Dans L'espion anglais, feuille à scandales de la fin du XVIIIe s. (dont Confession d'une jeune fille est l'une des chroniques), Pidansat de Mairobert, sous couvert de littérature, dénonce, colporte et médit pour, je l'imagine, le plaisir de ses lecteurs dévoyés. Nul doute qu'il serait aujourd'hui rédacteur en chef de Closer, de Voici ou d'un torchon de cet acabit.
La jeune Sapho est l'héroïne de ce court roman plutôt bien ficelé.
D'abord femme de plaisir d'une vieille lesbienne (qui se pâmera à la vue de son incroyable clitoris), elle sera initiée au tribadisme.
(...) Beauté forte à genoux devant la beauté frêle,
Superbe, elle humait voluptueusement
Le vin de son triomphe, et s'allongeait vers elle,
Comme pour recueillir un doux remerciement.
Elle cherchait dans l'oeil de sa pâle victime
Le cantique muet que chante le plaisir,
Et cette gratitude infinie et sublime
Qui sort de la paupière ainsi qu'un long soupir. (...) -
Baudelaire, Delphine et Hippolyte.
Elle profitera pleinement de l'enseignement de la secte anandryne -c'est-à-dire sans mec- dont l'auteur nous confie une apologie pas piquée des hannetons.
Sapho succombera aux assauts d'un coiffeur (?) qui la remettra dans le "droit chemin" des hommes. Une maquerelle dévote, Mme Richard lui permettra ensuite de devenir la maîtresse exclusive d'un Cardinal qu'elle trompera avec un quatuor de jeunes prêtres.
Nous la quitterons enceinte mais prête à revenir dès que possible à la putinerie.
Ce récit serait réussi s'il n'était si hypocrite : la première partie entièrement consacrée aux amours saphiques n'est en fait qu'un instrument de dénonciation particulièrement odieux. Pidansat de Mairobert se fait le chantre de l'outing : "Tremblez, gougnottes! Je vais vous livrer à la vindicte populacière!" pourrait-on entendre cracher le délateur.
Ce name dropping immonde (même sous forme d'anagrammes) ne lui portera pas chance : éclaboussé par un scandale où argent et sexe faisaient ménage, il s'ouvrira les veines... (Tant va le Morandini à l'o(dieux) qu'à la fin il se casse!)