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Critiques de Marie Darrieussecq (764)
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La mer à l'envers

Les 40 premières pages sont fracassantes. Elles expriment avec force le choc de deux mondes (celui des privilégiés et celui des réfugiés) sur fond de mer Méditerranée. Sans trop en rajouter, Marie Darrieussecq exprime avec justesse le désarroi de cette femme, Rose, qui n’assume pas le drame humain qui se répète sur les côtes italiennes. Le sujet dominant de ce roman n’est pas la culpabilité mais l’héroïsme. Qu’est-ce qui peut faire de nous des héros ? Le fait de risquer non seulement sa vie mais celle de ses proches au nom d’une noble cause ? L’inconscience ? Des facultés extraordinaires ? Rose, la protagoniste du roman, est tout cela. Une maman sensible, une femme perturbée, une magnétiseuse, une idéaliste. Tout le long du livre, Marie Darrieussecq marche sur une corde raide, entre l’envie de raconter une belle histoire et la peur de tomber dans le misérabilisme bon ton. Mais elle trouve l’équilibre. Son histoire tient la route, malgré des longueurs nécessaires, pour illustrer les hésitations de Rose, sa reconstruction, son envie d’une autre vie. C’est le deuxième thème du livre : la quête d’un ailleurs. Pour Younès, le migrant recueilli, cet ailleurs est l’Angleterre, le pays « où il n’y a pas de contrôle d’identité dans la rue ». Pour Rose, il est au pays basque. On devine que Marie (l’auteure) se cache peut-être derrière Rose (le personnage) : le mariage à bout de souffle, l’éducation compliquée des enfants, l’étrange évolution des rapports humains, les errements d’une société qu’elle ne comprend plus… Younès, l’homme qui vient du Niger, est un catalyseur. Avec son roman, Marie Darrieussecq porte un regard critique sur ce monde globalisé tout en nous affirmant qu’il est possible de le rendre meilleur. Il suffit d’un peu de folie, bien placée.

Bilan : 🌹
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Lettre à ce prof qui a changé ma vie

Devoir sur table, au lendemain du décès de Samuel Paty, professeur d'histoire-géo assassiné pour avoir 'blasphémé' :

« Quel(le) prof a changé votre vie ? »

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Quarante célébrités se sont collées à l'exercice, répondant en quelques pages. Appartenant pour la plupart au milieu littéraire, les auteurs de ces lettres citent essentiellement des profs de français, théâtre & lettres classiques, et d'Histoire.

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Au-delà de la matière enseignée, sont vantées les qualités de ces enseignants inoubliables : leur sens de la pédagogie, bien sûr, en tant que 'passeurs' de culture, mais aussi leur talent pour accompagner, éduquer, susciter la curiosité & l'envie d'apprendre, éveiller l'esprit critique, donner confiance (y compris, et surtout, aux plus rétifs).

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Que je connaisse ou non son auteur, que je l'apprécie ou pas, chaque texte m'a captivée, éveillant des souvenirs de ma vie d'élève.

Certains sont particulièrement touchants.

Je retiens les méthodes d'Albert Algoud pour faire aimer lecture & livres aux enfants.

J'ai aimé l'inventaire sincère de Jul (l'auteur, pas le chanteur), qui n'oublie pas les 'mauvais' profs : ceux qui ont perdu la foi en leur métier (si tant est qu'ils l'aient eue un jour), ceux qui blessent. Eux aussi nous ont construits, ont forgé notre caractère (pensée amère & dégoûtée pour le prof de latin de 4e - cruel, vicieux, méprisant, probablement pédo, et doté d'un talent certain pour faire détester sa matière).

Parmi toutes ces lettres, c'est celle de Henri Loevenbruck que j'ai préférée, je vous laisse découvrir pourquoi, tout en remerciant à mon tour tous ceux qui m'ont "élevée".

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A faire circuler très largement. Et à offrir, notamment aux jeunes profs, parfois découragés. 😉😘
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Fabriquer une femme

« Fabriquer une femme » était ma première incursion dans la bibliographie de l’autrice française, Marie Darrieussecq, mais certainement pas ma dernière. J’ai beaucoup apprécié la plume élégante de cette écrivaine dont le style m’a directement happée dès les premières pages.



Marie Darrieussecq y conte l’histoire de deux amies, Rose et Solange, à partir de leurs quinze ans : l’une est ambitieuse et introvertie alors que la seconde est énervée contre le monde entier et n’attend que de vivre la « vraie vie ». C’est le début des premiers vrais émois amoureux, des premières déceptions aussi, un âge dont on ne croit que les amis, c’est pour la vie et où on quitte doucement l’adolescence vers l’âge adulte.



Ces deux amies habitent l’une en face de l’autre, au sein d’un petit village basque : une dans une famille « bourgeoise » et l’autre, seule avec sa mère qui tient l’unique petite boutique à souvenirs de la bourgade. On voyagera avec elles, d’abord vers Bordeaux, puis ensuite Paris et d’autres contrées…



Adroitement, le bouquin est divisé en trois parties : la première est narrée par Rose, la seconde par Solange et les dernières, par toutes les deux. Même si c’est une histoire continue, chacune aura sa propre façon d’apprécier les faits et les situations, selon sa propre sensibilité. A aucun moment, n’apparaissent des redites ou des répétions qui auraient pu alourdir la trame.



