AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Catherine Bardon (848)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les déracinés

J'ai acheté ce livre après avoir lu de nombreuses chroniques le vantant mais comme il s'agit d'un "pavé" je l'avais gardé pour une envie de lecture d'un roman avec immersion totale sur plusieurs jours. La période de confinement que nous vivons était le moment idéal mais au lieu de m'immerger je me suis un peu noyée.....



"Nous sommes encore assez jeunes pour prendre vraiment racine dans ce pays. Car sans racines, on n'est qu'une ombre. (p632)"



Je vais encore une fois être à contre-courant des avis sur cette lecture dont je sais que nombre d'entre vous avez été enthousiasmés mais je vous rassure tout n'est pas négatif et je vais tenter de "disséquer" mon ressenti.



J'ai trouvé la première moitié du roman particulièrement longue, je veux parler de toute la partie de la rencontre entre Wilhelm (le principal narrateur) et Almah, leur vie à Vienne avec les prémices et le début de la guerre ainsi que les premières exactions envers les juifs. Ayant déjà lu beaucoup sur cette période ce ne fut pas une découverte. J'ai eu le sentiment que cela tournait un peu en rond, des répétitions surtout dans les sentiments de Wilhelm vis-à-vis d'Almah mais vous le savez le côté romance dans certains récits me "fatiguent" assez vite et celui-ci en avait toutes les caractéristiques qui me hérissent le poil. Je me suis accrochée malgré tout car toutes les éloges lues me laissaient entrevoir une possibilité d'intérêt dans la suite.



A partir de leur fuite vers la République Dominicaine, leur périple pour y arriver et leur installation dans l'île, le contexte politique du pays à l'époque, le récit est plus intéressant, j'ai eu un peu moins le sentiment de longueurs, les personnages étaient un peu plus étoffés, certains apparaissaient mais trop fugacement, l'action se concentrant uniquement sur le couple formé par Wil et Almah, cette dernière se révélant un peu plus en s'affirmant sur les choix de vie.



La narration est faite de plusieurs manières : Wilhelm est le narrateur principal mais l'auteure y mêle des pages de son journal personnel, reprenant parfois ce qui avait été écrit précédemment mais avec également une narration "off" pour situer le contexte d'ensemble, les attitudes de chacun etc.... Des pages et des pages qui parfois n'apportent rien.



J'ai été agacée par la fin de certains des "courts" chapitres annonçant le devenir de chacun dans le futur, annonçant ainsi, avant de le découvrir, ce qu'il allait advenir. Et puis Wilheilm (Wil) était parfois dégoulinant d'amour pour sa belle, une écriture comparable à ce que l'on peut trouver dans les romans sentimentaux. L'évocation de Stephan Sweig,  modèle absolu du narrateur, dans presque toutes les pages du début, me donnait l'impression qu'il n'y avait rien d'autres à écrire ou alors voulait donner une sorte de crédibilité culturelle au personnage. Mais Wil n'est pas Stefan.



Il y a un gros travail de documentation de la part de l'auteure et j'ai découvert à la fois un pays, la République Dominicaine sous la présidence de Rafaël Trujillo, homme d'état des plus douteux, mais aussi appris l'installation de réfugiés juifs durant la seconde guerre mondiale dans ce pays, à la manière de kibboutz. J'ai parfois eu la sensation d'une énumération des événements qu'il fallait glisser dans la narration, souvent en total décalage de ton avec le sentimentalisme de l'ensemble. 



Toute la partie historique aurait été intéressante si elle n'avait pas été noyée dans une littérature romanesque qui n'apporte rien et à mon avis nuit à l'ensemble. Je n'ai pas eu d'empathie pour les personnages, je les suivais sans rien ressentir émotionnellement.



Ce type de littérature a son public, il en faut pour tous les goûts, cette chronique n'étant qu'un ressenti personnel de lecture je ne lui porte pas préjudice car il a déjà remporté beaucoup de succès et continuera à plaire. Il est simplement la confirmation d'un type de romans qui n'entrent pas dans ma zone de prédilection. Une histoire d'amour sur un fond historique et qui comporte tous les ressorts du genre.



Je l'ai malgré tout lu jusqu'au point final, je n'ai sauté aucune page, jamais lu en diagonale et quand j'ai tourné la dernière page j'ai pensé : "Ça y est ! Je l'ai fini". 
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
Commenter  J’apprécie          476
Une femme debout

Haïti en 1950, on recrute des hommes et des femmes pour travailler dans les plantations de cannes à sucre de la République dominicaine. L’espoir d’avoir un travail, une maison, un bel avenir. Maria Carmen et André n’ont pas hésité et sont montés dans le camion.



Ce roman met en évidence le destin hors du commun d’une femme exceptionnelle, opiniâtre et discrète. Sonia Pierre déterminée à exister à égalité avec les autres, elle va construire dès son adolescence, brique par brique le mur de sa révolte. Elle va créer le MUDHA le mouvement des femmes Dominico-Haitiennes pour rendre visibles les invisibles. Une combattante, une mère, une épouse. Toute une vie de militantisme à parcourir le monde pour faire entendre la voix de sa communauté



À travers le portrait de cette femme que je ne connaissais pas, j’ai beaucoup appris sur l’exploitation des ouvriers haïtiens dans les plantations, une vie de galérien, un parfum de misère dans les bateyes, les campements où vivent les braceros, coupeurs de canne à sucre. Ce récit est aussi une mise en lumière sur le sort réservé par la République dominicaine aux enfants de ces immigrés nés sur son territoire, mais considérés comme des apatrides.



Ce n’est pas vraiment un roman, mais plutôt un témoignage sur les nouveaux esclaves par le biais des combats de Sonia Pierre.



