Considérée comme l'écrivaine la plus importante du XIXe siècle en Espagne, importatrice du naturalisme dans son pays, auteure de très nombreuses oeuvres,
Emilia Pardo Bazán reste peu connue et peu traduite en France. J'ai donc saisi avec beaucoup de curiosité l'occasion de lire un de ses livres, un petit volumes comprenant trois de ses nouvelles dans une édition bilingue.
Dans L'Héritière de Bouzas, la première nouvelle, nous suivons une jeune noble campagnarde, force de la nature, prête à défendre ce qu'elle pense lui appartenir, et à châtier ceux ou celles qui voudraient le lui disputer.
Dans La sainte de Karmar, une toute jeune fille malade est amenée chez une femme réputée sainte, pour une guérison éventuelle, comme dernier espoir.
Enfin, dans la dernière nouvelle, Un éventreur d'autrefois, un pharmacien très à la pointe de la science, mais solitaire et ayant des habitudes de vie très éloignées de celles de la société arriérée dans laquelle il vit, est perçu comme une sorte de dangereux et efficace magicien, utilisant des remèdes interdits, au point où certains sont prêts à lui offrir des ingrédients criminels pour gagner de l'argent.
C'est incontestablement très bien écrit et très prenant.
Emilia Pardo Bazán a le don de camper des personnages, un milieu, narrer une histoire, maintenir l'incertitude, jusqu'à la chute, toujours très efficace. Nous sommes dans des descriptions très précises, cruelles, qui n'embellissent pas, qui vont chercher le moins présentable. En même temps, le réalisme affiché, est malgré tout mâtiné d'une sorte de surnaturel, de quelque chose qui échappe aux lois de la science. le XIXe siècle cohabite avec quelque chose d'ancestral, de primitif, qui n'a pas dit son dernier mot, et la rationalité est démentie, n'a pas chassé les instincts, l'imaginaire, la croyance, la magie. Cela donne des récits chatoyants, jouant sur plusieurs registres.
C'est incontestablement de la belle littérature, je serais curieuse de voir ce que cela donne sur la longueur, dans un roman. A condition d'arriver à trouver, car vraiment peu d'oeuvres sont disponibles.