On replonge dans les années 80 que l’autrice retranscrit parfaitement au travers de faits réels, de mode, de musique, …



Roman sur l’amitié, on ne peut s’empêcher de replonger dans nos propres souvenirs (qu’ils aient lieu ou non durant les mêmes années). Toujours juste, Marie Darrieussecq offre un très beau livre sur comment se construire en tant que femme, aux rythmes calqués sur les deux héroïnes.



Une très belle découverte !
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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La mer à l'envers

Voici un récit bien dans l'air du temps :

Rose, parisienne typique, magicienne presque à son insu, citadine bobo, personnage fantasque, très attachée à sa liberté, psychologue pour enfants, mère aimante de Gabriel, 15 ans et Emma , 7ans , un peu dépassée par le déménagement prochain au Pays basque, croise le destin de Younès , jeune adolescent nigérien——-ses yeux se posent sur lui ——: Il est très jeune, des cheveux mouillés en boucles , un grand front un peu cabossé .Il ressemble à son fils . »

Où le rencontre t- elle ?



Au beau milieu de la Méditerranée , quelques heures avant Noël , lors d'une croisière offerte par sa mère ,avec ses deux enfants .



L'énorme paquebot sur lequel elle a embarqué a croisé la route d'un frêle esquif où s'entassent des réfugiés venant d'Afrique .



Les naufragés embarquent sur le gros navire. Aux migrants elle apporte quelques affaires , à Younès , l'adolescent nigérien , elle donne le portable de son fils Gabriel.



Lorsque quelques heures plus tard , les chemins de Rose et de Younès se seront séparés , ce téléphone mobile constituera entre eux —- un lien indéniable ——un attachement —- affectif autant que lointain ——



Rose réalise que les paquebots de vacanciers pour enfants gâtés sont sur les mêmes routes maritimes que les frêles esquifs des Migrants ...



En découvrant Younès , ce jeune migrant qui a fui son pays de misère ou de danger, elle plonge la tête la première dans cette terrible réalité .



Le décalage entre ses enfants exigeants , sa vie gâtée lui saute aux yeux .

Son univers change , celui du lecteur aussi...



Ce voyage donnera une nouvelle orientation à sa vie ou comment habiter intelligemment le monde ?

N'en disons pas plus..

Ce n'est pas un roman sur l'exil mais un récit engagé sur les différences et nos difficultés à accepter l'autre ou plutôt ce qui ne fait pas partie de notre univers habituel.

. Comment bousculer son quotidien et ses habitudes pour sauver un enfant qui n'est pas le sien,?

Une réflexion prégnante et exigeante, à travers le personnage investi, complexe de Rose, sur la place de l'individu dans le monde.

«  La-mer à l’envers  » , qui n'a rien de moralisateur, reflète l'embarras de sociétés complètement démunies face aux réfugiés qui se présentent à nos portes .



Un malaise , une culpabilité diffuse , malgré l'héroïsme de Rose, traverse l'écriture de l'auteure . Les phrases sont courtes , limpides , agréables.



Des thèmes graves abordés avec simplicité , une belle réflexion, une déclaration de tolérance, d'ouverture au monde , d'écoute pour Rose qui a beaucoup à donner .....



«  Le problème avec les migrants, c'est combien ils sont angoissants ... »
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Truismes

Ovni littéraire. Premier livre. Un énorme succès. Mais clivant, à cause de l'image de la femme qui apparaît fortement dégradée.

Il peut être vu comme une satire sociale, une fable, une farce ou un récit d'aventures décrivant minutieusement les étapes de la transformation d'une jeune femme en animal.



Evidemment une truie, l'animal le plus décrié, le plus sale mais aussi l'un des plus proche de nous. Un bain de boue? Des saillies à volonté avec n'importe qui? La truie c'est la prostituée des bas fonds.



Mais une truie bien dans sa peau alors que l'esthéticienne du départ est constamment salie par son patron ou des clients qui abusent de sa candeur. La critique de la condition féminine est évidente.



Au départ, surpris par le ton des années 1990: pas de filtre pour nommer les minorités ou les femmes. J'ai aimé le ton de Marie Darrieussecq, elle ose tout.



J'ai particulièrement goûté la noirceur du roman et son contexte totalitaire. Comme un miroir des violences et des travers humains dans la société ou vis à vis des animaux.



Encore plus de nos jours, le récit retombe sur ses pattes avec des thèmes comme l'égalité des genres et les maltraitances animales.



Ma relecture, bien des années après, m'a comblé, Marie Darrieussecq a créé une histoire simple mais riche qui alimente encore bien des sujets d'actualité.

Grouic...

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Pas dormir

«  Il y a ceux qui dorment et les autres. »

«  Mais je ne dors pas. »

«  Dormirais - je si je n’étais pas hantée ? » .

«  Qui est - ce qui ne dort pas quand je ne dors pas ?

Quelques extraits de cet opus, entre récit intimiste et essai riche, méditatif, passionnant au demeurant ,où, avec pas mal d’autodérision et de malice elle déroule les chapitres, autant de références scientifiques, littéraires, autobiographiques, littéraires , pratiques, modes d’emplois pour une autrice qui se serait un soir retournée et son sommeil ne la suivrait plus …



Car elle s’est métamorphosée depuis une vingtaine d’années en une sorte de sentinelle de la nuit, vingt ans d’errances , d’anxiété, de vertiges, de questions sans réponses ,d’épuisement , de «  non sommeil » le repos se refuse à elle .