Commenter  J’apprécie          461
Les déracinés

Une saga familiale basée sur un fait historique peu connu. J’ai malheureusement peiné à m’attacher aux personnages et je ne suis pas certaine de la continuer.



À Vienne, dans les années 1920, Wilhelm Rosenheck, jeune journaliste rencontre la jolie Almah dont il tombe aussitôt amoureux. Ils ne sont pas du même milieu et Wilhelm doit faire face à un rival mieux placé pour obtenir la main d’Almah. C’est sans compter sur la jeune fille qui entend bien choisir elle-même son mari.



Wilhelm et Almah se marient, ont un petit garçon, Frederick. Tout irait presque bien, presque. Ils ont beau penser que les mesures prises contre les juifs n’auront qu’un temps, que les choses reviendront à la normale, l’étau se resserre. Que doivent-ils faire ? Fuir en laissant les parents de Wilhelm derrière eux ? Rester et risquer leur vie et celle de Frederick ?



Ils entament un périple difficile avant d’être recueilli en République dominicaine. Catherine Bardon a ancré le destin de la famille Rosenheck dans ce contexte peu connu (en tout cas, je l’ignorais) et c’est une excellente idée.


Lien : https://dequoilire.com/les-d..
Commenter  J’apprécie          460
 Et la vie reprit son cours

Et voici le tome 3 de la série ! nous retrouvons la famille Rosenheck dans son domaine de Sosua, avec le retour au bercail de Ruth, la fille d’Almah et Wil. L’escapade américaine est terminée et elle reprend la vie en famille dans son île, s’apercevant au passage, lors de son retour qu’elle avait eu en fait le mal du pays.



On va suivre toute la famille et ses proches sur un dizaine d’années, de 1967 à octobre 1979, pour être plus précise. Ruth a grandi intérieurement (depuis l’Américaine) elle retrouve ses marques, la ferme, las promenades à cheval, le métier de journaliste auprès de Markus. Elle a laissé Arturo Soteras retourner aux USA, car il s’y sent mieux, plus accepté du fait de son homosexualité, qu’il est obligé de cacher à sa famille, catholique, ultra-conservatrice. Il poursuit sa carrière de pianiste. Et il peut compter sur Myriam, la sœur de Wil qui vit à New-York.



Ruth fait la connaissance du frère d’Arturo, Domingo, médecin promis à une belle carrière à Santiago, qui fait la fierté de ses parents. Cela ne plaît pas trop à Arturo, mais c’est le coup de foudre, Domingo va même lâcher sa carrière hospitalière pour s’occuper de l’association d’Almah, campagnes de vaccinations, soins des plus démunis.



Leur mariage sera l’occasion de revoir tous les proches éparpillés un peu partout, Svenka en Israël, Lizzie, l’amie d’enfance de Ruth qui est plongée dans le mouvement hippie, concerts, drogues, « peace and love » et d’autres encore…



On suit l’évolution de cette famille, et en parallèle tous les évènements qui se passent dans le monde durant cette dizaine d’années. Des guerres entre Israël et la Palestine, aux manifestations contre la guerre aux USA, les droits des minorités. On croise ainsi, Moshé Dayan, Golda Meir, mais aussi Jimmy Hendrix, Otis Redding, Janis Joplin, l’assassinat de Martin Luther King…



On suit l’évolution de la situation politique en République dominicaine : Trujillo n’est plus là, mais un autre dictateur lui a succédé et la famille est toujours obligée de se méfier, dans ses échanges de courriers avec les USA comme avec Israël notamment. Les USA jouent toujours les arbitres du monde dans leur chasse au socialisme (cf. L’assassinat de Salvadore Allende au Chili pour mettre en place Pinochet entre autres….



Les traumatismes du passé sont toujours là, et Catherine Bardon évoque très bien la difficulté de vivre parfois des enfants de déportés, des exilés, avec le syndrome du survivant. Lizzie en est un exemple particulièrement émouvant et éprouvant pour la famille, les drogues, notamment le LSD ne faisant pas bon ménage avec la santé mentale.



Dans ce troisième opus, on va voit arriver quelqu’un que l’on a bien connu dans « Les déracinés » et le passé est quand même toujours là, tapi dans l’ombre pour le bien comme pour le mal.



J’ai beaucoup aimé ce roman, et j’ai eu un grand plaisir à retrouver notamment Almah sa force de caractère, sa liberté d’esprit, son opiniâtreté. Les autres personnages sont moins attachants, mais je dois reconnaître que Ruth a bien évolué ; je l’avais trouvé irritante immature dans « l’Américaine », mais il n’est pas évident de trouver sa place quand la personnalité des parents est aussi forte. C’est plus simple pour son frère, Frederick, qui a repris la ferme.



Ce roman est comparable par son intensité et ses références à l’Histoire au premier tome qui reste quand même mon préféré, mais c’est dans un mouchoir de poche. Comme dans les précédents, l’auteure fait un clin d’œil à Stefan Zweig…



Un immense merci à NetGalley et aux éditions Les Escales pour m’avoir permis de déguster ce roman en avant-première. J’ai décidé d’acheter tous les romans qui m’ont été proposés pendant le confinement, afin de les offrir, ce sera ma modeste participation.



#Etlavierepritsoncours #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
Commenter  J’apprécie          457
Les déracinés

La Seconde guerre mondiale et la Shoah alimentent régulièrement les libraires avec de nouveaux livres. Si Catherine Bardon a choisi ce créneau pour son premier roman, ce n’est toutefois pas par inconscience, mais bien parce qu’elle a découvert un épisode peu connu de ce conflit et qu’elle a eu accès à des documents inédits. Sa plume alerte et sa parfaire connaissance des lieux ont fait le reste, à savoir un roman chargé d’émotion et de suspense.

