Citations de Catherine Bardon (359)
- Il ne faut pas pleurer, ma chèrie, pas le jour de tes vingt et un ans. Ce cadeau, c'est un symbole, il te revient, il faut que tu l'acceptes avec joie. Tu ne peux rien changer à notre histoire, ma Ruthie. Tu vas devoir apprendre à vivre avec, comme moi, comme ta mère, comme nous tous. Dis-toi que tes grands-parents t'auraient adoré; ils auraient été fiers de toi. Dis-toi que ce que tu vis, ce bonheur que nous partageons, c'est en partie grâce à eux.
Ne dit-on pas qu’on est chez soi là où on est accepté ?
« Nous dansons sur un volcan qui va exploser d’un jour à l’autre. » (p. 92)
Ils s'étonnèrent de croiser quelques Volkswagen noires en maraude. Ils apprendraient plus tard que c'étaient les véhicules des redoutés agents de la police secrète du dictateur, l'équivalent dominicain de la Gestapo.
P 301 Les Escales
"Nous ne pourrons jamais revenir, ils ne nous pardonneront jamais ce qu'ils nous ont fait."
p561
" Des questions me taraudent. Est-il possible de vivre pleinement heureux avec ceux qui vous ont coûté vos rêves? Le sacrifice de ce qui faisant l'essence même de votre vie vous rend-il meilleur? Porterais-je à tout jamais le regret de ce qui n'a pas été ? "
Unis par les épreuves, l'exil et l'abandon de nos vies, nous vivions dans une atmosphère de gaieté des relations saines, faites de complicité, de partage, de franche camaraderie, d'une compréhension mutuelle qui se passait de mots. Nous menions une vie simple et paisiblement harmonieuse. Aux privations et à l'inconfort, nous opposions une joie bruyante, parfois un peu forcée. Le sentiment de précarité laissait peu à peu la place à un sentiment de bien-être. C'en était fini de baisser les yeux, d'essayer de passer inaperçus, de nous fondre dans le décor, de perdre de la substance. Nous n'étions plus ces mendiants gris. Nous avions retrouvé notre dignité, nous avions une nouvelle terre et une nouvelle famille, et c'était vertigineux. Nous savions que nous vivions un moment unique suspendu dans le cours de nos vies ; c'était à la fois enivrant, exaltant et émouvant.
Elle a été courtisée, désirée, brandie comme un trophée, jalousée, trahie, rejetée, négligée, humiliée, abandonnée, oubliée. A-t-elle été aimée, seulement un peu ?
Elle ne pleure pas T, elle pleure son Papi. Elle verse des larmes sincères, celles d'une fille qui a haï son père pour ce qu'il était, celles d'une fille qui a aimé son père en dépit de ce qu'il était, celles d'une fille qui n'a jamais pu dire à son père qu'elle l'aimait, celles d'une fille à qui son père n'a jamais dit qu'il l'aimait. Ces mots si simples, qu'elle a attendu en vain toute sa vie, ces mots jamais prononcés, dont l'absence l'a marquée au fer rouge de l'indifférence, ces mots absents qui ont amputé sa vie.
Je t'aime, Flor des Oro.
Une question s'imposait qui appelait une réponse : celle de notre identité et celle de la terre où nous allions vieillir. Nous étions toujours des apatrides, sans nationalité, échoués par hasard sur cette ile en invités temporaires. Il nous fallait maintenant, sur les souvenirs de ces douze années, réinventer notre vie une nouvelle fois. Il fallait choisir une terre pour le reste de notre vie.
p.631
Si je me retourne sur le passé, je vois du noir, si je regarde l'avenir, il est merveilleux. C'est tout ce qui compte pour moi désormais.
Nous avions retrouvé notre dignité, nous avions une nouvelle terre et une nouvelle famille et c'était vertigineux.
P 380 Les Escales
Après tout, les acteurs de cette farce n'avaient rien de charitables protecteurs qui venaient sauver de malheureux juifs des griffes du nazisme. Derrière le projet humanitaire, chaque acteur avait des visées politiques précises. D'un côté, le dictateur souhaitait récupérer un peu de respectabiilté internationale, développer son pays et le purifier de ses Noirs grâce à la main d'oeuvre blanche, tout en engraissant ses comptes bancaires au passage. De l'autre, le Joint ( la plus grande organisation juive au monde. NDL ) positionnait sur l'échiquier mondial un nouveau pion qui lui permettrait de valider la capacité de jeunes urbains à construire une société à partir de rien, tout en ménageant une sortie de secours en cas de faillite de l'option palestinienne.
P 213-214 Les Escales
J'avais hésité à poser une mezouzah sur le chambranle de la porte d'entrée. "N'oublie jamais d'où tu viens. " Mon frère m'avait rappelée à l'ordre lors d'un dîner quelques jours après notre déménagement. Lui n'avait pas hésité et je compris qu'il avait raison. Nous étions des héritiers.
Nous sommes encore assez jeunes pour prendre vraiment racine dans ce pays. Car sans racines, on n'est qu'une ombre. (p632)
La vie est faite de hasards qu'on ne peut contrôler et tous les si du monde n'y changeront rien.
On ne peut donner que deux choses à ses enfants : des racines et des ailes.
Nous avions changé de paradigme,renonçant à tout le superflu mais à rien d’essentiel.
Peut-être touchions nous au bonheur ?
Elle s'évertuait à imaginer une foule de petits plaisirs quotidiens à moissonner d'urgence pour emmagasiner des souvenirs heureux, comme un écureuil qui stocke ses noisettes en prévision d'un rude hiver.
La vie est une chose étrange. Elle ménage des traquenards, vous guette en embuscade, vous cueille par surprise, avec une effronterie qui me laisse pantoise. C'est toujours quand on croit les choses apaisées que le petit grain de sable qui remet tout en question se manifeste.