D’où cet ouvrage original, à nul autre pareil, où elle oppose l’angoisse profonde et le silence à la privation de sommeil, indigne torture encore pratiquée dans certains pays comme le Rwanda à la jungle de Calais , nuits sans sommeil pour les déshérités qui n’ont plus aucun toit sous lequel se réfugier.

«  On veille quand il n’y a plus rien à veiller et malgré l’absence de toute raison de veiller » écrit Levinas , limpide .

Au cours de ces nuits interminables éveillées , la compagnie d’écrivains ou de plasticiens serait un réconfort .

Elle y convoque, au cours de 1001 nuits blanches : Proust, Hemingway , .mais aussi CIORAN, Duras, Gide, Woolf, Philippe Roth, Huysmans , Kafka , surtout lui, que des frayeurs et nombre de spectres réveillaient au milieu de la nuit , tel cet enfant aux joues rouges , «  Ce petit habitant des ruines » qu’il conte dans son journal , «  Ce petit fantôme qui surgit du fond du milieu du couloir obscur, il ne me manquait plus que cette visite, qu’à vrai dire j’attendais » ajoute l’écrivain …

Pour tenter de dormir, l’autrice a tout essayé : cette folie du «  non sommeil » l’a entraînée vers un catalogue de remèdes médicamenteux, voir les photos…..



Elle les teste depuis vingt ans avec une efficacité très relative , jusqu’à des méthodes alternatives plus ou moins hasardeuses et farfelues , : hypnose , jeune , alcool dont elle a, un temps, usé et même abusé , sorte de palliatif anxiolytique, entre veille et sommeil …

«  Les rituels des insomniaques sont souvent des déclinaisons sadomasochistes » écrit Gide dans son journal, dans cette méditation sensible, plutôt philosophique, elle évoque les nuits sans sommeil des sans - abri, les rescapés du génocide au Rwanda, d’autres expériences que la sienne. ….et aussi une source à chercher, fragments épars, auprès de ce frère aîné mort qu’elle n’a pas connu .



De certains textes antiques aux magasins ouverts en continu elle creuse ce qui se joue dans «  l’ombre » , fantômes et autres misères quand l’insomnie envahit nos nuits interminables..



«  L'insomnie est la prolongation sans répit de la misère écrit Françoise Frenkel.

Elle nous assure que la compagnie d’écrivains souvent insomniaques lui est une manière de réconfort « Comme si écrire, c’était ne pas dormir, sur tous les continents, la littérature ne parle que de ça » .

Et certains ont plongé «  une fois de trop dans le tiroir des cachets blancs » tel Proust qui à deux reprises a manqué de s’empoisonner ….

D’autres n’en ont pas réchappé.

«  Pas dormir : errer sans ombre »: définition de l’insomniaque .

Un livre enrichi d’une très importante iconographie, qui nous convie à un grand voyage de l’autre côté du miroir «  d’autres yeux nous observeraient »

Un inconnu inlassable nourri de sentiments confus qu’il y aurait autre chose. …..quelque part ….

La privation de sommeil: une torture à laquelle j’ai déjà beaucoup goûté, je ne pensais pas qu’autant d’écrivains avaient rejoint cette cohorte épuisée et anxieuse !

J’ai appris beaucoup ! .



«  Pour mille raisons, ce livre ne s’écrit pas.

Parviendrai- je à dormir le jour où je l’aurai écrit ? » .





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Truismes

Bizarre parfois la perception que l’on peut avoir des auteurs et des livres.

Ignorant tout de Marie Darrieussecq, je ne sais absolument pas pourquoi je l’avais associée à Christine Angot, que j’avais vue dans une émission et que j’avais trouvée malsaine à souhait. Et du coup, je n’ai jamais lu aucune des deux.

Hasard d’une brocante, encore, pour un euro je me suis dit que je ne risquais pas grand-chose et j’ai donc acheté Truismes pour me faire une opinion.

Bien m’en a pris. J’ai été très agréablement surprise. J’ai trouvé le ton et le sujet très originaux.

La narratrice, naïve, crédule et soumise m’a fait penser à Darling de Jean Teulé.

C’est la même descente dans la déchéance. On tombe vite dans le glauque. Pourtant, même dans les pires moments, l’auteur effleure simplement le hard et n’est jamais vulgaire.

Elle nous offre une satire du statut de la femme, et de son corps en particulier. Son image ne lui appartient pas.

En même temps que le corps de la narratrice, la socoété se transforme aussi et on arrive à une deuxième satire, celle de la politique.

On peut aussi penser à la part animale qui est en nous, en dualité avec notre intellect.

Bref, il y a matière à réflexion dans ce livre fable qui peut passer pour loufoque.

Je suis vraiment curieuse maintenant de lire autre chose de Marie Darrieussecq.

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Pas dormir

Insomnie. Un mot à 8 lettres qui devient vite angoissant.



Cette difficulté est un état que nous avons tous au moins connu une fois dans notre vie. Pourtant, certains malchanceux entretiennent une relation privilégiée avec cette dernière, ce qui est une vraie source de cauchemar.