Tout commence à Vienne en 1932 avec la rencontre de Wilhelm, jeune homme qui entend consacrer sa vie au journalisme et Almah, fille d’une riche famille juive pas très pratiquante. Leur amour va braver leurs différences, religieuses et sociales, pour s’épanouir au pied de la grande roue du Prater. Un feuilleton signé sous pseudonyme dans le quotidien Krone doublé d’en emploi à la Neue Freie Presse, principal quotidien d’Autriche, offrent de belles perspectives. Avec des éditorialistes et chroniqueurs tels que Stefan Zweig, Theodor Herzl, ou Arthur Schnitzler, on ajoutera que l’émulation était de haut niveau.

Mais les années trente vont soudain se voiler d’une menace de plus en plus persistante venue d’Allemagne. Mais Wilhelm et Almah ne veulent pas croire les oiseaux de mauvais augure. Mais la vie devient de plus en plus difficile, la menace de plus en plus forte. Myriam, la sœur d’Almah, choisit de s’exiler à New York avec son mari Aaron. À 19h 45, le 11 mars 1938 une brève allocution annonce l’Anschluss. Wilhelm est arrêté et envoyé dans un camp d’où il ne sortira qu’après avoir abandonné tous ses biens et s’être acquitté d’une taxe exorbitante, sans oublier l’engagement de quitter le Reich avant la fin du mois de janvier 1939. Mais obtenir un visa et un permis de séjour devenait quasi impossible. Après avoir pu séjourner dans un camp en Suisse et tenté en vain de rejoindre New York, ils acceptent l’offre qui leur est faite de s’installer en République dominicaine. Laissant derrière eux «l’Europe malade de la guerre et de la folie des hommes», ils débarquent dans les Caraïbes avec pour objectif de fonder à Sosúa une communauté agricole sur le modèle de Degania, le premier kibboutz fondé en Palestine.

Vont-ils réussir ce pari? Pourront-ils compter sur le soutien de la Diaspora? Le dictateur à la tête du pays ne va-t-il pas revenir sur ses promesses? Autant de questions qui vont trouver des réponses dans la seconde partie de ce roman passionnant à bien des égards. Le choix de Catherine Bardon de laisser la parole aux acteurs nous offre la possibilité de confronter les points de vue, les aspirations et les doutes. C’est à la fois formidablement documenté et très romanesque. Un vrai coup de cœur!




Lien : https://collectiondelivres.w..
Commenter  J’apprécie          443
 Et la vie reprit son cours

« El la vie reprit son cours »… et ma lecture se poursuivit avec ce troisième tome de cette saga familiale….

Ce fut encore divertissant, plaisant à lire, intéressant d’ enrichir mon vocabulaire de mots hispano-dominicains, de voyager à travers ce pays qui partage avec Haïti l’île d’Hispanolia, de découvrir ses traditions, et je n’ai pas pu m’empêcher d’écouter plusieurs fois le Manicero (le vendeur de cacahuètes) en version originale, et celle interprétée par les Beatles.

Commenter  J’apprécie          430
L'Américaine

Ce roman ouvre souvent des parenthèses sur l’Histoire, de la décennie sixties, politique, sociale, culturelle, économique...évocations d’évènements vécus sinon connus par les plus anciens d’entre nous ( Les concerts des Beatles aux Etats Unis, la Marche sur Washington pour la liberté, l'invasion de la République dominicaine par les Américains en 65...)

Le premier tome" les Déracinés" m’avait fait découvrir un pan de l’histoire inconnue celle de l’installation des Juifs en République dominicaine.

La lecture est agréable, parfois, certes, un peu trop naïvement sentimentale à mon goût, mais elle fourmille de détails résultant d’une recherche documentaire aboutie et c’est la force de ce roman, tout bien considéré, dérivatif.

Commenter  J’apprécie          435
Les déracinés

Un premier roman très ambitieux. Les déracinés est une vaste fresque romanesque, déployée sur une toile de fond s’étendant d’Europe en Amérique, dans un temps historique particulièrement tourmenté. Sur six cents pages, l’auteure, Catherine Bardon, raconte trois décennies de la vie d’Almah et de Wilhelm depuis leur rencontre et un coup de foudre mutuel, à Vienne, à l’aube des années trente.



Vienne est alors une grande ville moderne, rayonnant intellectuellement sur l’Europe. Près de deux cent mille Juifs y vivent. Pour une large part, de grands bourgeois, cultivés, peu religieux, très intégrés dans la haute société. Almah, fille d’un chirurgien, vient d’obtenir son diplôme de dentiste. La famille de Wilhelm, lui-même journaliste, possède une imprimerie. Contraste, d’autres Juifs sont installés misérablement dans les quartiers populaires, après avoir fui les pogroms de l’Europe de l’Est.



Longtemps sous-jacent, l’antisémitisme des Viennois se dévoile, attisé par l’idéologie nazie qui prolifère de l’autre côté de ce qui est encore une frontière. En 1938, sitôt l’Anschluss, il explose. Pour les Juifs de Vienne, la vie devient de jour en jour plus insupportable. Une escalade sans fin d’obligations et d’interdictions, qui se traduisent par autant d’humiliations quotidiennes. Près de la moitié d’entre eux ont déjà pris le parti de l’exil, souvent vers les Etats-Unis, parfois vers ce qui s’appelle la Palestine. Ils ont sacrément bien fait ! Car tout se complique. Désormais, pour partir, il faut solliciter l’autorisation des autorités nazies, qui la conditionnent à l’abandon de tous les biens. Almah, Wilhelm et leur petit garçon quittent l’Autriche, un maigre pécule en poche.



