Pas une nouveauté, loin de là !!
Écrit en 1957, ce livre ne trouva aucun éditeur aux USA et ne fut publié pour la première fois que onze ans plus tard et directement en format de poche, sous un autre titre et sous une couverture sans rapport avec le texte.
Enterrement de première classe : Un four.
Exhumé et réhabilité en 1984 en France, il put enfin sortir de l'ombre mais seulement le temps d'une éclaircie, l'éditeur bleu/blanc/rouge faisant faillite. Dur pour un roman noir !
La scoumoune.
C'est finalement en 2008 que ce crépuscule se fit enfin une place en pleine lumière, plus de cinquante ans après son écriture et sous la forme où on le trouve aujourd'hui.
Tout arrive à point pour qui…
Quand l'histoire d'un roman semble déjà en être un puisqu'on à failli faire taire à jamais un ouvrage qui parle du cinéma muet !
Un comble.
Un comble aussi quand on pense qu'en 2012,
Jean Dujardin remportait l'Oscar du meilleur acteur pour ‘The artist' qui s'intéresse à ce même sujet : le fracas assourdissant que fut l'avènement du parlant pour les stars adulées du cinéma muet.
Moteur ! Ça tourne ! Action (réveille le noir et blanc)
Hollywood 1922.
Tommy Post, dix-neuf ans est un jeune homme pressé à l'ambition aussi démesurée qu'est longue une année sans travail pour un figurant au chômage en quête d'un contrat.
Tommy rêve de devenir scénariste et s'est donné deux ans pour caracoler au sommet de la notoriété !
Diantre !
Bien sûr, rapidement un hasard bien exploité va lui permettre d'appuyer sur le bouton ‘start' de sa destinée forcément fulgurante. Y aurait-il roman sinon ?
Cachés dans son ombre projetée par les lampes à arc, nous pénétrons, impressionnés, dans les glorieux studios où les tournages en cours vont bientôt alimenter l'usine à rêves en bobines de cellulose pour que tintinnabulent bruyamment les innombrables dollars aux nombreuses caisses des multiples salles obscures qui ne désemplissent pas.
L'âge d'or, ne le réveillez surtout pas.
Les archétypes des évanescents fantômes du muet qui alors faisaient se déplacer les foules éblouies et hurlantes défilent sous nos yeux ébahis, du parvenu directeur de studio dictatorial à la hautaine et vénale star aussi capricieuse qu'impénétrable (quoique), en passant par le génial acteur maudit ou la favorite catapultée star malgré son évident manque de talent et pire encore, de désir.
Tous sont là, tous !
Bien sûr notre Tommy saura tracer sa route enchantée et produire un Post Hit dont bruissera le pré carré du tout Hollywood.
Fraîcheur de vivre !
Extrêmement jeune et moderne pour un vieil ouvrage âgé de 65 ans, ‘
le crépuscule des stars' aborde des thèmes encore très actuels aujourd'hui comme l'ambition démesurée, l'avidité, le harcèlement (dont sexuel, on croirait y reconnaître Harvey Weinstein), l'avortement et sa perception dans la population, le pouvoir supposé écrasant des juifs dans le monde des affaires, l'entre soi propre au milieu du 7ème art, les compromissions avec la presse, les coups de jarnac entre studios, le poids de l'industrie, de la finance et de la bureaucratie triomphantes face à la création artistique, la difficulté de mener une vie amoureuse équilibrée lorsque l'on mène un métier passion étouffant, l'heure de la retraite quand se pointe la relève…
Amusant, également, pour s'immiscer subrepticement dans l'étroit microcosme régi par les magnats des grands studios historiques, de suivre une intrigue digne d'un scénario typique des mélodrames de l'époque où les interprètes, maquillés comme des tacots volés, ouvrent des yeux ronds comme des soucoupes de tasses à café pour exprimer caricaturalement l'effroi ou la surprise.
Grandeur et décadence d'un art que la technique galopante a forcément écrasé tel un rouleau compresseur lancé dans une pente raide et qui broie, au passage, ceux qui furent adulés jadis !
Vacuité du succès et des ovations !!
Un bon roman qui n'a de noir que ce qui fait contraste avec le blanc de l'écran où sont projetés tous les fantasmes nés du mythe créé de toutes pièces pour remplir le vide abyssal des simples existences et faire naitre le rêve qui, moyennant quelques pièces, veut nous faire croire que tout est possible.
Une représentation sans concession du miroir aux alouettes qui ne peut que pâtir et tomber sur le bec après l'immense plaisir que m'avait procuré ma lecture précédente, ‘
le garçon' de
Marcus Malte.
Un très bon moment de lecture cependant que je dois à Sachka (Merci)