Le sommeil est un état psychologique indispensable dont nous avons tous besoin pour continuer à mener une vie à peu près normale. Malheureusement, Marie Darrieussecq fait partie de la catégorie des personnes qui ont perdu le sommeil. Dans l'ouvrage "Pas dormir", l'auteur nous retrace dans ce récit ses vingt années de galères à essayer de trouver le sommeil, sans avoir encore découvert une recette miracle. Pourtant, on découvre au fil des pages qu'elle a tout essayé ! L'alcool, les médicaments, les tisanes, les gadgets en tout genre, la médecine traditionnelle... et dire que certains n'ont qu'à compter les moutons...



Cet essai autobiographique est pour moi une véritable caverne d'Ali baba.

Parfois sujette aux problèmes d'insomnies en pleine nuit, cet ouvrage est réconfortant (car on se sent moins seul) et offre des solutions qui fonctionnent dans mon cas ! J'ai beaucoup apprécié les nombreuses anecdotes qui viennent compléter le récit de Marie Darrieussecq. On y apprend que l'insomnie est un mal connu par de nombreux auteurs, artistes ou autres personnalités et que Marcel Proust en est le fervent représentant.



En refermant cet ouvrage, j'ai envie de vous poser cette question : Et-vous, que faites-vous pour trouver le sommeil?



#grandprixdeslectriceselle

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Pas dormir

Vous n'allez pas le croire mais « Pas dormir » m'a sauvé la vie ! Grâce à « Pas dormir », j'ai dormi !

En effet, découvrir que la moitié des habitants de la planète tourne en rond la nuit m'a soulagée. Waouh, je ne suis pas la seule folle à rester éveillée, consciente, agitée, active, hyperactive, non ; demain matin (parce que c'est surtout le matin que ça pique et en début d'après-midi… hummm, les débuts d'après-midi à l'heure de la sieste qu'on ne peut pas faire parce qu'on BOSSE!!!), je ne serai pas la seule complètement épuisée, abattue, exténuée, complètement claquée ! Paraît-il que nous sommes un sacré paquet à refuser le sommeil ou à y goûter trois quatre heures grand maximum… Eh bien, depuis que je sais cela, je me sens moins seule. Je pense aux autres, à mes pairs de veille, à mes confrères d'insomnie, à mes camarades d'agrypnie, je panique moins dans la nuit noire ou pire quand le jour commence à pointer, que le réveil va bientôt sonner et l'interminable journée commencer…

Rien que pour ça, j'ai aimé « Pas dormir. »

Un vrai feel good pour moi !

Marie Darrieussecq ne dort qu' à coup de somnifères : elle a la collec' complète. Et comme ce livre est bourré de photos, vous la verrez, sa collec ! Elle a tout essayé : les tisanes, l'acupuncture, l'ostéopathie crânienne, la psychanalyse, le yoga nidra, le jeûne, l'hypnose et des tas d'autres trucs. Marie Darrieussecq est la reine du non-sommeil. Elle n'y arrive pas. Elle ne sait pas. Alors comme elle veille, elle écrit et nous raconte plein de choses et moi j'ai bien aimé la suivre dans ce livre « inventaire » où il est question de tout ce qui a trait à l'insomnie : tiens, savez-vous que les grands écrivains sont tous insomniaques ? Certains ont beau se coucher de bonne heure, ils se réveillent quelques heures après et attendent le bisou de leur maman… Elle nous parle de ses livres (qu'est-ce qu'elle en a lu des livres !!! - de l'avantage de rester en veille…), de ses voyages où elle ne dort pas, de l'alcool (oui, elle est alcoolique aussi, décidément, j'adore Marie Darrieussecq, elle m'est de plus en plus sympathique, cette-femme là). Elle parle des mômes aussi (alors eux, ils détiennent la palme dans la catégorie bouffeurs de sommeil), de la forêt (plus on déboise, moins on dort), des bêtes... Bref, « Pas dormir » est une balade en darrieussecquois. Quand on aime le personnage, on adore le bouquin… Je me suis régalée, j'ai beaucoup ri et j'ai surtout très bien dormi. Merci Marie !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Truismes

Une femme, ingénue et naïve devient un objet sexuel et en vient à se prostituer. Peu à peu, elle s'animalise pour devenir une truie. Cette histoire à priori farfelue et complètement déjantée se passe dans un futur lointain à l'aube du troisième millénaire où visiblement, le monde est par certains côtés redevenu sauvage et la perversité des puissants s'étale au grand jour sans retenue. On pense très vite à la « Métamorphose » de Kafka. La description de la condition féminine confère à cette comédie acerbe un étrange sentiment de mal-être. On est pris de pitié pour cette pauvre femme qui passe par toutes les conditions sociales. Ce roman peut être vu comme une dystopie illustrant le dérèglement général de notre société. Je ne connaissais pas Marie Darrieussecq, mais ce roman me donne envie de lire les autres.
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Il faut beaucoup aimer les hommes

Ce roman a eu le même effet sur mon esprit qu'une tisane (très concentrée !!!) de camomille, tilleul, verveine, mélisse… je pourrais poursuivre la liste longtemps encore tant les réactions sur mon cerveau ont été fortes : ennui, lassitude, fatigue, désintérêt… ont été significatifs au bout de quelques paragraphes.

C'est dommage, car j'ai toujours beaucoup de plaisir à écouter parler cette auteure de ses livres dans les émissions littéraires.

La lire se révèle plus compliqué, pour cet ouvrage du moins.

Style, fond… j'ai trouvé le tout tortueux et sans intérêt.