S’en suivent pour eux plusieurs mois d’errance, voyages interminables en cars, hébergements collectifs précaires, en Suisse, en France, au Portugal. Traversée de l’Atlantique, synonyme d’espoir. Mais l’accès aux Etats-Unis leur est fermé, car des quotas très restrictifs d’immigration juive y ont été décrétés.



En désespoir de cause, Almah et Wilhelm atterrissent en République Dominicaine, où une institution juive a négocié avec les autorités, les conditions de l’immigration de plusieurs dizaines de milliers de Juifs, à charge pour eux d’y créer des exploitations agricoles, sur le modèle des kibboutzim des pionniers sionistes de Palestine. Ils ne seront en fait que quelques centaines à tenter l’expérience.



Une vie nouvelle s’installe pour eux, sous le soleil, sans confort, loin des centres urbains de l’île. Des intellectuels font l’apprentissage de métiers manuels et agricoles. Les mois passent, puis les années, d’abord scandées par les nouvelles en provenance d’Europe, la guerre, le doute, l’espoir, la victoire, la chute finale des nazis, la découverte des camps, l’arrivée de rescapés. Joies, peines, réactions d’horreur, sentiment de culpabilité. Puis c’est la création de l’Etat d’Israël. Enthousiasme et ouverture d’un débat : qui part, qui reste ? Almah et Wilhelm décident de rester, et même de s’enraciner. Car comme le dit Almah, « sans racine, on n’est qu’une ombre ! ».



La plupart des événements sont racontés par Wilhelm, l’auteure reprenant de temps en temps la parole pour une narration classique. Une subtilité qui passe inaperçue. Quelques chapitres sont extraits de « carnets » tenus par Wilhelm, qui s’exprime sur des événements déjà connus sans vraiment apporter d’éclairage nouveau.



Rien à dire sur l’écriture, claire, appliquée, un tout petit peu scolaire. Les chapitres, tous titrés, très courts – souvent pas plus de trois ou quatre pages – rythment agréablement la lecture, mais certains peuvent manquer de consistance, un peu comme ces séries TV étalées sur plusieurs années, diffusées en feuilleton quotidien, dont certains épisodes donnent l’impression qu’il ne se passe rien.



Pour moi, le livre souffre de ce que j’appellerai une manière romantico-sentimentale, une recherche systématique d’un pathos, incontestablement apprécié par une certaine catégorie de lectrices, mais qui agacent des lecteurs comme moi. Ma femme a adoré. Je trouve que les développements auraient mérité plus de concision et de sobriété.


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
Commenter  J’apprécie          438
La Fille de l'ogre

On fait la connaissance de Flor de Oro (Fleur d’or), fille aînée du dictateur Rafael Leonidas Trujillo et de sa première épouse Aminta Ledesma, alors que son père est encore un « apprenti soldat », gravissant les degrés qui le conduiront vers le grade de général. Flor est en adoration devant son père, mais elle porte en elle la tache originelle qui prouve son origine haïtienne (comme son père d’ailleurs !) et ceci va la poursuivre durant toute son existence.



Le Jefe, comme on le surnomme l’envoie faire des études dans un collège en France, où elle découvre le froid, la solitude et la difficulté à se faire des amis. Elle se concentre sur les études, car son père, à chaque retour, épluche le carnet de notes. Elle se défend des moqueries en citant César : « Mieux vaut être le premier dans son village, que le second à Rome ».



Un jour, cependant, elle devient intéressante, son père est devenu Président de la République Dominicaine, via une élection truquée, les opposants ayant été muselés. Cela va signer son retour au Pays…



En fait, personne n’est là pour l’accueillir, son père ayant d’autres préoccupations, un remariage, d’autres enfants… Une brève période de bonheur, quand elle rencontre le beau lieutenant Porfirio Rubirosa, qui sera célèbre pour son côté bourreau des cœurs, (il épousera même une célèbre actrice française !) mais le dictateur veille, leur coupe les vivres lorsqu’ils s’exilent à New-York, notamment. L’argent et le pouvoir permettent tout…



Tout au long de son existence, Flor va essayer d’exister aux yeux de son père, qui ne cessera de la surveiller, de la manipuler, lui imposant ses choix, à travers ses nombreux mariages (neuf au total et tous plus ou moins ratés, car le Jefe œuvre en sous-main -sous-marin ?) au gré de ses intérêts personnels : chacun des nouveaux maris devant lui apporter des contrats juteux, le servir.



On se prend d’affection pour cette femme qui brille par son manque d’estime d’elle-même, toujours en quête de l’approbation paternelle qui ne vient jamais bien sûr, car il adore l’humilier, lui lancer des petites phrases assassines mais elle reste sous sa domination, il y a trop longtemps qu’on lui a coupé les ailes. Elle fuit de l’alcool, l’anorexie, se détruisant lentement.



Catherine Bardon nous offre, à travers l’histoire de cette femme manipulée, malmenée, celle de la République Dominicaine durant les trente ans de la poigne de fer de Trujillo ce qui rend ce roman encore plus intéressant, on est au-delà d’un destin individuel brisé.



Je connais mal l’histoire de la République Dominicaine, j’ai découvert Trujillo en lisant « Les déracinés », je l’avoue ! Je n’ai pas terminé la tétralogie, d’ailleurs, il me reste le dernier tome, mais les personnages m’intéressaient moins que ceux du premier tome.



L’auteure sait bien décrire la situation du Pays comme, la culture, et la famille du dictateur alors j’ai dévoré ce roman, même si parfois j’avais envie de secouer un peu notre héroïne, un passage sur le divan aurait été très intéressant, elle l’a d’ailleurs tenté mais son psy presque époux est décédé dans des conditions étranges… Alors elle n’a pas retenté l’expérience.



