en tout temps les fantassins dans les tranchées. Ici, rien de vraiment nouveau, même si on peut dire que Colic rejoint le panthéon du genre avec cette description rude et viscérale (au sens propre du terme…) de la peur, de l'alcoolisme outrancier, des violences gratuites, bref de la situation de guerre qui font de braves paysans des brutes sanguinaires.
A partir de la troisième partie, le narrateur déserte et fuit à travers Croatie, Slovenie puis Autriche, Allemagne et France pour mettre la plus grande distance possible entre la guerre et lui. Cette troisième partie est à mon avis la moins réussie – c'est d'ailleurs assez court (40 pages sur les 200) et l'enchainement de bus et de trains pour s'enfuir est loin d'être aussi prenant que ce qui précède.
Un auteur que je découvre avec son dernier roman mais qui me donne envie d'en savoir plus sur son oeuvre
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Enrôlé à 27 ans dans l'armée croate de Bosnie, l'écrivain déserte rapidement. Dans « Guerre et pluie », il raconte la guerre d'un homme sans expérience militaire.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Velibor Colic publie chez Gallimard son dernier livre, Guerre et Pluie , dans lequel il nous parle autobiographiquement d'un homme en proie aux doutes sur sa vie. Il y relate ses élucubrations et digression sur son passé et son présent, sur la guerre et la maladie.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Un admirable roman autobiographique dans lequel l'écrivain évoque une nouvelle fois la guerre de 1992 dans l'ex-Yougoslavie.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
J'essaie de me rappeler combien de fois j'ai vu la mort?
Combien de cadavres sont entrés dans mes yeux ? Pour la centième fois je me demande comment vivre avec ces âmes mortes? Se souvenir ou oublier ?écrire sur cette froideur métaphysique ou pas ? Passé composé, passé simple ou présent ?
Les certitudes sont là matière la plus dure de la bêtise et de la paresse humaine.
La maladie ressemble à la guerre, c'est une violence brutale et injuste. Au moment où elle vous arrive, curieusement, le monde qui nous entoure devient plus clair. Le mal nous décentralise et nous place au bon endroit dans le monde. La maladie est une leçon parfaite.
La guerre est toujours conçue par les personnes âgées pour tuer les jeunes. Ils sont prêts à tout sacrifier pour le peuple. Y compris le peuple lui même.
On croit mourir pour la patrie, on meurt pour les industriels, à sagement conclu Anatole France.
La maladie ressemble à la guerre, c'est une violence brutale et injuste. Au moment où elle nous arrive, curieusement, le monde qui nous entoure devient plus clair. Le mal nous décentralise et nous place au bon endroit dans le monde.
La maladie est une leçon parfaite.
Personne ne peut l'éviter. Elle arrive tôt ou tard, pour tout le monde.
Plusieurs études montrent que la mortalité des vivants s'élève à 100 %.
Le Livre des départs, Velibor Čolić