Essai à réitérer avec un deuxième livre.
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White

Jusqu'à présent, pour moi, Marie Darrieussecq était (roulement de tambour)...une page blanche (cymbale, éclats de rire).



C'est donc vierge de toute idée préconçue (si ce n'est qu'elle connut le succès avec son premier roman "Truisme") que je me lança dans cette lecture. J'ai mis du temps à me faire à sa plume, à ce style haché, en apparence assez impersonnel et froid, à cet abus de virgule. Et puis cette syntaxe toute personnelle, faite de phrase courte, de coupure abrupte. Au niveau du rythme c'est pas du binaire, mais c'est pas du ternaire non plus...En fait s'il fallait vraiment y accoler un adjectif, je dirais : déstructuré...moderne, en somme. Pour être honnête il m'agaça prodigieusement, ce style, pour finir par me séduire...



Voici pour la forme, mais le fond, la partie immergée de l'iceberg, la glace originelle enfouie sous 3000 mètres de couches successives de neige compressée ? Et bien ce n'est pas une histoire, non. Pas au sens d'un récit. Marie Darrieusecq entend plutôt nous parler, selon moi, de corps, du corps qui perçoit, qui sent, qui voit, qui entend, ressent...Du corps sensoriel. Et qui, triste condition que celle de l'homme, échoue à appréhender le réel, le monde, l'environnement. Ainsi, quoi de mieux que le pôle Sud comme impasse pour les sens, ce territoire grand comme l'Europe, où ciel et neige ne fond qu'un, où distances et proportions sont imperceptibles à leur juste valeur, "inconnaissable" en fait ?



C'est ainsi qu'elle y plonge Edmée et Peter, sous le vague prétexte d'une expédition scientifique (le projet White). Tous deux ne sont donc, au début, que des corps, traversées de quelques pensées. Puis, petit à petit, elle parsème son récit de bribes de leur passé. Tout deux sont, pour des raisons différentes, des déracinés. Tout deux sont hantés par des fantômes, des spectres que l'auteur fait parler à la première personne. A l'instar de la neige, ils s'accumulent et finissent par devenir envahissants. L'époque est incertaine, nous sommes dans un futur extrêmement proche et l'humanité s'apprête à poser le pied sur Mars (je dis ça pour les amateurs de SF mais au final, vous l'aurez compris, ce n'en est pas).



Ainsi, plus le récit avance, plus Edmée et Peter s'humanisent, sans pour autant devenir attachants. Dans le monde de Marie Darrieussecq, on ne pénètre pas le secret de l'intime...Y compris les intéressés eux-même. Voilà, j'ai plutôt apprécié. Pour autant la fin me laisse dubitatif, un peu comme une impression de hors-sujet (je n'en dis pas plus, à vous de voir...et de croire).
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Être ici est une splendeur



Des visages ronds, plats, lunaires, des centaines de visages de face qui nous regardent, droit dans les yeux. Les regards sont intenses, directs. Que cherchent-ils ces yeux ? Vers quelle immensité sont-ils tournés ? Beaucoup sont des autoportraits. Paula Modersohn-Becker s'est reproduite sur la toile à de très nombreuses reprises, offrant son drôle de petit visage enfantin comme autant de déclinaisons stylistiques. Quelle quête artistique et intime l'animait-elle ? Des portraits de femmes pour la plupart d'entre eux, jeunes ou vieilles parfois, des enfants, des mères avec des bébés, des femmes enceintes. Elle sera la première femme à se peindre nue.

Paula Modersohn-Becker peint la féminité, une féminité lumineuse, brute, sans emphase, sans discours. Elle va à l'essentiel, au travers d'un jeu de couleurs posées à plat, de formes simples, cloisonnées par un trait marqué. Les influences sont perceptibles, au fil de l'évolution des compositions, l'expressionnisme, Gauguin, Cézanne, la peinture des Nabis, l'art japonais, le cubisme. Elle semble faire la synthèse de l'ensemble des courants artistiques du début du XXème siècle.

L'émotion nous étreint à la lecture du livre de Marie Darrieussecq, l'émotion engendrée par la démarche de l'autrice qui fait le choix de porter à notre connaissance l'existence et l'oeuvre de cette pionnière, reconnue en Allemagne mais ignorée en France, et de participer à l'organisation de sa première exposition à Paris - là où elle fit plusieurs séjours et où elle a peint résolument dans des conditions précaires -, l'émotion déclenchée par la trajectoire de cette jeune femme qui se bat contre les préjugés et le classicisme de l'époque pour aller au bout de son projet mais qui ne connaîtra aucun succès puisqu'elle ne vendra que trois tableaux, et enfin celle qui nous fait chavirer lorsque nous apprenons sa fin tragique à l'âge de trente-et-un an, après un accouchement difficile.

Paula Modersohn-Becker aura vécu au sein de la communauté d'artistes de Worpswede en Basse-Saxe, où elle y rencontre son futur mari, le peintre veuf Otto Modersohn, ainsi que le poète Rainer Maria Rilke, avec qui elle entretient des liens d'amitié. Elle fait un premier séjour en Angleterre puis plusieurs à Paris, où elle travaille sans relâche et rencontre de nombreux confrères. Malgré l'anonymat dans lequel elle évolue et le peu de retours qu'elle reçoit, elle ne se départit jamais de sa tâche et de son objectif. Elle ne connaîtra de son vivant, ni reconnaissance, y compris de son mari, ni assurance, et son talent ne sera découvert qu'après sa mort.