Comment ne pas sourire en voyant Trujillo tenter de masquer ce qui est tout sauf un teint d’albâtre, en se poudrant abondamment le visage !



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Les Escales qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur



#Lafilledelogre #NetGalleyFrance




Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
Commenter  J’apprécie          421
Les déracinés

Un roman d'amour et d’Histoire, de l’Autriche à la République dominicaine.



C’est la vie d’un couple qui commence à Vienne, des jeunes gens de milieu favorisé, qui ne se sentaient pas juifs avant que les persécutions des années 30 ne commencent. Quand ils finiront par se résigner à quitter leur patrie, ce sera bien difficile.



Les protagonistes du roman passent par toutes les émotions des déracinés de la guerre. D’abord, ils ne peuvent pas croire que ça arrive chez eux, dans leur si belle paisible ville. Ils se refusent à partir tant qu’il y a un espoir, car c’est impossible que leurs concitoyens deviennent des brutes tortionnaires. Puis c’est la fuite, des promesses qui ne se réalisent pas, l’attente anxieuse dans les camps de réfugiés avec le froid et la faim. Et finalement le sentiment de culpabilité d’avoir fui et puis d’avoir survécu alors que d’autres ont péri dans les chambres à gaz.



La destination finale du couple, ce sera la République dominicaine. On y a établi un projet de « kibboutz », une expérimentation sociale, avec la complicité des États-Unis et du dictateur mégalomane du pays. Un paradis de liberté pour les enfants, mais une dure adaptation pour les parents, avec la chaleur, le travail physique et l’absence d’intimité.



Un roman qui fait découvrir un tout autre aspect de la République dominicaine qui fait partie des destinations « soleil » de bien des Québécois qui pourraient ainsi réaliser qu’il n’y a pas que la plage et les hôtels climatisés…

Commenter  J’apprécie          423
Les déracinés

C’est un gros pavé, certes très romancé, la première partie où les deux héros Wilhem et Almah évoluent à Vienne, n’est pas sans rappeler La dernière valse à Vienne (publiée en 1984, s’inspirant aussi de faits réels et de familles identifiées). C’est bien écrit, bien détaillé, les informations sur cette colonie juive installée en République dominicaine sont inédites pour moi.
Commenter  J’apprécie          411
Les déracinés

J'avais lu quelque part, je ne me souviens plus où, qu'un asile avait été proposé aux Juifs en Amérique latine.

Aussi, lorsque j'ai lu, sur Babeli,o une critique sur "Les déracinés" je me suis empressée de l'emprunter à la bibliothèque.

Wilhem et Almah, amoureux fous, autrichiens de coeur et de culture vont, malgré eux, être obligés de fuir leur pays qui succombe à la "lèpre nazie" et perdre leur insouciance de jeunesse : "Désolée Wil, mais je crois que nous n'avons plus le droit d'être légers".

En mars 1938, l'Autriche est envahie. C'est l'Anschluss. Il est plus que temps de partir.

Bien que méthodiquement préparé, leur exil ne se déroulera pas du tout comme prévu.

C'est finalement la République Dominicaine, une république bananière, qui les accueillera. Une nouvelle vie commence pour eux sous l'égide de Trujillo, un dictateur arrivé au pouvoir grâce à des élections truquées.

Catherine Bardon nous conte avec talent leurs pérégrinations.

J'ai beaucoup aimé ce livre. L'auteur a une belle plume et de grandes connaissances. Le tout est formidable.

Commenter  J’apprécie          390
La Fille de l'ogre

Pauvre petite fille riche... du moins pendant un certain temps !

Au-delà de cette biographie romancée, j'ai découvert un autre dictateur Trujillo , dont les vilenies sont comparables à celles commises par toutes les autres dictateurs.

Catherine Bardon s'est livrée à une quête documentaire historique poussée lui permettant de révéler la vie ombreuse bouleversante de la fille aînée de Rafael Leonidas Trujillo, un des plus sinistres , des plus terribles tyrans du XXème siècle ( plus de 30 ans de dictature). Flor de Oro balafrée par le destin , blessée à vie par la tyrannie et l'emprise paternelle . Elle se maria neuf fois, fut veuve une fois.

Commenter  J’apprécie          374
Les déracinés

Dans ce premier roman d'une saga déjà abondamment critiquée sur Babelio, l'auteure nous raconte 30 années de l'histoire de Wilhelm et Almah. Juifs autrichiens, intellectuels et fortunés, ils vont vivre après les années de montée du nazisme en Autriche, où l'étau se resserre petit à petit, l'exil qui les verra arriver en République dominicaine après de nombreuses difficultés. Ils y construiront leur vie dans une petite communauté d'exilés.

J'aime beaucoup les sagas, et ce premier tome m'a bien plu. J'ai suivi avec beaucoup d’intérêt les aventures de ce couple, et découvert l'existence de cette colonie de juifs en république dominicaine. J'ai ressenti au travers des descriptions l'amour de l'auteure pour ce pays. J'ai découvert de nombreux personnages, tous différents.

Il m'a sans doute manqué une écriture qui m'emporte un peu plus, qui me fasse vivre et ressentir plus intensément les péripéties pour que ce soit un vrai coup de cœur.

Cela ne m’empêchera pas de lire le tome suivant

Commenter  J’apprécie          376
Des mots par la fenêtre

Un recueil de textes, presque tous écrits pour l'occasion, publié au bénéfice des hôpitaux ; cela ne se refuse pas !

C'est assez hétérogène : beaucoup de nouvelles, quelques poèmes, d'autres formes. La qualité est variable, mais l'urgence à publier cet ouvrage explique sans doute beaucoup d'inégalités littéraires...



