Je fais des histoires où il n'y a pas de garçons ni de filles. Où personne ne se rencontre jamais. Des histoire où quand ça commence on ne sait pas comment ça va finir. Des histoires où c'est pas comme dans le vrai monde pourri où on vit.
Aujourd'hui est un jour premier.
Aujourd'hui est un jour où je prends parole.
Aujourd'hui j'ai entre mes mains ta paix, grand-mère. Kaïna. Ou ton exil.
Aujourd'hui est un jour où je vais naître une seconde fois.
"Si tu veux savoir où tu vas, il te suffit de regarder d'où tu viens." Ce sont tes mots, ma grand-mère.
Il faut faire vite.
Moha? Moha? Il n'y a personne?
Aidez-moi, je vous en prie. Ne vous retournez pas. Ne me jetez pas de pierres. Ecoutez-moi.
Je ne sais pas comment on fait, Kaïna.
J’arrive en automne à Marseille. J’ai le cœur en papillon. Je n’ai presque pas dormi. Je n’ai pas parlé. J’ai marché sur le pont du bateau. J’ai vu la nuit. Volé sur l’eau. J’ai été malade, malade. C’est mon cœur qui pousse mon ventre. Ou mon ventre qui pousse la vie. Ou la vie qui pousse le bateau. Il est nul. Il est lent. Une tortue, ce cargo. Peu importe. Je veux Marseille. Je veux Moussa. A Marseille, je vais étudier. Ou faire la coiffure. Tout est possible. Peu importe.
Nina : L'imagination, c'est comme la poésie. C'est un pays où tu fais tout ce que tu veux et où personne ne vient t'embêter.
Nina : C'est nul les princesses.
Alyan : Pourquoi?
Nina : Une princesse, elle attend longtemps un type qui viendra lui donner un baiser et après elle est enfermée toute sa vie elle fait des enfants elle lave le linge elle fait à manger elle passe son temps à se friser les cheveux à se mettre du rouge à lèvres à essayer d'être mince elle bouffe que dalle elle a l'air d'une grosse imbécile qui se croit jolie alors qu'elle est rien d'autre qu'une fille qui s'ennuie et qui ne sait même pas lire. Au mieux, elle finit sorcière.
tu partiras, Mamata. Tu as la légèreté du rêve. Tu as la parole en toi. Tu partira, Mamata. Tu feras comme mon autre petit-fils, Moussa. Il est en France. A Marseille. Et quand tu reviendras , car tu reviendras, Mamata,tu seras une femme libre.
« La biodiversité nous avait attaqués. Mais on avait résolu le problème. » (p. 11)
C'est très difficile de ne pas se faire remarquer quand on pèse plus de quatre-vingt-dix kilos à seize ans et pourtant j'ai toujours songé que ce poids encombrant n'était là que pour me dissimuler. Moi toute entière, comme si je m'auto-dévorais.
"Elle profite" est l'expression convenue pour décrire l'énormité de ma présence.
Je ne profite de rien. Je me cache. Elle est "enveloppée en est une autre comme si mon corps était un emballage cadeau. (p.8-9)
"(...) mieux vaut un frère qu'on se choisit qu'un cousin dont on rêve".
La semaine dernière, il m’a emmenée au cinéma à Marseille. J’ai vu le monde à l’envers et j’ai crié. Il a dit que c’est de la « science-friction ». Il se moque de moi. Toujours. Moha est un fils de mes aïeux, envoyé par Kaïna et la Dame blanche, pour m’apprendre la ville de Marseille où je suis aujourd’hui et où je parle la vérité. Je parle la France. Tout à l’heure, Moha va revenir avec une femme des services sociaux. Une femme qui va s’occuper de mon ventre. De mon enfant.