Une oeuvre singulière et magnifique à découvrir grâce à l'ardente biographie que lui a consacré Marie Darrieussecq à partir de son journal et de sa correspondance.
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Être ici est une splendeur

Peut-on peindre avec des mots ? Avec ce livre Marie Darrieussecq nous en apporte la preuve. Elle a une bien belle façon de nous en parler, avec des touches de poésie de ci de là. Une description évocatrice mais qui laisse libre cours à l'imaginaire de chacun. Au mot fin, je suis allé visionner quelques unes de ses toiles, je les ai immédiatement reconnues comme si elles étaient déjà dans ma mémoire et que Marie Darrieussecq l'ai dépoussiérée.

Je ne connaissais pas cette peintre allemande : Paula Modersohn-Becker, qui vécu entre l'Allemagne et la France de 1876 à 1907. Ce qu'elle aimait : peindre et c'est tout. Peindre et profiter de la vie, peut-être aimer, peut-être enfanter, mais avant tout ... peindre. C'est la première peintre à réaliser un autoportrait nue ... nue et enceinte. Avec ses yeux de femmes et non celui d'hommes qui ne voit que la représentation sexuelle des nus.

Ce livre c'est surtout une femme artiste qui parle d'une autre femme artiste et qui trouve les mots pour détourer le contour mystérieux qui entoure cette passion.

Des extraits de ses journaux et des lettres entre elle sa famille, ses amis ou son mari nous éclairent sur la façon qu'avait Paula d'envisager la vie.

En parallèle, le musée d'art moderne de Paris présente quelques unes de ses œuvres du 8 avril au 21 aout 2016.

Elle a traversée la peinture comme une étoile filante, laissant derrière elle des œuvres d'une force hors du commun. Dix ans d'une vie d'artiste, c'est beaucoup et c'est si peu. Elle aurait eu tellement de belles choses à nous faire découvrir.

Dommage.

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Pas dormir

Pas dormir : une résolution, une injonction, un regret, un constat, un souhait ?

Le titre du livre reflète bien l'ambivalence de l'autrice à l'égard de l'insomnie, et du sommeil également. Elle a perdu ce dernier à la naissance de ses enfants, il y a une vingtaine d'années, alors qu'elle dormait d'un trait jusqu'alors. Elle explique son problème par la prise de conscience de la possibilité de leur mort.

Elle a tout essayé pour tenter de le retrouver, sans succès, les somnifères, les anxiolytiques, la méditation, l'acupuncture, l'alcool...

Elle ne cache rien de ses dérives, de ses obsessions, de ses addictions.

Ex-psychanalyste, elle sonde ses failles et ses blessures, explore les replis de sa mémoire, de son enfance, évoque un frère mort avant sa naissance.

Elle fait, dans ce livre protéiforme, élaboré à partir de chroniques retravaillées et enrichi de nombreuses illustrations et photographies, parmi lesquelles celles, touchantes, de chambres d'hôtel aux quatre coins du monde, le tour de la question du sommeil, ou du non-sommeil : la chambre, le lit, les rituels, avec qui on dort.

Elle évoque avant tout, avec beaucoup d'érudition, les illustres écrivains qui ont connu les affres des nuits blanches, Kafka, Proust, Virginia Woolf, Marguerite Duras...

Marie Darrieussecq, sans le dire ouvertement, semble considérer qu'insomnie et création littéraire entretiennent un lien fort, l'une se nourrissant de l'autre. Son insomnie n'est pas vaine, stérile. Elle est la quête d'un autre monde, d'un au-delà, une ouverture sur autre chose, l'occasion de construire des phrases en agençant les mots. S'agit-il d'une rationalisation à posteriori, pour donner un sens, une légitimité à ces divagations et ces heures perdues dans le néant ?

Au final, elle reste floue et on ne sait pas comment elle dort mais on sait qu'elle a compris qu'il ne fallait pas chercher à dormir pour y parvenir et on sent une sorte d'attraction pour cette vie parallèle et nocturne, fruit de son hypervigilance.

Une voix singulière, sincère, qui nous livre un récit intime et prenant sur un sujet qui nous concerne tous.
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Lettre à ce prof qui a changé ma vie

Bon, je vais d'abord donner un aperçu de ce qu'ont écrit les 40 personnalités, puis j'irai, légèrement j'espère, de ma patte personnelle.

Ils sont tous touchants, mais la lecture m'est lente, car, évidemment, le style change, d'un auteur à l'autre. J'ai aimé les « cadeaux », faits par les enseignants ( je n'aime pas le mot « prof » ), la liberté pour plusieurs, l'affirmation par le blasphème pour Nicolas Beuglet, la pensée par soi-même pour la « blacksheep » Sophie Blandinière, les graines plantées, le gai savoir pour Irène Frain, l'empathie, l'écoute, le poids des mots pour Marius Jauffret, un superbe discours sur l'apparence et une belle mémoire pour Jul (n'est-il pas auteur de BD ou à Charlie ? ), que je trouve quand même un peu pompeux, une autre a fait de son enseignante d'Anglais sa marraine ! Je remarque la professeure d'histoire griote de Marc Lévy, l'hommage à ses parents enseignants d'Henri Loevenbruck, la prise de conscience de Tibault de Montaigu, le transport chez Zola de Tatiana de Rosnay, etc... Ce sont majoritairement les enseignants de lettres qui ont « le beau rôle », car beaucoup, parmi ces élèves écrivent maintenant.