Pour ma part, j'ai particulièrement apprécié quelques textes, dont :

- L'autre monde de Jim Fergus : en liberté dans son Amérique sauvage ;

- Sentence de Karine Gienel : mesurons notre chance de vivre en liberté, loin du "confinement" des traditions et religions ;

- À qui tu pense, Philo ? de Anne Icart : confiné dans son handicap, mais libre de rêver ;

- Lettre à mon inconnu de Yasmina Khadra : en recherche de l'autre ;

- Libre dans la jungle de Louison : le "déconfinement" vécu par un chimpanzé ;

- Le type le plus prévisible du Centre Commercial de Charlie Ménétrier McGrath : un temps d'enfermement peut-il rendre imprévisible ?



Un bon moment de lecture solidaire, sans ennui !

Recueil disponible uniquement en version numérique.
Lien : http://michelgiraud.fr/2020/..
Commenter  J’apprécie          370
La Fille de l'ogre

Une vie malmenée et mal menée



Après la trilogie des Déracinés, Catherine Bardon reste fidèle à la République dominicaine en retraçant la vie de Flor de Oro, la fille du dictateur Trujillo. Une biographie qui est d'abord un grand roman!



Un déchirement. Flor de Oro n'a qu'une dizaine d'années lorsque son père, chef de la police de la République dominicaine, décide d'envoyer sa fille dans l'une des plus prestigieuses écoles privées de France, afin de parfaire son éducation. Flor de Oro doit alors quitter Aminta, sa mère, Boule de neige son chien, mais aussi son climat et son décor de rêve pour le froid et les couloirs d'un vaste domaine. Une expérience difficile, mais qui lui permet de découvrir la haute bourgeoisie, parcourir les lieux de villégiature comme Saint-Moritz en Suisse ou Biarritz et de décrocher un diplôme. Pendant ce temps son père va prendre les rênes du pouvoir après un coup d'État quelques temps avant qu'un cyclone ne fasse des milliers de morts et de gros dégâts.

C'est donc un pays très différent et avec un tout autre statut qu'elle retrouve à 17 ans. Dans les flonflons de la fête organisée pour son retour elle va retrouver l'aide de camp qu'elle n'avait pu quitter du regard en débarquant, Porfirio Rubirosa. Mais l'amour peut-il trouver sa place dans un protocole très strict? Après avoir tenu tête à son père, elle finit par le faire céder et a même droit à un mariage grandiose avec le beau séducteur. Mais ce dont elle ne se doute pas, dans sa candeur et sa naïveté, c'est que désormais tous les faits et gestes du couple sont surveillés et rapportés au dictateur.

À l'image de toutes ces rumeurs qui circulent sur la police politique et la chasse aux opposants, elle va pourtant très vite comprendre que son père est un Janus dont la face sombre est impitoyable. Elle comprend alors «que si elle accepte de regarder en face ce qu'est son père, ce qu'il fait à son pays, ce qu'il fait à son peuple, elle sombrera. Elle le sait. Pour survivre, elle doit refouler ces pensées et ces images, les tenir à distance et leur dénier tout pouvoir sur elle.»

Mais ses envies d'émancipation sont balayées d'un revers de manche par «T», comme l'autrice a choisi de désigner le dictateur, qui régnera sans partage pendant trois décennies.

En déroulant la vie sentimentale de Flor de Oro, qui se mariera neuf fois, Catherine Bardon montre combien la cage dorée dans laquelle elle se meut est une prison. Que toute tentative pour s'en échapper est vouée à l'échec, y compris après la mort du tyran.

Sans manichéisme, la romancière nous permet de comprendre toute l'ambivalence de leur relation. Si sa fille a largement profité des largesses de son père, elle a aussi beaucoup souffert de ce statut si particulier. Espionnée en permanence, elle ne pouvait se permettre de faire un pas sans que celui-ci ne soit relaté à son père. Un carcan dont elle tentera bien de se défaire, mais sans succès. Car, comme l’a montré Diane Ducret dans ses ouvrages sur les femmes de dictateurs, ces derniers avaient pour la plupart un rapport très pervers avec leurs épouses et maîtresses. Et si elle n’a pas spécifiquement traité le cas de Trujillo, les déviances sont semblables. C’est Mario Vargas Llosa, avec son roman La fête au bouc, qui retrace les dernières années de Trujillo et son assassinat, qui va souligner combien le dictateur considérait les femmes comme lui appartenant, qu’elles devaient lui être offertes faute de bannissement, de disgrâce, de la perte de tous leurs biens, voire de prison ou d’exil forcé, la tout sans aucune justification. On comprend alors que le combat de de Flor de Oro aura été vain, même si elle n’a jamais cessé de le mener.

Comme l’a souligné Catherine Bardon dans un entretien accordé pour la sortie du roman, raconter la vie de Flor de Oro lui aura aussi permis de rendre hommage aux Dominicains, comme elle l’a fait dans sa saga des Déracinés, car La Fille de l’Ogre «est aussi une allégorie du peuple dominicain pendant la dictature.»






Lien : https://collectiondelivres.w..
Commenter  J’apprécie          351
La Fille de l'ogre

J’avais déjà entendu le plus grand bien de la tétralogie de Catherine Bardon: “Les déracinés”, mais c’est avec son dernier roman que je découvre cette auteure et son talent pour le roman historique.!

De l’histoire de la République Dominicaine, je ne connaissais que ce que j’avais lu dans le passionnant ouvrage de Mario Vargas LLosa: “La fête au bouc”, qui retrace les derniers jours de la dictature de Trujillo et balaye trente années d’oppression et de tyrannie pour le peuple dominicain.



