Troisième épisode de la « trilogie Sainte-Hermine » après «
Les Blancs et les Bleus » (1867) et «
Les Compagnons de Jéhu » (1857) (chronologiquement, le second a été écrit avant le premier), «
le chevalier de Sainte-Hermine » un des derniers grands romans d'
Alexandre Dumas, est original à plus d'un titre.
L'histoire de son édition, tout d'abord. Quand Dumas range définitivement sa plume et sa rapière, le 5 décembre 1870, il laisse plusieurs manuscrits dans ses cartons, dont «
le chevalier de Sainte-Hermine ». Ce n'est pas tout à fait un inédit, les deux premières parties du roman ont été diffusées dans la presse en feuilleton, seule la troisième est restée inachevée. Cent trente cinq ans après, l'historien
Claude Schopp, grand spécialiste de Dumas à qui il a consacré nombre d'articles, de biographies, d'éditions commentées (tous de très grande qualité), présent une édition « complète » du roman : Des années de recherche dans divers dépôts d'archives, des trouvailles de manuscrits dans des bibliothèques (y compris à l'étranger), un immense travail de relecture et de réécriture du roman…
Claude Schopp a effectué un travail de Titan pour livrer au public la troisième partie de la trilogie des Sainte-Hermine.
L'histoire de sa composition, ensuite. le point commun entre les trois romans, c'est bien évidemment le sort des trois frères Sainte-Hermine (et de leur père), mais peut-être également faut-il y voir une trilogie
Bonaparte : dans «
Les Blancs et les Bleus » on y voit le jeune général au siège de Toulon ; dans «
Les Compagnons de Jéhu » c'est le retour d'Egypte et le 18 brumaire ; enfin dans «
le Chevalier de Sainte-Hermine », c'est le Premier Consul Bonaparte et l'Empereur
Napoléon. Dumas, conscient que le deuxième volet a été édité avant le premier, rebat les cartes dans le troisième. Par de larges retours en arrière il nous remet en mémoire, (parfois par chapitres entiers), l'histoire de la famille Sainte-Hermine : en 1793, le père, impliqué dans la conspiration du Chevalier de Maison-Rouge pour l'évasion de
Marie-Antoinette, fut pris et guillotiné, non sans avoir transmis à son fils Léon, le soin de le venger. La même année, Léon fut pris par les républicains et fusillé sous les yeux de son frère Charles à qui il transmet la vengeance. Enfin, en 1799, Charles, devenu chef des Compagnons de Jéhu sous le nom de Morgan, meurt guillotiné à son tour à Bourg-en-Bresse, transmettant le tragique héritage à Hector, le dernier fils.
«
le Chevalier de Sainte-Hermine » raconte les aventures d'Hector, responsable d'une triple vengeance (ses deux frères et son père). En proie aux persécutions de Fouché (dont le portrait rappelle à la fois le Colbert du « Vicomte de Bragelonne » et le Dubois du « Chevalier d'Harmental »), notre héros est sans cesse en fuite, à cause de ses relations royalistes (notamment avec son ami Cadoudal). « Gracié » quand le Premier Consul devient empereur, il s'exile en s'engageant sur le bateau du corsaire Surcouf, avec qui il vit maintes aventures maritimes, et en tire même une certaine renommée. Il participe à la bataille de Trafalgar (un des sommets du roman), puis passe en Italie où il combat le fameux Fra Diavolo…
Du Dumas pur jus, où la petite histoire et la grande se rejoignent et s'entrelacent sans jamais nous lasser. Que du bonheur, quoi.
Claude Schopp, à qui nous serons à jamais redevables d'avoir redonné vie à ce roman, a composé une suite, d'après les plans de Dumas : « le salut de l'Empire » paru en 2008.