Dans les
Poèmes bleus, comme dans l'essentiel de son oeuvre,
Georges Perros se révèle de manière très singulière, dans une écriture tout à fait à part.
Comédien durant quelques années à la
Comédie-Française puis au Théâtre National Populaire avec
Jean Vilar, il est plus tard rédacteur à la Nrf. C'est fin 1958 qu'il décide, avec épouse et enfants, de quitter Paris pour s'installer dans une région qu'il affectionne particulièrement : la Bretagne. Ce sera le Finistère et Douarnenez. Cette région qu'il connaît depuis son enfance lui est précieuse (il changera son nom de Georges Poulot en
Georges Perros, en souvenir de
Perros-Guirec, endroit où il venait souvent en vacances enfant). C'est sur cette terre d'adoption qu'il décide de se consacrer à l'écriture. En 1962, paraissent les
Poèmes bleus.
"[...] J'allais une fois encore vers cette Bretagne
Qui m'a très jeune fasciné
Qui m'est aimant quand j'en suis loin
Qui m'est douleur quand de trop près
j'en subis la loi inflexible
de pierres de ciels d'horizons […]"
Dans la poésie de
Georges Perros, il n'y a pas de quatrains, pas de sonnets, d'alexandrins, de rimes, pas d'abstraction, de travail sur la sonorité des mots, pas d'incantation,… Dans de longs poèmes, comme saisies dans l'instant, l'auteur rend compte de choses vécues, livre les impressions qui sont nées d'elles.
On y trouve beaucoup d'attachement, de tendresse portés à la nature, à l'océan, aux paysages bretons, aux habitants de Douarnenez mais aussi un certain désenchantement, un sentiment assez indéfinissable de ne pas être assez, de ne pas posséder assez de vie, comme si l'auteur se trouvait en bordure des choses, à l'extrême limite de son expression.
Georges Perros écrivait que " le poète est un homme qui nous donne envie d'aller vivre chez lui, mais chez lui n'est nulle part ". Ce propos résume assez cette proximité, cette affinité ,que l'on peut éprouver en lisant
Perros mais aussi une fragilité, un sentiment d'éloignement. Une subversion tente de se faire entendre, mais elle reste suggérée, mesurée, comme dans un acte désespéré.
L'oeuvre de
Perros n'a d'autre ambition que de rendre compte de l'instant, de n'être qu'une accumulation de riens, de choses très ordinaires : " On n'écrit que ce qu'on peut, le reste étant, très exactement, littérature ". Il y a chez
Georges Perros, une simplicité, une manière de se tenir en retrait du temps qui touche au coeur.