Dans “La fille de l’ogre”, Catherine Bardon s’intéresse à un personnage secondaire de l’Histoire dominicaine: Flor de Oro Trujillo, la fille aînée du dictateur, fruit d’un premier mariage avec Aminta Ledesma, avant son accession au pouvoir. Cette enfant qui lui ressemble et qui lui rappelle, malgré elle, sa goutte de sang noir et ses origines haïtiennes qu’il tente tant bien que mal de renier… Cette fille petite et maigrichonne mais dont la joie de vivre et le sourire enjôleur séduisent instantanément ceux qui la côtoient. Cette gamine qui cherchera toute sa vie durant, l’affection et la tendresse d’un père, sans jamais les trouver. Cette femme qui grandira dans l’absence du père mais subira pourtant son joug tyrannique et son omniprésence dans sa vie, dans ses décisions ainsi que dans ses actes de rébellion. Une femme-enfant qui ne parviendra jamais à se construire totalement et composera toute sa vie avec ses névroses, ses troubles alimentaires et ses sentiments ambivalents, enchaînant les échecs et les déceptions, notamment avec les hommes (neuf mariages à son actif tout de même!).



A travers l’histoire de Flor de Oro Trujillo, Catherine Bardon nous offre un passionnant portrait de femme, extrêmement documenté, ce qui n’a pas dû être une mince affaire quand on voit le peu d’informations présentes sur internet concernant la fille aînée du dictateur… Cette femme, au destin pour le moins romanesque, a subi de plein fouet la violence d’un père manipulateur, paranoïaque et sans états d’âme. Une vie brisée par le tumulte et le chaos, par les drames et les tragédies mais une âme insoumise qui ne cessera jamais de lutter pour gagner sa liberté tout en acceptant, paradoxe oblige, certains privilèges liés au fait d’être la fille d’une des plus grosses fortunes mondiales…



Grâce à Catherine Bardon, j’ai découvert une femme fascinante et terriblement touchante, en avance sur son temps avec ses rêves d’émancipation et d’indépendance, mais dont le moindre geste et la moindre parole seront continuellement épiés, et qui, malgré quelques tentatives d’évasion, vivra toute sa vie dans une prison dorée.



Le style de l’auteure est vif et entraînant avec ses phrases courtes qui s’enchaînent avec fluidité et c’est peut-être ce que je pourrais reprocher au roman… Cette construction sujet/verbe/complément trop répétitive crée l’impression de recevoir une flopée de données factuelles qui manquent de profondeur et nuisent à la création de personnages plus incarnés, comme s’ils subissaient l’Histoire alors même qu’ils l’ont faite (bon, c’est un peu vrai dans le cas de Flor de Oro…). C’est dommage, car c’est ce qui m’a manqué pour être complètement emballée… Un ouvrage qui n’en demeure pas moins passionnant!



Lecture qui rentre dans le cadre du challenge Jeux en foli…ttéraire XII organisé par SabiSab28 et CallieTourneLesPages.
Commenter  J’apprécie          351
Un invincible été

«On construit de mots la chair du passé» (Aragon)



Catherine Bardon met un terme à la saga des Déracinés avec cet invincible été qui couvre la période 1980-2013. L’occasion de retrouver avec plaisir et émotion les rescapés de cet exil forcé et leurs descendants. Et de faire gagner la vie sur l’adversité!



Quoi de mieux qu'une fête de famille pour ouvrir le dernier volet d'une saga entamée en 2018 avec Les Déracinés? À Sosúa, ce village de République dominicaine où une poignée d'hommes et de femmes persécutés par les nazis ont trouvé refuge et tenté de sa construire un avenir, on fête la Quinceañera, c'est-à-dire les quinze ans de Gaya, la fille de Ruth et de Gabriela, son amie d’enfance. Les deux adolescentes ressentent toutefois bien différemment ce rite de passage. La première a l’impression de participer à une mascarade à laquelle elle se soumet pour faire plaisir à ses parents et à sa grand-mère, soucieuse du respect des traditions, pour la seconde c'est l'occasion de fêter joyeusement cette étape qui la fait «devenir femme».

Pour Almah, la patriarche de cette tribu, c’est aussi l'occasion de voir le chemin parcouru. Pour sa fille Ruth tout semble aller pour le mieux. Elle a surmonté le chagrin de la perte de son amie Lizzie en mettant au monde Tomás, le fils conçu avec Domingo qui partage désormais sa vie. Un bonheur simple qu'elle aimerait voir partagé par Arturo, le musicien installé à New York, avec lequel elle aime tant correspondre. Mais quelques mois plus tard, c'est du côté de la tragédie qu'il va basculer. Victime d'un accident de moto, il est hospitalisé avec son passager, son ami Nathan, danseur à la carrière fulgurante, beaucoup plus gravement atteint que lui. À son chevet Ruth va découvrir que les deux hommes formaient un couple depuis longtemps et ne sait comment soulager leur peine. Car Nathan ne dansera plus jamais.

Il faudra un séjour à Sosúa pour qu'un coin de ciel bleu ne déchire son univers très noir et n’ouvre au couple un nouvel horizon.

Gaya, la fille de Ruth, a choisi de quitter la République dominicaine pour aller étudier les baleines à l'université de Wilmington en Caroline du nord. Elle ne sait pas encore que ce ne sera là qu’une première étape d'un exil qui passera notamment par les Galápagos.

Mais n'en dévoilons pas davantage, sinon pour évoquer un autre projet qui à lui seul témoigne du demi-siècle écoulé, l'ouverture du musée juif de Sosúa, voulu par Ruth avec le soutien d'Almah. L'occasion de nouvelles retrouvailles et d'un hommage à toutes ces vies qui, par «leur détermination, leur goût de l'effort, leur âpreté au travail, leurs renoncements, leur dignité magnifique devant l’ineffable, s'étaient faufilés dans les lézardes de l’histoire pour écrire ici une page essentielle, sans laquelle rien d'autre n'aurait pu advenir. Ils étaient des rocs, de la race des vainqueurs, et la présence de chacun ici, aujourd’hui, témoignait de ça: ils étaient victorieux et indestructibles.»