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A mon tour !

Pour moi, ce fut en première, Mr Freu, un vrai CAPEPSIEN d'EPS, qui me révéla la discipline que j'allais enseigner. Auparavant j'avais eu des maîtres d'EPS qui m'ont fait pratiquer peu de disciplines différentes. Mr Freu m'a ouvert l'esprit à tout un champ des possibles, que j'ai élargi par la suite.

Je vous passe rapidement les coups de baguette de Monsieur Majid en primaire ;

les trois enseignantes dont je fus amoureux ;

le prof qui m'a mis 09.5 / 20, que j'ai supplié de mettre 10, et je vous dis pas quand mon père l'a appris !

le professeur de 4è Techno qui, après « la paumelle », nous laissa un sujet libre et où je m'éclatai à dessiner les côtes d'une voiture de circuit 24 ;

celui de math de première et terminale qui semblait être injuste avec moi et que j'ai étonné au bac...

… et des enseignants assez connus dans le supérieur comme Christian Pociello qui a fait escale à Nancy pour nous donner un cours magistral de sociologie du rugby avant de s'envoler vers les Vosges, deltaplane sur le toit de sa voiture ;

l'impressionnante brochette Famose-Vigarello-Parlebas qui nous attendaient tous les trois derrière un bureau, Jean-Pierre Famose, l'inventeur de la trace bleue, Pierre Parlebas, en survêtement impeccable mais démodé, et surtout Georges Vigarello, qui me faisait penser au César dessiné par Albert Uderzo, expert en philosophie et en EPS, passionnant !

Je n'oublie pas Jean-Yves Nérin, qui m'a appris à « écrire », Dominique Durand qui m'a fait aimer Edgar Morin, les systémiques et... l'escalade !

Marc Durand, qui m'a permis de différencier la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque ;

Pierre Arnaud ;

… et Jean-Louis Dieu, le bien nommé !

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Je termine l'évocation de ma carrière d'élève par le début, par la honte de ma vie... Oserai-je ?

J'ai fait pipi en classe de huitième, en plus devant une maîtresse super-jolie, parce que nous venions d'arriver dans un pays hispanique, et que je ne savais par dire «  Por favor, puedo ir al bano ? »

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A l'inverse, pour ma carrière d'enseignant, je serai bref  :

En Picardie dans un collège sensible, où les enfants étaient défendus bec et ongles par leurs parents, l'administration ouvrant le parapluie, c'était un peu l'ambiance pourrie de la série « Sam », la pauvre, qui fait tout ce qu'elle peut pour défendre les harcelés, et se retrouve confrontée à la police. J'ai fait le grand écart, « instruisant » les élèves attentifs et essayant « d'éduquer » les élèves irrespectueux.

Par contre, je me suis éclaté à La Réunion, et, passionné, j'ai fait découvrir plein de sports à des élèves ébahis qui n'en avaient pratiquement jamais fait, et ce fut un plaisir, pour eux comme pour moi !
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Il faut beaucoup aimer les hommes

Solange est une actrice française qui vit à Hollywood.

Elle est éperdument amoureuse de Kouhouesso, un acteur noir à la carrière prometteuse.

Des périodes intenses, des périodes d’attente, plus ou moins longues, des périodes de désespoir.

Elle part le rejoindre en Afrique sur le tournage d’un film, mais Kouhouesso lui échappe

.Certaines scènes de cinéma et de tournages m’ont paru un peu longues et fastidieuses, mais le fond de l’histoire est intéressant.

C’est une belle histoire d’amour, une belle réflexion sur le racisme

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Truismes

La narratrice écrit ce texte alors qu'elle est en situation d'urgence. Elle ressent le besoin de coucher sur le papier l'expérience qu'elle vit depuis plusieurs mois. le lecteur sent que c'est difficile, elle semble en danger et dans l'incapacité physique et intellectuelle de mener son projet à bien.

C'est que la narratrice est en phase d'évolution vers l'état de cochon, de porc, de truie.

C'est sur un ton a priori naïf qu'elle nous raconte la progression de sa transformation.

Le thème essentiel de ce court roman est la condition féminine. L'autrice en passe toutes les facettes au crible : le corps de la femme ne lui appartient pas, il est la cible des hommes qui se transforment en prédateurs. Cela s'exprime tant dans le monde du travail que dans le domaine privé. La femme existe pour donner du plaisir aux hommes et assurer leur confort domestique. Marie Darrieussecq évoque la dépendance financière, l'interdiction d'avoir du plaisir sexuel, la maltraitance gynécologique, l'hostilité sociétale à l'avortement, etc. (je ne vais quand même pas tout vous raconter).

Alors qu'elle devient ce que l'on a fait d'elle, une cochonne, la narratrice explore des mondes interdits et décrit l'harmonie à se sentir au diapason de son corps.

Vous avez compris, ce roman est tout sauf un truisme, il est un pavé dans la mare, écrit au milieu des années 1990, bien avant la révolte Metoo et les revendications féministes actuelles.

Mais Marie Darrieussecq ne s'arrête pas là. Elle place son héroïne dans une temporalité de science-fiction ( ??), celle de la prise de pouvoir de l'extrême droite et de la mise en place d'une dictature visant notamment à se débarrasser des minorités. La violence et la négligence faites à la nature n'échappent pas à sa vision globale du 3e millénaire.