En parcourant le destin de cette communauté de 1980 à 2013 la romancière, comme elle en a désormais pris l’habitude, raconte les grands événements du monde. Elle va nous entraîner à Berlin au moment où s’écroule le mur ou encore à New York lorsque les deux tours du World Trade center s’effondrent. Sans oublier la mutation politique et économique de ce coin des Caraïbes menacé par les tremblements de terre – comme celui d’Haïti à l'ouest de l’île qui poussera Ruth, Domingo et Gaya sur la route en 2010 – et le réchauffement climatique.

Bien plus qu’un hommage à cette communauté et à cette histoire qui aurait sans doute disparu dans les plis de l’Histoire, Catherine Bardon nous offre une formidable leçon de vie. Elle a en quelque sorte mis en scène la citation d’Henry Longfellow proposée en épilogue «… nous aussi pouvons rendre notre vie sublime, et laisser derrière nous, après la mort, des empreintes sur le sable du temps.»




Lien : https://collectiondelivres.w..
Commenter  J’apprécie          340
Les déracinés

Je vous parle aujourd’hui du premier tome d’une saga magistrale qui m’a laissé KO !



Dans « Les déracinés », nous suivons Wilhelm et Almah en « exilés volontaires » fuyant Vienne et le régime nazi. Destination la République Dominicaine pour y fonder un kibboutz. Ce qui nous permet de vivre de l’intérieur la montée de l’antisémitisme et de découvrir un aspect méconnu de l’Histoire.



Formidable conteuse, l’auteure fait honneur à cette fresque à la fois familiale et mondiale. Sans patho, avec des émotions pleines de justesse. Elle réalise la prouesse de nous transmettre un récit porteur d’espoir prouvant qu’il est possible de rebondir malgré l’adversité.



J’ai ressenti une grande maîtrise dans la forme de ce roman. Les chapitres s’adaptent au récit et esquivent les longueurs inutiles. On passe d’un personnage à un autre, d’un extrait de journal à des descriptions détaillées, mais surtout d’un point de vue à un autre. J’ai été bluffée par ce transfert fréquent du « je » au « il », à peine perceptible et pourtant crucial pour l’immersion du lecteur.



Que les néophytes se rassurent : ce récit est largement abordable, même avec une connaissance superficielle du sujet. De nombreux repères temporels et historiques vous guideront.



En refermant la dernière page, je suis partagée entre l’envie de me jeter sur la suite et le besoin de me remettre de ce pavé chargé en émotions.

Commenter  J’apprécie          340
Les déracinés

C'est une vaste fresque romanesque qui couvre la période années 30/ années 50 et qui nous conte l'histoire d'une famille juive autrichienne prise dans les tourments de la guerre. Face aux persécutions nazies, Willhelm et Almah Rosenheck décident de quitter l'Autriche. Choix difficile car ils sont attachés à l'atmosphère culturelle de leur ville où vivent alors deux cent mille Juifs pour la grande majorité intégrés depuis longtemps dans la société autrichienne.



Ils partent trop tard pour obtenir l'asile des Etats-Unis et doivent se replier sur la République dominicaine qui leur offre l'asile. Ils arrivent donc à Sosua où le dictateur dominicain Trujillo a imaginé pour eux une colonie agricole juive, vieille proposition faite à l'Alliance israélite universelle en 1882 par le général Luperon qui était un ami des Rothschild.

Sosua va devenir une enclave que les abus du pouvoir de Trujillo ne vont pas atteindre. Pour autant la vie sur place est loin d'être idyllique, tout au moins au début: en plus de l'apprentissage de l'espagnol, il faut apprendre un nouveau métier et créer une nouvelle société.

Les nouvelles qui vont parvenir de l'Europe ne vont pas arranger les choses et causer beaucoup d'angoisses.



C'est sans doute la partie la plus intéressante du livre qui montre comment Almah, dentiste de formation et Wilhelm, journaliste, s'adaptent à leur nouvelle vie. Le modèle d'organisation, du moins au départ, s'apparente à celui des kibboutzim.

Le livre est incroyablement documenté, notamment en ce qui concerne la dramatique conférence d'Evian de juillet 1938, qui eut lieu suite à une initiative de Roosevelt pour trouver des terres d'accueil aux réfugiés juifs, conférence à laquelle seulement 32 pays participèrent, dont 20 d'Amérique latine et seulement 9 d'Europe.Un seul pays s'était porté candidat: la République dominicaine.

Le livre rappelle pour le thème choisi l'excellent livre de Louis Philippe Dalembert "Avant que les ombres s'effacent" au sujet d'Haïti et montre à quel point les portes se sont fermées à l'époque face à l'afflux de réfugiés juifs.

On apprend beaucoup sur la vie de ces réfugiés et sur leurs rapports avec les survivants d'Europe et les réfugiés qui avaient pu s'installer, plus tôt aux Etats-Unis.

Un beau travail d'écrivain et d'historien.

Commenter  J’apprécie          330




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Catherine Bardon Voir plus

Quiz Voir plus

Saint-quiz

Monsieur le Maire entra dans son bureau, .......... de l'écharpe tricolore, qu'il arborait fièrement

ceint
sain
saint
sein
seing

10 questions
53 lecteurs ont répondu
Thèmes : vocabulaire , mots , humour , amusementCréer un quiz sur cet auteur

{* *}