Bien que publié au rayon littérature blanche, ce roman est une vraie dystopie, permettant à l'autrice de taper fort sur un monde pas si imaginaire que ça.

Le titre dit tout par son inverse : distorsion de la vérité, fondamentalité du propos, cynisme assumé par la voix ingénue de son personnage. On notera également un magnifique jeu de mots (ça y est, vous l'avez ?).

Ce livre fourmille de trouvailles sous forme d'analogies, chaque mot compte dans ces quelques 160 pages que le lecteur reçoit en pleine face tel un uppercut.

Marie Darrieussecq brosse le portrait décadent de notre société et par contraste avec la candeur de la narratrice, le propos est glaçant. D'autant plus que 25 ans après la parution, le roman est d'une terrible actualité, la réalité s'approchant dangereusement de sa fiction.

Je vous fais la grâce de vous épargner le paragraphe sur le style de l'autrice qui est impeccable, incisif, ciselé et percutant.

C'est un roman d'une intelligence féroce, d'une grande richesse, j'ai pleuré de rire, à moins que ce ne soit de consternation devant une analyse aussi fine du devenir pathétique de notre société.

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Une nuit à Manosque

Une nuit à Manosque est un recueil de nouvelles qui m'a été envoyé en service presse par les éditions Gallimard, que je remercie chaleureusement.

La manifestation littéraire Les Correspondances de Manosque a lieu chaque année en septembre et a fêtée ses 20 ans d'existence en 2018.

À cette occasion, un recueil de courtes nouvelles rassemble une vingtaine d'auteurs sur le thème proposé : « Une nuit à Manosque ». Chaque auteur a choisit librement d'écrire une fiction ou un souvenir réel.

Je ne vais pas vous présenter toutes les nouvelles vu qu'il y en a quand même vingt, et la chronique serait trèèès longue ;) Juste celles qui m'ont le plus touchées, et il y en a déjà pas mal car ce recueil m'a beaucoup plu.

Une nuit à Manosque débute avec L'esprit de la Guinness de François Beaune. L'auteur nous emmène dans un pub.. où l'on ne vend pas de la Guinness même si le pub se nomme ainsi ! J'ai aimé cette première nouvelle, courte mais très bien trouvée, jolie découverte :)

Dans Des nuits et des lieux, Jeanne Benameur nous fait découvrir son Manosque... J'ai trouvé ça très intéressant, l'auteure a une très jolie plume :)

Le texte de Marie Darrieussecq est très personnel, elle nous raconte comment lors de l'édition 2017 elle s'est fait harcelée dans la rue par un homme qui était à sa fenêtre. J'ai beaucoup aimé ses mots, et c'est un très beau texte qui parle d'un thème fort. Il s'agit d'un de mes textes préféré.

La colline de Julien Delmaire est une nouvelle surprenante, qui m'a beaucoup plu tout comme Rencontre avec un personnage de Miguel Bonnefoy ou La ville des mots de René Frégni. Chaque auteur nous présente sa vision de la ville, avec souvent des surprises, c'est passionnant et on ne s'ennuie jamais.

J'ai également beaucoup aimé Place Saint-Sauveur de Célia Houdart, une courte nouvelle nous présentant un jeune allemand de 23 ans.

Appréciant énormément l'auteur Philippe Jaenada, c'est avec un immense plaisir que j'ai dévorée Lost in Manosque. J'ai adoré sa nouvelle, que j'ai trouvé excellente. "A Manosque, le plus difficile, c'est de rentrer se coucher".

Le textes de Maylis de Kerangal et de Alice Zenater sont très intéressants, tous deux sont différents mais aussi passionnant l'un que l'autre.

J'ai également beaucoup aimé La bergère de Nathalie Kuperman qui nous présente une bergère, dans un hôtel...

Pour finir, j'ai adoré Un beau souvenir de Eric Reinhardt, car l'auteur nous fait partager un de ses souvenirs.

Je pense que vous l'aurez compris, j'ai été charmé par Une nuit à Manosque. Je trouve ce recueil de nouvelles très bien ficelé, les textes sont de qualité et j'avoue qu'ils m'ont donné envie d'aller faire un tour à Manosque pour découvrir à mon tour cette belle ville :)

Je suis ravie de ma lecture, et je mets quatre étoiles à cet ouvrage, que je vous recommande.
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Notre vie dans les forêts

Une lecture triste mais qui fait réfléchir.

Une dystopie au style faussement décousu, des révélations progressives par une femme, ex-psy, qui vit désormais en nomade dans une forêt avec un petit groupe d'humains et de "moitiés". On comprend assez rapidement qu'il s'agit de clones, qui ont vécu endormis jusqu'à présent.

La planète semble aussi envahie de robots. Robots infirmiers, médecins, robots compassionnels qui remplacent progressivement les psys ...

Le livre m'a rappelé la trilogie de Gemma Malley "La déclaration", mais aussi le très glaçant "L'unité" que j'avais découvert grâce à des critiques sur Babelio.

Les robots, les clones, la disparition progressive du travail, des emplois sont-il synonymes de progrès ? La négation de la vie, de la vie humaine, de la liberté est un thème qui revient souvent dans les dystopies. Il est ici exploré longuement, mais avec de nombreuses questions en suspens. Une réflexion salutaire sur le transhumanisme et l'idée que nous nous faisons du progrès
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